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MOUSSU T pdf print E-mail
Ecrit par Stephane Burgatt  
dimanche, 08 mai 2005
 

« Ce que les Marseillais m’ont donné en inspiration, je le leur rends en pastis. »

Père fondateur de Massilia sound system, néo troubadours Occitans bercés au raggamuffin, Moussu T s’est permit une petite incartade. Accompagné des jovents, il fait revivre les musiques italo occitanes du début du siècle dernier dans « Mademoiselle Marseille ». Un album auto produit, oscillant entre le festif et le nostalgique. Rencontre lors de l’apéro-écoute organisé à l’occasion de sa sortie.

Faire ta promo t’ennuie toujours autant ?
Quand c’est comme ça non. Là ça devient rigolo. Maintenant il faut bien faire savoir quand  ton disque est sorti, le hasard n’aidant pas forcément. A l’inverse, nous sommes pour la promo au quotidien : payer l’apéro aux gens comme on le fait ce soir. On avait démarré ça avec Massilia Sound System.  Ce que les Marseillais m’ont donné en inspiration, je le leur rends en pastis (rires) !

C’est de la politique !
Mais figure toi qu’ils ne sont pas cons les hommes politiques, ils savent ce qui marche. Mais là, on a sorti la sono sur la place, les gens sont dehors et font la fête sans que personne ne se plaigne ni n’appelle la police…C’est pour montrer que la ville peut servir à ça aussi.

On te retrouve pour présenter ton effort solo, sans tes collègues historiques mais avec les jovents. Que signifie cet adjectif ?
Les jovents (prononcer djouvain) ça veut les dire les jeunes, les adolescents. Tout ça parce que dans le projet tu as le doyen et fondateur de Massilia, c'est-à-dire moi, et le dernier arrivé : Blu (le guitariste). Il y a une amusante complicité inter générationnelle entre nous deux. L’autre membre du projet, notre percussionniste brésilien, a lui aussi dix ans de moins que moi. Mais attention, je ne suis pas vieux pour autant !
Mélanger les générations autour d’une même chanson est une idée qui nous a toujours plu. D’ailleurs, le disque a été réalisé par un jeune et mixé par un vieux !

Comment s’est passée la rencontre avec votre percussionniste brésilien ?
Il officiait dans un groupe qui nous a invité, en 2001, à jouer dans le nordeste du Brésil. On a sympathisé et il est venu faire les percussions dans « Occitanista » (le dernier album de Massilia sound system). Et on s’était promis que si on devait créer quelque chose en marge, on le ferait ensemble. C’est ce qui s’est passé, on a tenu parole. Cela vient aussi d’un désir de fraternisation entre le nordeste du Brésil et l’Occitanie.

Quelles couleurs as-tu voulu donner à cet album ?
En fouillant, je me suis aperçu que dans les années 20 et 30, il y avait eu un mélange de musiques noires et marseillaises. Quand tu écoutes Scotto tu retrouves en effet ce côté un peu biguine, swing. C’est ce qui m’a intéressé.
J’ai aussi été influencé par « banjo », un livre d’un auteur Jamaïcain qui parle de personnes voulant monter un groupe dans le Marseille des années 20. Tout ça m’a catapulté dans cet univers. C’était intéressant de montrer que ce cosmopolitisme marseillais existait depuis très longtemps. Et on a récupéré tout ça.

Justement, en parlant de récupération, ton compère Lux Botté a déclaré dans une interview que votre travail de composition consistait à « piller les bonnes influences ».
C’est marrant parce qu’en Nissart, « pillar » veut dire prendre. C’est du pillage dans le sens où  la musique que l’on veut faire est populaire, donc le reflet de la réalité. Et ce reflet c’est aussi ce que tu écoutes. Donc tu fouilles dans ton panier à la recherche de trucs qui marchent pour les resservir à ta manière.

D’où vient ce besoin de revenir constamment aux racines de la musique ?
Dans ton panier traditionnel d’influences musicales, tu as la réflexion des générations qui sont passées là avant toi. Il faut en profiter. Moi, pour être à hauteur des Jamaïcains je ne peux pas me servir de la culture française stricto sensu. Je suis obligé d’aller puiser dans l’Occitanie. La culture française ne me suffit pas car elle a été accaparée par les élites. Elle n’a pas le côté sauvage de la terre et de la mer qui nous touche et nous caractérise !

Cela veut dire que tu considères tes albums comme des « revival » historiques ?
Par sur celui là. Si je faisais du revival, je ferais du collectage. Ca, je m’en occupe avec une association qui s’appelle salabrum. On y collecte toutes les chansons liées à la mer. Maintenant il est vrai que dans l’album tu as ce côté pédagogique. Je perpétue un esprit, quand ça m’arrange, pour l’appliquer à aujourd’hui. C’est en ça que ça n’est pas du revivalisme. 

Tu as profité du break pris avec Massilia pour sortir « Mademoiselle Marseille »…
On avait affirmé s’arrêter un an mais ça n’a pas été vrai. On va tourner tout l’été dans un spectacle qui s’appelle « la comédie provençale » où tous les projets gravitant autour du groupe seront réunis. Une véritable revue marseillaise avec Oaïstar, Papet J et le soleil FX…

Le disque est à peine sorti et il a déjà reçu le CHOC des musiques du monde et est en playlist sur France inter. Ca ne démarre pas trop vite ?
Non non, pour moi ça va (rires). Ce n’est pas le premier disque que je fais donc je reste paisible par rapport à ça. Quand un disque sort, il y a une espèce d’actualité brûlante d’un coup, artificielle même. Il faut l’accepter. Moi ce qui me fait rire c’est que ça me fait trimballer les deux jeunes citadins derrière moi !

Tu seras à Béziers le 14 juillet pour la festa d’Oc. Un festival occitan qui accueille un tchatcheur provençal. Peux tu m’expliquer la différence entre l’Occitan et le Provençal ?
L’Occitan est une langue dialectale, comme toutes les langues naturelles du monde. C’est un terme générique pour désigner toutes les formes dialectales des langues d’Oc. Ici on parle le Provençal et à Béziers le Languedocien.  La forme est différente mais il y a un fond commun de vocabulaire et de culture. Les troubadours, nos grands ancêtres, ont décidé que nous étions une communauté culturelle. Je m’incline donc devant leur décision.
J’aime beaucoup un verbe occitan, « afraira », qui signifie devenir frères. L’Occitanie c’est ça : un certain nombre de peuples qui ont décidé de devenir frères. Après, toutes les justifications linguistiques, je m’en…balance !

Adam, le label de Massilia et Oaïstar n’est pas de la partie, pourquoi ?
Ils n’ont pas voulu. Je n’étais pas étonné de recevoir un accueil « frais » des maisons de disques. Chanter des stations de métro de Paris, tout le monde trouve ça normal. Maintenant, chanter la rue Torte, c’est autre chose. Quand tu fais un album comma ça, il faut casser la tirelire et créer ton propre label. C’est fait et maintenant il y a Manivette records.

Manivette, qui signifie Emmanuelle en provençal.
Exactement. Parce que ma petite s’appelle Emmanuelle, voila.

Emmanuelle…ton attachée de presse ?
Eh oui. Le monde est petit mais La Ciotat n’est pas grande non plus (rires) !
Aïoli.

Propos recueillis par Stéphane BURGATT – mai 2005