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RENDEZ-VOUS DE L'ERDRE 2012 à NANTES (44) pdf print E-mail
Ecrit par Fred Delforge  
lundi, 03 septembre 2012
 

LES RENDEZ-VOUS DE L’ERDRE
NANTES (44)
Du 31 aout au 2 septembre 2012

http://www.rendezvouserdre.com 

vendredi 31 aout 2012 

Aller aux RDV de l’Erdre, c’est toujours un grand moment de convivialité qui se traduit par des retrouvailles et par de nouvelles rencontres, c’est aussi passer quelques jours dans une ville pleine de vie, pleine d’énergie, une ville qui un week-end tout entier et plus encore vibre à l’unisson au rythme du jazz sous toutes ses formes mais aussi de la belle plaisance ! Cent vingt concerts dans et autour de l’agglomération, cent quarante bateaux qui vont filer de Nort-sur-Erdre jusqu’à Nantes, des têtes d’affiche à n’en plus finir mais aussi des jeunes talents locaux et enfin une vraie scène blues où se croisent valeurs sures et candidats d’un tremplin qui peut se vanter d’être devenu un des meilleurs de l’hexagone en terme de qualité des artistes et de récompenses ! Rien d’étonnant à ce que cent cinquante mille spectateurs fassent le déplacement chaque année pour ne pas manquer cette fête …

Deux heures de train au départ de Montparnasse en nous voilà déjà au Pont Morand pour l’ouverture officielle de cette nouvelle édition ! Une brève allocution de Philippe Audic, président de l’Association Culturelle de l’Eté qui organise l’événement, une autre d’Armand Meignan qui assure une programmation de choix et nous voilà déjà bientôt au pied de la scène blues où nous attend ce soir Snake Fuzz Moan, vainqueur du Tremplin 2011 Cognac Blues Passions ! Seul sur les planches, ce transfuge de la scène rock garage lyonnaise nous emmène dans un univers totalement différent de ce qu’il fait en groupe et nous dévoile une musique pleine de sensualité, pleine de sensibilité, une musique un peu lente et répétitive qui rappelle parfois vaguement Skip James et qui fait démarrer cette cuvée blues 2012 en douceur, sans vraiment d’à-coup … Dans sa grande majorité, le public déjà nombreux apprécie le jeune chanteur et guitariste !

On passe désormais aux choses sérieuses avec du très lourd, Kenny ‘‘Blues Boss’’ Wayne, un incontournable de la scène blues mondiale avec qui nous avions déjà passé un bon moment au FestiBlues International de Montréal en début de mois mais qui cette fois est accompagné par une dream team de musiciens nationaux tels qu’Anthony Stelmaszak à la guitare, Thibaut Chopin à la contrebasse, Drew Davies au Saxophone et Fabrice Bessouat à la batterie. Presque septuagénaire, le pianiste et chanteur est présenté comme le maillon qui manquait entre Memphis Slim et Fats Domino pour que la chaine tienne le coup et c’est à grand renfort de ses blues old school mais aussi de ses boogies woogies endiablés qu’il nous transporte dans un répertoire où l’on reconnaît forcément des extraits de son excellent dernier album produit par Duke Robillard lui-même et sorti chez Dixiefrog il y a un peu plus d’un an ! Du bon blues qui déménage et qui fait taper du pied, un public qui sent des démangeaisons monter en lui et qui se met même à danser devant la scène … Voilà ce qu’on appelle une première soirée carrément réussie !

Le temps de prendre quelques verres avec les amis et on s’aperçoit que le Stéphane Belmondo Quartet a déjà terminé son concert sur la superbe scène nautique Ceineray, l’écrin flottant qui accueille les plus gros concerts du festival et leur offre une scénographie à 360 degrés … Tant pis pour nous, on essaiera d’avoir plus de chance demain soir puisque la musique va encore résonner sur les bords de l’Erdre durant tout le week-end ! 

Samedi 1er septembre 2012 

Ne pas se soumettre à la tradition du jury du Tremplin des RDV de l’Erdre qui consiste à aller déguster un plateau d’huitre en buvant du Muscadet sur les bords de l’eau est inconcevable et c’est donc ainsi que démarre la journée, juste avant que les premières notes de blues ne commencent à résonner sur la scène où l’on remarque, dès l’entrée en lice du premier groupe à 15 heures, un public dense et motivé ! Avant, il y avait eu le non moins traditionnel tour dans la ville avec à la clef quelques belles rencontres architecturales bien sur, mais aussi musicales puisque les fanfares étaient de sortie dans les rues de Nantes …

Les Driftin’ Blues n’ont pas eu grand chemin à faire puisque c’est de Rezé qu’ils viennent pour nous offrir leur blues et c’est portés par leur chanteuse qu’ils vont nous proposer cet après-midi un parcours classique mais de bonne facture ponctué de belles pièces comme le « Midnight Train » de Buddy Guy. Un harmoniciste virtuose pour relever le tout et voilà un quintet qui nous offre une bonne mise en jambes bien blues pour la journée ! Le public qui a répondu présent de façon encore plus appuyée que les années précédentes apprécie un jeu encore un peu fébrile mais déjà très honnête. Pas facile d’être les premiers à jouer dans un tremplin mais Driftin’ Blues s’y est attaché sans le moindre complexe et a incontestablement donné tout ce qu’il avait en magasin !

La formation suivante est originaire du Mans et c’est sur fond de classiques du blues revus et corrigés à sa propre sauce que Dr Bones & The Blue Roots va nous en mettre plein les mirettes ! Une rythmique éprouvée qui se fait visiblement plaisir sur scène, des solistes époustouflants de virtuosité, un chanteur slideur à la voix parfois pas très bien exploitée mais à la sincérité touchante, la foule n’aura pas beaucoup à se forcer pour être ravie d’entendre quelques standards comme « Dust My Broom » ou « Got My Mojo Working » avant de terminer sur un rappel avec « The Sky Is Crying ». Visiblement, les Manceaux en auraient bien encore joué quelques-unes tant on sentait que la mayonnaise avait pris ! Mais voilà, il y a parfois des règles que l’on ne peut transgresser, même si ça attriste tout le monde …

Le temps de fignoler sa balance et voilà Charles Després & The Midnight Creepers à pied d’œuvre pour un set en dent de scie commencé très calmement sur un instrumental puis agrémenté de compositions parfois pleines de délicatesse, parfois plus musclées sans pour autant quand même devenir sauvages. Véritable homme de la situation, Charles Després chante, joue de la guitare et plaisante avec le public, esquissant même parfois un pas de danse pour étayer ses arguments, tandis qu’à ses côtés, le tandem basse batterie assure le coup sans trembler le moins du monde. Quelque peu retombée en milieu de prestation avec un nouvel instrumental pas vraiment bien placé, la bonne ambiance reviendra tranquillement et c’est une fois encore une prestation fort honorable que nous a délivré ce troisième groupe concurrent du tremplin.

Au repas, les conversations vont bon train et le jury échange sur tel point fort ou tel point faible de chacun des concurrents et si une chose est déjà certaine, ce que nous aurons cette année encore le plus grand mal à nous mettre tous d’accord sur le nom du vainqueur … et c’est loin d’être fini puisque la journée de demain nous réserve encore trois candidats de plus ! C’est donc à Candye Kane que nous allons penser pour le reste de la soirée et c’est avec toujours autant de chaleur humaine et de gentillesse que la « Big Beautiful Woman » qui a bien décollé suite à ses graves ennuis de santé va venir faire bien plus que nous rassurer sur sa capacité à tenir le show …

Laura Chavez à la guitare, c’est déjà l’assurance d’avoir sur scène une guitariste de grande qualité, et c’est sans se priver le moins du monde que celle que l’on surnomme « the next Stevie Ray Vaughan » va nous en mettre plein les yeux et plein les oreilles ! Un premier morceau du band en trio instrumental et voilà enfin Candye Kane qui monte prendre place derrière son micro. Si elle a perdu les kilos qui faisaient son charme visuel, la diva n’a rien laissé de sa voix dans sa bataille contre le cancer et c’est en véritable entertainer qu’elle prend son public à bras le corps pour lui offrir non seulement ses plus belles chansons mais aussi de longs échanges durant lesquels elle raconte sa vie, sa jeunesse, ses expériences. Nantes n’a plus d’yeux que pour Candye et celle ci le lui rend bien, livrant un show époustouflant où rien ne manque, ni la chaleur, ni la qualité, ni cette petite touche de soul et de rhythm’n’blues qui fait continuellement monter la pression jusqu’à ce que la marmite explose ! 

On se demandait comment Candye Kane allait pouvoir quitter la scène sans déclencher une émeute tant le public en redemandait à la fin du concert, la blueswoman n’a pas eu besoin de fouiller trop loin pour trouver la solution et c’est du côté de la vente des disques qu’elle est venue se prêter en toute simplicité à une longue séance de dédicaces, mais pas ces bêtes dédicaces où l’artiste signe sans s’intéresser à la personne, non, plutôt celles où chaque coup de stylo donné dans le livret du CD donne lieu à des échanges où les remerciement et la sincérité fusent des deux côtés de la table. Sacrée Candye qui nous a une fois encore donné le meilleur d’elle-même ! 

La scène Ceineray accueille ce soir David Sanchez, Nicholas Payton et Stephon Harris accompagnés d’un quartet cubain et quand on voit la foule qui se presse tout autour de l’endroit, on comprend que photographier va être bien plus qu’un parcours du combattant … Alors c’est au loin et avec tout le barda dans le sac que l’on profite un instant des notes que le saxophoniste, le trompettiste et le vibraphoniste nous envoient de fort belle manière, des notes quelque peu dispersées par le vent frais qui souffle sur Nantes et qui commence à glacer les corps en même temps qu’il agresse les cordes vocales. Une bonne nuit par dessus et tout devrait être en place pour le final de demain qui s’annonce chargé ! 

Dimanche 2 septembre 2012

C’est par une conférence animée par nos amis Christophe Mourot et Jacques Périn de Soul Bag que débute cette dernière journée de festival à l’heure de l’apéritif … Du jazz au blues et du blues au jazz, les chemins se croisent et se décroisent et les deux érudits ne vont pas se priver de nous le démontrer tout au long de 90 minutes pleines de bonne humeur et de belles notes ! Pour un peu, on en oublierait presque le brunch au canotier où nous attendent Eric C et Kevin Doublé pour une prestation qui a su réunir un public nombreux et attentif !

Le temps d’avaler un plateau d’huitres et nous voilà déjà au pied de la scène blues pour le premier des gros morceaux de la journée, Old Bluesters, un jeune groupe fait de vieux routiers de la scène nationale qui met le niveau très haut grâce à de belles expériences individuelles, voire collectives, de chacun de ses membres ! Cà démarre très fort donc et le public apprécie à sa juste valeur un concert plein de belles choses où le dobro remplace à l’occasion l’harmonica mais où l’équilibre est toujours parfait. Un « Walking The Dog » sur la fin du set et voilà les bords de l’Erdre bien émoustillés par un de ces combos que Nantes n’est pas prêt d’oublier ! Il faut quand même reconnaître que l’on dépasse, et de loin, le niveau des « jeunes révélations » que ce genre de tremplin est sensé dénicher mais tout bien pesé, mettre Old Bluesters en valeur aujourd’hui n’avait rien de déplacé.

Les suivants sont jeunes, ce n’est rien de le dire puisque les deux solistes affichent chacun 21 ans ! Et pour mieux nous rappeler que la valeur n’attend pas le nombre des années, c’est une prestation digne de valeurs sures de la scène internationale que The Lazy Bones va nous proposer, brillant de mille feux et tirant parti de l’expérience d’une section rythmique dans laquelle on remarque un nouveau venu pas complètement inconnu puisque la contrebasse est tenue par Miguel Hamoum ! Très à leur aise sur scène malgré la présence d’un public nombreux, ces jeunes talents du crû ne vont pas se laisser impressionner et vont offrir à leurs ouailles une démonstration de blues très large avec même au passage un peu de rock et de rockabilly. Ovationné à leur descente de scène, les quatre garçons affichaient la banane des grands jours, celle des gars qui viennent de réussir un mauvais coup et qui en sont fiers ! 

Le dernier groupe à se produire dans le cadre du tremplin n’est pas un inconnu puisqu’il s’agit de Robert Lenoir & The Goodbye Joe, récent vainqueur du tremplin du Cahors Blues Festival ! Techniquement impeccable, la prestation des Normands ne va pas manquer de charmer son monde et si le quintet s’égare parfois un peu en s’éloignant des grilles traditionnelles du blues, on ne peut que lui reconnaître une somme conséquente d’influences, et non des moindres puisque l’on sent planer autour d’eux les vieux relents de Dire Straits, de Bob Dylan ou encore d’Eric Clapton. Le public en redemande forcément et Robert Lenoir ne se prive pas de lui en donner autant que faire se peut, offrant une prestation irréprochable mais sans doute un peu trop loin du blues que l’on attendait de lui, surtout dans le cadre d’un tremplin … 

Les délibérations ne sont jamais faciles aux RDV de l’Erdre mais c’est en finissant par se mettre d’accord que le jury a choisi cette année de récompenser trois groupes, mettant en troisième position les Driftin’ Blues qui reçoivent le prix France Blues et qui se produiront donc en marge de l’European Blues Challenge à Toulouse en mars prochain dans le cadre d’un showcase ! Nul doute que les décideurs des 25 pays membres de l’European Blues Union apprécieront le talent de ce groupe qui a eu la lourde tache d’ouvrir le bal cette année … Le second pris échoit aux Old Bluesters qui enregistreront un album ou une maquette dans un studio professionnel et qui raflent au passage un autre prix prestigieux puisqu’ils se produiront dans le cadre de l’Europa Jazz So Blues du Mans en novembre ! Et le grand gagnant de l’année sera The Lazy Bones qui, outre l’honneur de se retrouver en haut de l’affiche lors de la prochaine édition du festival, décroche également les prix Soul Bag, Montfort Blues, Blues Fest et Léon’s Blues. Une belle moisson qui garantit à ces jeunes gens une saison bien remplie ! 

Lauréats de la dernière édition, ce sont les Blues Bound qui vont avoir le plaisir de refermer le crû 2012, tout du moins sur la scène blues, et c’est durant deux heures que Mathieu Pesqué et son complice harmoniciste Roll Pignault mais aussi un guitariste invité vont réjouir les yeux et les oreilles d’une assistance qui apprécie la fraicheur de leur musique et la jeunesse des artistes. Navigant à vue du côté du folk sans pour autant complètement abandonner les rivages du blues, le trio remportera un vif succès auprès d’une assistance qui, malgré la fatigue de trois jours intenses, réclamera et obtiendra sans grande difficulté pas moins de trois rappels ! Et il y a fort à parier que l’on y serait encore si les impératifs de l’organisation n’avaient fini par obliger Blues Bound à plier bagages … 

Un coup d’œil sur le Stefano Di Batista Quintet qui fait le plein sur la scène nautique Ceineray et il faut bien se résoudre à aller se reposer un peu avant d’attraper le premier TGV pour Paris demain matin à 5 heures … Une fois encore on ne peut que se féliciter d’une organisation et d’un accueil XXL assurés par une équipe de choc que l’on remerciera chaleureusement ! Le jury est traité de manière royale aux RDV de l’Erdre et c’est en grande partie du à des gens formidables dont la modestie souffrirait si on les citait tous. Du président de l’association aux stagiaires, des techniciens aux bénévoles, chacun a tout fait pour que les rouages du festival soient bien huilés et pour tout avouer, ça a été une fois encore impeccable ! Merci à tous, et à l’année prochaine donc … 

Fred Delforge – septembre 2012