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EUROPEAN BLUES CHALLENGE 2012 à BERLIN (D) pdf print E-mail
Ecrit par Fred Delforge  
lundi, 19 mars 2012
 

EUROPEAN BLUES CHALLENGE
KESSELHAUS / KULTURBRAUEREI – BERLIN (Allemagne)
Les 16 & 17 MARS 2012 

http://www.bluesyou.com  

Pour la seconde année consécutive, c’est à Berlin que se déroule l’European Blues Challenge et c’est une fois encore l’occasion de retrouver tout ce que la communauté blues européenne compte d’activistes au sein des vingt quatre pays membres de l’European Blues Union dont ce sera ce week-end la deuxième assemblée générale. Berlin est un lieu chargé d’histoire et c’est forcément en commençant le séjour par un peu de tourisme que l’on patiente jusqu’au lancement officiel de la première des deux soirées d’un concours qui promet d’être riche et intense. 

Vendredi 16 mars 

Le trajet est on ne peut plus classique avec comme étapes obligées la Porte de Brandebourg, les restes du mur, Checkpoint Charlie mais aussi Alexanderplatz et les divers monuments qui émaillent une ville toujours aussi surprenante … Au programme aussi, bière et saucisses, deux incontournables d’une culture qui n’appartient qu’au peuple allemand. La journée filant à vive allure, c’est rapidement à Kesselhaus, en plein cœur de la Kulturbrauerei, que l’on se retrouve pour un repas convivial avant le début d’une soirée qui ne nous réserve pas moins de neuf groupes venus en découdre en toute amitié pour une place sur le podium !

Une rapide allocution de Tom Ruf, Président de l’EBU, dans le but de présenter la manifestation mais aussi les membres du jury et quelques guests prestigieux et il sera très vite temps de se préparer pour plus de quatre heures et demi d’un blues métissé et vivant. Un blues européen comme seule une organisation comme celle ci est capable de le présenter ! 

On commence avec les Finlandais de Ismo Haavisto Band et c’est un harmoniciste chanteur et guitariste en costard rouge qui vient nous proposer un bon gros blues gras et juteux ! Une guitare lead plutôt réjouissante à ses côtés dans le quartet et nous voilà partis de fort bonnes conditions ! Le public se montre enthousiaste, ça ne pouvait mieux démarrer …

On se dirige maintenant vers la Croatie avec The Downstrokes dans un format un peu spécial puisque ils sont ce soir en duo acoustique avec deux guitares et la voix de Mladen Rakas ... Le show sera bien évidemment dédié à Drazen Buhin, l’âme des Croatian Blues Forces, parti rejoindre le paradis des bluesmen il y a un peu plus d’un mois … Une pensée de nous tous pour notre ami ! 

Direction la Hollande avec John F. Klaver Band, un groupe que l’on ne quitte plus puisque nous l’avions découvert à Amsterdam en octobre dernier avant de le retrouver à Memphis en février. La formule est rodée et si le son est beaucoup trop fort ce soir, le quartet s’en sort carrément bien avec à la clef son incontournable reprise de « Spoonful » portée par un orgue Hammond volatile et une guitare inspirée !

Venu de Slovaquie, Lubos Beña est un duo ou plus exactement un one man band guitare et percussions auquel est venu se greffer un harmoniciste. Le set plutôt agréable et bien roots proposé par les deux personnages au look rural passe carrément bien auprès d’un public qui visiblement apprécie l'alternance entre les sonorités électriques et acoustiques. Un problème de jack géré à l'arrachée par l’harmoniciste et un « Pick A Ball Of Cotton » à fond les ballons et déjà le duo retournera vers le fond de la salle 

Seul artiste noir de la soirée, Roland Tchakounté représente la France et nous emmène dans un set teinté d’Afrique dans une formule quartet un peu différente de ce que nous connaissions de lui … Pas facile de se plier aux conditions du concours quand on est un artiste qui aime prendre le temps de vivre sa musique, c’est pourtant avec un certain charisme et en se reposant sur un Mick Ravassat particulièrement en verve ce soir que Roland fera le tour de ses racines les plus profondes et de toute sa culture blues particulièrement riche. La salle a visiblement apprécié !

On grimpe un peu du côté des Alpes et on se retrouve en Suisse avec Marco Marchi & The Mojo Workers, un quartet atypique avec une guitare, tuba, un harmonica et des percussions … Tout ce joli monde sagement assis nous envoie un blues roots de derrière les fagots, un blues qui ne fonctionne pas mal du tout auprès de l’assistance et surtout qui sonne grave ! La bonne surprise de la soirée !

Arrivé de Riga, en Lettonie, Chehols est quartet avec contrebasse et guitare Gretsch vintage qui nous envoie un mélange très rock et rockabilly dans lequel on retrouve au passage une cover du fameux « Heartbreak Hotel » d’Elvis Presley ... Le son est malheureusement beaucoup trop fort et c’est une fois encore avec les bouchons d’oreilles qui nous arriverons au terme du set, non sans en être passés par un final très « Blues Brothers » !

C’est la Pologne qui nous présentera le groupe le plus inattendu du jour, Slavek Wierzcholski I Nocna Zmiana Bluesa, un sextet avec un violon qui va nous offrir une succession de gimmicks un peu usés mais encore efficaces … Ca swingue, ça roule, ça blues un peu à la va comme j’te pousse mais à l’arrivée, la salle apprécie et se prend même une démonstration de washboard pas désagréable du tout. Si côté musique tout n’était pas parfait, au moins côté visuel, la Pologne nous en a cette année encore mis plein les yeux …

C’est en Belgique que se terminera la soirée, avec Lightnin' Guy & The Mighty Gators qui va avoir un peu tendance à en faire trop ce soir, mais quand on débarque à Berlin avec un bus de supporters, il faut leur en donner pour leur argent … Une intro au Weissenborn, deux titres à l’harmonica, un titre bien funky, Lightnin’ Guy déplie ce soir le catalogue de ce qu’il sait faire et il n’aura malheureusement pas le temps de tout nous sortir tant le temps est compté ! Ses fans apprécient et le font savoir, le reste de la salle partage, même si c’est un peu à cause du public que l’on sortira cette fois les bouchons …

Au terme d’une première journée bien chargée, c’est vers un peu de repos qu’il faut aller cette fois car la journée de demain s’annonce chargée avec au menu Assemblée Générale et Open Market pour commencer, seconde soirée de concerts ensuite, et cette fois avec dix groupe en lice ! On n’est pas couchés …

Samedi 17 mars 

C’est sur les coups de dix heures que les membres de l’European Blues Union se retrouvent dans la salle de réception de l’Holliday Inn Mitte pour leur Assemblée Générale annuelle, l’occasion de rendre une fois encore un hommage appuyé à notre ami Drazen Buhin avant de débattre de toutes les choses qui ponctuent l’existence d’une organisation en forme de pieuvre avec pas moins de vingt quatre tentacules …

Le repas achevé, c’est un Open Market qui réunira tout ce que le blues européen compte de groupes, tourneurs, programmateurs et festivals pour des échanges constructifs qui déboucheront à n’en point douter sur des échanges internationaux plus que productifs ! L’Europe du blues se construit à vitesse grand V et à voir les cartes et les albums qui s’échangent, on se retrouvera les uns et les autres à maintes reprises durant toute l’année qui vient … Au rayon des stands venus de l’hexagone, on remarquait ceux d’On The Road Again et de France Blues qui présentaient la vivacité et la diversité de notre scène nationale, mais aussi ceux de deux groupes venus spécialement pour faire des rencontres, Blues Power Band et In Volt. Et des rencontres, ils en ont fait ! 

On retrouve Kesselhaus juste après l’ouverture des portes vers 18 heures 30 et si la salle est encore pratiquement vide, on sent dans ces lieux qui ont l’habitude d’accueillir des manifestations importantes que la musique est une des choses majeures de ce projet fou qu’est Kulturbrauerei, à savoir celui de recycler une ancienne brasserie en un lieu de culture et de détente avec moult salles de spectacles, cinémas, clubs et restaurants … Et si Berlin vibre traditionnellement au son des platines des Djs et des dancefloors, c’est ce soir encore le blues qui aura le dernier mot dans cet endroit à la fois atypique et un peu trash !

C’est ainsi la Bulgarie qui ouvre les festivités de ce samedi et c’est en quartet que Vasco The Patch y va de son gros blues rock et de son boogie qui déménage. Un chanteur harmoniciste au pantalon totalement destroy qui s’arme bientôt d’une guitare pas moins bigarrée, un autre chanteur qui rejoint le groupe pour y apporter sa voix usée par le temps et faire plonger le final du côté des bayous … Il n’y a pas à dire, l’Est de l’Europe se défend carrément bien côté blues !

Dago Red est une valeur sure en Italie et c’est avec sa contrebasse mais aussi avec une chanteuse additionnelle que le groupe va continuer de nous régaler, et ce après un premier passage en quartet par « My Babe ». L’arrivée de la gent féminine dans le combo apportera ensuite un peu de fraicheur bienvenue et fera plonger de temps à autres le répertoire du côté d’un folk blues plutôt bien senti, le tout avec un mélange de classe et de retour aux racines très bien dosé ! 

La Suède nous réserve une bonne surprise avec Slidin’ Slim, un duo blues roots avec résonateur et harmo qui vire au blues plus luxueux quand l’harmoniciste troque son instrument contre un saxophone. Un look très soigné et une musique qui l’est naturellement moins, on pénètre sans le moindre mal dans cet espèce de blues hors du temps qui à l’occasion peut même virer au psychédélique. Inattendu mais vraiment bien pensé !

Norbert Schneider d’Autriche a la particularité d’une part d’avoir été finaliste au Concours de l’Eurovision et d’autre part de porter des chaussettes jaunes du plus bel effet. Commencé en solo avec entre autres une cover du célèbre « Halelujah I Love Her So », le set du dandy se poursuivra en trio et en électrique avec comme souvent durant ce week-end un son violent aux limites du strident. Dommage car en plus de sa belle gueule, Norbert Schneider a une belle voix et un jeu de guitare intéressant. 

Direction la Norvège avec Rita Engedalen & Backbone pour un départ en solo de la chanteuse puis ensuite une prestation électrique et inspirée qui invite le public à taper du pied. Ca bouge très fort, ça joue carrément bien … les guitares se percutent, se chahutent un peu, mais au final c’est toujours la voix de Rita Engedalen qui a le dernier mot et c’est très bien ainsi ! Il n’y a pas grand chose à redire si ce n’est que dans son ensemble, le show entre blues et blues rock n’aura souffert d’aucune baisse de régime !

On traverse l’Europe du Nord au Sud pour rejoindre l’Espagne où nous attendent Mingo & The Blues Intruders. Un chanteur harmoniciste en cravate, des morceaux rythmés et pas mal de références aux plus grands standards du blues avec même un passage final par Little Walter et son « Got To Go », voilà encore un groupe qui a des arguments pour faire résonner le blues bien plus loin que ses frontières et entretenir la flamme d’une musique aux couleurs américaines mais à la saveur européenne.

Venu du Royaume Uni, Ben Poole est un jeune guitar hero qui a tout compris de l’art et de la manière de faire son job. Une guitare qui cause fort et juste mais sans trop en faire, c’est rare, un charisme très légèrement saupoudré d’humilité, une capacité à en passer par l’acoustique et en prime une voix qui n’a pas à rougir du tout, le jeune musicien est tellement bon dans son œuvre que l’on en oublie presque que c’est en power trio qu’il se produit tant les couvertures tombent naturellement de son côté ! On en arriverait presque à paraphraser un éminent reporter présent dans la salle en citant son désormais incontournable « oh qu’il est bon ! ».

Le Danemark nous surprend avec The Blues Express et son guitariste à peine moins brillant que Ben Poole mais seulement âgé de 16 ans. A ses côté un groupe avec un claviériste qui fait le pitre sur son siège et une chanteuse tellement gênée par sa robe trop courte qu’elle passe son temps à la redescendre pour cacher son intimité … On aurait presque pu se moquer mais rayon musique, le band ne donne pas dans la demi-mesure et c’est en impressionnant leur monde que les Danois s’en sortiront avec bien plus que les honneurs. On devrait en reparler d’ici peu tant le groupe a les dents longues ! 

On se demandait presque s’il finirait par y avoir un régional de l’étape et c’est Michael Van Mervyk qui nous rassure en venant représenter l’Allemagne. Le guitariste et chanteur n’a plus à faire la preuve de son talent et c’est pourtant des conditions difficiles qui vont l’attendre ce soir puisqu’il cassera sa chanterelle dès le premier titre, continuant bientôt au chant pur, mais quasiment « nu » sans sa guitare, pour finalement terminer en slide au lap steel et nous emmener vers un « Bad Bad Blues » servi en guise de dessert pour une prestation à la fois très improvisée et très professionnelle.

C’est la Géorgie qui refermera ce 2ème European Blues Challenge avec T.Blues Mob et c’est en quintet avec un bassiste et chanteur bondissant que le groupe va venir terminer de nous détruire les oreilles avec un son tellement fort que les premières rangées reculent instantanément de cinquante centimètres dès les premières notes. Dommage car le feeling est bien présent, même si les démonstrations individuelles en fin de set finiront quand même par lasser, surtout après cinq heures de musique non stop ! 

Pas de grandes délibérations inutiles, c’est après une dizaine de minutes seulement que Tom Ruf viendra annoncer les résultats, consacrant dans l’ordre inverse le Britannique Ben Poole à la troisième place du classement, déclarant l’Autrichien Norbert Schenider comme premier accesseur et consacrant tout simplement les Norvégiens Rita Engedalen & Backbone comme les grands vainqueurs de ce cru 2012 de l’European Blues Challenge. L’occasion pour la chanteuse de rechausser sa guitare et de repartir pour un rapide set avant que la soirée ne vire à la jam.

Dix neuf pays, dix neuf groupes, une dizaine d’heures de musique live et un niveau somme toute assez homogène, plus que l’an dernier sans doute ! C’est ce que l’on retiendra avant toute autre chose de cette escapade berlinoise qui a démontré par l’exemple que le blues en Europe est une musique qui se porte plutôt bien grâce à une poignée d’activistes qui, dans chaque pays, fait de son mieux pour que les choses évoluent. Vingt quatre nations se sont réunies sous la bannière de l’European Blues Union, et c’est loin d’être terminé. Vivement 2013 et son 3ème European Blues Challenge ! 

Fred Delforge – mars 2012