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ROLAND TCHAKOUNTE au NEW MORNING (75) pdf print E-mail
Ecrit par Fred Delforge  
vendredi, 29 février 2008
 

ROLAND TCHAKOUNTE – JUMBO LAYER
LE NEW MORNING – PARIS (75)
Le 28 février 2008


http://www.roland-tchakounte.com
http://www.myspace.com/rolandtchakounte 
http://www.myspace.com/jumbolayer
http://www.myspace.com/christophedupeu  

A l’heure de présenter son troisième album au public, Roland Tchakounté ne pouvait décemment pas passer à côté d’un concert dans une des salles mythiques de la capitale et, comme nombre d’artistes, c’est en offrant un New Morning à son trio qu’il a souhaité placer « Waka » sous les meilleurs auspices ! A une heure du concert, la Rue des Petites Ecuries est baignée d’une effervescence très prometteuse pour la suite de la soirée et les visages connus se succèdent dans les divers établissements du quartier où l’on attend l’ouverture des portes … 

C’est Jumbo Layer qui se charge d’ouvrir les hostilités et c’est en affichant un léger retard pour laisser à la salle le temps de se remplir que le trio s’y colle, arborant un style qui n’est pas sans surprendre un public plus habitué à un blues très roots qu’à l’astucieux mélange de rock alternatif et de soul que nous proposent les Parisiens. Emmené par les deux têtes pensantes du combo, le guitariste et chanteur Gilles Riberolles et la chanteuse et danseuse Lollie Pop Death Crush, Jumbo Layer n’en finira plus de ponctuer ses morceaux de samples et autres effets et c’est en nous livrant des relectures très personnelles de titres comme « Spoonful » et « You Gotta Move » ou encore des pièces aux noms évocateurs du genre de « Marie Laveau », « Voodoo Working » ou « Don’t Break It Down » que cet ovni où l’on remarque une diva tatouée à outrance et un guitariste qui cultive une ressemblance avec Keith Richards jusqu’au bout de la Telecaster nous aidera à passer un bon début de soirée, certes un poil déconcertant pour certains mais apprécié par une bonne majorité de la salle … Très professionnel, le groupe ne se laissera à aucun moment perturber par quelques petits soucis de son ni même par une guitare qui se débranchera de façon impromptue en plein morceau !

Une petite demi-heure de changement de plateau et c’est à Roland Tchakounté de venir séduire un New Morning plein comme un œuf malgré les vacances scolaires qui battent leur plein en Région Parisienne et la fuite d’une partie des spectateurs potentiels vers les pistes enneigées. Une brève présentation du toujours très inspiré René Malines, quelques derniers petits réglages et c’est parti pour un premier standard du plus Français des Camerounais, le splendide « Me Kouh Shem » qui a le mérite de mettre tout le monde d’accord sur l’utilisation du Bamiléké dans le blues ! Le ballet des photographes bat son plein et si le gratin de la presse nationale a répondu présent, c’est en sachant que la soirée ne pouvait être qu’excellente compte tenu de la finesse du trio et de son expérience acquise de Chicago à Memphis en passant par Montréal où Roland Tchakounté fait à chaque fois forte impression.

La grosse surprise que nous réserve le show de Roland Tchakounté version 2008 réside surtout dans sa montée en intensité, essentiellement due à une volonté qu’affichent les trois musiciens d’électrifier leurs morceaux. Mick Ravassat a ainsi abandonné le dobro pour se concentrer sur une alternance de jeu en slide et en accords jouée à la Les Paul, l’imperturbable Matthias Bernheim continuant pour sa part à saupoudrer le musique que compose Roland de son bric à brac de percussions. On passe des titres de « Waka » à ceux d’« Aba Ngo » sans le moindre heurt et c’est en reconnaissant des morceaux comme « Africa » ou « Noum Windo » que le public se laisse emmener dans le voyage que lui propose un groupe régulièrement rejoint à l’harmonica par Christophe Dupeu, petit plus indispensable dans une musique en perpétuel mouvement.

La soirée file bon train et on n’en finit plus d’apprécier autant le son que l’image d’un groupe qui se fait plaisir sur scène, la sobriété du costume de Roland Tchakounté apportant un véritable bonus visuel qui colle admirablement à la classe naturelle des concerts au New Morning ! Paradoxalement, plus les compositions partent vers un style naturellement world, plus le côté blues et spontané de Roland est mis en avant et c’est au travers de pièces d’une rare intensité que les musiciens vont nous épater à chaque instant, Mick s’engageant dans des soli particulièrement bien sentis et se voyant soutenu dans ses délires les plus majestueux par une formation qui fait corps de façon irrésistible ! On traverse encore quelques nouvelles pièces comme « Zuiktam » ou « Bintou » et son surprenant refrain en Français, appréciant à chaque instant l’engagement d’un artiste qui a compris qu’il était le porte-parole de l’Afrique et que son devoir était de nous aider à aimer son pays et plus largement son continent ! Aussi, Roland Tchakounté s’efforce de mettre l’accent sur ce qui le touche, le blesse ou simplement le dérange, reprenant une bribe du discours idiot d’un président spécialiste du genre lors de sa visite à Dakar sans le citer et démontant toute sa théorie à l’emporte-pièce sur « le problème de l’Afrique », recueillant par la même occasion l’adhésion d’une salle qui a compris que l’on ne plaisante pas avec la sensibilité du chanteur et guitariste.

On approche inévitablement des rivages de l’occident et c’est non pas en se retournant vers le Cameroun mais en faisant un unique clin d’œil au blues américain et en rendant hommage à John Lee Hooker que Roland Tchakounté et son groupe viendront nous remercier d’avoir contribué à ce que cette fête soit non seulement belle mais également inoubliable ! Une partie de la salle s’échappe rapidement pour aller attraper son métro, le reste du public reste là pour finir de communier avec un artiste qui dédicace ses albums, ne manquant jamais d’avoir un sourire, un regard, un mot gentil à l’attention de chacun … C’est aussi pour cela que tout le monde succombe au charme d’un bluesman qui est en passe de venir s’inscrire parmi les plus brillants, toutes nationalités confondues ! Grande soirée …

Fred Delforge – février 2008