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ZISKAKAN pdf print E-mail
Ecrit par Stephane Burgatt  
mercredi, 05 décembre 2007
 

"Derrière l'image de carte postale se cachent de grandes souffrances"


Ils sont originaires de l’île de la Réunion. L’histoire de ces hommes qui ont mis sur pied ce projet, remonte à 1979. En 28 années de musique et d’activisme au travers de tournées internationales, les Ziskakan ont, depuis leur création, outrepassé une fonction réductrice de groupe de musique pour s’imposer en ambassadeur de la culture créole Réunionnaise dans sa globalité.
Musicalement, Ziskakan a développé son style autour du genre propre à l’île : le maloya. Une musique et une danse créées par les esclaves qui, à l’instar du blues outre atlantique, chantaient leurs peines, leurs mésaventures mais aussi leurs espoirs.
Une rencontre avec Gilbert Pounia, chanteur et leader naturel de la formation est la chance d’offrir un décryptage sur ce qu’il est écrit derrière l’image de carte postale que l’on conçoit de celle que l’on appelle aussi « l’île intense ».

Pour resituer l’époque, quand vous avez créé Ziskakan, la France était sous la présidence de Valérie Giscard D’Estaing, La Réunion était DOM depuis une trentaine d’années. Quand à vous vous étiez de jeunes poètes. Quel a été l’élément déclencheur qui vous a donné l’envie de lancer cette aventure ?

C’est vrai que Ziskakan n’est pas simplement un groupe, mais tout simplement un mouvement qui est né à la fin des années 70. Pour ma part, je revenais tout juste de la métropole. J’étais parti faire des études d’éducateur spécialisé sur Lyon.
A mon retour j’ai vraiment vu tout le bouillonnement qu’il y avait sur l’île. Pas seulement à La Réunion d’ailleurs : un regain d’intérêt s’est manifesté autour de la Bretagne, de l’Occitanie…
Sans que personne ne se donne spécialement le mot, quelque chose était en train de se passer. Ecrivains, poètes…Même des politiques se mobilisaient ! Le but commun étant de donner toute sa place à la langue créole. Il fallait dépoussiérer l’image d’une langue, notre langue, qui a été de tous temps « doudouïsée ».

La langue était votre seule préoccupation ?

Au départ oui. Le mouvement n’incluait pas encore la musique. Il est venu naturellement ensuite car notre culture est faite aussi de danse et de musique.

Un mouvement à l’image de l’île : pluriculturel.

Oui, je suis pour ma part d’origine indienne. Chez moi, nous sommes de quatrième génération. Pourtant, mes parents ne peuvent pas me raconter leur histoire, celle de leur peuple. Toute l’histoire des îles a été occultée car elle cache des choses terribles, très violentes. Elle est faite de grandes souffrances, de déchirements car elle s’est faite avec comme point de départ l’esclavage.
Ce sont tous ces hommes non considérés qui ont construit ces langagismes. La majorité des gens qui ont peuplé l’île sont des gens qui ont été arrachés à leur culture d’origine, à leurs propres racines. Ils n’avaient plus de culte ni même leur propre nom.

Il faut savoir que l’île n’était pas habitée auparavant. Ils sont donc repartis de zéro sur cette nouvelle terre en créant une culture propre qui avait pour base le métissage justement : noirs, indiens, asiatiques…

Oui, il y a eu tous ces apports somme toute très différents qui ont finalement créé la richesse culturelle de notre zone. Ces gens arrivants de divers endroits du globe, dans des conditions également différentes, et qui sont arrivés à créer des choses ensemble, c’est grand.
Et même si ce métissage donne du beau aujourd’hui, nous n’oublions pas de quoi il est né. C’est pour ça que quand j’entends parler du 10 mai en France, date de commémoration de l’abolition de l’esclavage, je suis d’accord. Mais il faut que notre histoire fasse dorénavant intégralement partie de l’histoire de France, qu’elle soit enseignée dans les écoles au même titre que le reste.

Vous pensez donc que trop de choses restes encore méconnues sur votre terre ?

Les gens ont encore bien du mal à situer La Réunion par rapport à la Guyane par exemple…

Pour dégrossir, vous vous situez au large des côtes sud-est africaines.

Voilà, et pour être encore plus précis, à 700 Km à l’est de l’île de Madagascar pour qui nous chercherait sur la carte.


Propos recueillis par Stéphane Burgatt novembre 2007


Liens à visiter :
www.ziskakan.re
www.myspace.com/zicaziclemission (interview en podcast)