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GNAWA DIFFUSION pdf print E-mail
Ecrit par Stephane Burgatt  
jeudi, 23 août 2007
 

"GNAWA c'est fini..."

Quinze années de carrière, trois albums studios et presque autant d'opus live. Plusieurs centaines de dates et l'heure arrivée du choix : continuer pour l'alimentaire ou prendre une route inconnue, être en adéquation avec son instinct d'artiste. Amazigh Kateb et toute sa petite famille ont fait leur choix : l'heure est arrivée de passer à d'autres choses sans pour autant partir chacun de son côté. Ce groupe, qui a su habillement dresser un pont musical entre Kingston et Bab-El-Oued a tiré sa révérence à Béziers en aout 2007. Nous y étions et voici un apperçu de ce qu'il s'est dit en coulisses.

Un adieu sans les les mouchoirs ?

Sans les mouchoirs oui car on en avait déjà parlé depuis un bon moment. Chacun a pu ainsi préparer ses projets dans son côté tranquillement. Ce n'est pas une décision précipitée. Ca fait deux ans qu'on l'a décidée. C'est un peu restrictif de travailler toujours dans un même groupe. Souvent les musiciens collaborent à d'autres projets en même temps mais moi, en étant assez central dans Gnawa Diffusion, je n'ai que très peu de temps pour moi. De mon côté j'ai un gros projet qui touche aux textes de mon père (Ndlr. Yacine Kateb, écrivain-journaliste algérien, 1929/1989), dans une approche musicale et théatrale. C'est quelque chose qui me brûle depuis un moment et j'ai besoin de m'y consacrer à 100%. Ca me tient beaucoup à coeur, ça touche à un deuil personnel...c'est l'âge adulte !

Il faut savoir tout simplement rester honnête avec vous même et les gens qui vous suivent.

A la base on a quelque chose qui n'est pas construit en plastique. On s'est construits par la scène.

C'est vrai qu'en regardant votre discographie, vous avez sorti presque autant de lives que d'albums studio.

Oui, un qui vient d'en sortir un ("fucking cowboys" - 2007) et un autre en 2002 ("Live DZ") juste après la tournée en Algérie. A cette époque nous avions eu un premier split ; qui s'est mal passé cette fois-ci. C'est pour ne pas rester sur cette image négative que nous nous sommes reformés par la suite. C'était stupide de partir par la petite porte après tous les moments que nous avions passés, les tournées à l'étranger : Jordanie, Soudan, Syrie... On a tout remonté avec l'esprit de famille qui va avec. Maintenant on se sépare mais on va continuer de se voir car on est une famille justement. En s'arrêtant maintenant, alors que tout va bien, on donne toutes les chances à Gnawa de se reformer plus tard. Le feu brule encore très fort et je ne veux pas attendre qu'il s'éteigne pour initier d'autres choses. Une vraie histoire, ça prend du temps.

Bon, à parler "vrai", tu en as eu marre !

La musique c'est un art vivant. Si tu t'installes dans un truc qui marche, tu prends inéluctablement la grosse tête. Des artistes devienennt ainsi car c'est un métier qui abime. A un moment donné, si tu ne sais pas t'extraire de ce que tu as créé, tu deviens quelque chose qui correspond à un public...mais plus à ce qui te correspond à TOI ! Du coup tu deviens schizo et tu demandes des loges peintes en rose bonbon avec des mirroirs inclinés à trente degrés pour pouvoir regarder ta calvitie.

Une chose qu'on ne pourra pas vous retirer, c'est l'esprit de famille, l'esprit de clan...

Quand tu vois certains artistes, ils te parlent de "leur" batteur, de "leur" guitariste...on dirait qu'ils les ont achetés ! C'est pas bon de tomber dans ce mode de fonctionnement qui ressemble à de la subordination. C'est le début de la connerie pour moi : quand tu commences à tirer la couverture à toi.

On va parler un peu de ces "Gnawas" que vous représentez. Qui étaient-ils ?

C'étaient des esclaves d'Afrique noirs qui sont arrivés au Maghreb. Au départ, ils servaient de milice privée aux princes et aux seigneurs d'antant. On les appelaient "gnaouis" car en Arabe, ça signifie "guinéen" ; la Guinée étant alors Le pays des noirs... Dans le cheminement de ce peuple, il y a quelque chose qui ressemble beaucoup à de l'Aïkido, tu utilise la force de ton adversaire contre lui. Les Gnaouas ont fait exactement le même chose avec la langue, la religion et la musique. Ils se sont créés une identité tellement proches des Arabes et des Africains en même temps qu'ils se sont rendus intouchables.

Le roseau qui plie mais ne se romp pas...

Tout à fait. C'est un exemple que j'extrapole à l'imigration en France. Il y a beaucoup de gens qui incarnent le gnaouisme sans le savoir...Au lieu d'être frontal avec cette société, il faut juste parler SON langage pour lui dire ce qui ne va pas.

Site : http://www.gnawa-diffusion.com/

Propos recueillis le 12/08/2007 par Stephane Burgatt

Crédit photo : Hinda Habhab