Accueil du portail Zicazic.com


Zicazic on Twitter. Zicazic on Facebook.

Flux RSS ZICAZINE

Qu'est-ce que c'est ?




Accueil

> MENU
 Accueil
 ----------------
 Chroniques CD's
 Concerts
 Interviews
 Dossiers
 ----------------

CORKY SIEGEL pdf print E-mail
Ecrit par Pierre Jobin  
jeudi, 23 août 2007
 

C’est presque par le plus grand des hasards que je me suis retrouvé en train de lire cette entrevue réalisée par notre ami Pierre Jobin pour le bulletin de la Société Blues de Montréal et instantanément le charme a agi ! Le charme de Corky Siegel bien évidemment, que j’avais eu l’occasion de côtoyer au même moment dans le cadre du FestiBlues International de Montréal mais aussi un an plus tôt lors de sa venue à Blues sur Seine, et bien entendu le charme de la plume de Pierre Jobin qui a si bien su retranscrire une histoire particulièrement intéressante … Il aurait été dommageable de priver nos lecteurs français de cette entrevue instructive au possible et c’est avec une joie réelle que nous pouvons aujourd’hui vous la proposer ! Le texte est de Pierre Jobin, les photos de Marcel Dubois, et vous pouvez vous renseigner sur les publications et les activités de la Société Blues de Montréal en vous rendant sur www.bluesmontreal.com  

...Rencontrer Corky Siegel, c’est ouvrir un autre chapitre merveilleux de l’histoire du blues. C’est une émotion intense que l’on ressent à la rencontre des grands du blues, ces enfants passionnés, ces penseurs-créateurs, ces communicateurs conviviaux, chaleureux, intenses... Ces musiciens virtuoses et raconteurs!… Ecoutez la suite de l’histoire!...

The Siegel and Schwall Band, je possédais bien une couple de vinyles du groupe, 953 West et Siegel-Schwall 70… J’avais, en outre, fait un texte sur leur récent CD Flash Forward qui marquait le retour du band avec du matériel original, pour la première fois depuis un peu plus de trente ans. Concernant Corky Siegel, j’étais pratiquement ignare, plutôt inculte, donc ouvert à la découverte, et bien loin de me douter de la petite histoire fabuleuse et incroyable que me déballerait si simplement, celui-ci.

Brian Slack, du papier que vous lisez, me dit, lors de ma visite au Festiblues de Montréal : « Voudrais-tu faire une entrevue avec Corky Siegel pour le bulletin de la Société Blues de Montréal?» L’idée me plaît, surtout que j’avais vu Corky Siegel quelques semaines auparavant, avec le Chicago Blues Reunion, au Festival d’Été de Québec, et que les légendes bien enracinées te donnent généralement de la copie et beaucoup de récits anecdotiques, comme de nouvelles pièces au grand puzzle, par définition inachevé. Après les présentations d’usage, j’y vais de ma question de départ: «M. Siegel, quand avez-vous entendu du blues pour la première fois?»

«Eh! bien je crois que j’ai vraiment commencé quand j’ai entendu Chuck Berry, Little Richard et Fats Domino. Ils étaient mes premières expériences dans le domaine, de même que tous ces artistes qui jouaient dans le contexte du Chicago des années 50, Jimmy Durante, Doc Watson… Ils jouaient de la country music, ils jouaient du dixieland, ils jouaient du gospel, du jazz, du rock n’ roll... Tous ces styles, et même Gershwin, ont des éléments de blues. J’ai entendu du blues traditionnel pour la première fois aux environs de 1964, et je suis tombé profondément en amour avec cette musique, le Blues!… Toutes les autres formes de musique que j’écoutais, venaient directement du blues ou étaient influencées par le blues. Quand j’ai entendu du blues, je me suis senti comme chez-moi! » L’artiste mentionne aussi, que rétrospectivement, l’autre élément qui l’a rapproché du blues est le fait que lorsqu’il était enfant, il avait compris qu’il vivait dans un pays libre, et que, conséquemment, toutes les personnes étaient égales. Or, quand il regardait par sa fenêtre, il voyait que des gens étaient brutalement, extrêmement maltraités, juste à cause de la couleur de leur peau. Il ajoute qu’à cette époque, tout comme lui, plusieurs autres jeunes blancs, étaient attirés, que ce soit vers le blues ou le jazz, par la culture afro-américaine, qu’il décrit comme magnifique en soi. De plus, il fait remarquer que politiquement, il avait le sentiment d’être du mauvais côté, et qu’il voulait traverser dans l’autre camp. «Je crois que cela constituait les raisons principales pour lesquelles tant de jeunes blancs étaient attirés vers le blues.», fait-il remarquer. Le bluesman raconte qu’il a commencé à jouer un peu de blues en 1965, et que, c’est à cette époque, qu’il a rencontré son partenaire, le guitariste Jim Schwall. Il précise, qu’alors, il commençait juste à apprendre un peu le piano, l’harmonica, de même que la guitare. «C’est alors que nous avons commencé à monter un répertoire ensemble, et que, la même année, nous avons décroché un engagement régulier au Pepper’s Show Lounge, même si nous n’étions encore qu’au stade de l’apprentissage. Le Pepper’s Lounge engageait un drummer et un bassiste, différents à chaque semaine, pour jouer avec nous. Nous étions alors les hôtes, le house band, de 9 heures à 2-3-4 heures du matin, pour les musiciens qui y venaient et qui étaient : Little Walter, Hound Dog Taylor, Howlin’ Wolf, Muddy Waters, et même les jeunes, tels Junior Wells, Buddy Guy, Lonnie Brooks, James Cotton. Le seul bluesman que j’aurais aimé y voir, et que je n’ai pas eu la chance de rencontrer, a été Jimmy Reed, mais tous ces musiciens étonnants, dont Willie Dixon, ils venaient au club et passaient la soirée avec nous. Ils «jammaient» avec nous. S’il y avait un harmoniciste, je jouais du piano, un pianiste, je jouais de l’harmonica. Si il y avait un harmoniciste et un pianiste, je les laissais jouer. Nous étions juste ces jeunes blancs, les deux seuls dans tout le voisinage avec tous ces maîtres du blues qui venaient et nous prenaient sous leur aile. C’était incroyable! C’est comme ça que ça a commencé pour nous!» Concernant la suite de l’histoire, il mentionne que leur premier album est paru un an plus tard, et que même avant cela :

« ...En 1966, deux événements significatifs se sont produits. Ce japonais est venu au club Big John’s, où Paul Butterfield avait joué, car il y avait des auditions pour le remplacer. Nous l’avons emporté, et puis, ce japonais a pris l’habitude de venir soir après soir… Un soir, il m’a dit, «Votre band devrait jammer avec mon band!». Son band était l’Orchestre Symphonique de Chicago, et son nom était Seiji Ozawa, le chef d’orchestre!!... C’est de cette façon que je suis entré dans le monde symphonique. Et puis, durant cette même période, Ahmet Ertegun (Fondateur d’Atlantic Records, New York), d’une part, et Sam Charters, (Réalisateur pour Vanguard Records) d’autre part, sont venus au club, pour essayer de nous faire signer un contrat d’enregistrement. Sam Charters a dit à Ahmet Ertegun que nous étions déjà sous contrat... Nous avons fini, en définitive, par nous retrouver sur Vanguard Records, c’était en 1966. Tous ces événements se sont déroulés très rapidement!... En 1968, il y a eu notre première performance avec l’Orchestre symphonique de Chicago! C’est comme ça que ça s’est passé et ça a marqué le reste de ma vie.»

Si ce récit était un conte de fées, je le conclurais en vous disant que le p’tit Siegel aux «bottes liégées» de sept lieues devint un musicien prolifique, avec l’aide de son pote Schwall, de ses copains bluesmen et de l’inspiration du visionnaire magicien-musicien Ozawa; je vous mentionnerais, qu’il franchit allègrement l’océan de turbulences qui séparait les univers du blues et du classique, ravivant ainsi moult espoirs d’harmonies. Comme c’est une histoire de bluesman, et de dynamiques variations de la musique, je pourrais dire, ma foi, qu’après quarante ans dans le domaine, il continue de faire de son mieux, pour, qu’à partir de la tristesse, s’épanouissent des blues joyeux! joyeux! joyeux!… En fait, comme il me le mentionne lui-même, le blues se veut, pour lui, une musique très joyeuse! Citant, il ne sait plus trop bien, qui, de BB King ou de son ami et batteur, Sam Lay, il lance ces paroles à propos du blues, en guise de conclusion : «Hey ! Si c’est si triste, comment se fait-il que tout le monde danse ?» (Rires)

Merci beaucoup, monsieur Siegel pour cette ouverture dans cette histoire incroyable and «on the move»!

*Pour en savoir plus, rendez-vous au www.corkysiegel.com

*Et n'hésitez pas à adresser vos commentaires sur cet article à Pierre Jobin, son auteur

English Version

Meeting Corky Siegel is opening another amazing chapter of blues history. It is the intense emotion that you feel when you come face to face with blues giants – passionate children, creative thinkers, congenial communicators, warm, intense... master musicians and story-tellers! Listen to the rest of the story!

The Siegel and Schwall Band, I did own a few vinyl albums of that band, 953 West and Siegel-Schwall 70… I had also written a piece about their recent CD Flash Forward, which marked the band’s return to original material for the first time in over 30 years. As for Corky Siegel himself, I was practically ignorant, or rather uneducated about the man, and therefore open to discovery, and completely unsuspecting of the fabulous, incredible story that he would convey to me so simply.

Brian Slack, of the paper you are reading, told me during my visit at Montreal’s Festiblues: “Would you like to interview Corky Siegel for the Montreal Blues Society’s newsletter?” I liked the idea, especially since I had seen Siegel perform a few weeks earlier with the Chicago Blues Reunion at the Festival d’Été in Québec City, and knowing that well established legends usually give you lots of material and anecdotes, like new pieces to add to the big, unfinished puzzle. Following the introductions, I fire off my fist question: “Mr. Siegel, when did you first hear the blues?”

“Well, I think, I started really hearing it, you know when I heard Chuck Berry and Little Richard and Fats Domino, they were my first, but even a lot of the artists that they played on the radio, in the fifties in Chicago, like Jimmy Durante and Doc Watson, you know, they played country music, they played dixieland, they played gospel, they played jazz, they played rock n’ roll, you know all those had little elements, even Gershwin had little elements of blues. But, I heard some traditional blues, for the first time, probably in 1964-65, 64, I’d say, and deeply fell in love. The Blues!... You know, I heard all these other forms that were influenced by the blues or came right out of the blues. When I heard the blues, it felt home!” Siegel also mentioned that looking back, the other thing that drew him to the blues was the fact that as a child, he understood that he lived in a free country and that as a result, all people were equal. Yet, when he looked out his window, he could see that people were being brutally and extremely mistreated, based only on the colour of their skin. He added that back then, like him, many white kids were drawn to the African American culture – whether blues or jazz – which he describes as magnificent in and of itself. He also pointed out that politically, he felt like he was on the wrong side and wanted to cross over. “I think it had a lot to do why there were so many whites kids that were drawn to the blues.” The bluesman told me he began playing the blues a little in 1965, and that’s when he met his partner, guitarist Jim Schwall. He explained that he was just beginning to learn to play the piano, the harmonica and even the guitar. “So we start working together to put a repertoire, and the same year, 1965, we got a gig even though we were just learning to play, in Pepper’s Show Lounge. And they hired a bass player and a drummer for us, a different one every week and we were the hosts, the house band from 9 at night to 2 or 3 or 4 in the morning for people that would come to sit in. People that came to sit in was Little Walter, Hound Dog Taylor, Howlin’ Wolf, Muddy Waters, even the young guys like Junior Wells, Buddy Guy, Lonnie Brooks, James Cotton…Ha!... The only one that I remember that I’d loved and that I never met was Jimmy Reed, but all these amazing players, Willie Dixon, they were comin’, sittin’ with us, all night!... They jammed with us! That was it! If there was an harmonica player, I’d play the piano, if there’s a piano player I’d play the harmonica. If there was a piano and harmonica player, I let them play! You know, but it was like that kind of thing and we were just these young white kids, the only two in the whole neighbourhood with all those blues masters comin’ in and taking us under their wing. It was unbelievable! So we get started!” Regarding the rest of the story, he mentioned that their first album came a year later, and that even before that happened:

“In 1966 that two things happened. One, this Japanese fellow, he used to come in to the club called Big John’s where Paul Butterfield did play, and we took his place. There were auditions and we got the audition. So, he used to come night after night, after night, after night. And ah!... one night he said ‘Would your band jam with my band?’ His band was the Chicago Symphony, he was Seiji Ozawa, conductor. So that’s how I got into the classical thing. And, then, right around the same time, is when Ahmet Ertegun and Sam Charter came into the club to try sign us. Sam told Ahmet Ertegun we were already signed, so we didn’t know that, but we ended up getting a Vanguard Records… That was 1966, so that’s how fast it happens! In 1968, was our first performance with the Chicago Symphony and that was it! That sort of marked the rest of my life.”

If this story reads like a fairytale, I would end it by saying that the little Siegel with his “corky” seven-league boots became a prolific musician with the help of his buddy Schwall, his bluesmen friends and the inspiration of the visionary musical wizard Ozawa; I would mention that he effortlessly spans the turbulent ocean that divides the blues and classical worlds, thereby reviving hopes of harmony between the two. Since this is the story of a bluesman and his exciting takes on the music, you could indeed say that after 40 years in this field, he continues to create, from sadness, some happy and joyful blues music! In fact, he said that to him, blues is very happy music! Quoting either BB King or his friend, the drummer Sam Lay – he wasn’t sure which of the two – he ends with these words about blues music: “Hey! if it was so sad, how come everyone’s dancin’?” (Laughs)

Thank you, Mr. Siegel for this glimpse into an incredible and “on the move” story!

*To know more, go to www.corkysiegel.com

*Send you comments at Pierre Jobin, the author