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BAY CAR BLUES FESTIVAL pdf print E-mail
Ecrit par Fred Delforge  
lundi, 01 mai 2006
 

BAY CAR BLUES FESTIVAL (7ème édition)
GRANDE SYNTHE (59)
28, 29 et 30 AVRIL 2006


Rendez-vous incontournable des musiques bleues en France, le Bay Car Blues Festival a réussi une fois de plus le tour de force de rassembler la quasi-totalité de la communauté blues pour quelques jours dans l’extrémité nord de l’hexagone … Commencé il y a quelques jours avec ses traditionnelles chapelles, des concerts donnés chez les particuliers dans la plus pure tradition des Rent House Party d’antan, ce nouveau cru prenait ce soir ses quartiers sous un immense chapiteau planté en plein centre du vélodrome de Grande Synthe. Et comme c’est une tradition dans la région, la bonne humeur, la convivialité et la bière allaient venir agrémenter quelques journées bien chargées …

Vendredi 28 avril : Alex Schultz & Tad Robinson – Sharrie Williams & Robin Rogers

Alex Schultz est un de ces grands guitaristes qui n’ont pas froid aux yeux et qui déposent en toute simplicité de gros morceaux de bonheur dans les salles où ils se produisent. Parti en instrumental pour quelques morceaux très grisants, ce quatuor atypique où la guitare du maître n’est pas soutenue par une basse mais par un orgue Hammond, un saxo et une batterie va très vite réussir à bluffer un parterre d’aficionados mais aussi et surtout toute une meute de spectateurs anonymes pas spécialement avertis. Rejoint ponctuellement par le génial chanteur new-yorkais Tad Robinson, Schultz va nous servir un cocktail de quatre-vingt dix minutes où se mélangent une voix très noire qui pioche entre blues, rhythm’n’blues et gospel et un jeu technique et succulent qui donnera des sueurs froides aux nombreux musiciens présents sous le chapiteau. Pourtant armés d’une solide discographie l’un et l’autre, Alex Schultz et Tad Robinson nous serviront quand même un titre inédit, « Long Way Home », avant de se laisser glisser dans leurs propres répertoires mais aussi dans leurs œuvres communes avec « Welcome Home » pour en arriver à un « I Got Trouble » d’une rare intensité en fin de set. Le ton est donné, cette soirée sera chaude malgré le froid polaire qui règne dehors …

Honneur suprême pour Bay Car, c’est ici que Sharrie Williams a choisi d’enregistrer son futur DVD et si le set va un peu s’en ressentir à cause d’un stress bien naturel et d’une équipe technique omniprésente, le talent sera comme à chaque fois au rendez-vous grâce notamment à une équipe de tueurs, ses Wiseguys, et notamment aux deux géniaux instrumentistes Lars Kutschke à la guitare et Pietro Taucher aux claviers. Entrée sur le second morceau, la fabuleuse chanteuse va très vite prendre l’ensemble du chapiteau dans le creux de sa main et lui donner la becquée, lui offrant autant de jazz et de blues que de gospel et le faisant vibrer de sa belle voix d’alto. Rejoints à plusieurs reprises par la chanteuse Robin Rogers, Sharrie et les Wiseguys vont s’offrir une prestation diversifiée et passionnante où l’on retrouve les influences country mais aussi celles des chanteuses comme Janis Joplin, Aretha Franklin et Gladys Knight dont Robin est friande. Munies chacune d’un coffre très personnel mais complémentaire, les deux chanteuses ne manqueront pas de marquer la soirée d’une empreinte indélébile et c’est avec les habituels « Just You And Me », le tonitruant « Hard Drivin’ Woman » et le génial « Traveling » qu’elles se feront remarquer le plus, Sharrie faisant une incursion dans le public sur le premier et offrant quelques pas de danse à ses musiciens mais aussi au photographe Gérard De Castro sur le dernier. La salle n’échappera pas à la traditionnelle larme d’une artiste qui fête ses dix ans sans drogues avant de se voir gratifiée d’un rappel d’anthologie regroupant Alex Schultz, Tad Robinson, Robin Rogers, Sharrie Williams et leurs musiciens sur un colossal « Amazing Grace » dont les notes résonneront jusque tard dans la nuit …

La fatigue des jours précédents et de la route se faisant sentir, nous déclinons l’invitation à la traditionnelle jam session qui réunit pourtant ce soir Peter Nathanson, JB Boogie, Mr Tchang, Rosebud Blue Sauce, Blues And Trouble, Fred Chapellier …

Samedi 29 avril : Mercy Blues Band – Fred Chapellier – Rhythm Room All Stars & Big Pete Pearson

Ne se contentant pas de les programmer dans le cadre du soutien qui leur a été décidé en commun au sein du CLB, le Bay Car Blues Festival a choisi de mettre Mercy Blues Band dans des conditions exceptionnelles en le retenant dans sa formule en septet, c'est-à-dire avec deux batteurs et deux choristes qui complètent la section classique conduite par Jean-Paul Avellaneda. C’est donc un show vif et rythmé qui attend un public séduit non seulement par la vision des deux demoiselles qui se trémoussent sur scène mais aussi et surtout par une musique décapante à souhait qui rappelle parfois les Blues Brothers, peut être en raison de la présence du saxo et des chœurs. Ne laissant jamais aucun temps mort entre les morceaux, Mercy s’appuie sur la complicité de ses deux batteurs, le maître (Franck Marco) et l’élève (Stéphane Avellaneda), sur leur complicité avec la basse de Bruno Quinonero et sur tout le talent de Jean-Paul qui ne manque jamais de placer un bon mot derrière de beaux riffs et qui, un fois de plus, est en grande forme ce soir. On traverse ensemble la set liste traditionnelle du groupe avec son détour obligé par l’acoustique sur le génial « Can’t talk to daddy » et  Mercy nous offre même une surprise de taille en invitant Robin Rogers à partager la scène avec le groupe pour un ultime morceau qui verra les batteurs s’échanger leurs instruments en plein milieu d’un break avant de se lancer dans un final … à n’en plus finir ! Epoustouflant de classe et de vigueur, Mercy Blues Band a fait comprendre ce soir pourquoi sa musique était appréciée des deux côtés de l’Atlantique et bien plus loin encore.

Seconde recrue du CLB, Fred Chapellier va lui aussi mettre ce soir les petits plats dans les grands en s’offrant son lot d’invités mais également en mettant la salle à feu et à sang à grands coups de guitare comme lui seul sait le faire ! Si ses textes en Français sont un plus indiscutable pour séduire le public, c’est tout chez Fred qui donne à se réjouir dès lors que ce grand bonhomme monte sur une scène. Une manière charmeuse de se promener entre ses musiciens et d’être très mobile au milieu d’un groupe statique, un jeu qui le transperce et qui lui tire des rictus adaptés à chacune de ses notes et un toucher de frettes à faire pleurer les plus grands guitar heroes vont conduire une fois de plus l’artiste à tout donner dans un set où l’on retrouve « Y’en a marre » ou « Le Blues du petit déjeuner » sur lequel Lorenzo Sanchez place un solo avant que Fred ne fasse miauler sa guitare, mais où la surprise arrive en même temps que Nina Van Horn venue rejoindre celui qu’elle a elle-même invité sur son album à paraître en septembre à placer ses riffs sur un titre. En trois titres parmi lesquels on retrouve « Goodbye New Orleans » qu’elle avait composé en hommage aux sinistrés après le passage de Katrina, Nina parviendra à inverser le cours du temps et à retourner un set qui gagne encore en intérêt grâce à sa voix croustillante et à ses interventions pertinentes entre les morceaux. Retournée backstage, Nina se verra remplacée par Miguel M qui vient rejoindre ses vieux potes pour un titre d’une rare intensité avant que le show ne nous offre un final magistral avec « Le Blues » et surtout avec « Merci Mr Roy » qui verra Fred s’enfoncer sous le chapiteau au point de s’éloigner jusqu’à ce que son système HF commence à décrocher ! Séduit, le public fait trembler le sol et acclame littéralement celui qui nous aura offert en cette froide soirée un moment d’une rare chaleur ! Merci Mister Fred …

Il est minuit quand le Rhythm Room All Stars prend place sur la scène pour se lancer dans un set qui démarre en instrumental avant de très vite laisser à Chris James le soin d’allier la voix à la guitare et de tisser une trame musicale de cinq titres, dont un clin d’œil à Muddy Waters avec « Hoochie Coochie Men », qui ne sont qu’autant de friandises avant que l’imposant Big Pete Pearson ne vienne prendre son poste légitime de frontman pour nous servir avec brio un gros Chicago blues de très bonne facture. Soutenu par un groupe de haut vol dans lequel on retrouve l’harmonica magique de Bob Corritore mais aussi la batterie de Brian Fahey, Big Pete Pearson va mettre en évidence tout le savoir qu’il a acquis en accompagnant sur scène des gens comme Ray Charles, Muddy Waters, BB King ou John Lee Hooker dont il a tenu la basse pendant des années. Adaptant les standards au gré de son humeur, le grand homme du blues nous gratifiera lui aussi d’une promenade fort appréciée dans le public et nous permettra de nous régaler du son chaud des deux Les Paul des artificiers Johnny Rap et Chris James tout au long d’un set à la cadence soutenue et au charme communicatif. Acclamé par tout le chapiteau, le Rhythm Room All Stars reviendra même à deux reprises pour des rappels où l’on retrouvera un imposant « Mojo Working » servi avec tout le talent et la classe d’un groupe atypique où se mélangent l’expérience d’un vieux routier de la scène internationale le la fraîcheur de quelques-uns des plus brillants jeunes musiciens américains ! Du grand art …

Dimanche 30 avril : Charles Pasi – The Electric Kings – Shemekia Copeland

Multiple gagnant du dernier Tremplin Blues sur Seine, Charles Pasi signe ce soir sa première participation à un des grands festivals français et c’est avec la gorge un peu serrée que le jeune Gavroche et son groupe de tueurs vont débuter un set qui va littéralement mettre le feu au chapiteau en se partageant entre acoustique et électrique. En multipliant les cassures et les changements de rythmes, les Parisiens parviennent à créer la surprise à chaque instant, réussissant même à donner du piment à leur musique en jouant de façon plus vive et énergique en acoustique que quand la Strat d’Antoine Holler est de sortie ! Bien structuré, le show du quartet se concentre sur le jeu d’harmonica très subtil de Charles mais aussi sur sa voix accrocheuse et fait plaisir à voir, s’adjoignant au passage un allié de luxe, le public, qui vibre comme un seul homme à la découverte de morceaux comme « She’s » ou l’épatant « If I Move » mais aussi de la surprenante adaptation de « Hit The Road Jack ». Une brève incursion dans le public sur « Talkin’ With My Friend » permettra de montrer de plus près aux spectateurs que le métier est en train de rentrer et sera surtout un des déclencheurs de l’unique standing ovation du week-end, amplement méritée compte tenu de la place d’outsider des jeunes gens et de la qualité de leur prestation ! Vous avez dit meilleur concert de ce 7ème Bay Car ? C’est bien possible …

Présentés par Dom et Marie de Groovy Gravy, les Electric Kings entrent en scène un peu après 22 heures pour nous servir ce soir un show étrange qui va tourner pratiquement autour du même riff pendant près de quatre-vingt dix minutes, séduisant une partie de l’assistance tout en lassant quelque peu l’autre … Rien à redire pourtant d’une prestation où les guitares des excellents Marc T et Luke Alexander ont donné du grain à moudre à un Big Dave quelque peu embrumé, le tout soutenu par la frappe monstrueuse de Willie Maze et une basse non moins impressionnante. Régulièrement accompagné de sa talk box, Marc T va plonger le set dans une atmosphère très proche du dub tandis que Luke Alexander multipliera ses démonstrations de Cry Baby sans pour autant remporter une adhésion sans réserves de la part d’un chapiteau qui s’endort un peu par moments. Desservis qui plus est par un son brouillon, The Electric Kings se limiteront pratiquement à un répertoire constitué de reprises et ne sortiront de leur léthargie ambiante que sur le solo de batterie et sur un final beaucoup plus lourd inspiré de manière plutôt surprenante de l’œuvre de Black Sabbath. Un show techniquement parfait auquel il manquait juste la petite étincelle pour mettre le feu aux amplis …

Accompagnée d’Arthur Neilson à la guitare, Shemekia Copeland va se charger ce soir de clôturer un festival qui aura répondu à toutes les attentes du public par la qualité de sa programmation. Partagée entre Chicago blues, soul, country, gospel et même rock, la fille du  regretté guitariste Johnny Copeland nous fait aujourd’hui un grand tour d’horizon de l’étendue de sa voix que l’on compare souvent à celle d’Etta James. Bourré d’énergie, le show attire autant l’œil que l’oreille et séduit par des plans éprouvés mais toujours aussi efficaces. Remisant de temps à autres sa traditionnelle Flying V pour se mettre en slide à la Stratocaster, Arthur Neilson ne rate pas une occasion de placer un solo ou de mettre des watts dès que l’occasion se présente, jouant de sa complicité avec la jeune chanteuse pour donner encore plus de richesse à une prestation déjà très consistante. De « Living On Love » à « When A Woman Had Enough » en passant par l’excellent « Who Stole My Radio », Shemekia Copeland nous conduira jusqu’à un final très rock’n’roll qui part comme une fusée comme pour mieux contraster avec la vieille Ford T qui servait de visuel au festival cette année. Un unique rappel explosif en forme de « Let The Good Time Roll » bourré de vitamines et il est temps de libérer la scène qui reprendra dans les jours à venir son statut de vélodrome … Bay Car est mort, vive Bay Car !

Encore un passage backstage pour saluer non seulement les artistes mais aussi les amis et surtout le staff du Bay Car Blues Festival parmi lesquels on ne citera que Franck Orts et Stéphane Bak sans pour autant oublier la longue liste des bénévoles et anonymes sans lesquels ce genre d’évènements n’existeraient pas et il est temps de regagner la ferme voisine pour goûter à une dernière nuit brève mais réparatrice dans le Nord avant de rejoindre la base … Plus qu’un festival de blues, Bay Car est un festival d’amis, de passion, d’humour et de joie de vivre, un de ceux comme on ne sait les faire qu’à Grande Synthe ! On y reviendra, c’est certain …

Fred Delforge – avril 2006   

  
Le site officiel du festival : http://www.bay-car.com