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BRISA ROCHE pdf print E-mail
Ecrit par Pierre Derensy  
samedi, 31 décembre 2005
 

Brisa Roché a comme les chats :  7 vies dans sa fourrure, un sourire et des yeux que l’on pourrait qualifier de  félin mais par contre son miaulement et ses feulements se rapportent plus aux grandes chanteuses américaines qu’aux félidés . Cet animal de compagnie vient donc planter avec « The Chase » ses griffes acérées dans nos cœurs. Signée chez Blue-Note au temps de ses reprises jazzy dans les bars parisiens,  pour prendre tout le monde par surprise, elle se décide a enregistrer un album résolument rock.

A la base du concept, des images cinématographiques et une guitare « Destroyer » qui déchire tout le papier peint sur son passage. « Airplane » premier titre du disque, rugit de riff de guitares coléreuses  et la voix pure haut perchée de Brisa passe au dessus du mur du son. Comme il n’est jamais bon de faire la même chose éternellement, dès « Mystery Man » c’est le violon et la chanson douce qui emporte tout notre scepticisme à voir débarquer un énième clone de Pink-Martini ou de Shivaree. La Roché est donc bien unique. La lady day princière rugit les flammes de l’enfer et souffle un air froid et divin,  tour à tour, pour calmer la tempête qui gronde dans nos têtes de piafs. On parle voyage dans ses chansons, elle évoque timidement, entre les barreaux d’une cage qu’elle n’a jamais fréquentée, tout ce qu’elle doit à son père et à sa vie de bourlingueuse. Toutes ces ambiances qui se mêlent dans la pelote qu’elle délie consciencieusement. Il y a donc, forcement, beaucoup  d’amour aussi dans ce disque.  Bref, elle nous gobe d’un coup d’un seul, c’est la victoire du Gros Minet sur les Titis aux plumes légères. Que ce soit sur « Billionaire » ou dans l’électrique « Dial Me Up » ainsi que sur les autres pistes (19 au total) elle charme l’auditeur et ce n’est pas la présence d’une tripoté de guest (Vincent Martel, Erik Truffaz, etc…) qui n’aiguiseront pas notre appétit de la voir bientôt sur scène. Même une reprise  d’Adamo « Dans le Vert de ses Yeux » trouve grâce. Parfait.

Brisa Roché est une jeune femme qui a tout pour elle. Intelligente, jolie, un univers peuplé de mille démons passés et de séraphins angéliques penchés sur son avenir, un début de carrière en jazz cabaret qui tourne avec son premier album à un moment festif pop-rock, un accent anglo-saxon charmant sur un français maîtrisé de main de maîtresse femme et enfin des tubes à foisons signés sur le label Blue Note qui permettront de chérir à nouveau l’Amérique et les américaines.

A la première écoute de  votre disque je suis tombé amoureux de « The Chase » car il est totalement décalé dans la production musicale actuelle, est ce que vous croyiez que je puisse encore faire  une interview déontologique ?
Brisa Roché :
« J’espère que vous ne serez pas neutre et que mon intervieweur est éprise de ma musique !»

Peux tu  me dire qui était Brisa Roché avant « The Chase » ?
Brisa Roché :
«Je suis toujours la même personne que ce soit avant ou après le disque. La chose qui a changé en moi et qui est très personnelle c’est que j’ai toujours vécu dans un univers underground, très hors-société avec un passé d’aventurière qu’on pourrait qualifier d’extrême alors que dorénavant j’ai réussi, enfin j’espère, à devenir une jeune fille sage avec une sécurité sur mon existence.»

Avais tu  le complexe de Janus ?
Brisa Roché :
«Disons qu’avec ce disque les deux parties de moi-mêmes se réunissent et ne sont plus en conflit. J'ai TOUJOURS été à la fois cette fille sage/sérieuse et cette fille qui devait constamment prouver sa force rock n roll. The Chase legitimise cette mélange en moi, et unifit les deux cotés.»

Avant de rentrer en studio, avais tu déjà envie de donner cette  ambiance cinématographique qui parcoure ton album ?
Brisa Roché :
«Encore une fois il faut comprendre le double sens sur ce qualificatif. D’un côté les BO des années 60 mais aussi des sons et des textes très visuels, très imagés. Je voulais monter dans une voiture des années 60 qui roulait vite, cheveux aux vents avec la mer sur le bord de la route. Il fallait absolument fixer ce véhicule dans un mouvement pour montrer que soit on était poursuivit par quelqu’un ou quelque chose.»

D’où ces «Intermissions » ?
Brisa Roché :
«Ce sont des petits moments pour garder l’auditeur attentif, qu’il ne s’ennuie pas et reste accroché jusqu’à l’arrivée. Je devais réussir à faire rentrer la personne dans une salle de cinéma pour le faire sortir sous le soleil.»

Qu’est ce qu’a pensé ta maison de disque  quand ils ont entendu ta maquette ?
Brisa Roché : 
«Mon contrat d’artiste avec Blue Note portait sur le fait que je reprenais des standards de jazz, mais ils m’ont laissé l’entière responsabilité sur ce que je voulais sortir. J’étais tellement dans la survie avec le jazz que je ne connaissais pas le luxe de la créativité. Quand ils m’ont demandé ce que je voulais faire il fallait trouver aussitôt quelque chose de brillant (rire). Je voulais pas arriver en déclarant ‘je ne sais pas, je n’ai pas d’idées sur la question’ donc j’ai improvisé et j’ai trouvé que de dire ‘mystérieux, généreux, super-héroïque, intimiste, féminin, grandiose et rock n’roll’ pour former la vertèbre du projet.»

Dans «Mystery Man» on ressent toute l’influence du Velvet Underground ou de Can ?
Brisa Roché :
«C’est vrai ? (rire) whaou j’en suis très fière ! Je n’ai malheureusement pas eu le temps de pousser cette envie jusqu’au bout car nous étions pris par le temps. J’ai essayé de mettre sur mon disque toutes ces petites idées mélodiques, ces recherches foisonnantes : par exemple la batterie dans le grave et pas dans l’aigu, tout ce qui faisait le son mythique de ces groupes.»

Tu reprends  aussi une chanson d’Adamo, c’est ton passage en France et le fait de jouer dans le métro qui t’a fait connaître ce chanteur ?
Brisa Roché :
«J’ignorais qui était Adamo. J’ai senti que vivant en France les gens de ma maison de disques allaient me demander de fredonner en français. Je ne voulais pas qu’ils arrivent et m’imposent leurs choix. Ils me donnaient en exemple ‘Je Ne Veux Pas Travailler’ de Pink-Martini pour faire des chansons jazzy-coquines, mais ces chansons ne m’allaient pas du tout… Je n’avais pas un sou pour aller m’acheter des disques dans les magasins et chercher des chansons, par contre un jour j’ai acheté un 40 45 tours pour 2 euros, je m’étais dit que j’allais trouver quelques  trucs bien là dedans mais après avoir tout écouté et essentiellement des choses très drôles avec des pochettes que tu ne peux même pas imaginer tellement elles étaient kitch je suis tombé sur une face B de ‘Vous Permettez Monsieur’.»

J’aime aussi dans ton disque c’est que « Billionaire » soit collé à « Dial Me Up » pour ensuite partir sur un « Warned », ta track-list a t’elle était difficile à faire, vu le panel de musique que tu déploies ?
Brisa Roché :
« J’aimais cette idée de contraintes avec les chansons phares au début pour attirer l’auditeur comme ‘Mystery Man’ ou ‘Billionaire’, après ça il me fallait un morceau en français dans les 5 premiers titres, ensuite j’avais la possibilité de faire mon puzzle comme je l’entendais. J’ai voulu, sans choquer l’oreille, mélanger des morceaux up et des berceuses. J’ai changé encore quelque chose depuis que tu as reçu l’album destiné à la presse, j’ai mis le dernier ‘Intermission’ en ghost-track afin de garder l’intensité dans la deuxième partie du disque.»

Es tu une grande angoissée Brisa ?
Brisa Roché :
«Non… je suis très concentrée, perfectionniste… je suis obsédée par la chose que j’accomplis sur le moment. Je ne pense pas à ce qui pourrait arriver dans le futur, je suis juste très affairée sur le présent.»

Pour toi,  qu’est ce qui fait la différence entre le côté feutré du jazz et l’électricité du rock?
Brisa Roché :
«Franchement pour moi quand je chantais les balades de jazz je les vivais aussi volcaniquement que ceux qui sont sur ce disque. Tu as un grand espoir fulgurant dans le jazz, une tristesse intense qui font que l’un et l’autre ont la même puissance.»

Tu permets  grâce à « The Chase » de faire cohabiter des musiciens qui viennent d’univers différents, est ce que cela a été difficile de croiser Erik Truffaz et Sébastien Martel par exemple ?
Brisa Roché :
«Pas du tout. Ce sont des musiciens professionnels qui travaillent sur plein de projets, ils se mettent au diapason du projet auquel ils participent.» 

Dans le disque on n’entend pas de programmation alors que tu as chanté sur des albums  éléctro et que tu aimes cette musique?
Brisa Roché :
« Dans « The Chase » il n’y en a pas. Juste une boucle que je te laisse trouver.»

Tu avais besoin de cette spontanéité organique ?
Brisa Roché :
«On avait décidé de tout jouer live avec de vrais instruments. Cela m’aurait enlevé de l’énergie si je n’avais pas eu cette création qui découle des prises directes. Je m’étais habituée à ça en faisant du jazz : travailler sur le moment présent. Si j’avais dû enregistrer une guitare sur une piste, puis la batterie et la basse ensuite, je pense que j’aurais été malheureuse.» 

Ta voix  me rappelle les chansons de Noël et les cigarettes de Betty Boop ?
Brisa Roché :
« (rire) »

Dois tu ton amour du chant aux cours payés par ta maman dès tes2 ans ?
Brisa Roché :
«Cela m’a appris la joie physique de chanter, cela m’a appris comment bien respirer, cela m’a appris à connaître ma voix et ça c’est déjà énorme. Après je me suis fixé des buts par rapport à ma voix que j’ai travaillée en copiant des genres, en poussant les notes… ma voix est plus puissante que celle que tu entends sur l’album. Je voulais chanter sans y mettre des vocalises en la laissant la plus naturelle possible. En jouant beaucoup dans les clubs je me suis rendu compte qu’il fallait que je mette plus de sable et de douceur…»

Comment appréhendes tu tes prochains concerts ?
Brisa Roché :
« J’ai hâte. La scène me manque. C’est bizarre car avant j’organisais tout ça moi même alors que maintenant avant de pouvoir jouer il faut régler plein de choses. Cela devient très compliqué même si je l’accepte c’est frustrant. Je souhaite retrouver un public et ma liberté sur scène.»

As tu  toujours l’intention de créer tes robes pour monter sur scène ?
Brisa Roché :
« Oui ! je vais adapter ça à mon nouveau répertoire !»

Pierre DERENSY