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BOUGY BLUES FESTIVAL pdf print E-mail
Ecrit par Fred Delforge  
lundi, 30 août 2004
 

BOUGY BLUES FESTIVAL

 

Bougy est un petit village des environs de Caen, un de ces nouveaux bastions du blues qui s'offre le luxe d'organiser un festival annuel ... Bien entendu, ce n'est ni Cahors, ni Cognac, ni même Blues-sur-Seine. Le Bougy Blues Festival, c'est juste un petit festival de province sans prétention qui parvient à réunir une affiche alléchante et à faire venir des amateurs d'un peu partout. Ce n'est donc une surprise pour personne d'y retrouver les habitués des grandes manifestations nationales et internationales ...  

Vendredi 27 août 2004 - Thierry Anquetil Blues Band / Boney Fields & The Bone's Project

C'est le Thierry Anquetil Blues Band qui se charge d'ouvrir cette troisième édition du Bougy Blues Festival … Si la formation est, sur le papier, annoncée en tant que groupe local, personne ne s'attend à voir un blues band de second ordre tant l'aura de Thierry Anquetil est importante bien au-delà des limites de la Normandie.

Fortement influencé par des artistes comme Otis Rush ou Freddie King, le quartet entame son show au son de " Aint Enough Comin In " et ne manque pas de poursuivre un certain temps l'hommage rendu ces deux légendes. S'appuyant sur une rythmique impeccable, la voix mais surtout la guitare du Normand ravissent les spectateurs venus en nombre conséquent. Les claviers de Benoît Delente sont malheureusement mis un peu trop en retrait et il est difficile de profiter normalement de la doublette orgue Hammond XB-1 / Rolland RD-700 du jeune musicien.

Victime de problèmes de son indignes de son talent, Anquetil ne va pas tarder à lancer une échappée gagnante pendant laquelle on reconnaîtra les standards de ses maîtres avec, entre autres, les excellents " Sweet Little Angel " de B.B. King, " I Got A Woman " de Ray Charles ou " Across The River " de Freddie King.

Thierry Anquetil et son Blues Band savent également composer et ils ne manquent pas de nous faire profiter de leur talent en nous servant un " Dead Time " maison qui ne fait pas pâle figure aux côtés des hymnes du Chicago Blues et qui laisse préfigurer quelques belles pièces pour ce qui deviendra peut-être un jour le Calvados Blues …

Entre des soli individuels, dont une très impressionnante démonstration de batterie, et quelques facéties d'un Thierry qui joue de la guitare derrière sa tête et en fait tomber son micro, il sera bientôt temps d'user quelques " Boogie Man " et autres " Make Love To You " avant de voir se terminer cette heure et demie de bon blues comme on l'aime.

Faut il encore présenter Boney Fields ? Toujours un pied en dehors des limites du blues, Boney se plait à visiter le rhythm'n'blues mais aussi le funk, le jazz et pourquoi pas le reggae pour nous en mettre plein les yeux et plein les oreilles !

Fidèle à sa tradition, il ne manquera pas ce soir d'insuffler un peu d'énergie à une salle qui commence à sentir peser le poids d'une journée de travail. Showman émérite, Boney Fields fait résonner sa trompette sur des arrangements particulièrement bien pensés et fait le spectacle avec une section de cuivres omniprésente composée de l'incontournable Nadège au sax et d'Olivier au trombone. Derrière eux, on remarque un petit génie de la six cordes, sorte de croisement de Jimi Hendrix et de Kéziah Jones, qui ne va pas tarder à se lâcher et à répondre aux invectives du boss en faisant tour à tour pleurer, gémir, grincer et hurler sa guitare.

On visite en rythme les morceaux de " Red Wolf ", l'album de Boney sorti il y a moins d'un an, mais aussi quelques classiques tels que " Got My Mojo Working " et des titres plus surprenants comme " Sex Machine " du grand James Brown … Passé maître dans l'art du funky blues, le trompettiste dreadlocké est également un chanteur hors pair et ne manque pas de nous régaler de sa voix rocailleuse et de ses effets spéciaux au résultat immédiat. S'amusant avec son public, il ne manquera pas de lui poser quelques pièges avec notamment une longue litanie de questions sur les goûts de chacun concernant le blues, le funk, la soul, le hip hop, la techno et enfin le sexe.

Après un " Let The Good Time Roll " découpé à la serpe par de multiples interventions en tout genre et quelques autres morceaux de bravoure, The Bone's Project se lancera dans une démonstration très hendrixienne qui verra chacun partir pour laisser de l'espace au guitariste puis revenir tour à tour pour l'accompagner dans son voyage au bout de la musique. Si l'expérience ne manque pas de charme, elle a quand même l'inconvénient de durer assez longtemps et de risquer, à la longue, de lasser quelque peu le profane.

Encore un solo personnel pendant lequel le bassiste laisse transparaître ses origines mauriciennes et un dernier " What Did I Do " sur lequel le guitariste fait de la slide avec une baguette de batterie et il est temps pour Boney Fields et son Bone's Project de nous quitter une première fois avant de revenir pour un final qui laissera une place importante à Bob Marley … Il y a deux heures et demie que le plus parisien des bluesmen de Chicago est sur scène mais son énergie est restée intacte ! Alors, Boney Fields, blues ou pas blues ? Assurément blues !

Les plus courageux partent vers La Grange pour un after et un bœuf … Il est deux heures du matin, la nuit va être longue !

Samedi 28 août 2004 : Stringers In The Night

C'est un concert en plein air qui nous est proposé en ce milieu d'après-midi et par chance les cieux sont cléments et le soleil nous irradie de ses rayons bienvenus. Le décor est planté dans une remorque de camion garée au milieu du stade municipal, l'ambiance est champêtre et entre stands de chamboule tout, baptêmes de poney et de Harley Davidson, maquillage et tatouages au henné, le public a tout le loisir de s'occuper en attendant Stringers In The Night.

C'est peu avant 15 heures 30 que Gégé et Arnaud se lancent dans un premier service qui fait la part belle à leur tout récent album éponyme mais également à de très belles reprises dont bien évidemment " Hydeaway " de Freddie King qui ouvre le bal. Entre les " Caviar, foie gras " et autres " Trop de passé " et " Ronsard Boogie ", le public retrouvera quelques standards tels que " Hoochie Coochie Man " ou les " Alabama " de JB Lenoir et " Hard Times " de Ray Charles. Véritable encyclopédie de la musique, Arnaud ne manque pas de présenter les pères des morceaux que son compère et lui-même interprètent et pimente les interludes de quelques belles anecdotes … Au loin, les poneys apprécient le spectacle et de longs hennissements se joignent aux applaudissements d'un public malheureusement un peu trop clairsemé. Après une petite heure de concert, les Stringers cèdent leur place à un long entracte …

Retour vers 17 heures 20 pour la deuxième partie du set des Mantais qui démarre très fort avec un " Big Boss Man " impeccable. Les bottlenecks sont sortis des étuis et on va pouvoir se délecter des talents des deux guitaristes sur des merveilles telles que " Route 66 ", " Take This Hammer ", " C'qu'on a en nous " ou l'indispensable " Love In Vain " de Robert Johnson dans une version très proche de celle des Rolling Stones … Un concert des Stringers In The Night sans le tandem " C'matin " et " Salut j'm'appelle Gégé " ne serait pas un véritable concert et c'est en enchaînant leurs deux standards que le duo acoustique tente de nous quitter. Le public en redemande et devant tant d'insistance, Gégé et Arnaud invitent leur ami Mike Lécuyer à les rejoindre sur scène pour interpréter son légendaire " Gare du Nord à 7 plombes du mat' blues ". A peine revenus du Festiblues de Montréal où ils se sont produits devant 20.000 personnes, les trois showmen  retrouvent instantanément leurs marques et nous servent dans la foulée un ultime " Summertime Blues " qui rangera définitivement leurs instruments.

Le concert a été un excellent moment et si on se fie à l'avis des spécialistes présents dont les inévitables Lucky Jean-Luc, Patrick Demathieu et autres collèges de Trois Rivières Blues et de L'Oreille Bleue, Stringers In The Night a une belle carte à jouer sur la scène blues actuelle.

Samedi 28 août 2004 :  Rosebud Blue Sauce / Rab McCullough

Retour au Chicago Blues pour une soirée qui affichera complet très rapidement … Venus de Cahors, les Rosebud Blue Sauce sont quatre jeunes gens élevés au swing, au jump et au rock qui ne vont pas se priver de nous dégourdir les jambes à grand renfort de leurs reprises mais également de leurs titres empruntés à leur premier album et au prochain qui devrait arriver à l'automne prochain. Entre une section rythmique en béton emmenée par la contrebasse d'Abdel et un sax ténor particulièrement efficace, Nico Duportal n'a plus qu'à laisser s'exprimer sa guitare et à pousser la chansonnette sur quelques bons vieux rocks mais également sur des balades fort bien travaillées. De Clarence Gatemouth Brown à Otis Rush ou à T Bone Walker, nombreuses sont les influences qui viendront pimenter les compositions d'un groupe auquel il ne manque assurément rien pour entrer dans le carré des grands et qu'il nous tarde de retrouver très vite sur les plus prestigieuses scènes de l'hexagone.

Tout fraîchement débarqué de Manchester où il se produisait la veille, Rab McCullough n'a pas eu le temps de faire de balance mais en grand professionnel, il profite d'un premier morceau de Freddie King pour parfaire ses sonorités et obtenir le son qui tue !

Parti des les premiers morceaux dans un registre très rock, McCullough va en cours de route faire quelques détours par des titres plus paisibles avec même quelques petites pointes un peu plus funky. Rab est un des maîtres incontestés de la guitare et il est capable de tout jouer, que ce soit rapide à en mourir ou au contraire beaucoup plus calme, et il ne se prive pas de nous en mettre plein la vue au cours d'un show décapant à souhait. La salle ne s'y trompe pas et devient très vite une véritable fournaise … l'Irlandais originaire de Belfast va nous proposer un florilège de son répertoire avec des excursions vers ses précédents albums et notamment le dernier en date, " Belfast Braekdown ",  dont on retiendra les impressionnants  " Don't Get Your Hopes Up " et " Dirty Black Water " pour n'en citer que deux.

Après un bel épisode avec une électro-acoustique demi-corps, McCullough reviendra à la Stratocaster pour un hommage appuyé à Jimi Hendrix avec les plans qui s'imposent dont bien évidemment le jeu dans le dos et derrière la tête … Il ne manque plus que le solo avec les dents à un " Voodoo Child " sur lequel on appréciera les cris mes aussi les murmures de la Fender du virtuose. Il y aura bien encore quelques beaux faits d'armes mais rien n'empêchera la soirée de filer à une vitesse insoutenable vers une fin qui semble inévitable. McCullough nous quitte mais l'assistance réclame du Rab et c'est par un clin d'œil à son ami Rory Gallagher que l'homme de l'Ulster terminera ces deux heures d'une prestation brillante et inoubliable !

De retour sous la loge chapiteau, on a tout loisir de saluer l'artiste et ses musiciens Irlandais qui ont fait pour une fois le déplacement et qui nous ont proposé un show plus riche et plus en place que les habituelles sortie de McCullough avec le team Dixiefrog. Une bien belle farce que nous ont jouée les organisateurs ce soir …

Bougy résonne encore des derniers accords que déjà le gotha du blues se prépare pour un nouvel after à La Grange …

Il ne reste plus qu'un concert à vivre avant de clore définitivement ce troisième Bougy Blues Festival. Demain après-midi, les parisiens de Big Brazos feront résonner la vallée de l'Odon avec leur blues aux accents folks et festifs. Nous serions bien restés pour assister à la prestation de nos amis Docteur Blues, El Magnifico, Papa Gombo et Winer Jammer mais la route entre la Normandie et l'Ile de France est particulièrement chargée le dimanche après-midi et il faudra nous résoudre à quitter Bougy avant le grand rush dominical … On se console toutefois en se disant que la prochaine édition de Blues-sur-Seine accueillera Big Brazos en novembre prochain et que nous aurons alors tout le loisir d'apprécier leur musique. Ce n'est que partie remise …

Il ne serait pas honnête de conclure sans remercier l'organisation et bien entendu les performants Marc Mitou et Marc Loison qui ont su mettre au point une équipe des plus efficaces et un festival de haute volée. On dit souvent qu'un lieu devient mythique quand il refuse du monde à l'entrée … Le Bougy Blues Festival est donc devenu une grande manifestation dès sa troisième édition ce qui, en ces temps où la musique se cantonne pour beaucoup à la nouvelle saison de la Star Academy, est un véritable exploit ! Bravo à tous, merci et … à l'année prochaine !

Fred Delforge - août 2004