samedi, 01 novembre 2003
L'envers du décor
(Enrage Production - Small Axe - Tripsichord
- 2003)
Durée 42'49 - 13 Titres < /p>
http://www.tagadajones.com
_Pour
qui est adepte d'un punk aux relents hardcore et même métal,
Tagada Jones est un véritable délice ! Pour leur
quatrième album, les Bretons ont décidé de
persévérer dans le militantisme et d'utiliser plus
que jamais leurs textes pour faire passer un message qui leur
est propre. Autour des deux voix du combo, Gus (samples) et Niko
(guitare), on entrevoit un petit nouveau, Seb, qui reprend le
poste de bassiste laissé vacant par Pepel, mais aussi les
incontournables Boiboi (batterie) et Stef (guitare). Avec plus
de six cent concerts dans une vingtaine de pays et presque dix
longues années de travail, les Tagada Jones ont gagné
le respect de leurs fans et leurs prouvent une fois de plus qu'ils
le méritent puisque cet album entre dans la droite lignée
des traditions du groupe. Efficacité, droiture, absence
de compromis
Tout ce qu'on aime quoi !
_S'il était un groupe qui pouvait prétendre
à la place de leader de la scène punk hardcore française,
il a désormais des soucis à se faire car cet "
Envers du décor " affiche clairement ses ambitions
de tenir la dragée haute à d'éventuels prétendants
au trône. Usant intelligemment des harmonies là où
ils pourraient se contenter de beugler leurs revendications, les
Tagada Jones proposent une musique forte, violente et colorée
qui frappe droit au but. Engagés jusqu'aux bouts des ongles,
les textes sont autant d'exutoires qui laissent transparaître
les motivations fortes d'un combo qui a du mal à encaisser
les travers de notre société. Les refrains vous
pètent à la tronche comme autant de petites bombes
dérangeantes et on a vite fait d'emmagasiner les plus féroces
ou les plus actuels
" A gauche comme à droite
", " Un Kulte ", " Les Cobayes ", "
Apocalypse ", " Star System " ou " Reality
show " sont autant de classiques sur lesquels les kids vont
lancer leur infernal pogo lors des concerts à venir. La
contestation est restée le credo des Tagada Jones et pour
tout vous dire, ça nous fait bien plaisir. Il fallait oser
ce genre de protestation en des temps où les Ernest-Antoine,
Endémol et autres petits Nicolas ont décidé
de prendre les rennes du pays en main
Tagada Jones l'a
fait. Chapeau bas !
Fred
DELFORGE - 24 septembre 2003
TAGADA
JONES
Compte rendu de concert
Le poste à galène - Marseille
7 novembre 2003
_Comment
une salle aussi mal gérée peut elle accueillir des
groupes de renom tels les Tagada Jones ? Les noms des invités,
notés au dos d'un fly, sont bien souvent perdus, l'accueil
est autant impersonnel qu'exécrable. Sauf bien sur dès
qu'il s'agit d'ouvrir la porte monnaie. On appelle ça comment
déjà
ah oui, ça me revient : vampires
des comptoirs. Par contre il faut leur reconnaître une qualité
: ils savent susciter le rire. Car quand tu vois les vigiles fouiller
le groupe star de la soirée à l'entrée, ça
dépasse les limites de l'imaginable. Et des gérants
comme ça on aimerait bien vite les oublier. Hélas,
ils s'offrent de bien belles têtes d'affiche.
Heureusement, que le groupe se montre très ouvert et l'interview
accordée pour l'événement nous permet de
respirer un peu. Nous manquerons ainsi la performance des Unfit
(désolé pour eux) ; mais comme on dit, il faut ce
qui faut. Mais d'après l'analyse de Stef, le grateux des
Tagada Jones, ils ont servi un bon hardcore à l'américaine
et des prémices de pogo se sont fait sentir.
_Opération " fuck the star system
" oblige, le groupe fait lui-même les derniers réglages
sur scène et Niko lance furieusement la partie (quand il
s'agite il fait vraiment penser à Michaël J Fox. Si
si, vous verez). Le public, bien que moyennement abondant, à
peu près 200 personnes, réagit bien à l'énergie
débordante du groupe et de son second chanteur, Gus, qui
n'hésite pas à descendre micro au poing dans la
fosse. Le public adore ce qu'on lui met dans la tronche et le
fait savoir. Les premiers titres font honneur au dernier opus
de la bande qui n'oubliera pas ses vieux classiques tels "
SOS ". Des slams sont tentés par des individus volumineux
(pour certains) devant un public trop maigre
c'est le sol
qui fera office de réceptacle ; c'est le risque que tout
punk en herbe doit prendre en conscience !
Seul un petit veinard réussira l'unique slam réussi
de la soirée, le seul qui ne s'est pas éclaté
comme une merde. Pendant ce temps, TJ écorche le star système
ou encore nos politiques, soutient José Bové
bref,
ils font leur taf sans taches. Et après une sorte de faux
rappel (anti star système oblige n'est ce pas ?), ils terminent
la partie en lâchant carrément les commandes des
micros à des fans qui n'en reviennent pas et sautent bien
volontiers sur cette occasion en or. Les Tagada sont énormément
soutenus par leurs fans et ils le rendent bien
star système
où étais tu ce soir là ?
Stef
BURGATT
pour Zicazic.com - 07 Novembre 2003
TAGADA JONES
INTERVIEW EXCLUSIVE POUR ZICAZIC
Rencontre détendue au troquet du coin
avec Niko le leader, chanteur et grateux des Tagada Jones. Et
ce pendant la première partie de leur show assurée
par les Unfit. Eh non la punk attitude n'est pas morte, elle a
encore pas mal de punch a revendre ; la preuve.
Stef : Une question que l'on a jamais du
te poser une seule fois : le nom Tagada Jones, hormis les influences
" picsou magazine ", c'est quoi ?
Niko : C'est vrai qu'on nous la pose souvent celle là.
Il n'y a pas vraiment d'explication en fait. Au tout début
du groupe, en décembre 93, on a du changer six fois de
nom dans les premiers mois. Le premier c'était les "
Mamie surfe dans le golfe ", à l'époque de
la première guerre en Irak ; c'était complètement
débile (rires). L'explication c'est les quelques grammes
d'alcool dans le sang et les " tagadagadagada " de la
guitare. Ensuite, pourquoi est on parti là-dessus, je ne
vois plus aucune autre raison plausible. Et puis ce nom est resté.
On aurait pu prendre un nom plus sérieux, plus marketing
mais on s'en fout. Comme le titre des chansons, on s'en foutait
aussi. Et les répets
c'était plus des beuveries
qu'autre chose (rires) !
Stef : à vos débuts, vous
étiez très punk rock pour ensuite évoluer
sur du hard core. A ce jour, tu penses plutôt retourner
aux sources ou faire encore évoluer ta zic ?
Niko : le côté punk reste toujours, dans les
paroles et dans le style vindicatif et revendicatif. Et tu sais
quand on a commencé, on ne savait pas du tout jouer et
puis moi je venais de l'alternatif donc on est resté sur
du simple avec 4 accords. Et comme tous les groupes, tu prends
un peu de technique et tu as envie de jouer avec ce que tu viens
d'apprendre. Et puis pour nos albums on ne nous a jamais collé
de producteur exécutif donc on a toujours pu faire les
choses à notre idée. On vit au quotidien sans vraiment
réfléchir et en jouant ce qui nous fait plaisir.
Il n'y a que sur le dernier album qu'on s'est fait une espèce
de pré-prod. Je pense que celui là ressemble un
peu plus à ce qu'on a envie d'écouter personnellement.
Et puis surtout on n'écoute plus les mêmes choses
qu'il y a 10 ans.
Stef : c'est un vrai coup de chance pour
un artiste d'avoir ce contrôle sur son produit
Niko : on a créé enragé prod avec l'intention
de nous produire. Et du coup on n'a jamais eu à faire face
à des concessions vu qu'on a toujours voulu faire notre
boulot tout seul sans jamais avoir envie d'aller ailleurs. Et
je fréquente assez le milieu pour voir que les groupes
qui sont sur un gros label indépendant ne font pas ce qu'ils
veulent. Par exemple les Uncommonmenfromars, je trouve vraiment
dommage de la part de Wagram d'attendre autant de temps pour les
faire enregistrer leur disque ! Et je ne te parle même pas
des majors où tu as un directeur artistique qui te cadres
bien vers là où tu dois aller ; et ce, même
sans que les artistes ne s'en rendent compte. On aurait été
à leur place c'est clair que l'on se serait fait bouffer
petit à petit mais on a posé les limites dès
le début. On a déjà été contactés
par des boites mais on est restés fidèles à
notre discours.
Et tu sais, c'est dans ces cas là que tu en vois plein
tourner leur veste. Les avis changent avec le temps
Stef : quelqu'un à vendre en particulier
?
Niko : non, ce n'est pas pour être méchant que
je dis ça mais de nos jours, l'attrait de l'argent est
devenu si puissant que les groupes ne résistent pas. Quand
tu discutes entre 4 yeux, tout le monde est copain mais dès
que tu en as un qui arrive et qui pose un chèque de X milliers
de Francs sur la table
l'argent prend le dessus. Beaucoup
se sont fait bouffer comme ça !
Quand tu vois tous ces groupes montés de toutes pièces
comme la star ac', qui sont pressés de toutes parts. Ca
gave tout le monde vite fait ; c'est un produit de consommation
rapide et au bout de 3 ans tu le balances à la poubelle.
Stef : d'être le capitaine d'une
boite indé ça relève pas de l'acrobatie ?
Surtout quand tu vois le naufrage de Boucherie prod'
Niko : je ne sais pas pourquoi ils ont coulé. C'est
quand même eux qui ont lancé le premier disque de
la Mano Negra mais peut être qu'après ils n'ont pas
su rester en phase avec les envies du moment. Pour le moment je
trouve que nous on n'est pas à côté de la
plaque. Peut être que dans 5 ans je ne te dirai pas la même
chose. Peut être même que l'on aura arrêté
le disque pour passer sur un support dur. Là dessus je
pense aussi qu'on peut suivre. On a toujours fonctionné
avec peu de moyens. Et puis quand tu sais que dessus c'est Tagada
qui fait le gros des ventes tu te rends mieux compte de la chose
; on ne vend pas des cent et des milles. Le dernier on l'a écoulé
à 6000 ex et celui là on compte franchir les 10
000 ex. Cumulé, on a du vendre 40 000 ex. On est pas perdant
dessus mais on est tout juste gagnant. L'envergure d'un salaire
peut être.
Stef : vous êtes très engagés
dans vos textes. Quelle est la chose qui te révolte le
plus en ce moment ?
Niko : l'individualisme des gens. On vit dans un monde super
égoïste et la solidarité n'existe plus. Chacun
vit dans son coin et ne voit plus personne. Une révolution
sociale était prévue pour octobre et ça m'a
bien fait rire car personne ne peut se saquer ! Quand les fonctionnaires
descendent dans la rue ils se font traiter d'enculés par
ceux du privé. Quand les intermittents bloquent des festivités
ils se font gueuler dessus car ils empêchent certains de
se faire des tunes
Au bout du compte, personne ne se serre les coudes et rien ne
se passe. Et ça les fait bien rire là haut car leur
plan de diviser pour mieux régner marche à merveille.
Dans cette pyramide de l'intermittence, tu as ceux d'en haut qui
n'ont même pas besoin de cette alloc pour vivre et ceux
d'en bas qui s'en sortent tout juste et qui ont besoin de cette
tune pour pouvoir continuer à créer. Et c'est à
ceux-là que l'on s'attaque, encore une fois on sabre le
bas de la pyramide. Et de notre côté on a pas réussi
à aller de l'avant, on n'a fait que se tirer dans les pattes
et les réformes sont quand même passées. C'est
cet individualisme qui est en train de me tuer en ce moment.
Stef : il y a un nouvel arrivé dans
la bande ; qu'à t'il apporté ?
Niko : un groupe c'est une famille, tu vis les uns sur les
autres tout le temps. Donc, un nouveau venu ça change déjà
beaucoup humainement parlant. Musicalement, lui joue avec les
doigts alors que son prédécesseur jouait avec un
médiator. Il a fallu s'habituer à ça, à
son style de jeu. Mais bon, lui est arrivé juste avant
l'enregistrement et il a pas eu le temps d'imposer sa patte. Je
pense que ça se sentira plus sur le prochain
Stef : Comme Trujillo au sein de Metallica.
En parlant de ça, t'en as pensé quoi du Saint Anger
?
Niko : c'est clair que ça a bien changé déjà.
Je respecte ce qu'ils font. Je le prend come un pied de nez à
tout ce qui se fait de nos jours, à tous ces groupes surproduits.
Eux à l'inverse ont fait un album " roots style ".
A leur niveau ils s'en branlent de ce que les gens en disent.
Ils se sont déjà pas mal fait baver dessus.
Stef : les punks Québécois
ont-ils différents de ceux d'ici ?
Niko : les gens sont beaucoup plus ouverts. Tu rencontres
un mec dans la rue, c'est ton " pote " et tu vas boire
un coup avec lui. Ici c'est l'inverse, il faut que le mec te montre
qu'il est cool pour que tu ailles boire un coup avec lui. Là
haut il faut qu'il te montre qu'il est con pour que tu arrêtes
de boire un coup avec (rires). Ca n'a strictement rien à
voir. Le côté négatif, c'est que c'est les
états unis et ils sont autant individualistes que eux ;
chacun pour sa gueule. Quand tu creuses un peu c'est très
superficiel. Là bas le punk c'est une mode vestimentaire
et rien de plus. Par contre tu passes des vacances à coup
sur.
Stef : actu punk, le grand retour des Beruriers
noirs
Niko : ma question c'est : est-ce que j'ai le droit de donner
mon avis là-dessus ? Tu vois, nous on ne va pas jouer aux
Transmusicales. C'est le festival le plus subventionné
de Rennes. Et j'ai du mal à voir le rapport entre les Bérus
et ce festival qui n'a jamais fait de punk sauf au moment où
ça a été la mode. Pourquoi avoir choisi de
faire leur retour là ?
C'est très critiqué à Rennes d'autant plus
qu'ils jouent au milieu d'un chanteur Breton et de Stephan Eicher.
Leur choix m'étonne.
J'aimerai être une petite souris pour voir Eicher jouer
devant des punks.
Stef : tu espères quoi pour l'avenir
?
Niko : continuer à jouer, si possible avec Tagada et
pour faire une musique qui colle avec l'esprit du groupe, pas
pour utiliser le nom juste pour vendre. Pas faire de la pop sous
le nom de Tagada sous prétexte qu'on est bien ensemble.
Le jour où on aura envie de jouer autre chose on changera
de nom tout simplement. Et surtout qu'il n'y ait jamais un petit
con qui vienne me taper sur l'épaule en me disant "
eh, vieux croulant, arrête tes conneries ! ".
Je me vois bien grand patron de major, les doigts de pieds en
éventail, j'aurais fait deux ou trois tubes et je me ferais
les poubelles de la star ac'
Stef : eh pourquoi pas
En tout cas
merci pour ce sympathique moment interview.
Niko : Merci à vous et longue vie à votre zine
car des groupes comme nous, qui ne sont pas parachutés
du haut par les majors, ce sont les médias comme vous qui
nous font sortir du lot...
Propos recueillis
par Stef BURGATT
por Zicazic en Novembre 2003
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