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EN TERRE DE BLUES 2025 (USA) pdf print E-mail
Ecrit par Fred Delforge  
samedi, 18 janvier 2025
 

EN TERRE DE BLUES
MEMPHIS – CLARKSADLE – NASHVILLE – MUSCLE SHOALS – JACKSON … (USA)
Du 1er au 18 janvier 2025

https://visitmississippi.org  
http://msbluestrail.org  
https://blues.org 

Quelle drôle d’idée que celle de commencer l’année 2025 par une journée de trente et une heure ? C’est pourtant celle qui nous est venue quand nous avons fait le choix de prendre la direction de Memphis en ce premier jours férié de l’année … On aurait pu penser que les vols seraient moins chargés, les aéroport plus calmes, il n’en sera rien et c’est finalement sur les coups de 22 heures que nous nous retrouverons tous ou presque dans ce lieu aussi atypique que prometteur qu’est l’aéroport local, le deuxième du monde en terme de trafic, mais pas en ce qui concerne les passagers puisque l’endroit semble toujours quasiment désert, simplement parce que Memphis est la base mondiale de Fedex et que nombre des avions du groupe partent et arrivent ici. Pas le temps de faire un premier tour et c’est directement vers l’hôtel que nous partirons pour être en forme dès demain matin !

Jeudi 2 janvier :

Accompagnant cette année des visiteurs qui arrivent dans la région pour la première fois, nous décidons de leur proposer un rapide tour d’orientation en voiture dans Memphis avant de filer en direction du Sud pour rejoindre Clarksdale puisque nous aurons une semaine tout entière dans Bluff City pour profiter de ses nombreuses attractions. Soulsville, la maison natale d’Aretha Franklin, Stax, I Am A Man Plazza, Beale Street Sun Studio et Mud Island seront autant de points d’intérêt que chacun appréciera durant ce premier survol qui aiguise déjà l’appétit des newcomers qui ont compris que la quinzaine allait être dense !

Direction le Deep South donc avec un premier arrêt sur la Highway 61 au niveau du panneau qui marque l’entrée dans le Mississippi puis un second dans un des lieux incontournables de cette route mythique, la Gateway To The Blues et son visitors center qui fait également musée et office du tourisme régional. Un endroit toujours très apprécié pour son décorum et pour son contenu puisque la boutique propose nombre de goodies toujours très appréciés ! L’heure a bien tournée et nous décidons de prendre notre premier véritable repas dans un restaurant lui aussi incontournable, The Hollywood Cafe, un célèbre juke joint qui propose de la soul food délicieuse et qui a même eu droit aux honneurs de la chanson de Marc Cohn, « Walking In Memphis ». Un endroit à découvrir absolument

On décide ensuite d’emprunter le chemin des écoliers et de passer par Helena avant de rejoindre Clarksdale et tout le monde est surpris de voir l’état de délabrement de cette ville fantôme qui accueille un des très gros festivals de blues américain, le King Biscuit Festival qui a lieu chaque année début octobre. Un rapide tour sur la levee pour y découvrir les fresques qui ont bien vieilli en quelques années et on déambule ensuite au milieu des bâtiments effondrés, des boutiques abandonnées et de ce paysage de désolation qui a quelque chose de postapocalyptique ! On ne se laisse pourtant pas abattre et nous reprenons bientôt la route pour Clarksdale en passant par Friars Point, petite ville ou Robert Nighthawk a vécu et qui lui a inspiré sa chanson « Friars Point Blues » …

La nuit tombe à notre arrivée à Clarksdale et nous faisons là encore un rapide tour de ville avant de rejoindre le Shack Up Inn qui sera notre base pour quatre nuits … Il n’y a qu’un unique concert ce soir en ville et l’heure ayant déjà bien avancé, il ne sera pas possible de nous y rendre …

Vendredi 3 janvier :

Direction Greenville ce matin, avec en cours de route quelques étapes obligatoires comme celle au Po Monkey’s qui continue de se dégrader mois après mois, avec cette fois une porte d’entrée à moitié éventrée qui laisse entrevoir à l’intérieur quelques restes des années fastes de ce club de blues parmi les plus connus du Deep South … On traverse ensuite Leland, la ville natale de Kermit la Grenouille, celle qui également a vu un certain Johnny Winter grandir puisqu’il a passé ici une partie de sa jeunesse, mais aussi celle du bluesman Pat Thomas, le fils de James "Son" Thomas dont la sépulture est à quelques kilomètres d’ici. On s’arrête un moment devant le Highway 61 Blues Museum qui n’ouvre plus que sur réservation et on se pose un long instant pour identifier les bluesmen de la fresque qui est peinte dans une rue adjacente et qui perd elle aussi lentement mais surement de sa superbe … Et puis on file vers Greenville où il ne reste plus grand-chose des souvenirs de Nelson Street, le centre névralgique musical de la ville à la grande époque … La misère est bien visible dans les rues et on ressent une certaine forme d’insécurité, quand bien même les gens nous saluent gentiment de la main en nous croisant.

Pour changer un peu des circuits traditionnels, on remontera vers Clarksdale par la Route 1, celle qui est marquée par de nombreux souvenirs liées au blues, et on s’autorise quelques arrêts du côté de Scott, où un marker de la Mississippi Blues Trail nous rappelle la grande crue de 1927, souvent évoquée dans divers blues par divers bluesmen et en particulier par Big Bill Broonzy qui considérait ce village comme le sien … On poursuit en croisant nombre de panneaux commémoratifs du côté de Benoit (Eddie Taylor et Eddie Show), de Rosedale avec son White Front Café Joe’s Hot Tamale, ou encore de Gunnison (Otis Clay), et on se retrouve bientôt en ville où après un repas aux fameux Abe’s Bar-B-Q, une institution vielle de plus d’un siècle dont le nom figure dans l’édition Clarksdale du Monopoly, nous allons faire un tour en ville, et notamment dans une autre institution, la librairie Cat Head de notre ami Roger Stolle qui nous accueille comme toujours avec une très grande gentillesse et un savoir blues sans limite. Un saut dans l’Emporium de l’ami Deak Harp, génial musicien et spécialiste des harmonicas customisés, et il sera bientôt temps de rejoindre nos quartiers au Shack Up Inn pour un peu de détente avant le concert du soir.

C’est après avoir retrouvé les groupes qui représenteront France Blues à l’International Blues Challenge, Ady One Woman Band et Mazingo, que nous partons au Levon’s Bar & Grill où deux amis du cru, la bassiste Heather Crosse et le batteur Lee Williams, se produisent ce soir avec en invités des musiciens australiens venus eux aussi pour participer à l’IBC dans quelques jours à Memphis. Le concert commence par un duo desdits Australiens puis il est temps de passer en formation plus étoffée avec à la clef des interprétations des morceaux des "Aussies" et bien entendu quelques standards revus et corrigés pour l’occasion. Le concert est agréable, malgré un son un peu trop fort, et on en profite pour diner dans le club/restaurant en attendant l’arrivée de nos amis de Toulouse Blues Society et du groupe de Thomas Sarrodie qui les représentera à Memphis. Les musiciens font connaissance, évoquent en toute amitié le grand moment qui les attend la semaine prochaine, échangent entre eux, et c’est dans une atmosphère des plus agréables que la soirée se terminera entre bon blues et belles personnes, avec en plus quelques bières locales consommées bien entendu avec modération.

La journée a été belle et longue et on se retrouve une fois encore au Shack Up Inn pour évoquer le programme du lendemain qui promet d’être costaud. Le sommeil commence à peser et il faut bien se résoudre à aller recharger les accus pour se présenter en forme samedi dès potron minet …

Samedi 4 janvier :

C’est par deux heures de discussion autour de projets communs avec Bubba O’Keefe de Visit Clarksdale que nous commençons une journée qui va nous emmener au cœur de la légende blues du Delta et après ce bon moment d’échange et de partage, nous prenons la route d’Indianola où nous attend une belle visite du B.B. King Museum , un endroit très bien documenté qui ne se contente pas de parler de la vie et de l’œuvre du King of the Blues mais qui s’attarde également sur les conditions de vie à l’époque où il est né et où il a grandi avant de devenir une star mondiale reconnue de tous. Depuis le film de présentation jusqu’au recueillement sur sa sépulture, c’est un moment chargé d’émotion et passion qui se produit au sein de notre petit groupe d’une vingtaine de personnes qui apprécient pleinement la visite. Hasard du destin, Paul Benjamin, l’indispensable couteau suisse de la Blues Foundation depuis une éternité, mais aussi sa charmante épouse Jean et Janet Webb, Présidente de le Mississippi Delta Blues of Indianola, sont dans les lieux et nous avons là encore l’occasion de tous nous retrouver, unis par le même amour du blues, pour un nouveau temps d’échange avec Robert Terrell, ami de longue date et âme du musée !

Après un repas bien mérité au Blue Biscuit, une institution qui est également un juke joint installé quasiment en face du musée, nous prenons cette fois la direction de Greenwood pour aller rendre visite à celui que tout le monde respecte et apprécie, Robert Johnson, dont nous irons non pas fleurir la tombe mais tout au moins saluer l’esprit en nous attardant un moment auprès de ses restes, toujours aussi vénérés et respectés par des fans qui lui laissent en preuve de leur visite un mediator, une pièce de monnaie ou encore un objet personnel dont le bluesman m’a plus rien à faire mais qui alimentent l’endroit pour en faire une sorte de grand bric à brac hétéroclite et plaisant à regarder. Mais l’heure tourne vite et il nous faut remonter vers Clarksdale, non sans faire une halte à Money, non loin de là, pour aller là aussi nous recueillir auprès des ruines de Bryant Grocery, l’épicerie qui aura signé l’arrêt de mort du jeune Emmett Till le 28 aout 1955, lorsque une équipe d’odieux nuisibles le captureront, le tortureront et le mettront à mort avant de le jeter dans la Tallahatchie River sous prétexte qu’il aurait fait du gringue à l’épicière, alors que le jeune garçon venait tout juste de fêter son quatorzième anniversaire.

Le temps de poser nos affaires et d’étancher notre soif au Shack Up Inn et nous partons maintenant dans un juke joint bien connu de tous, Red’s, un endroit dont le propriétaire est décédé il y a tout juste un an, la veille de la Saint Sylvestre, mais qui continue de fonctionner sous l’impulsion donnée par les musiciens locaux qui l’entretiennent et s’y produisent quasiment quotidiennement. Et c’est justement une célébrité du cru qui s’y colle ce soir puisque Big A Sherrod est sur scène en trio, mais avec une autre équipe que celle qui l’accompagne habituellement, Heather et Lee jouant pour leur part à Coldwater, à environ une heure de là. Se produisant de temps à autres en France, le chanteur et guitariste qui a participé à l’édition 2024 du Beautiful Swamp Blues Festival nous servira ce soir son lot de standards qu’il agrémentera non seulement de son jeu précis mais aussi de son humour un peu potache qui fait mouche à chaque fois. Malgré parfois à quelques petites longueurs dues à l’empilage systématique des « Sweet Home Chicago », « Got My Mojo Working » et autres « Thrill Is Gone », le trio nous servira un set très apprécié d’un public fait d’amateurs plus ou moins avertis, de passionnés et de locaux.

Il sera temps ensuite de rejoindre nos shacks pour profiter du sommeil du juste car la journée a été une fois encore dense et intense !

Dimanche 5 janvier :

Si tous les musées et autres lieux publics sont traditionnellement fermés dans le Deep South le dimanche, il n’en reste pas moins que la région dispose de nombreux endroits à visiter en extérieur et ce sont quelques-uns de ces sites que nous allons découvrir, quand bien même la pluie et le vent se sont invités à la promenade. On commence donc par un premier arrêt au "véritable" crossroads qui est situé du côté de Claremont, juste après avoir franchi la voie ferrée abandonnée qui passe devant le Shack Up Inn mais aussi et surtout à Tutwiler, le village qui sera notre prochain arrêt puisque c’est devant la gare locale, aujourd’hui disparue, que W.C. Handy a vu un vieux Noir jouer de la guitare avec un couteau, ce qui lui donnera l’idée d’utiliser cette technique avec son groupe et par la même occasion de devenir le musicien qui a rendu le jeu en slide populaire. Parmi les fresques auprès de la voie ferrée désaffectée figure le souvenir de cet acte fondateur, et l’on trouve également une peinture murale rendant hommage à Aleck “Rice” Miller alias Sonny Boy Williamson II sur laquelle est indiqué assez sommairement le chemin pour se rendre auprès de sa tombe. Le moment de recueillement est comme toujours un peu émouvant et on y parle un instant de l’histoire de ce grand bluesman qui avait enregistré pour Chess Records à Chicago mais aussi pour Trumpet Records à Jackson.

La route se poursuit vers le Sud et on passe devant le célèbre pénitencier d’état qu’est Parchman pour aller jusqu’à Dockery Farms, le lieu où l’on dit, avec quand même un léger doute, que le blues serait né. Il reste sur place quelques beaux bâtiments assez marquants et une reconstitution d’une station-service mais ce qui est le plus important dans cet endroit chargé d’histoire, c’est de se souvenir que sur cet espace d’une centaine de kilomètres carrés fondé par Will Dockery en 1895 se trouvaient une scierie et des champs de coton exploités par des métayers qui recevaient en échange de leur récolte des sommes payées dans une monnaie qui n’avait cours que sur l’exploitation, ce qui les empêchait de partir s’installer ailleurs et d’y trouver meilleure fortune. Trente ans après l’abolition de l’esclavage, les Noirs restaient ainsi tributaires des propriétaires terriens et étaient souvent très endettés … Fort heureusement, Will Dockery était "un bon propriétaire" qui a rendu la région prospère là où il n’y avait avant que des marécages et des animaux sauvages. Parmi les bluesmen ayant vécu à Dockery, on notera bien entendu Charley Patton, Robert Johnson et Howlin' Wolf !

Après un repas dans un excellent restaurant/cantine populaire de Cleveland, le Country Platter, où nous avons été accueillis par des locaux très sympathiques et particulièrement attentionnés, les Blancs n’étant pas nombreux à s’arrêter ici, nous remonterons à notre rythme vers Clarksdale en prenant au passage une grosse averse qui se terminera en orage … la température chute rapidement et en peu de temps nous passerons de 16° à des chiffres qui deviendront bientôt négatifs … Alors histoire de se réchauffer un peu, nous nous installerons tous ensemble pour une soirée apéritive autour de quelques boissons locales et de beaucoup de musique, les connaissances ayant été faites entre tous les musiciens, il semblait évident que tout cela se finirait à un moment ou à un autre par une jam endiablée. Un superbe moment tombé juste à propos et marqué par quelques standards et par quelques moments de franche camaraderie, d’autant plus que Clarksdale ne propose qu’un unique concert ce soir, et à une heure plutôt précoce !

Notre dernière soirée dans la ville du Crossroads a été magnifique mais il faut bien se résoudre à prendre un peu de repos, la suite du voyage nous réservant encore plein de bonnes choses …

Lundi 6 janvier :

Nous effectuons ce matin la remontée vers Memphis, non sans être allé à Stovall près du lieu où la maison de Muddy Waters a été détruite par une tornade, puis nous passons saluer notre ami Roger Stolle et faire quelques emplettes dans son formidable magasin, Cat Head, qui regorge de trésors en tous genres, des albums jusqu’aux livres en passant par les vêtements, les affiches et autres objets hétéroclites qui ravissent à chaque fois les amateurs de blues. Chemin faisant, nous marquons un premier arrêt dès la sortie de la ville pour y rendre hommage à Pinetop Perkins au McLaurin Memorial Garden où il repose depuis fin mars 2011 puis nous filons vers Robinsonville pour y faire notre second repas du périple au Hollywood Café, avec comme à chaque fois des plats gouteux et un accueil des plus chaleureux. On vous recommande les fried pickles, la spécialité locale, mais aussi les ribs, les burgers et bien entendu le catfish.

Il sera bientôt temps de reprendre la route pour faire une pause rapide à la Gateway To The Blues et y faire là encore quelques achats avant de rejoindre Walls et de saluer la mémoire de Memphis Minnie, décédée en 1973 à l’âge de 76 ans, qui est inhumée dans le cimetière local. On remarquera que son troisième époux, mort une douzaine d’années avant elle, est enterré à ses côtés, la tombe de ce dernier étant agrémentée d’une simple pierre à son nom tandis que Memphis Minnie est honorée par un monument funéraire plus important qui a été financé par Bonnie Raitt. On se pose un instant devant les deux sépultures et on repense forcément à des titres emblématiques comme « When the Levee Breaks » ou « Me and My Chauffeur Blues » …

Il est temps ensuite de filer vers Memphis afin que chacun d’entre nous regagne ses quartiers et vaque à ses occupations du soir, certains ayant choisi de se rendre au Fedex Forum pour assister au match de basket des Grizzlies de Memphis contre les Mavericks de Dallas et saluer la belle victoire de l’équipe locale tandis que d’autres iront découvrir Wiseacre, la grande brasserie proche du centre ou resteront tout simplement au calme en attendant la suite.

Il ne reste plus désormais qu’à attendre le début de la grand-messe du blues qui commencera demain en fin d’après-midi sur Beale Street et c’est en piaffant d’impatience que chacun se prépare à sa manière …

Mardi 7 janvier :

On se donne quartier libre ce matin avec une partie du groupe qui part faire des emplettes chez Walmart tandis que les autres se détendent ou se rendent au Sun Studio pour une visite qui leur fera un peu mieux pénétrer dans l’univers de Sam Phillips et des enregistrements légendaires qui sont sortis de ses studios … Outre les reliques et autres souvenirs des années fastes, le visiteur est appelé à mettre ses pas dans ceux d’Elvis Presley ou encore du Million Dollar Quartet pour lequel le King était en compagnie de Jerry Lee Lewis, Carl Perkins et Johnny Cash. Un grand moment de découverte qui se poursuivra du côté de Central BBQ avec en toile de fond une soul food toujours aussi savoureuse et odorante … Encore quelques errances dans la ville à la découverte des fresques murales, des lieux inattendus et pourquoi pas des célèbres canards du peabody et nous serons bientôt à pied d’œuvre pour le lancement de la 40ème édition de l’International Blues Challenge !

C’est soir de fête chez Alfred’s puisque le club a été réservé pour un International Blues Showcase 100% français, avec pas moins de quatre groupes proposés par France Blues et par Toulouse Blues Society. Un joli cadeau de la part de la Blues Foundation qui reconnait une fois de plus l’engagement de notre pays dans la cause du blues et qui salue à sa manière le travail de fond réalisé par ces deux entités depuis des années au niveau national. C’est donc devant une salle bien garnie que vont se produire tour à tour Ady One Woman Band, Atua Blues, Mazingo et Thomas Sarrodie & Bi-polar Blues, quatre formations qui ont chacune leur esthétique, leur coloration et surtout leur envie de bien faire et d’aller le plus loin possible dans cette aventure qui pourrait les emmener, pourquoi pas, jusqu’à une grande finale à l’Orpheum Theatre samedi après-midi.

Mais pour l’heure, on se rôde tranquillement sur des sets de quarante cinq minutes et Ady a choisi de nous raconter des histoires profondes et touchantes relatives à sa vie et à ses sentiments sur fond de guitare, de cigar box et de percussions qu’elle dose avec beaucoup d’inspiration et qu’elle ponctue toujours de petites anecdotes qui vont droit au cœur de l’assistance comme c’est le cas avec « Johnny The Rapist », un titre fort et chargé de sens. Suit bientôt Atua Blues, un duo composé de David Noel aka Nono des SuperSoul Brothers et de Grant Haua, qui nous emmènera dans un répertoire pioché dans ceux des deux protagonistes mais aussi dans plusieurs pièces originales créées pour l’occasion et dans quelques standards revus et corrigés à leur manière comme cet « Amazing Grace » rempli de toute la puissance vocale de Nono.

On en arrive maintenant aux groupes et c’est Mazingo qui se charge de faire monter la pression avec son blues teinté de rock mais aussi d’une grosse dose de personnalité, le tout propulsé par une belle énergie et par une présence scénique qui fait plaisir à voir tant les trois garçons affichent une véritable complicité doublée de talent et de ferveur. Il n’en faut pas plus pour donner de la gnaque à Thomas Sarrodie et à ses complices qui, à leur tour, mettent le feu dans un club qui s’est un peu vidé car il y a également de belles choses dans les clubs voisins, mais qui reste motivé et qui réagit à l’unisson à l’écoute d’un chanteur doublé d’un guitariste inspiré et d’une section rythmique aux petits oignons. Un « Voodoo Chile » sorti de derrière les fagots pour arranger le tout et c’est de belle manière que le trio toulousain refermera cette soirée en tous points réussie !

L’International Blues Challenge est lancé, et bien lancé en plus, et c’est la tête pleine de souvenirs que chacun retourne vers son logement en attendant une suite qui promet d’être belle puisque la liste des participantes est plutôt intéressante …

Mercredi 8 janvier :

Nous profitons de la matinée pour aller faire un tour du côté du Stax Museum, pour faire la visite de cet endroit culte et y découvrir toutes les informations précieuses et toutes les raretés dont il regorge. Véritable trésor de la soul et des musiques noires américaines, les labels liés au studio ont vu passer les meilleurs artistes du genre et la Soulsville Foundation entretient encore et toujours l’héritage mais aussi la flamme, notamment avec la Stax Music Academy qui offre leurs études à des jeunes gens du quartier qui, en retour, continuent à interpréter et à transmettre une musique populaire mais pleine de chaleur et de convivialité. En sortant, nous marquerons un arrêt devant Royal Studio, malheureusement fermé aujourd’hui, puis sur Lucy Street, devant la maison natale d’Aretha Franklin, avant d’aller déguster les délicieux ribs du Cosy Corner, un restaurant on ne peut plus populaire sur North Parkway. Il ne restera plus ensuite qu’à accompagner les groupes pour satisfaire aux obligations liées à l’organisation et pour découvrir le programme du soir.

Pas de chance, deux formations françaises jouent au même moment et les deux autres sont très peu espacées dans le temps, ce qui nous oblige à nous séparer pour aller applaudir nos représentants nationaux. Mazingo se produit au Blues City Café, juste après un groupe atypique, Africa Unplugged, qui a un petit quelque chose de "Rasta Rocket plays the blues". C’est toutefois en y mettant l’art et la manière que le trio va embarquer tout le monde dans son univers où l’on chante en Anglais mais aussi en Français. Alexis nous régale de sa guitare tourbillonnante, mais aussi à l’occasion de son harmonica et de son chant et, à ses côtés, Felix marque le tempo avec finesse et classe tandis qu’Andrew, à la contrebasse et au chant, harangue la foule et fait preuve de superbes dons d’entertainer, un véritable plus pour faire avaler la pilule d’un blues riche et racé qui déborde parfois un peu du cadre, même s’il est compliqué de tracer un cadre dans ce genre de musiques. Le groupe a de l’allure, de la technique et du talent et le public a apprécié, c’est bien ce qui compte le plus !

Pendant ce temps, Thomas Sarrodie & Bi-Polar Blues se produisent au Wet Willies, un club un peu compliqué à dompter puisque c’est un bar à granités où l’on joue avec la lumière allumée et derrière une sorte de rambarde assez inconfortable visuellement. Le trio donnera toutefois le meilleur de lui-même et s’efforcera de garder toutes ses chances de passer à l’étape suivante en proposant un set construit et parfaitement dosé, foi de Toulousain ! Et en traversant ensuite la rue, on se retrouve au Corner Bar, plus connu sous le nom de Club Handy, où Atua Blues se démène pour réussir à proposer une musique riche des deux cultures de ses membres, Maori pour l’un, Béarnaise pour l’autre. L’osmose est bien présente et c’est avec une certaine sérénité que le duo abattra lui aussi ses cartes en prévision de la suite de la semaine !

C’est enfin au Blues Hall qu’Ady One Woman Band sera l’ultime française à se produire ce soir et elle n’a aucun mal à prendre ses marques, même si c’est toujours un peu compliqué de s’installer en solo, surtout avec un tel attirail. Mais tout se passe sans encombre et c’est devant un public réceptif qu’elle va venir offrir toute l’étendue de son talent en interprétant ses chansons pleines de sens, pleines de symboles, des chansons qui s’engagent pour la cause des femmes mais aussi pour un monde plus digne, plus humain. Qu’elle chante en Français ou en Anglais, Ady réussit à capturer l’attention d’une assistance qu’elle gardera dans la main jusqu’au bout, même si ce n’est pas évident de devoir jouer devant les supporters des autres candidats qui quittent les lieux ou au contraire qui cherchent la bonne place pour le set suivant. Mais c’est sans se soucier de ces petits détails qui sont les mêmes pour tout le monde que notre One Woman Band livrera ce soir une prestation de très belle qualité, avec en prime un petit tour dans le public avec la cigar box à la main !

Le temps de saluer Ville Mehto, le candidat finlandais qui a eu un voyage des plus compliqués, puis de diner au Blues City Café, et nous rejoindrons rapidement notre hôtel pour nous réchauffer un peu et nous reposer en attendant la neige qui devrait rapidement venir prendre part à la fête …

Jeudi 9 janvier :

Longtemps utilisée en tant que complexe omnisport occupé par les Grizzlies de Memphis mais aussi par les grands événements musicaux, la pyramide de Memphis a été transformée en espace pour les activités sportives outdoor lors de l’inauguration du Fedex Forum et on y trouve aujourd’hui tout ce qui a trait à la pêche, à la chasse et à toutes les activités sportives liées à la nature réunies dans un grand complexe commercial. Si l’on monte tout en haut de l’ouvrage, on peut se restaurer mais aussi avoir une vue panoramique sur la ville … C’est le choix qui sera fait par une partie du groupe tandis que d’autres partiront visiter le Civil Rights Museum, un endroit riche en émotions et en témoignages forts. Et comme il est difficile de ne pas casser sa tirelire à Memphis, c’est du côté de Shangri-La Records que se finira la matinée, au beau milieu de vinyles que les collectionneurs s’arracheront forcément !

L’après-midi nous réservera une belle surprise car une poignée de lucky guys est invitée par Boo Mitchell, le fils du grand Willie Mitchell, à découvrir Royal Studios … L’occasion de naviguer, avec plein d’images dans la tête, entre les disques d’or, les masters de grands morceaux et albums appartenant à l’histoire de la soul et du blues, les Grammy Awards et les instruments vintage qui meublent un studio dans lequel il y a une âme qui est restée bien vivante depuis toute ces années. Outre le plaisir de retrouver ces lieux chargés de bonnes vibrations, nous aurons également la joie d’y croiser le musicien anglais Mississippi MacDonald, déjà chroniqué sur Zicazic, mais aussi le président de la Korea Blues Society, Choi Hang-seok, dont les activités sont multiples et carrément intéressantes pour une collaboration à court ou moyen-terme.

Il est déjà temps de repartir sur Beale Street pour le second quart de finale de ce 40ème IBC et c’est avec Mazingo que l’on commence, le groupe se montrant toujours aussi efficace et motivé pour nous proposer un blues original et concentré. Le Blues City Café n’est pas plein car on annonce de la neige pour la fin de soirée, ce qui a refroidi les gens, mais il vibre à l’unisson de nos Frenchies qui donnent tout ce qu’ils ont en eux et qui partagent sans compter. Quelques minutes plus tard, Ady One Woman Band en fera de même dans un Blues Hall réceptif mais relativement peu garni. Le show fonctionne bien auprès de l’assistance et le petit tour dans le public avec la cigar box fait à chaque fois son effet et c’est là aussi une très belle prestation que la blueswoman nous offrira devant un parterre de spectateurs qui visiblement apprécie da démarche et son engagement.

Au même moment, une partie de la délégation est partie au Wet Willies pour retrouver Thomas Sarrodie & Bi-polar Blues qui vont donner ce soir tout ce qu’ils ont en eux et mettre leurs dernières pièces dans la machine pour essayer de décrocher le jackpot. Là encore, le trio a pris de l’assurance et donne sans compter, ce qui est très apprécié d’une assistance exigeante en termes de qualité. Quelques minutes plus tard, le Finlandais Little Willie Mehto en fera de même au King Jerry Lawler’s, un club lui aussi assez délicat à prendre en main avec son univers qui tourne autour du catch et ses télévisons qui diffusent des combats en continu. Mais le garçon a de l’assurance et on peut lui faire confiance pour tirer son épingle du jeu.

Direction le Corner Bar maintenant, pour assister à la prestation d’Atua Blues et pour découvrir un show qui a pris de l’ampleur au fil des passages sur Beale Street. Les deux compères sont bien en place et la guitare porte habilement les deux voix qui se complètent et qui ne manquent pas de saveur, formant un ensemble homogène et séduisant qui semble plaire à l’assistance. Juste avant le duo proposé par Toulouse Blues Society, on avait pu assister au show proposé par le Néerlandais John F Klaver, toujours aussi habile une guitare à la main, et tout de suite après, c’est l’Allemand Richie Arndt de Blues Baltica qui refermera la soirée avec son blues plein de saveur et de couleurs. Un final de choix composé de trois formations européennes pour un club à la configuration atypique …

La neige commence à tomber et on regagne paisiblement nos pénates pour assister à l’annonce des résultats en ligne, avec une joie intense pour Atua Blues et Thomas Sarrodie & Bi-polar Blues qui passent en demi-finale et une pointe de regrets pour Ady One Woman Band et Mazingo qui terminent ce soir leur aventure américaine sans avoir le moins du monde démérité et sans avoir de reproches à se faire.

Vendredi 10 janvier :

La neige a recouvert Memphis cette nuit et c’est en zigzaguant que nous nous rendons au Hyatt Centric pour assister à la cérémonie de remise des Keeping The Blues Alive Awards présentée pour la deuxième année consécutive par Dexter Allen … La salle est clairsemée en raison de la météo et il manque un bon nombre des musiciens et personnalités qui sont habituellement présents pour cette rencontre. On retrouve quand même avec un réel plaisir Tony Braunagel, Bruce Iglauer, Gina Sicilia ou encore Thornetta Davis mais on regrette forcément l’absence de Bob Corritore qui est resté bloqué à Phoenix et qui a du se faire représenter pour recevoir le prix attribué au Rhythm Room, le club qu’il tient dans sa ville depuis maintenant 33 ans. Parmi les récompensés, on soulignera forcément notre ami irlandais Charlie Hussey, la Little Steven’s Blues School ou encore le DJ polonais Ryszard Gloger mais aussi le Jefferson Street Sound Museum de Nashville et Blues Blast Magazine.

En attendant le début des demi-finales, nous aurons tout le loisir de trainer sur Beale Street et dans les environs en faisant une halte au BB King Blues Club pour y apercevoir Meg Williams et son groupe avant de partir à la réunion proposée par Blind Raccoon afin d’y rencontrer Betsie Brown, une attachée de presse avec laquelle nous avons des relations professionnelles de longue date. C’est également l’opportunité de croiser certains des artistes qu’elle soutient et de lui présenter nos musiciens français avec, pourquoi pas, une collaboration à venir dans le futur. Il sera ensuite temps d’aller diner avant de rejoindre le King Jerry Lawler’s pour y entendre quelques groupes avant qu’Atua Blues ne fasse son entrée en scène.

Plus détendu que les jours précédents et plus à l’aise en raison d’un set un peu plus long, le duo présenté par Toulouse Blues Society va nous offrir ce soir le set qui va bien, ponctué de belles interventions parlées et d’une touche d’humour qui fait mouche, surtout quand le sujet devient plus que léger. Les deux voix se complètent parfaitement, Grant Haua se fait plaisir en jouant autant avec les notes qu’avec les silences et c’est un véritable délice pour un public qui boit sans aucune retenue la musique d’Atua Blues. Le binôme construit autour de deux projets très différents au départ a bien fonctionné et il y a fort à parier que les deux complices n’ont pas fini de le faire évoluer.

On traverse la rue pour rejoindre le Rum Boogie Café et on assiste à la prestation des Texans de Sam Barlow & His True Blues Band avant que Thomas Sarrodie & Bi-polar Blues s’y collent pour refermer cette demi-finale avec un set précis et bien en place. Le trio toulousain a fait là encore le pari de l’humour et nous propose un show plein de malice construit autour de ses propres morceaux, sans pour autant s’abstenir de nous poser une cover en cours de route. Les titres font mouche et que ce soit dans les blues bien envoyés que dans les blues lents, la rythmique est toujours en phase avec un guitariste et chanteur qui ne se prend jamais les pieds dans le tapis et qui assure le coup avec précision. La salle continue à chanter après la fin du set, ce qui est plutôt bon signe, et on se dit que si le jury a aussi bien apprécié que l’assistance, on pourrait bien ne pas en rester là …

Les résultats tomberont tard dans la nuit et il est plus d’une heure trente du matin quand Kimberley Horton, CEO et Présidente de la Blues Foundation, annonce enfin la liste des finaliste dans laquelle il ne restera que très peu d’Européens et malheureusement aucun Français …

Samedi 11 janvier :

C’est le grand jour de la finale et on commence ce grand marathon de blues avec Cory Luetjen & The Traveling Blues Band Duo de Charlotte Blues Society, un duo qui unit la guitare et le saxophone pour un blues à deux voix qui ne fait pas semblant. Le public entre directement dans le good trip que nous proposent les deux bluesmen ! C’est élégant et plein de relief et on ne s’ennuie pas un instant à l’écoute d’un groupe qui joue intelligemment entre puissance et délicatesse ! Une belle entrée en matière donc …

On passe au premier groupe de la journée avec les Australiens Nardia de Melbourne Blues Appreciation Society qui démarrent fort avec un titre très suggestif, « Fire in my Kitchen », portés par une chanteuse que joue de ses formes, mais sans vulgarité. A ses côtés, ça assure grave avec une rythmique puissante et un guitariste virtuose, un peu trop même par moments ! Mais ça le fait et la salle apprécie. Une cover de « I’d Rather Go Blind » en cours de route finira de rendre le set très consistant.

Retour aux solos/duos avec 2 Blues For You de Mississippi Delta Blues Society of Indianola, une formation originale combinant un pianiste qui joue aussi du trombone et un batteur, le tout pour un blues qui lorgne parfois du côté du ragtime mais qui tient généralement ses fondamentaux avec une précision impressionnante de réalisme. Si le choix d’un duo sans guitare peut surprendre de la part de la blues society de la ville de BB King, force est de constater que le résultat est à la hauteur et que cette place en finale est amplement justifiée !

The See See Riders de Blues Baltica nous arrivent d’Allemagne avec un blues acoustique qui sent bon l’héritage des années 20, 30 et 40 avec sa configuration à deux guitares, un violon et une contrebasse pour quatre voix. On se promène du côté du Piedmont mais aussi des jug bands de Bluff City et on se régale d’une superbe musicalité qui parvient à embarquer l’assistance dans un monde où vintage ne veut absolument pas dire passéiste ou dépassé. Une cover des Mississippi Sheiks pour refermer le set et on en termine avec un des très bons moments de ce quarantième IBC avec un groupe que l’on retrouvera sur différentes scènes d’Europe cette année, c’est certain !

Joce Reyome de East Coast Blues Society au Canada est une jeune femme pleine d’humour qui arrive seule en scène avec sa guitare et son chant et qui nous régale de sa voix puissante, un peu trop parfois, et de son jeu précis. Entre ses propres morceaux et une cover de Johnny Cash, on suit cette artiste native de Boston qui vit aujourd’hui au Canada dans un set assez bien équilibré et pas piqué des vers ! Il est difficile de se retrouver seule sur une aussi grande scène et Joce Reyome aura su intelligemment et sans trembler relever le défi ! Un de nos coups de cœur de la journée …

Le contraste est complet avec Ra'Shad The Blues Kid de Magic City Blues Society qui déboule à huit sur scène pour une grosse démonstration de rhythm’n’blues musclée à souhait ! Deux guitares, un harmoniciste et un pianiste et une section rythmique mais aussi une paire de choristes et danseurs, c’est un show complet et bien consistant que nous propose le Blues Kid, avec de belles excursions du côté de la soul et du blues pour finir de rendre une belle copie, peut-être un peu chargée par moments, mais c’est pour la bonne cause et ça fait du bien à entendre ! Le groupe a sorti ce soir quelques as de sa manche, reste maintenant à voir si cela aura l’effet escompté !

Nick Charles de Melbourne Blues Appreciation Society est seul avec sa guitare et vient nous servir un picking très fin et élégant tout en entrant dans un rôle de storyteller qui lui va comme un gant. La voix solide, la guitare aiguisée et le costume parfaitement ajusté finissent de faire naviguer le bluesman dans registre ou l’on pourrait mettre Charley Patton, Robert Johnson, Sonny Terry ou encore Elmore James et c’est avec gourmandise que l’on se délecte de ses blues, certes traditionnels, mais adaptés de manière contemporaine. Un bel artiste !

Josh Hoover & Soul Colossal de Blues Society of Omaha est un sextet qui marche dans les traces laissées par les artistes de la Stax et qui le fait plutôt bien avec des cuivres bien agréables et avec un leader au piano très bien épaulé par un guitariste inspiré. Le ton est juste et le son est bon, autant de bonnes raisons de se laisser porter par un mélange de soul et de rhythm’n’blues carrément bien dosé et par des titres qui ressemblent déjà à des standards. L’Orpheum est conquis, le laisse entendre sans aucune hésitation, et c’est amplement mérité !

On en arrive à John F. Klaver de Dutch Blues Foundation que l’on connaît depuis déjà un bon moment et on retrouve avec plaisir le Néerlandais qui se produit cette année en acoustique et en solo. Avec ses chansons très personnelles, l’artiste parvient à prendre le public dans sa main et à le convaincre, ce qui n’est pas facile sur une aussi grande scène. Ajoutant à l’occasion un trait d’humour à sa prestation, John F. Klaver parviendra à s’attirer la sympathie d’une assistance qui commence un peu à s’essouffler après quatre heures de musique d’affilée.

Dylan Salfer Band de Minnesota Blues Society est un sextet qui a la particularité de jouer avec deux batteurs mais aussi d’avoir un orgue Hammond et un saxophone … Le son de la guitare est absolument horrible et fort et ça gâche carrément tout en produisant une bouillie sonore indigeste qui ne laisse rien passer d’autre, nous privant en bordure de scène de tous les détails de la musique qui ne deviennent audible que dès que le leader arrête de jouer pour chanter sans sa guitare ! Ca s’arrange un peu quand il pose sa Telecaster et attrape sa Les Paul mais c’est regrettable d’avoir aussi peu de discernement, surtout quand on arrive à ce niveau du challenge ! Dommage …

On termine cette finale avec Lynette Barber and Will Ellis Duo de Triangle Blues Society, une formation piano voix qui ne manque pas de charme et qui nous offre un blues légèrement jazzy comme on peut souvent en entendre dans les piano bars des États Unis et d’ailleurs. Lynette Barber raconte ses histoires avec une voix puissante et convaincante tandis que Will Ellis frappe ses touches avec un réel talent et c’est un final de belle qualité qui nous est proposé au bout de près de cinq heures trente de finale, une paille comparé aux sept ou parfois huit heures des années précédentes !

Après une légère attente des résultats, on découvre le palmarès de cette édition 2025, quarantième du nom :

 

Meilleur album autoproduit : « Revelation » de Pipper & The Hard Times

Meilleur Harmoniciste : Jock Webb Sr. de Ra’Shad The Blues Kid

Meilleur guitariste solo/duo : Nick Charles

Meilleur guitariste groupe : Dylan Salfer

 

Seconde place solo/duo : 2 Blues for You

Première place solo/duo : Joce Reyome

 

Troisième place groupe : Dylan Salfer Band

Seconde place groupe : Ra’Shad The Blues Kid

Première place groupe : Josh Hoyer & Soul Colossal

Dimanche 12 janvier :

C’est la première journée post-International Blues Challenge et elle va commencer comme tout le temps par un très grand moment puisque nous sommes quelques-uns à nous rendre à la Peace Baptist Church, dans les faubourgs de Memphis, pour assister à la messe dominicale. Rendant visite régulièrement à cette communauté, nous sommes immédiatement reconnus et accueillis chaleureusement et nous assistons, captivés, à cette débauche de ferveur en musique. Les sermons évoquent entre autres les incendies de Californie et la musique nous emmène entre spirituals, gospel et soul avec un band qui assure grave. Les fidèles vivent pleinement l’instant et le clou de la matinée sera surement cet époustouflant « Amazing Grace » qui sera interprété par Grant Haua et qui mettra toute l’assemblée dans une sorte de transe incroyablement forte et prenante. Les accolades et autres messages de félicitations au bluesman Maori fusent de toute part et chacun s’assurera d’avoir pu saluer comme il se doit le héros du jour. Il y a des moments de vie qui valent plus émotionnellement qu’une victoire à l’IBC et Grant vient de le comprendre ce matin.

Nous prenons maintenant la route de Nashville où nous arriverons en fin de journée, une fois la nuit tombée, mais en cours de route nous ferons une halte à Brownsville pour tenter d’y visiter le musée dédié à Tina Turner et la reconstitution de son école à laquelle est accolée la maison de Sleepy John Estes. Malheureusement, en raison de la neige, le West Tennessee Delta Heritage Center qui abrite le musée est fermé et nous ne pourrons pas nous entretenir avec le personnel, toujours très charmant, et découvrir les expositions relatives à Tina Turner mais aussi à la musique en général, à l’agriculture et à la vie sauvage. C’est d’autant plus regrettable que l’année dernière à la même période, le centre était déjà fermé pour la même raison et que cette visite fait traditionnellement partie des moments importants de nos visites en Terre de Blues.

On file donc vers Nashville et une fois installés dans notre hôtel, nous partons prendre notre dose de blues du soir en nous rendant au Bourbon Street Blues & Boogie Bar sur Printers Alley, une ruelle devenue mythique où l’on trouve plusieurs clubs de musique. Par chance, l’endroit qui compte parmi les plus courus de Music City n’est pas trop chargé à notre arrivée et nous nous installons à une table juste en face de la scène, ce qui nous permet de profiter pleinement du spectacle proposé par le House Band, le Stacy Mitchhart Band, qui se produit ce soir sans Stacy Mitchhart mais avec son bassiste, Michael Dearing, et avec le saxophoniste Jules Caldarera, le batteur Darin James et le claviériste et trompettiste Cory Distefano. Accueillant un guitariste dont le nom nous a échappé, le groupe nous servira durant un set tout entier quelques standards du blues et du rock avec énormément de maitrise et beaucoup de charisme, chacun prenant à son tour le chant lead et donnant sans compter pour que le show soit non seulement solide mais aussi agréable à entendre. Ces gars-là jouent à la maison et se font plaisir à le faire, ça s’entend forcément !

Il ne restera plus ensuite qu’à reprendre la route pour rejoindre notre hôtel et nous remettre tranquillement de cette première décade bien chargée en émotions …

Lundi 13 janvier :

Nous consacrerons cette journée entière à la découverte de Nashville et de Gibson Garage jusqu’au Hard Rock Café en passant par les multiples clubs de Broadway et par les nombreux vendeurs de bottes et de chapeaux, nous ne nous lasserons pas d’admirer les incroyables enseignes lumineuses de Music City, avec en cours de route différents arrêts dans les clubs locaux avec plus ou moins de bonheur selon les groupes qui s’y produisent et la bière qu’ils servent. Du bon et du moins bon, c’est ce qui attend le chaland quand il se déplace dans les endroits branchés de Nashville et que ce soit de la country, du rock, du blues ou du jazz, il faut vraiment gratter le vernis pour réussir à trouver de temps à autres quelques belles choses en dessous. Nous sommes en janvier et les températures sont proches ou en dessous de zéro, ce qui fait que la vie est quelque peu au ralenti et que les touristes ne sont pas légion en ville, alors avec un forfait parking à 35$ plus taxes pour douze heures, mieux vaut en profiter autant que faire se peut !

Une fois la nuit tombée, nous décidons de retourner vers le Bourbon Street Blues & Boogie Café où la soirée commence avec Alex Kramer et son groupe qui nous servent là encore des standards en tous genres allant du répertoire de Carlos Santana jusqu’à celui de Bill Withers en passant par Otis Redding et nombre d’autres encore. Le club n’est pas plein à notre arrivée mais outre nos Frenchys, on trouve quelques Canadiens et des gens venus de différents états du pays, de quoi motiver le leader du band qui ne manque pas de saluer les uns et les autres comme il se doit. Après la pause d’une demi-heure aux alentours de 20 heures, c’est le même Alex Kramer qui revient, mais cette fois avec un autre groupe qui se chargera d’animer la jam du lundi, un rendez-vous important si l’on en croit le nombre de musiciens venus s’inscrire sur la liste des participants et grossir de façon très importante la clientèle du Bourbon Street Blues & Boogie Café. Et comme jam session signifie toujours standards à gogo, inutile de vous raconter ce qui sera interprété ce soir …

On finira par s’éclipser pour rejoindre le camp de base du soir car demain, nous aurons beaucoup de route et sans doute quelques arrêts intéressants à proposer …

Mardi 14 janvier :

C’est quasiment jour de messe aujourd’hui puisque nous prenons la direction de Lynchburg avec pour finalité la visite de la distillerie Jack Daniel’s, un endroit qui à l’image de la marque est bourré de plans marketing mais qui vaut néanmoins le détour puisque la visite de la distillerie est pleine d’authenticité et d’anecdotes croustillantes … On commence par le brûlage du bois d’érable destiné à produire le charbon de bois qui filtrera le précieux whiskey puis on file du côté de la grotte qui, comme à Lourdes, apporte ses bienfaits en offrant une eau pure indispensable à l’élaboration du breuvage vendu et apprécié dans le monde entier. Place ensuite aux quartiers généraux où l’on trouve encore le coffre-fort qui a été fatal au fondateur de la marque, ce dernier y ayant donné un coup de pied qui lui brisa l’orteil et entraina à terme une gangrène et son décès. Vient bientôt la distillation par elle-même et le filtrage, autant de bonnes raisons d’apprécier la part des anges avant de filer vers la mise en bouteilles d’une série limitée que les collectionneurs paient à prix d’or chez nous, puis vers la dégustation qui a baissé d’un cran depuis l’an dernier au niveau de la gamme présentée … On remerciera néanmoins la très sympathique Maddy qui a parfaitement fait le job et nous a expliqué en détail la fabrication du Old N°7 et des multiples produits de la marque, propriété de Brown-Forman depuis 1956.

On se détend ensuite un moment en prenant le lunch au Bar-B-Que Caboose Café voisin, où l’on ne peut que remarquer le petit train qui tourne incessamment autour de la salle de restaurant, puis on fait un tour dans les boutiques locales à la recherche de goodies et autre souvenirs hors de prix, et on file ensuite très vite en direction de Muscle Shoals, une ville célèbre en Alabama pour ses divers studios d’enregistrements et en particulier pour les Fame Recording Studios et pour les Muscle Shoals Studios, les seconds ayant été créés par des transfuges des premiers. On marque un rapide arrêt chez Fame pour programmer une visite demain matin et on part ensuite vers l’hôtel pour se remettre d’une journée qui, une fois encore, a été longue et quelque peu éprouvante. Ce soir, c’est quartier libre, pas de musique au programme, juste de la détente, un peu de bon temps entre amis et quelques fruits de mer …

Mercredi 15 janvier :

Après l’orgie de fruits de mer d’hier soir, nous attaquons ce matin dès l’aube en partant à la découverte des studios Fame avec une visite guidée des lieux où ont enregistré par le passé, entre autres, Wilson Pickett, Aretha Franklin, Gregg Allman, The Allman Brothers et tant d’autres encore. Si le studio A est quelque peu encombré suite à une session nocturne avec notre ami producteur Matt Ross Spang, plusieurs fois récompensé aux Grammy Awards, le studio B est pour sa part vide de tout instrument et, par la force des choses, un peu moins intéressant à découvrir, même si notre guide ne manque pas de nous raconter dans le détail toutes les bonnes choses qui s’y sont déroulées. Un tour dans le gift shop pour s’offrir quelques souvenirs en fin de visite et nous serons bientôt prêts à reprendre la route en direction de Tupelo, à environ une heure trente de route de Muscle Shoals.

Tupelo est la ville natale d’Elvis Presley et outre la maisonnette où il a poussé son premier cri, toute la ville ou presque lui est dédiée avec des endroits mythiques comme le Johnnie’s Drive In où celui qui n’était pas encore le King venait manger ses hamburgers, ou encore comme le Tupelo Hardware où la mère du jeune adolescent réussit à le décider de choisir une guitare au lieu du pistolet qui lui faisait tant envie … Partout dans la ville, on peut trouver des lieux qui ont vu passer le jeune Presley, qu’ils soient importants ou plus anecdotiques, et à chaque coin de rue, on trouve tantôt un portrait, tantôt une statue qui rappelle celui qui, en peu de temps, est devenu une véritable légende adulée par des millions de fans. Petite ville prospère d’une petite quarantaine de milliers d’âmes, Tupelo et son Elvis Trail sont devenus, grâce à l’Office du Tourisme local, une des destinations indispensables de tous les amateurs de rock’n’roll, et c’est tant mieux car il est toujours plaisant d’y faire un arrêt, ou mieux, d’y passer la soirée.

On reprend la route car notre destination du jour est Jackson et qu’il faut encore compter près de quatre heures de route pour s’y rendre en empruntant une voie mythique, la Natchez Trace Parkway qui, sur 444 Miles, traverse trois états. Nous cheminerons aujourd’hui sur un peu plus d’un tiers de ce couloir de voyage historique utilisé par les Indiens d'Amérique, les "Kaintucks", les colons européens, les marchands d'esclaves, les soldats et les futurs présidents. Un arrêt à Kosciusko pour y découvrir le marker de Charlie Musselwhite, qui a vu le jour dans cette petite ville fin janvier 1944, puis un autre au Visitor’s Center tenu par un des cousins du formidable bluesman et nous rejoindrons enfin Jackson où, après un repas pris chez Martin’s, nous irons faire un tour sur Farish Street by night histoire de palper l’atmosphère glauque et pas très sécurisante du quartier … Pas grand monde dans le secteur, hormis quelques voitures de police tous gyrophares allumés, peut-être simplement pour effrayer le chaland puisque rien ou presque ne bouge dans le secteur depuis belle lurette !

Renseignements pris auprès des amis en ville, de Peggy Brown jusqu’à Bobby Rush, il n’y a rien de bien folichon à aller écouter ce soir et nous décidons donc de prendre un peu de repos après cette longue journée de route …

Jeudi 16 janvier :

Nous commençons la journée en retournant vers Farish Street pour y retrouver les souvenirs de la glorieuse époque où l’endroit était l’épicentre du blues à Jackson puis nous passons près du Queen Of Hearts, un club fondé dans les 70’s qui a accueilli nombre de grands bluesmen et qui tombe aujourd’hui en décrépitude, un peu à l’image du quartier populaire dans lequel il est situé … Le blues est une musique qui ne fait plus trop recette aux Etats-Unis, quand bien même le pays regorge de très bons artistes, mais ces derniers sont souvent confinés dans de petits lieux qui sont essentiellement courtisés par les spectateurs avertis. Il n’en reste pas moins que Jackson a su reconnaitre les siens et que la ville a baptisé une de ses artères importantes du nom de « Bobby Rush Boulevard », une reconnaissance toute particulière, reçue qui plus est de son vivant par un artiste on ne peut plus brillant, sympathique et engagé pour la transmission du genre.

On file maintenant à Vicksburg et on s’offre un grand tour dans cette ville qui a été le théâtre d’une rude bataille durant la Guerre de Sécession entre mai et juillet 1863, mais qui a également eu une réelle importance pour tout ce qui concerne la musique, il n’y a qu’à compter le nombre de markers de la Mississippi Blues Trail qui y sont installés pour s’en rendre compte. On fait donc un grand tour sur Washington Street qui abrite deux musées, le premier dédié au Coca Cola, l’autre à la Guerre Civile, et on en profite pour jeter un œil à la splendide gallerie de HC Porter mais aussi pour rendre visite à notre amie Michel Fedell, propriétaire de Michel’s Music, un magasin où l’on trouve disques, instruments, cours de musique et même une scène pour jouer. Une institution en ville et un endroit à ne manquer sous aucun prétexte tant il est chaleureux et chargé d’histoire, toujours tenu par sa très sympathique gérante qui officie toujours malgré le poids des années et une agression violente qui lui a laissé des séquelles.

On emprunte ensuite la Highway 61 pour se rendre à Rolling Fork, la ville natale de Muddy Waters dans laquelle on trouvait, avant le passage de plusieurs tornades fin mars 2023, une reconstitution de la maison de son enfance … Malheureusement, les éléments sont plus forts que l’homme et la ville entière a été dévastée, mettant à terre la plupart des habitations mais aussi l’hôtel de ville et le commissariat. Aujourd’hui, Rolling Fork panse ses plaies, les champs de ruines ont été déblayés, les maisons rescapées reprennent petit à petit des couleurs et ça reconstruit tranquillement, à son rythme, avec un mélange de patience et de résilience. Les gens se demandent parfois ce que l’on vient faire ici maintenant qu’il n’y a plus rien, ou presque, et quand on leur explique que ce n’est pas du voyeurisme mais simplement de la condescendance et de la solidarité dans cette épreuve, ils vous remercient et vous sourient …

De sourires il sera encore question une heure plus tard quand nous arriverons à Bentonia et que nous franchirons la porte de Blue Front Café où, paisiblement installé devant la télé, une cigarette à la bouche, Jimmy "Duck" Holmes lancera spontanément un « Hey my friend, nice to see you again » ! L’homme est plutôt ténébreux, pas franchement causant, mais quand il vous a à la bonne, vous êtes considéré quasiment comme de la famille. Etant donné qu’il n’y a pas de musicien dans le groupe cette fois, nous n’aurons pas droit à la traditionnelle leçon de Bentonia Blues que le bluesman nominé aux Grammy Awards prodigue volontiers aux visiteurs, mais en lieu et place, nous aurons un long échange avec lui sur notre voyage et sur ses étapes, sur les gens que nous avons pu rencontrer et sur ceux qui n’étaient pas là, ou plus là … Encore un grand moment qui s’achèvera par une photo souvenir devant le front porch du juke joint et par un rendez-vous fixé pour juin prochain et notre prochaine visite dans le Deep South …

Jackson n’a pas grand-chose de musical à nous proposer ce soir, nous irons donc finir la soirée chez Martin’s autour de quelques plats copieux et servis avec beaucoup de gentillesse de la part des serveuses. Le voyage tire à sa fin et la fatigue commence à se faire sérieusement sentir … Nous ne trainerons pas à nous endormir ce soir !

Vendredi 17 janvier :

C’est la dernière véritable journée du périple et nous comptons bien en profiter jusqu’au bout pour découvrir de nouveaux endroits, c’est donc en direction de Memphis que nous partons avec en cours de route quelques étapes, à Belzoni pour commencer. Belzoni est la capitale mondiale du catfish et nombre de statues de ces poissons ornent les rues de cette ville où l’on trouve quelques markers dont celui de Denise LaSalle, native du comté de Leflore, mais aussi celui de Pinetop Perkins qui est né à Belzoni en juillet 1913. Derrière ce panneau au nom du pianiste qui fait office de témoignage pour la postérité, deux vieilles cabanes se délabrent année après année, ce qui apporte une certaine tristesse au paysage de cette longue plaine agricole que nous parcourons depuis déjà près d’une heure …

L’arrêt suivant se fera à Indianola pour saluer notre ami Robert Terrell du BB King Museum mais aussi pour aller voir la rénovation faite il y a déjà quelques années sur le Club Ebony, racheté par BB King en 2008 puis offert au musée quatre années plus tard. Aujourd’hui, le club revit ses belles heures de gloire et si l’intérieur a quelque peu changé, on y entend du très bon blues quotidiennement. On file ensuite vers Holy Ridge où est inhumé Charley Paton mais aussi quelques autres bluesmen dont Willie James Foster et Asie Payton, puis on remonte tranquillement vers Clarksdale … Cette semaine, le Ground Zero Blues Club est ouvert et quand bien même il n’y a pas de musique en journée, nous nous y installons pour déjeuner et pour permettre aux newcomers de s’en mettre plein les yeux, chose qu’ils ne manqueront pas de faire et d’apprécier.

On reprend ensuite la route de Memphis pour y passer notre dernière soirée et forcément, c’est du côté de Beale Street que l’on se dirige, avec quelques propositions musicales comme un groupe de Texas blues au King Jerry Lawler’s, le house band du BB King’s Blues Club ou encore Earl "The Pearl" Banks au Blues City Café. Nous jetons notre dévolu sur cette dernière option et nous nous retrouvons face à un groupe qui assure avec ses trois guitaristes, sa rythmique millimétrée et son harmoniciste, mais qui n’en fait pas plus qu’il n’en faut et qui déroule, un peu comme s’il était à l’usine, des standards un peu capillotractés. Il n’en reste pas moins que nous passerons une bonne soirée entre amis à écouter un blues pas forcément très original, mais parfaitement interprété, et c’est bien là ce que nous attendions ce soir …

Il ne reste plus qu’à ajuster les valises en prévision des longs vols qui nous attendent demain … Au moment où l’on embarquera dans l’avion pour Atlanta puis dans celui pour Paris, nous aurons très certainement dans la tête des images de cette grosse quinzaine de jours passée en Terre de Blues en bonne compagnie, avec moultes visites et au moins autant de belles rencontres. Ces voyages quasiment initiatiques sont toujours l’occasion pour ceux qui savent ouvrir leur cœur et leur esprit de découvrir, de partager, d’apprendre à connaitre les choses et les lieux où elles se sont déroulées et l’édition 2025 aura été en ce sens plus que formidable avec quatre formations au top et des accompagnateurs plus que sympathiques. Des éditions comme celle-là, on en redemande à chaque fois !

Fred Delforge – janvier 2025