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TEMPT FATE pdf print E-mail
Ecrit par Yann Charles  
lundi, 19 février 2024
 

TEMPT FATE

https://www.facebook.com/temptfate31 

Rencontre avec Pierre-Louis de Tempt Fate. Il est venu "à la capitale" pour nous parler de « Holy Deformity », le tout nouvel album du groupe. Un opus qui permet au combo de passer un nouveau palier. Un très bel album à écouter, et surtout à découvrir en live.

Salut Pierre-Louis, Tempt Fate, le nom de votre groupe peut être traduit de différentes manières : tenter le diable, tenter le coup et tenter le destin. Alors dis-moi, quelle est la bonne solution ?
Alors ça pourrait être le côté destin, bien qu'on s'en foute un peu (Rires) car on n'y croit pas. En fait, c'est plus la traduction d'une expression anglaise. Elle ouvrait sur du sens. Et le fait d'ouvrir sur un horizon de possible, ça nous convenait bien.

Je sais que c'est toujours difficile, mais comment peux-tu définir le groupe musicalement ? Death metal certes, mais il n'y a pas que ça ? Je dirais mélodique, un petit peu. Mais on a aussi des petites doses de déstructuration. Et on y rajoute aussi un peu de hardcore. Brutal aussi forcément, peut-être un peu de metalcore aussi ?
Peut-être. Même si c'est un truc qu'on n'aime pas trop. Même s'il y a des trucs vraiment super dans le metalcore. Mais c'est moins notre tasse de thé on va dire. En fait, c'est un mix de tout. On essaie de prendre des éléments qui nous plaisent, mais quand même en essayant d'avoir notre propre patte. On m'a dit, il n'y a pas longtemps, qu'il y avait aussi un peu de prog. Mais je ne pense pas. On a surtout envie que ça tabasse un peu et qu'il n'y ait pas trop de respirations, mais qu'il y ait aussi quelques envolées émotionnelles parce qu'on est sensible, tu vois ...

« Holy Deformity » est votre tout nouvel album, que peux-tu nous en dire ?
« Holy Deformity » est sorti sur le label Almost Famous et est distribué par Season Of Mist. C'est notre première signature de label. On est content de cet album, car par rapport aux EP précédents, on a pu définir notre patte. Les débuts étaient un peu déstructurés entre le trash, le hardcore, et des changements de tempo qui n'allaient pas toujours. Sur cet album, on a essayé de recentrer et de condenser tout ça. On a choisi huit titres. On en a sabré quelques-uns qu'on avait écrits en plus. On a préféré moins de titres, mais qui se tiennent, et que le tout soit cohérent. On voulait vraiment que cet album-là marque un tournant.

Huit titres pour un peu plus de trente minutes, on est sur des sets efficaces ?
C'est ça. Sur scène, on joue rarement plus de quarante minutes. Allez, quarante-cinq maximum. Après le batteur, il dit non. (Rires)

Sinon, quels thèmes abordez-vous ?
On est resté sur un concept où on parle de l'angoisse. L'idée est de parler des déchirements internes. Pourquoi ce sujet ? Il y a quelque chose qui me porte depuis longtemps, c'est que je travaille en psychiatrie, en profession libérale, depuis une dizaine d'années, et c'est l'endroit sur terre où bizarrement je me sens le mieux.

Quelles évolutions musicales notes-tu par rapport à « Human Trap » sorti en 2018 ?
Déjà, le line up a changé. « Human Trap », je l'ai quasiment composé tout seul. Toutes les parties, chant compris. Pour « Holy Deformity », on a le même chanteur et le même batteur, et un nouveau guitariste, qui est bien meilleur que moi, qui fait tous les solos. Et du coup, on compose beaucoup à deux et j'aime beaucoup parce qu'il est très riche en matière de riffs, et on arrive à communiquer sur la touche à apporter. J'ai des idées des fois, mais je n'arrive pas à les mener forcément à terme, car je n'ai pas la connaissance musicale suffisante. Mais maintenant qu'on compose tous les deux, la recette marche bien. Tout ce qu'il a amené est vraiment très intéressant, et sans lui, ce serait sûrement autre chose. En tout cas, on a réussi à nous resserrer autour d'un produit qui nous correspond plus en termes d'identité. On a évité tous les plans où on ne comprend pas trop où on voulait en venir, comme ça a pu être le cas auparavant. Il y a des structurations qui sont compliquées et ça, on aime bien.

Vous avez également sorti un EP en 2021, c'est la liaison entre les deux albums ou bien cela n'a rien à voir ?
Le tout premier, on l'a viré, car cela ne correspond absolument plus à ce que l'on fait. Ça restait du death, mais c'était gentillet. Mais bon, il faut bien commencer. (Rires) Celui entre les deux qui s'appelle « Old », qui est un EP 2 titres, fait la liaison avec ce qui allait arriver avec « Holy Deformity ». Il y a eu aussi deux singles en plus, donc en gros quatre ou cinq titres qui sont sortis avant l'album. Et qui justement, en termes de thèmes et de construction musicale, font le lien entre les deux albums.

L'album précédent abordait des thèmes super joyeux, enfermements psychiques, névrose ... Quels thèmes abordez-vous ou développez-vous cette fois ?
On reste dans ces mêmes thèmes. C'est une suite, un peu différente, avec en trame de fond un personnage qu'on mettrait du côté féminin, et qui se questionne sur l'intégrité de son corps, de l'angoisse que cela suscite. On essaie de l'aborder, sans aller jusqu'à la question du diagnostic, car cela m'intéresse très peu. Mais on l'aborde plutôt sur le côté psychotique, sur ce qu'il se passe dans le déchirement. Quand le corps perd son unité. Qu'est-ce qui peut faire ça ? Comment peut-on tenir ? Comment peut-on mettre du sens sur cela ? Un exemple. J'ai quelques patients pour qui ce n'est pas juste des crises d'angoisse telles qu'on les connaît, mais par exemple, il ou elle prend sa douche, et son corps part dans le siphon de la douche. Comment réagit-on à cela ? Donc on essaie de traiter de ce type de sujet. Qu'est-ce qui se déchire, qu'est ce qui se vide dans cet effondrement interne ?

C'est un exutoire par rapport à ton travail de psy ? Ou juste un ou des sujets qui te passionnent ?
Est-ce que c'est cathartique ? Je ne sais pas. C'est plutôt ma sensibilité, mon empathie, et des questions qui me préoccupent, car on n'a pas forcément les réponses à apporter. Comment se relève-t-on d'une dépression ? Qu'est-ce qui vient nous redonner corps ? Tout ça fait partie de mon boulot. Mon idée était de prendre quelque chose de tout ça et d'en faire quelque chose de plus ou moins fictif. Donc oui, c'est une sorte d'exutoire, mais en restant ouvert, pour que les autres membres du groupe, qui n'ont pas la même sensibilité que la mienne, puissent aussi se loger dedans.

Tu disais tout à l'heure que tu travailles beaucoup avec le second guitariste, mais est-ce que les autres membres interviennent aussi dans les compositions ? Comment travaillez-vous ?
On travaille beaucoup par correspondance, car on habite dans des départements différents. Ce qui a changé la donne, en tout cas pour cet album-là, c'est que la musique est majoritairement écrite par Jean-Philippe, l'autre guitariste, et moi-même. On écrit tout, tous les instrus, et ensuite, on refourgue tout ça au batteur pour qu'il n'ait pas de surprises et qu'il puisse mettre ses coups de pédales. Il réécrit quelques fois deux ou trois trucs. Idem pour le bassiste qui fait parfois aussi quelques retouches. En ce qui concerne les textes, je m'en occupe. Anthony, le bassiste, s'en occupe aussi, car on a une plume très différente, mais on est ami depuis très longtemps. On se connaît très bien. On arrive à avoir la même direction d'un concept. Et du coup, émotionnellement, on va se comprendre. On écrit le chant ensemble. Par la suite, on envoie les tablatures à tout le monde, et on fait des dernières retouches en studio, quand on se retrouve tous ensemble.

Ah oui, sur l'album précédent, il y a un titre au nom imprononçable « Wiederholungszwang », d'ailleurs, je ne vais pas essayer de le dire, ça tombe bien, c'est une interview écrite ! Par contre dans « Holy Deformity », on retrouve des titres normaux et prononçables. Vous ne vouliez pas tenter une deuxième fois l'expérience, c'est ça ?
Ah si, le dernier, « Erlebnis ». Même si effectivement, c'est moins imprononçable. (Rires)

La pochette de l'album est à la fois super belle et super effrayante. Qui a eu l'idée et qui l’a réalisée ?
Ca n'a pas fait mouche pour tout le monde. On en est très content, car c'est passé par mille débats entre nous. On n’était pas loin de se déchirer, à l'image de ce que l'on traite. (Rires) Et on en est très content, car c'est un pote qui l'a fait. Il a réussi à faire quelque chose entre la frontière avec le old school qu'il adore, et quelque chose de très moderne.

Elle est violente quand tu te rapproches, et violente également de loin avec ces couleurs qui flashent.
C'est ça. Que tu aimes ou pas, elle t'arrête, elle t'interpelle. Avec dans le fond, dans la rosace, un élément un peu christique, alors que cela ne parle pas du tout de religion, mais justement qu'est-ce que le sacré du corps ? On a un corps, on ne sait pas trop s'il est vivant ou mort, un peu en élévation.

Y-a-t-il un titre que vous voulez mettre en avant plus particulièrement, et si oui, lequel et pourquoi celui-là ?
On a sorti un clip qui s'appelle « God Ends Here », donc « Dieu s'arrête ici », qui ne traite pas de religion, mais c'est plus conceptuel dans ce que cela peut représenter. Qu'est-ce qui fait sacrer et qu'est ce qui désacralise ? C'est un clip que l'on a tourné pas loin de chez moi. Donc on a mis en avant celui-là, car le titre catchait bien. C'est un titre que j'aime bien. Même si ce n'est pas celui que je préfère, mais il fallait en choisir un. Je suis plus friand de « Filth Of Life ». C'est un morceau qui marche bien en live. Quand on aura le budget, on fera sûrement une vidéo du morceau live.

J'ai vu que vous aviez pas mal joué en 2023, vous avez déjà des dates, voire une tournée prévue pour 2024 ?
Oui. Il y a des dates qui arrivent. Des tournées ? Non. J'ai envie de lever un peu le pied en ce qui concerne les tournées. Ou alors, passer un cran au-dessus. Cela fait dix ans que l'on existe. Donc, des tournées, on en a fait quelques-unes. Beaucoup joué en France, beaucoup de bars, et on a envie d'accéder à autre chose. On a de la matière qui est un peu plus carrée qu’avant. On a un ingé-son qui nous suit. On a mis les moyens pour structurer les choses, donc ça commence à répondre et il y a pas mal de choses qui vont arriver.

On termine toujours nos interviews par cette question : quel est le dernier morceau ou le dernier album que tu as écouté ?
Ah. Je réfléchis ... Ça, c'est une colle. J'écoute de la musique tout le temps et là, le trou ... Ah oui. Alors tu vas rigoler, mais on a monté un groupe avec mes patients où on fait beaucoup de reprises acoustiques, donc j'ai écouté « Nightcall », chanson de Kavinsky, un morceau un peu electro. Alors, tu vois, ce n'est pas du tout en rapport avec l'album. (Rires)

Merci pour cette interview.
Un grand merci à toi.

Propos recueillis par Yann Charles