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VOICE OF RUIN pdf print E-mail
Ecrit par Yann Charles  
jeudi, 21 décembre 2023
 

VOICE OF RUIN

https://voiceofruin.com/ 
https://www.facebook.com/voiceofruin 

En visite en France pour la sortie de leur dernier et très bon album, « Cold Epiphany », rencontre aujourd'hui avec Nicolas, le guitariste du groupe suisse Voice Of Ruin. Et c'est à Paris, au Dr Feelgood Temple, que ça se passe. Un très bon moment !

Salut Nicolas, peux-tu nous faire un petit retour sur qui est Voice Of Ruin ?
Salut. A la base, Voice Of Ruin, c'est une bande de copains situés à Nyon, en Suisse, dans la cambrousse, entre Lausanne et Genève, qui se réunissent pour faire du hard rock et boire des bières. Comme beaucoup de groupes je pense. Moi, personnellement, j'arrive dans le groupe à partir de 2015. C'est un groupe qui a eu deux vies, la première vie où le groupe a fait énormément de dates et où on a bien charbonné, et une seconde vie où on décide de faire ça de manière un peu plus pro. Du moins de faire les choses différemment. La seule chose qui relie ces deux vies qui se sont entremêlées, c'est que les créateurs naviguent toujours autour du groupe. C'est toujours des potes et des gens qu'on voit, et par exemple, l'an dernier, je n'ai pas pu faire quelques dates à la naissance de mon fils, et c'est le guitariste d'avant qui est venu faire ces dates. On n'a jamais oublié d'être des potes.

On voit que vous avez beaucoup tourné et vers des pays où les groupes de metal n'ont pas forcément l'habitude d'aller. Je pense au Népal, en Inde, en fait pas mal en Asie. Pourquoi ce choix de pays ?
C'était une question d'opportunités. Quand c'est arrivé, on était au local et notre booker nous a demandé si on voulait une tournée en Inde ou au Népal. On s'est un peu documenté et on s'est aperçu qu'il y a une grosse fanbase de metal là-bas. Du coup, on a été là-bas. Et c'était totalement fou comme expérience. L'Inde n'a jamais été un pays qui m'a attiré, mais vraiment l'expérience a été super. Au Népal surtout. Les gars qui organisent le festival ont un groupe de metal, Underside. Et chaque année, ils organisent un festival. C'est une grande scène. C'est trois mille spectateurs. C'était vraiment incroyable comme expérience. Le reste du pays est hyper modeste, sans infrastructure, sans route, et au milieu de la ville tu as un festival qui se monte. Tu te demandes même comment c'est possible. Alors, comme tu l'as dit, ce n'est pas des pays typiques ou tu t'attends à ça. Mais c'était une proposition, et on la saisie. Et c'était vraiment super cool. L'Inde, ça a été plus compliqué, mais dans le sens où c'est une autre mentalité. Du coup, on a eu un tiers des dates qui étaient incroyables, un tiers des dates qui n'étaient pas super cool, mais bon, ça allait. Et un tiers des dates c'était plutôt What a Fuck ! (Rires). Exemple, on joue dans un bar à New Delhi. Le gars donne un tabouret à notre ingé-son pour qu'il pose sa table de mix. Et moi, je me souviens du concert où il tient sa table de mix pour pas qu'elle tombe, les mecs qui le bousculent. Dans la salle, il n'y a pas les bonnes prises, mais pas de souci. Ils dénudent les fils au canif et branchent ça dans ta prise. On se demande encore comment tout n'a pas sauté ou cramé. Alors, c'est vrai, qu'il y a eu des moments très durs, mais on a eu des moments humains tout à fait incroyables. Je me rappelle que dans une salle, trois gamins nous ont dit qu'ils ont fait quinze heures de route pour venir nous voir. Ils nous avaient vus sur internet, et ils ont donc décidé de venir. Quinze heures de bagnole pour nous ! Incroyable.

Vous sortez votre quatrième album, « Cold Epiphany », que peux-tu nous en dire ?
C'est un changement pour Voice. Du tout au tout. Après le Covid, on avait décidé de ne plus rien faire pendant au moins quatre mois. En fait, le Covid c'est la fin de la première vie du groupe je pense. Après être allé enregistré en Suède, on revient, on fait quelques dates, et tout s'arrête brutalement. Et là, tu réalises que tout ce que tu as construit, tu ne vas peut-être pas pouvoir vivre de la musique et tout ce genre de choses. Après pour l'album, on a décidé de faire les choses différemment. On a pris le temps de faire trois sessions d'enregistrement distinctes. Et, ensuite, pour composer l'album, j'ai fait en fonction des directives données par le groupe. J'envoie des démos, ils me donnent leur avis, et on fait la chanson. De temps en temps, le bassiste envoie quelques démos, et là, on a fait tout le contraire. On a pris une maison, et honnêtement, les premiers jours, on n'a rien fait. Randy a ouvert son bar à cocktails, donc on a passé notre temps à boire des cocktails (Rires). Et un matin, je me suis levé et j'ai commencé à composer. Les autres pareil. Et la mayonnaise a commencé à prendre, et à partir de là, on a commencé à définir ce qu'on voulait faire. On a fait une dizaine ou une vingtaine de démos, et on jette tout sauf un titre. Là où travaillait Dario, il y a eu la possibilité d'avoir un studio dans un entrepôt. On a refait une série de morceaux, et, je te la fait courte, ça a duré quatre ans à faire des morceaux, à garder et à jeter. Et au final, on en a gardé neuf. On est ensuite allé en studio et à partir de là, on a pris notre temps. Si tu vas en Angleterre ou en Suède comme beaucoup de groupes, dans un super studio, tu payes pour trois semaines, mais tu n'as pas une minute de plus. Et comme là on s'est dit qu'on ferait un focus sur la voix, on savait qu'il nous faudrait du temps.

Du coup, si vous avez une quarantaine de titres, il vous reste du matériel pour les futurs albums non ?
Non. Car après les neuf titres qu'on a conservé, on n'a rien gardé du tout.

J'allais te demander si c'était une suite à l'album précédent, mais non du coup?
Non, du tout. Dans « Acheron », les gars me disaient, quand je composais, qu'il fallait mettre plus de mélodies de guitares, mais là, non. Les tempos sont plus lents et il y a plus de riffs de guitare plus simples, moins de notes. Dario, le batteur, avait commencé à faire beaucoup d'instrus pour l'album précédent, qu'on a pu greffer sur la fin. Mais là, dès le début, on a intégré son instrument.

Pourquoi ce titre, « Cold Epiphany » ?
Quand on a commencé à composer, j'ai dit à Randy que ce serait cool qu'ils parlent des différents archétypes d'un tueur, l’archétype d'un mec qui chasse une mouette, mais ça se retourne contre lui. Il y a l'histoire du mec qui a raté sa vie, mais qui ne s'en aperçoit qu'à la fin. En fait ces archétypes, remplis de clichés, qui permettent de glisser certains thèmes qui sont des thèmes qu'on raconte tous dans notre vie en grandissant. Le côté comédie de famille, c'est un peu ce qu'il s'est passé avec ce groupe. On a réalisé qu'on en vivrait peut-être pas. En tous cas le côté MTV, le bus et tout ça, c'était faux. En fait, on a compris qu'il y a beaucoup d'apparat, mais que beaucoup n'en vivaient pas. Donc pour nous, ça a été un peu la fin du rêve de gosse qu'on avait tous. Et du coup, on s'est dit qu'on allait faire de la musique pour faire ce qu'on a envie, comme au début, et on veut maintenant juste passer du bon temps entre potes, faire des voyages. Revenir à la base pour du pur plaisir.

Musicalement, on est plutôt dans du death metal, une touche de symphonique, peut-être un peu thrash, avec une touche groovy et l'énergie du metalcore. J'ai bon ? Sinon, comment vous définissez-vous ?
Le côté groovy, c'est ce sur quoi est revenu Randy sur les deux derniers albums en nous disant que c'est top. Mais moi, pour les textes, c'est pas l'endroit où je suis le mieux. Et cette fois, toutes les chansons qu'on a composé, on les a fait en fonction de la voix. Randy a fait des lignes de voix qui étaient géniales, on a tout bazardé ce qu'on avait fait avant la voix, et j'ai recomposé toutes les guitares pour que la voix soit bien en avant. Et du coup Randy est beaucoup plus à l'aise sur ces temps plus lents, et c'est exactement ce qui convient. Mais bon, sans rentrer plus dans les détails, on est un groupe de metal tout simplement avec une belle tendance au metalcore. Bien que metalcore, c'est devenu une sorte de fourre-tout, mais ça me convient très bien. En fait peu importe l'étiquette, l'essentiel c'est que les gens écoutent cette musique.

Vous avez travaillé avec Mike Kalajian pour le mastering, une des références dans le domaine, nominé aux Grammy Awards. Pourquoi lui ?
Les masterings ne se sont pas toujours bien passés auparavant, dans le sens où tu vas dans les grandes maisons de mastering, tu payes le nom, et quand tu reçois les premiers masters, ça ne sonne pas. C'était écrasé, ça ne sonnait pas bien du tout. Comme pour cet album, j'ai produit et mixé tout l'album, je voulais quelqu'un d'autre pour le mastering. Et pourquoi lui ? J'ai vu qu'il a fait le dernier album de Periphery et je trouve qu'il a un mix hyper intéressant. Je n'aime pas trop ce groupe, mais le mix est sensationnel. Il y a beaucoup de fréquences basses que beaucoup de groupes de metal coupent. Et bosser avec Mike, ça a été un rêve. Il a été tellement cool, tellement réactif, avec beaucoup de retours sur l'album. Et quand on a reçu la version 1, c'était exactement ce que j'avais en tête.

Vous recherchiez quoi, un nouveau son ? Et qu'est-ce qu'il vous a apporté ?
Lui a cette façon de masteriser qui est un peu différente des autres. Sur notre album tout a été fait en analogie, rien sur ordinateur. Il ne le fait pas toujours, mais il avait compris ce que je voulais. Je voulais quelque chose qui sonne fort, mais qui soit aussi bien rempli de basse. Plus que ce que les autres font maintenant. Et ça, il l'a vraiment très bien fait.

Est-ce que vous composez vos titres pour la scène ou pas forcément ?
Avant non, maintenant oui. Avec l'expérience, dès les premiers riffs de guitares, si les gars sentent qu'on va pouvoir le jouer et surtout le garder comme ça sur scène, on garde. Sinon, on jette. A part peut-être « Cyanide Stone » qui était un featuring, et il faudrait une voix féminine, tous les autres titres seront joués sur scène. On n'est pas un groupe avec des techniciens sur tous les instruments, et avec l'expérience, on s'est aperçu que même si tu n'es pas un groupe hyper technique, les gens s'en foutent un peu. Ce qu'ils recherchent, c'est l'efficacité, le groove.

Tu viens d'en parler, vous avez fait un morceau avec Anna Murphy, qui, on va dire, évolue plus dans le folk metal (elle a été vocaliste, flûtiste et vielliste au sein d’Eluveitie). Pourquoi elle ?
Parce qu'on l'a rencontrée sur une date et au moment où le morceau a été composé, c'est Daryl qui chantait les parties claires, et il doit aussi faire un taping en live sur ce morceau. Il s'est dit qu'il y a de fortes probabilités que, s’il n'est pas dans un bon jour, il risque de foirer l'un ou l'autre. Et Irving a toujours aimé ce que faisait Anna, et il l'a contactée. Et ça s'est fait comme ça. Et ça colle bien car le morceau est hyper mélodique, celui où j'ai mixé les synthés les plus forts, et c'est vraiment parfait avec son style. Irving a eu raison sur ce coup-là.

Par contre ça doit être compliqué de faire une set-list de concert, qu'est-ce qu'on retrouve sur scène ?
Avant, ça l'était. Maintenant pas trop. On a élaboré la set-list et les choses sont venues assez naturellement. La seule question qui se posait était comment on alterne le rythme pour être sûr d'assurer le set de A à Z. Mais il y aura des chansons des anciens albums.

Vous avez fait beaucoup de clips ou vidéo live, c'est pour être très présent sur les réseaux ? C'est important cette présence ?
J'aurais envie de oui, malheureusement, car, je parle pour moi, je suis de la vieille école dans le genre où ce n'est pas mon focus principal. Personnellement, je ne suis pas très actif. Les autres le sont beaucoup plus. J'ai remarqué qu'en France, chaque fois qu'il y a une promo, les gars font plus la promo du clip que de l'album en lui-même, et avant les dates. Je ne pense pas, encore une fois c'est mon avis personnel, que ce soit ça le meilleur moyen de promotion. Franchement, je me demande encore qui regarde les clips en entier et enchaîne clips sur clips. Mais quand même, pour les clips de cet album, on a voulu se faire plaisir car Cédric, le réalisateur des clips, est très films d'horreur, et même vieux films d'horreur. Et Randy aussi. Et le résultat, c'est que je pense que ce sont nos meilleurs clips, et surtout on s'est fait plaisir.

Ce n'est pas trop difficile de scénariser vos clips ? Qui s'en charge ?
Randy et Darryl. Randy est le guitariste lead, mais ne compose pas forcément les morceaux. Mais c'est un petit prodige de la guitare. Et il est aussi très films. Donc c'est lui qui écrit les scénarios des clips avec Randy et le réalisateur.

On peut parler de la pochette de cet album, particulièrement réussie ?
Celle-là, c'est Travis Smith qui l'a fait. Il avait fait celle de « Purge And Purify ». Ce qu’il y a de bien, c'est que Travis s'est souvenu de nous, et alors qu'il bossait sur le Periphery et plein d'autres groupes, je me suis dit, on va lui envoyer des messages et on verra bien. Et donc on lui a envoyé les textes et on lui a juste dit qu'on voulait la couleur bleue, et il nous a renvoyé le truc. Impeccable !

Deux mots pour parler du metal, en général, en Suisse. De premier abord, ce n'est pas le premier pays auquel on pense en parlant metal, mais depuis quelques années, il y a une belle émergence de groupes non ?
Alors la scène Suisse, on a quelques gros groupes, Samael par exemple, à l'époque, est le premier groupe de metal qui passe le million de disques vendus. Il y a aussi Zeal And Ardor qui lui aussi marche super bien. Sinon, il y a une petite scène en Romandie. En Suisse alémanique, pendant des années, il n'y a pas eu de scène, mais elle commence à émerger et ils font les choses bien. Par contre, ce qui est marrant, c'est que ce sont eux qui ont tous les gros concerts. Nous, on gravite surtout autour de la scène française. Je pense que c'est parce qu'on a toujours aimé venir jouer en France et qu'on a surtout toujours été bien accueillis.

On a une question rituelle pour terminer les interviews : quel est le dernier morceau ou le dernier album que vous avez écouté ?
La toute dernière chose que j'ai écoutée, c'est Kordhell. C'est du phonk, qui a un peu à la base le rap de Houston mis à la sauce electro drift Tokyo, et en écoutant, j'ai eu l'impression d'entendre des samples de Rammstein. C'est composé comme du metal dans les structures, j'ai découvert ce type et je trouve que ça tabasse bien. Souvent entre les albums et les compos je me nettoie un peu les oreilles en écoutant autre chose. Et comme ma femme est brésilienne, j'écoute aussi pas mal de guitaristes brésiliens. En tant que guitariste, j'essaie d'ouvrir mes horizons, même si je reviens toujours au metal !!

Merci beaucoup pour l'interview.
Merci beaucoup à toi. C'était cool.

Propos recueillis par Yann Charles