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Ecrit par Yann Charles |
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samedi, 23 juillet 2022
WNTRHLTR
https://www.facebook.com/wntrhltr
Rencontre avec Thomas, le chanteur/guitariste de Wntrhltr. Un nom
étrange, imprononçable, mais dont l'album « Deu.Ils » ne laisse pas
indifférent. Un artiste attachant qui nous parle de cet opus et de
son groupe.
Salut. Deux définitions d'après le dossier presse
pour "Winterhalter" : laquelle convient le mieux : le peintre
Franz Xaver Winterhalter et son existence compliquée, qui pourrait
bien se rapprocher de pas mal de vos textes, ou la version
signifiant Gardien de l'Hiver ?
Salut. Alors on va prendre la version du peintre Franz Xaver
Winterhalter. Le Gardien de l'Hiver, c'est plutôt un côté meute et
rassemblement. Pour le peintre, c'est plutôt son histoire qui m'a
aidé à écrire sur cette question de la dualité. Car lui était issu
d'une famille très pauvre, allemande, et il s'est retrouvé sur le
devant de la scène en devenant peintre à la cour d'Angleterre. Quand
il revenait en Allemagne, c'était un "pourri vendu, t'es un Anglais"
et en Angleterre, c'était tout l'inverse. C'est cette question de
dualité qui est omniprésente dans l'album.
Tu aimes les choses compliquées non ? Le nom du groupe sans
voyelles, imprononçable …
En fait c'est parce que j'avais envie de resserrer tout ça,
comme un peu un nom de culte. Pour que le gens qui comprennent
soient dans la confidence, un peu comme un secret que l'on peut dire
à l'un ou l'autre mais pas à tout le monde. Bon, là, du coup, c'est
tombé un peu à l'eau avec les interviews de présentation de l'album.
(Rires) Mais voilà, je voulais un petit côté mystique et
mystérieux.
Et le titre de cet album, « Deu.Ils », je ne sais pas non plus
comment il faut le prononcer ?
(Rires) En fait il faut le prononcer Deuils. Comme Deuils
au pluriel, mais écrit en DEU et ILS. Tout ça pour rester dans le
thème de la dualité.
On va parler « Deu.Ils », ton dernier album. C'est un album noir,
mélancolique, quels thèmes développez-vous ?
Je pense qu'il est plus sombre que noir. Ce serait également
plus désespoir que mélancolique. Mais désespoir avec de la lumière
qui arrive au bout. C'est très sombre sur les deux premiers
morceaux, mais à la fin on reprend de la force. On s'aperçoit que ce
n'est pas la fin du monde. Et on se relève. A partir de là, c'est la
lumière qui arrive et on s'accepte et on s'autorise à souffler.
Quel est le thème ou les thèmes que tu abordes dans cet album ?
La dualité, mais ça on en a parlé. La vision des autres. Plutôt
la vision que les autres peuvent avoir de nous. Ce sont des envies
que les autres nous prennent comme on est. Mais qu'ils ne nous
voient complètement tel que nous sommes. C'est un peu compliqué de
paraître et de garder quelques secrets.
Cet album est un exutoire ? Une manière d'extérioriser des
sentiments voir des angoisses qui te touchent de près ?
Oui. C'était le rapport avec mon père. Sur le single « Light »,
c'est accepter ses démons, ce qui nous fait du mal, et réussir à
passer au-dessus. Tout simplement. Il n'y a plus de question de
dualité. Pour « Caught », c'est plus l'acceptation de notre
quotidien. On sait qu'on est là, pas pour très longtemps, pour une
période donnée, et il faut arriver à l'accepter car il n'y a rien
qui nous permettra de passer au-delà, ni au travers.
C'est une thérapie cet album?
C'est une thérapie oui. Pour la petite anecdote, j'ai commencé
une thérapie il y a maintenant cinq ou six ans par rapport à pleins
de questions car je sortais d'une relation qui n'était pas très
saine, et on peut dire que c'est l'aboutissement de la thérapie.
Dans la présentation il y a cette phrase : "Au départ, vu comme
un album solo, « Deu.Ils » m’a servi à sortir les mots que je
n’arrivais à dire". Pourquoi ne pas avoir fait un album solo ?
J'avais besoin de m'appuyer sur d'autres musiciens pour ne pas
aller dans un sens où je m'enfermerais moi-même. Que ce soit dans un
style ou dans certaines idées. Et quand j'ai fait écouter mes
premiers morceaux à Marc, le batteur, il m'a dit que c'était génial
et qu'il fallait qu'on travaille ensemble. C'était pareil avec
Angie, l'ancienne bassiste, et avec Camille l'ancien guitariste. Ils
ont participé à compléter l'ensemble. Et finalement, cela a donné
quelque chose d'inattendu car j'étais, au départ, parti sur de la
dark folk. En fait, ils m'ont aidé à trouver d'autres pistes
musicales. Angie par exemple est plus dans des influences punk et
stoner, et ça a donné énormément de groove à certaines parties des
morceaux.
Du coup, comment tu peux le définir musicalement cet album ?
Compliqué. (Rires) Ça reste sombre. Mais il y a un côté
post-hardcore et post-metal qui domine. Certains côtés black ambient
sur certains riffs. Mais je dirais oui, post-hardcore et post-metal.
Comment avez-vous travaillé pour cet album ? Qui a
fait quoi ?
Je suis arrivé avec toutes les compos de base de guitares. Et
ensuite on a travaillé tous ensemble sur tous les instruments. Il
n'y a que sur « Lights » que je suis arrivé avec une proposition de
musique déjà finie.
Les textes, tu les avais déjà, ou ils sont venus avec la musique
?
Non, j'avais déjà des choses. J'avais des pages de textes
écrites et qu'en fait j'ai adapté à la musique. Je voulais d'abord
passer par l'émotion musicale et dans un second temps adapter les
textes. L'idée des textes était déjà là. Il fallait juste les faire
coller avec la musique. A partir du moment où la musique me
convenait et qu'elle était cohérente avec ce que j'avais envie de
ressentir et que les gens ressentent, j'adaptais les textes.
Pourquoi le choix de Laure le Prunenec pour venir sur cet album ?
C'est une très grande amie. Et à la base, encore un petit scoop,
j'avais pris des cours de chant et de techniques vocales avec elle
pour faire du chant clair. Bon, il y a eu la Covid. Elle était à Los
Angeles pour des albums, donc ça n'a pas pu se faire comme on le
voulait, et du coup, je lui ai proposé de participer sur l'intro.
J'aurais dû chanter sur l'intro, mais c'est elle qui a pris le lead.
Et j'en suis très content. (Rires) Je ne pense pas que
j'aurais été capable de faire la même chose.
Qu'est-ce qu'elle-t-a apporté ?
Sur le prologue, pas grand-chose car j'avais déjà le texte et
elle n'a que, si j'ose dire, posé sa voix. En revanche sur « Deu.ils
», c'est une collaboration entre tous les deux. C'est le tout
dernier morceau de l'album, et c'est vraiment le point d'orgue où on
part quasiment en total free style. Et du coup, elle m'a apporté une
vision encore plus ouverte qui fait qu'on peut avoir une approche
totalement différente, mais qui reste cohérente. Plus de barrière.
Une ouverture musicale.
Cet album a été composé pour la scène, ou pas forcément ?
Oui totalement. Même si c'est un travail introspectif, le but
est de le pousser sur scène au maximum, pour justement extérioriser
tout ça. On ne cherche pas forcément des dates partout. On fera une
release party, sûrement au mois de septembre, mais l'album est bien
prévu pour aller sur scène. Le temps d'avoir une set list carrée, de
prévoir des choses sympa pour le live et d'avoir également quelques
nouveaux titres à proposer.
Est-ce que c'est un album que tu pourrais quand même jouer solo,
en acoustique ?
Oui. J'y pense. C'est au programme. C'était la base de mon
projet que de le faire en solo. Et je pense que ça sortira un jour
ou l'autre.
Pourquoi ce choix de « Light » comme premier single ?
Parce que ça reste une force. Une idée du combat contre les
idées que l'on peut avoir quand on broie du noir. Juste la force de
se dire "je me lève et j'affronte tout ça". C'est vraiment quelque
chose qui me tenait à cœur et que je voulais mettre en avant. «
Sonar » est sombre. C'est le premier morceau que j'ai écrit en 2019.
« Caught » et « Sonar » sont très très sombres. Après on retourne
sur le côté lumière. « Adored » a un côté vraiment très lumineux. Et
« Light » est un peu entre les 2. Ça ne va pas au départ mais après
on se dit que oui ça va quand on se prend un petit peu en main. On
rejoint les deux univers très sombres et très lumineux en même
temps.
Un petit mot sur cette pochette d'album. Elle est belle, forte en
même temps ? Ces deux cercles qui cherchent à se rejoindre.
Comme c'était mon père, c'était le même sang donc le côté rouge.
Les deux demi-cercles sur le côté de la pochette, c'était la
séparation et la dualité, encore une fois. Et le cercle représente
un cycle. Bref on est dans cette tonalité-là.
Dernières questions rituelles chez nous : peux-tu définir le
groupe, puisqu'au final c'en est un, en deux ou trois mots ?
C'est une bonne question. Je ne m'attendais pas à ça. Je dirais
force, inspiration et une voie. Une voie dans le sens chemin, pas
pour chanter. (Rires)
Et pour terminer : quel est le dernier morceau ou le dernier
album que tu as écouté ?
Ah, j'ai écouté Turnstile, leur dernier album « Glow On ».
J'aime leur style et l'énergie que les mecs ont sur scène. Au départ
je viens du hardcore et j'avais entendu deux ou trois morceaux, et
je n'avais pas trop accroché. Mais finalement, cet album est
extraordinaire. Ça a une patate énorme et ça joue … Incroyable.
Tu viens du hardcore. Tu pourrais y retourner après cet album ?
Non non. Car j'ai plus le côté sensible du dark et que le côté
rentre dedans du hardcore. Même si j'adore ça et que je vais
toujours me défouler dans le pit. Mais ce n'est pas ce que j'ai
envie de faire.
Merci
Merci à toi.
Propos recueillis par Yann Charles
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