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Ecrit par Yann Charles |
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mercredi, 01 juin 2022
MEMBRANE
https://www.facebook.com/membranenoise
Rencontre avec le groupe Membrane qui nous parle de son dernier
album, « Beyond Your Beliefs », sorti il y a maintenant quelques
semaines. Mélange de noise et doom, ils nous entraînent dans un
univers plutôt sombre où, à coups de rythmes lourds et pesants, ils
essaient de trouver la lumière de nos émotions profondes.
Salut. Peut-on faire un petit rappel de qui est
Membrane, et pourquoi ce nom de groupe ?
Alors Membrane a un peu de vécu, car cela fait maintenant 22 ans
qu'on existe. Le nom de Membrane a un rapport avec le bruit, les
haut-parleurs, les membranes du haut-parleur. Voilà, c'est un peu
l'explication du nom. En gros, c'est par rapport au bruit.
On va parler de votre dernier album, « Beyond Your Beliefs ». Sur
votre précédent album, vous aviez plongé dans une profonde
noirceur, j'ai l'impression que pour ce nouvel opus, vous plongez
encore plus profondément non ?
Oui, effectivement. En fait l'album précédent était
l'introduction de cet album-là. On a commencé à se projeter sur ce
genre d'ambiance avec des morceaux longs, en plusieurs parties, et
avec plus de lenteurs par rapport à ce que l'on faisait avant. Et
sur ce dernier album, on a essayé d'aller encore plus loin.
C'est donc la continuité du précédent. Vous aviez déjà en tête de
faire un album puis sa suite ou c'est venu après ?
On était parti sur cette base-là, effectivement, d'album noir,
mais il s'est retrouvé plus varié que ce que l'on pensait
initialement. Mais c'est parce qu'on avait envie de ça à ce
moment-là. Mais à la fin de l'enregistrement de l'album précédent,
on avait déjà en tête d'aller dans cette direction de plus de
noirceur, et surtout, de faire un album peut être plus homogène,
plus monolithique.
Je trouve cet album pesant musicalement, avec des riffs et une
atmosphère presque irrespirable, à la limite de mettre mal à
l'aise. C'est le fait d'évoluer avec ces rythmes lents, lourds ?
Je pense que c'est une addition de plusieurs choses. La lenteur,
la répétition et les dissonances dans les rifs aussi. Je pense aussi
que la longueur des morceaux y participe beaucoup. On ne sait pas
faire de morceaux courts. Il n'y a jamais "couplet/refrain,
couplet/refrain", on aime sortir de ce schéma-là. En fait, ce sont
des pavés de musique qu'on pose sur une seule et même chanson.
Vous partez sur des choses différentes à l'intérieur d'un même
morceau ?
C'est exactement ça. Il faut écouter les morceaux jusqu'au bout,
car il y a toujours plusieurs parties différentes. J'appelle ça des
morceaux à tiroirs. Mais c'est voulu. J'aime ce genre de cassure où
on part d'un truc pour arriver à un autre truc. Et j'adore ça. Et je
pense que ça se ressent dans ce que l'on compose.
Plus que des chants, on est dans des cris de douleur presque ?
C'est sûr que ce n'est pas très joyeux. (Rires) La
musique est vraiment un exutoire pour nous. Après, tout va bien pour
nous. (Rires) On a tous une vie, des gamins, mais la musique
nous permet d'extérioriser des sentiments.
Une sorte de thérapie ?
Oui, on peut dire ça. Moi qui ai des soucis de santé, ça me
permet de m'exprimer sur l'au-delà, la mort, bref sur plein de chose
comme ça. J'extériorise tout ça dans les chansons. Ça permet de
crever l'abcès sur certaines craintes ou certaines peurs.
Quels thèmes développez-vous, ou peut-être abordez-vous dans «
Beyond Your Beliefs » ?
On parle beaucoup de l'au-delà comme je le disais. La vie après
la mort est un sujet qui nous intéresse et nous touche. Qu'est-ce
qu'il y a derrière ? On parle aussi des conflits entre les
personnes, les ressentis entre individus. Sans vraiment entrer dans
le côté religieux, on aborde aussi les croyances que l'on peut
avoir. On parle aussi des idées que l'on peut avoir, nous, sur la
vie. Je pense que le Covid nous a fait aborder ces sujets.
C'est le contexte qui vous a inspiré pour cet album ?
Oui, je pense. Le Covid nous a interrompus, comme beaucoup
d'autres, dans la tournée que l'on avait pour l'album précédent. On
avait quand même des idées de compos, mais je n'avais pas encore
commencé à travailler les paroles. Et donc, forcément, j'ai été
influencé par cette pandémie. On ressent tout ça dans l'atmosphère
qui se dégage des morceaux.
C'est la frustration due à la pandémie qui vous a énervé ?
(Rires) Non, on était déjà énervés avant. Mais c'est sûr
que ça ne nous a pas calmé. (Rires) Avec le nombre de
concerts qu'on a du annuler, on est au taquet là. On est dans les
starting-blocks. Au début, c'était cool, ça nous a permis de nous
poser tranquillement, mais là, ça fait deux ans, ça commence à faire
beaucoup.
Comment pourrais-tu vous définir musicalement ? On
est au-delà du noise et sûrement plus noir que ce post hardcore
qu'il y a dans votre description de groupe.
C'est compliqué de décrire sa musique. Quand tu composes, tu ne
penses pas forcément à être dans tels ou tels styles. Tu fais selon
ton inspiration, sans trop te poser de questions. On va dire qu'on
s'éloigne du noise rock dans lequel on évoluait peut-être avant. Il
y avait encore quelques morceaux sur l'album précédent, mais pas sur
celui-là. Le post hardcore, on ne sait pas trop ce que c'est. (Rires)
Je pense que dans notre musique, il y a un peu de noise, de doom, de
post rock et de l'ambiant. C'est un mélange de tout ça je pense. Ça
part un peu dans tous les sens du point de vue des styles, mais
l'album reste très homogène. C'est ça qui est paradoxal.
La pandémie, vous a-t-elle obligée à changer vos plans de
préparation et de sortie ?
On pensait sortir l'album en fin d'année dernière car tout était
fini fin juillet. Du coup, on avait prévu une sortie en octobre
2021. Mais comme on a trouvé un label et qu'ils veulent faire les
choses bien, ça a retardé la sortie. Et finalement, ils ont eu
raison, car comme il y a eu un retour de l'épidémie, ça aurait été
moins bien que de le sortir maintenant. On n'aurait pas pu le
défendre sur scène, mais surtout peut être ne pas pouvoir faire de
promo non plus.
Comment avez-vous travaillé pour cet album ? Ensemble, à distance
?
On a l'avantage d'avoir notre propre local. Donc on a réussi à
bosser tous ensemble. On répétait souvent. Pendant le premier
confinement, on échangeait par internet, mais finalement, on n'a pas
trop avancé. On avance plus en travaillant tous ensemble.
Comment s'est déroulé le processus de création ? La pandémie,
vous a-t-elle permis d'aller plus loin dans les compos. Disons
plus que ce que vous aviez prévu ?
Oui, c'est vrai que ça nous a libéré du temps finalement. Et
effectivement, cela nous a permis d'aller beaucoup plus loin sur
l'album à tous les niveaux. On a pu plus creuser les morceaux, les
ambiances. Je pense sincèrement qu'il n'aurait pas eu la même tête
s'il n'y avait pas eu le confinement. Ça nous a aussi permis
d'enregistrer en plusieurs phases. On n'est pas allé en studio
pendant cinq jours et hop, c'était fini. On a travaillé sur
plusieurs week-ends, et du coup, on a pu aller plus loin et on avait
plus de temps pour affiner les morceaux. Je crois qu'on a enregistré
en cinq ou six fois.
Après la disparition de Mathieu Roszak, le guitariste qui vous a
rejoint dans ce projet, vous avez décidé qu'il n'y aurait pas
d'autre guitariste, comment allez-vous évoluer sur scène ?
Pour le moment, on a décidé de ne pas le remplacer, et je pense
encore pour un petit moment. Mais après, on verra comment on fera.
Du coup, on a modifié le set car on avait travaillé avec lui sur
quasiment tout le nouvel album, avec un set bien tourné vers la
guitare. Du coup, le set est fait de 50% du nouvel album et de 50%
de l'album précédent. Et pour pallier l'absence de la seconde
guitare, on joue nos morceaux au click avec des boucles de guitares.
Cette disparition de Mathieu doit donner une atmosphère encore
plus pesante lors des concerts ?
Oui, ça donne une atmosphère spéciale effectivement. Et comme on
a aussi de la vidéo, ça renforce le côté pesant.
Quelles sont les évolutions, qu'elles soient musicales ou autres,
depuis vos premiers albums ?
Ben déjà, on est content d'être encore là. (Rires) Même
s'il n'y a plus que moi qui suis là depuis l'origine du groupe. Le
style musical a forcément évolué avec l'arrivée de Max à la batterie
en 2014. On aimait bien ce côté noise rock pied au plancher très
urbain qu'on avait au début, mais au bout de trois albums, il
fallait qu'on parte vers autre chose. Le but était d'aller explorer
d'autres choses.
Dernières questions rituelles avant de conclure cette interview :
peux-tu définir le groupe en deux ou trois mots ?
J'appliquerais la règle des trois L : Lent, Lourd et Long. Ce
n'est pas moi qui l'ai inventée, je l'ai lu quelque part. Sûrement
un groupe de doom. (Rires)
Et pour terminer : quel est le dernier morceau ou le dernier
album que tu as écouté ?
Le dernier album de Hangman Chair. On reste toujours dans le
lent long et lourd. Et aussi Kill All, un vieux groupe américain qui
a splitté.
Merci pour cette interview.
Un grand merci à toi.
Propos recueillis par Yann Charles
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