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Ecrit par Alexx Schroll |
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lundi, 27 décembre 2021
LES SHERIFF
https://www.lessheriff.fr
Remerciements : Fred, Olivier, Mr Cu!, Bouth.
Quand Alexx nous a proposé de réaliser l’interview des Sheriff, on a
sauté directement sur l’occasion, d’autant que le nouvel album de ce
groupe culte tourne sur la platine en attendant une chronique sur
Zicazic ! C’est donc à Olivier Tena qu’elle est allée poser quelques
questions, et le résultat parle de lui-même …
Vous avez commencé les concerts de reformation des
Sheriff en 2014, et ce mois-ci vous avez sorti votre nouvel album,
« Grand bombardement tardif ». Comment est arrivée l'idée de ce
nouvel album, la suite logique des concerts depuis sept ans, une
envie collective, votre label qui vous a mis la pression, ou
autres ?
C'est venu très très lentement, il n'était pas vraiment question
d'album à la base, on n'en avait pas trop envie, mais on avait fait
un morceau qu'on se traîne depuis quatre ans environ sur scène et
que les gens commençaient à connaître (« Montpellier »). Ce morceau
devait sortir sur une compilation mais cela ne s'est finalement pas
fait, alors on avait tout de même envie d'en faire quelque chose, un
45 tours, ou le sortir sur Internet … Et de fil en aiguille on a
écrit d'autres chansons, ce qui a abouti à l'album ! Après, vu que
ça faisait longtemps qu'on n'avait pas composé, chacun avait des
petits trucs à droite à gauche. C'est notre nouveau guitariste,
Ritchie, qui nous a envoyé le premier morceau, peut-être six mois
avant le Covid. Puis Patrice (guitare) s'y est mis, il a envoyé
trois morceaux, on a ensuite demandé à Manu (basse) d'envoyer ce
qu'il avait, chacun y est allé de ses morceaux, on a fait le tri, et
on en a choisi douze.
Comment s'est passé l'introduction de votre nouveau guitariste,
Ritchie, dans le groupe ?
Ça faisait déjà une paire d'années qu'on avait des problèmes
avec Fab, notre ancien guitariste, ça ne se passait pas très bien
sur scène musicalement parlant la plupart du temps, et il y avait la
distance qui posait problème, il habite Rennes et nous dans le Sud
de la France. On avait déjà essayé des gens dont Ritchie, c'est le
beau-frère de notre manager (Mr Cu! de Kicking Records), un mec
qu'on connaissait déjà, il habite dans notre coin, il est très bon,
il joue dans notre style. Ensuite on a eu une grosse discussion avec
Fab et on a décidé de continuer avec lui pendant encore quelques
années, mais ça ne s'est pas vraiment arrangé alors on a rappelé
Ritchie. Il nous apporte vraiment un coup de jeune, il est super
enthousiaste, je pense que son arrivée n'a pas été étrangère au fait
qu'on ait voulu s'atteler au nouvel album. Avant lui, c'était
difficile de se projeter.
Etait-il fan des Sheriff lorsqu'il était ado ?
Oui, étant de Nîmes, il connaissait bien nos morceaux, même si
nous n'étions pas forcément son groupe phare.
Le nouvel album, de par son artwork et le thème de la chanson
éponyme, évoque la préhistoire. Est-ce un clin d’œil à votre
statut de dinosaures du rock français ?
C'est Manu qui est fan de sciences, de planètes, comme moi, qui
en a eu l'idée. Ça nous a bien fait rire car effectivement, c'est un
grand bombardement tardif qui se passe là (rires), et pour
l'artwork, c'est mon frère qui avait fait les photos, mais pas pour
l'album. Quand on a vu la photo, l'imagerie dinosaure qui peut
effectivement s'appliquer à nous nous a bien plu, et c'est ainsi
qu'on est partis là-dessus.
Je vais parler de certaines des chansons de l'album. « Tailler du
caillou », c'est une référence à ton autre métier, tailleur de
pierre ?
Oui, je ne sais pas vraiment comment viennent mes chansons en
fait, je pars d'une chanson avec des textes en Anglais, et je ne me
dis pas « il faut que je fasse une chanson là-dessus », c'est juste
que ça arrive assez naturellement. Je ne pars pas d'un thème bien
précis mais pour celle-ci par exemple, il fallait que le refrain se
termine par « yeah », donc « tail-ler » m'est venu de cette façon et
j'ai développé autour de ça. Mais le plus important pour moi est que
les mots sonnent et claquent, je suis super exigeant pour faire
sonner le français de A à Z sur nos chansons. Par exemple, lorsque
j'écoute des groupes américains, je comprends pas ce qu'ils disent,
donc les textes ça ne m'intéresse pas trop mais c'est l'agencement
des sons dans les paroles qui est intéressant : que ça soit
reproductible et que ça coule de source pour chanter.
« Du rock n roll dans ma bagnole », tu écoutes quoi dans ta
bagnole en ce moment ?
Surtout AC/DC, les Ramones et NOFX, j'ai des tonnes de CDs dans
ma bagnole, mais elle se fait vieille alors il va probablement
falloir que je fasse des clefs USB pour la nouvelle. Je ne sais pas
trop comment ça se passe mais je vais demander à mon petit frère (rires)
« Enfants du passé », y'a-t-il une certaine nostalgie ?
Non, absolument aucune. C'est juste que parler de ma vie en ce
moment devient plus limité qu'avant, je suis très casanier, je ne
vois pas énormément de monde alors certaines paroles font référence
à notre jeunesse car parler de mon présent est moyennement
intéressant.
« Montpellier », tu ne te verrais pas vivre ailleurs ?
En fait, je n'y habite plus, maintenant j'habite vers Lodève,
c'est plutôt l'Hérault qui me tient à cœur, je suis méditerranéen,
c'est dans mon sang, ce sont mes racines.
Entre les deux derniers albums, qu'avez-vous fait musicalement
parlant ?
Il n'y a que Manu et Fab qui ont continué à faire des groupes,
The Hop La, de 2004 à 2012 je crois. Les autres, non. On est allés
bosser, il faut bien bouffer !
Est-ce que les Sheriff sont trans-générationnels ?
Oui très clairement, d'ailleurs ça me fait rire : beaucoup de
personnes amènent leurs gamins sur les concerts. Il faut dire qu'on
a des morceaux très « chantables » et les enfants sont fans, ils
peuvent reprendre les refrains avec nous genre « 3,2,1,0 », ça les
éclate. Et il y a aussi nos gamins, ils ont entre 18 et 30 ans !
C'est la nouvelle génération de fans de Sheriff.
Comment êtes-vous passés de votre premier groupe, Vonn, aux
Sheriff dans les années 80 ?
On devait enregistrer un six titres dans un studio à Rouen : la
séance ne s'est pas très bien passée car on était jeunes et assez
mauvais (rires) et quand on est revenus de cette ville, on
s'est fait virer, Philippe (le guitariste) et moi. Ils ont pensé
qu'ils n'arriveraient à rien avec nous donc ils nous ont dit ciao.
Mon frère et un autre guitariste n'avaient pas vraiment le fait de
faire des groupes de rock dans leur ADN, ils sont donc repartis à
leurs études. Manu s'est retrouvé tout seul comme un con et est venu
créer les Sheriff avec nous ! Et comme on était mauvais, on a essayé
de faire des trucs pas très compliqués, ce qui nous a changé de la
fin de Vonn où on avait au contraire expérimenté des choses plus
musicales, style les Undertones deuxième mouture. Nous on était des
punks, alors l'inspiration ça a été le premier Ramones, des songs
basiques, trois accords maxi, une mélodie simple et zou.
Justement, vous avez ouvert pour les Ramones à Pau en 1992 et ça
ne s'était pas vraiment bien passé je crois ?
Je pense que c'était le problème pour tout groupe qui faisait la
première partie d'Américains ou d'Anglais ... C'est-à-dire qu'on ne
les voit jamais, on voit les techniciens qui ont pour ordre de ne
rien bouger : ils n'enlèvent pas la batterie, les amplis, alors on
se retrouve avec un espace plus que réduit en jouant devant
leur config, en plus on n'est pas éclairés, on a moins de son … Par
exemple je suis allé voir AC/DC au Stade de France, le groupe de
première partie avait la moitié de la sono. C'est comme ça, le gros
écrase celui qui est avant pour ne pas avoir la pression, même si la
première partie est très bonne. Pour en revenir aux Ramones, sur ce
concert ils étaient déjà vieux, Joey avait mis un temps fou à monter
sur scène … mais leur bassiste C.J qui était le dernier arrivé et le
petit jeune de la bande a été super cool avec nous, on a pu échanger
des T-Shirts !
As-tu des souvenirs marquants des premières tournées des Sheriff
en 1987, 1988 ?
Ce qui m'avait le plus marqué, c'est quand on avait joué à Paris
devant 800 personnes, nous en tête d'affiche et la Mano Negra en
première partie, il y avait encore Alain à la contrebasse qui a
ensuite joué avec les Happy Drivers, le line-up était donc un peu
différent. C'était un de leurs premiers concerts : six mois après
ils nous ont invités à jouer dans les Arènes d'Arles pour faire leur
première partie … devant 12000 personnes. Ils étaient devenus
énormes, c'était l'âge d'or de tous ces groupes : la Mano, Noir
Désir, leur notoriété a évolué en un rien de temps !!
Penses-tu, hors période sanitaire, qu'il soit plus facile de
tourner en ce moment que dans les années 80 ?
C'est sans conteste plus facile de nos jours. Enfin ça l'est
pour nous, mais pour un groupe qui débute, je ne sais pas trop
finalement. A l'époque, il n'y avait pas toutes les structures qu'il
y a maintenant : pas de salles, pas de sonorisateurs comme
maintenant … Bon, heureusement, à la fin des années 80, il y avait
de plus en plus de fanzines, de radios, mais au début, c'était la
misère : par exemple OTH avaient vraiment du mal à jouer, ils ne
tournaient même pas au début car il n'y avait pas de structure. Il
n'y avait rien pour le rock dans les années 80, c'était au final
super underground, selon moi c'est devenu mainstream au début des
années 90, avec Nirvana tout ça. Il fallait se débrouiller avec les
réseaux indépendants. Faire un disque, aussi, était une véritable
galère, ça coûtait une blinde ! Il n'y avait pas de studio, d'ingé
son etc. Et pour être distribué, imagine. Cela étant, maintenant, il
y a vraiment beaucoup de possibilités, tu peux enregistrer dans ta
cuisine, mais tu es un peu noyé sous le nombre. D'ailleurs, les
groupes de jeunes maintenant sont hyper bons, nous à leur âge on
était mauvais comme des cochons ! Rien que pour avoir de bons
instruments, de bons amplis, c'était dur. Là, on peut avoir de la
qualité plus facilement. Les groupes de jeunes sont meilleurs, mais
ils souffrent davantage de la concurrence !
Merci Olivier pour cette interview !
Merci à toi !
Propos recueillis par Alexx Schroll
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