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Ecrit par Fred Delforge |
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samedi, 03 juillet 2021
Queyssac 2021
BLUES IN QUEYSSAC
VILLAGE – QUEYSSAC (24)
Les 2 et 3 juillet 2021
http://www.bluespourpre.fr/
Il y a des festivals où il fait bon revenir et Blues In Queyssac est
assurément un modèle du genre dans cette catégorie avec un accueil
de grande qualité, avec une programmation qui ne l’est pas moins et
qui en prime fait la part belle aux groupes nationaux, un phénomène
suffisamment rare pour être souligné ! Ajoutez-y les
spécialités de canard, le Pécharmant et la bière artisanale qui font
fureur dans la région et vous aurez vite compris pourquoi une
soixantaine de bénévoles triment avec le sourire pour recevoir les
artistes certes, mais aussi un public qui à chaque fois répond
présent.
Vendredi 2 juillet 2021 :
La chaleur est pesante quand nous arrivons en début d’après-midi,
mais cela n’enlève rien au plaisir de retrouver les amis qui
finissent d’installer le site au beau milieu du village, interdit à
la circulation tout le week-end, si ce n’est pas de l’engagement
municipal ça, on n’en verra jamais ! Les groupes arrivent
tranquillement, prennent le temps de fignoler leurs balances pour
que la soirée soit parfaite, puis arrive l’heure de l’ouverture des
portes et c’est alors une ruée vers les friteuses et les planchas
d’où s’élèvent des fumets engageants … Les premiers futs de bière
sont percés, mais ici c’est le vin qui est à l’honneur, appellation
locale très restrictive oblige !
Il est 20 heures et le stand de restauration ne désemplit pas
lorsque Sib, le Président de Blues Pourpre, monte sur scène pour
clamer sa joie d’être enfin là ce soir et pour annoncer la venue
d’un trio qui nous arrive des Monts d’Auvergne, Black Cat Bones, une
formation qui présente la particularité de compter deux femmes,
Lorie, chanteuse et percussionniste et Claire, violonistes,
accompagnées par la voix et la guitare acoustique de Phil.
Avec un peu moins de dix années d’existence à son compteur, Black
Cat Bones a su acquérir une belle expérience et la traduit par des
compositions dans lesquelles le groupe évoque l’assassinat de John
Kennedy, l’histoire de Rosa Parks ou encore les méfaits de Jack
l’Éventreur, autant de thèmes qui sont abordés dans des ambiances où
le blues se teinte de folk, de jazz aussi parfois, et même à
l’occasion de petites touches qui ne sont pas sans faire penser aux
bayous de Louisiane.
Les parties de slide sont un véritable régal, et que dire de ce
morceau interprété a-capela par Lorie qui va mettre les poils à un
public qui a répondu présent à l’invitation de ce qui est un des
tous premiers festivals avec des contraintes sanitaires réduites. On
se régalera encore des histoires de Crossroads que les Black Cat
Bones racontent avec une classe folle et c’est avec une très belle
entrée en matière que Blues In Queyssac affirme d’entrée de jeu son
appartenance aux grands festivals de blues.
L’édition 2021 est dédiée aux femmes et c’est cette fois Miss Bee
qui vient, en compagnie de ses Bullfrogs, nous faire l’honneur de
son blues délicieusement teinté de soul et de jazz, les Palois
commençant directement avec une reprise empruntée à une des
formations les plus brillantes de l’hexagone, Malted Milk. Difficile
de résister à la voix de Maëlys Baey et à son jeu de saxophone,
d’autant que la jeune femme est soutenue par une section rythmique
de tout premier plan avec Rémi Grangé à la basse et Chacha Angela à
la batterie, et épaulée par la guitare de Jean Guichemerre qui
brille sans jamais trop en faire.
Pour leur premier concert de l’année, Miss Bee & The Bullfrogs
ne vont pas se priver de prendre du plaisir mais aussi d’en donner
et de reprises en compositions, c’est avec beaucoup de discernement
que le groupe modulera son set, plaçant tantôt un « I Don’t
Need No Doctor », tantôt un « Talk To Me Baby »,
tantôt un « St. James Infirmary », tantôt un titre aux
accents plus funky, mai trouvant à chaque fois le ton juste et le
petit trémolo qui apporte la véritable grande émotion. D’Albany en
Georgie jusqu’à New Orleans en passant par Memphis, Detroit ou
encore New York, c’est un véritable voyage au cœur des musiques
noires américaines que nous propose le quartet, et on monte dans le
train à leurs côtés avec un certain plaisir !
Il est loin le jeune groupe qui, en 2019, s’était adjugé la plupart
des prix du Tremplin des RDV de l’Erdre, c’est aujourd’hui une
véritable machine de guerre qui se présente à nous, avec un
répertoire plus que solide et surtout avec cette pointe
d’originalité et d’audace qui met tout le monde d’accord. Le public
est sous le charme et ne boude pas son plaisir, applaudissant à tout
rompre entre les morceaux et n’oubliant pas d’en redemander à la fin
d’un set qui a filé bien trop vite et obtenant finalement un
« Thrill Is Gone » avec Freddy Miller en special guest.
Lorie des Black Cat Bones finira par rejoindre Miss Bee & The
Bullfrogs pour son troisième rappel et c’est sur un « Hoochie
Coochie Man » juteux à souhait que le public de Queyssac s’en
ira rejoindre ses pénates pour un repos bien mérité avent une
seconde soirée qui s’annonce bouillante !
Samedi 3 juillet 2021
La journée commence sous le signe de la pluie et si nous essuyons
quelques averses en toute fin de nuit, le temps ne fera que
s’améliorer et fur et à mesure que la journée avance, nous
permettant une fois encore de passer beaucoup de temps aux balances
et d’échanger avec les groupes présents ce soir, des formations que
nous connaissons de longue date mais que nous n’avions pas eu
l’occasion de voir depuis un certain temps. Autant dire que
l’ambiance est bonne et que les bénévoles en profitent également
durant la mise en place du site.
C’est avec quelques minutes de retard que Little Mouse & The
Hungry Cats vont investir la scène et prendre immédiatement le
public à bras le corps, Claire au chant se montrant toujours aussi
charismatique et talentueuse dans le rôle de la petite souris
chargée de mener les vilains matous à la baguette. C’est en partant
sur la base de leur tout nouvel et excellent album, « Voodoo
Works », que ces Auvergnats venus des environs de La Bourboule
vont nous servir une potion magique dans laquelle le blues se laisse
parfois rattraper par le jazz et par la soul.
La section rythmique avec Eric Courier à la basse et Denis
Maisonneuve à la batterie se veut à la fois efficace et solide et si
la guitare de Jean-Christophe Sutter, compositeur principal du
groupe, est toujours très inspirée, c’est superbement complétée par
les claviers de Richard Adéo qui rappelle de temps à autres un
certain Dr John, que ce soit par le look ou par le jeu, que tout ce
beau monde accompagne la frontwoman du quintet dans un répertoire où
les originaux sont légion mais où l’on remarque aussi à l’occasion
de belles adaptations portées avec talent et inspiration.
En quatre-vingt-dix minutes d’un blues élargi au possible, Little
Mouse & The Hungry Cats auront su gagner le cœur d’un public
venu prendre sa dose de bonnes vibrations, et il y a un signe qui ne
trompe pas à ce sujet, c’est que si les parents ont su participer à
la fête, les enfants également auront su prendre leur part du gâteau
en dansant devant la scène depuis le début du set jusqu’à la fin du
rappel. La soirée ne pouvait mieux commencer et ceux qui ont fait le
choix de regarder l’Euro de foot à la télé ont assurément eu
tort !
Et ça tombe plutôt bien puisque l’artiste suivant est un véritable
amateur de rugby, il faut dire que le bonhomme a la carrure qui
convient pour cette discipline. Freddy Miller et un colosse, mais un
colosse au grand cœur et à l’humour débordant, et c’est en compagnie
de ses Blues Steelers qu’il va venir nous le rappeler. Jérôme
Perraut aux guitares, Patrice Cuvelier aux claviers, Patrick Guarino
à la basse et Christophe Bertin à la batterie sont au moins aussi
adorables que talentueux et c’est à grand renfort de sourires et de
bonne humeur qu’ils vont suivre le boss dans ses moments les plus
fous, ceux où la musicalité se laisse rattraper par quelques blagues
et surtout beaucoup d’anecdotes.
Freddy Miller & The Blues Steelers ont un second album en
préparation et ils ne se gênent pas pour essayer quelques morceaux
sur un public aussi réactif que séduit qui réagira autant à des
standards comme « Stormy Monday » ou « Messin’ With
The Kid » qu’à des pièces originales pleines de ce mélange de
force, de finesse et de tendresse qui caractérise ce chanteur
attachant, sorte de mélange entre Shrek, l’ogre sympa des studios
Dreamworks, et Ted, l’ours un tantinet dépravé de Seth MacFarlane.
De tendresse et d’émotion il sera question d’ailleurs, avec la
montée sur scène de Jacky Beaugois qui, en marge de la dernière
exposition de sa carrière, viendra offrir à Freddy Miller un
portrait qu’il a spécialement réalisé pour lui.
Après un set explosif et ponctué de quelques moments de bravoure,
c’est une formation fière du travail bien fait qui viendra refermer
les portes de ce quatrième Blues in Queyssac devant un public qui a
passé plus de la moitié de son concert debout devant la scène. Il y
a longtemps que l’on n’avait pas vu une telle fête et nous en sommes
particulièrement heureux puisque cela confirme non seulement
l’avènement d’un grand artiste mais aussi parce que cela signe le
retour des concerts debout, ce qui fera forcément plaisir à tout le
monde.
Il va maintenant falloir se résoudre à quitter ce petit coin de
France si attachant, non sans féliciter et remercier chaleureusement
toute l’équipe et tous les bénévoles de Blues In Queyssac pour leur
gentillesse, leurs efforts et leur générosité. En seulement quatre
éditions, ce festival est devenu un rendez-vous incontournable de la
saison blues française et la qualité de la programmation n’y est pas
étrangère, c’est certain !
Fred Delforge – juillet 2021
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