|
|
|
|
|
Ecrit par Yann Charles |
|
|
vendredi, 25 juin 2021
PRIMAL
AGE
https://www.facebook.com/PRIMALAGE
Une vraie rencontre avec Didier, puis Dimitri, les fondateurs du groupe
Primal Age qui arpente les scènes françaises et
internationales depuis 25 ans. Un quart de siècle et
toujours cet engagement farouche pour dénoncer les
méfaits de notre société sur le
climat, l'environnement, et pour défendre les causes
animales. Un nouvel et très bon album, « Masked
Enemy », en est un bel exemple. C'était au Black
Dog à Paris, et ça fait du bien de revoir des
gens en vrai !
Salut Didier. Même si
ça fait maintenant un quart de siècle que Primal
Age existe, est-ce que vous pouvez vous présenter pour les
lecteurs qui ne vous connaissent pas ?
Did : Salut.
Le groupe a démarré en 1993. J'ai
rencontré Dimitri et Thierry, le guitariste de
l'époque, sur un petit concert en Normandie. Eux avaient
déjà un groupe. On s'est lié
d'amitié, on a fait quelques soirées et on s'est
dit "pourquoi pas faire de la musique ?". Et c'est très
rapidement devenu cette envie de faire quelque chose de
sérieux. On s'est dit "Est ce qu'on fait de la musique pour
les potes, ou on essaye de faire un disque, sans aucune
prétention, mais avec beaucoup de sérieux ? ". On
est parti sur ce projet. On a un ami, Philippe Wagner, qui organisait
beaucoup de concerts à Beauvais à
l'époque, qui nous a donné notre chance, et tout
est part de là. Tu arrives à prendre des
contacts, et ça a fait boule de neige.
C'était
peut-être aussi une époque où il y
avait moins de groupes, donc peut-être plus de
facilité de se faire remarquer ?
Did : C'est
vrai que le hardcore était une petite niche, mais je pense
que tu avais la même possibilité de contacts que
maintenant.
Vous êtes des
pionniers du mélange metal et hardcore. À
l'époque, qu'est-ce qui vous a poussé vers ce
style ? Vous n'arriviez pas à vous définir
réellement ?
Did : C'est
selon nos influences. On est de la génération Mad
Ball, Sick Of It All, toute la vague old school, Youth of Today pour le
côté Straight Edge et du coup, il est
arrivé des groupes comme Strife, Morning Again, qui avaient
une consonance plus métallique avec des textes
très engagés au niveau de l'écologie,
l'environnement et de la cause animale, et ça nous a tout de
suite parlé. On s'est dit que ce serait bien de partir vers
ça. En plus, on avait chacun des influences metal avec des
groupes comme Slayer ou Metallica dans les années 80. Donc,
disons que ça nous a orienté dans cette voix avec
un côté groove et punk du hardcore et la puissance
du metal.
Vous êtes
toujours très engagés dans vos combats. Cela fait
longtemps que vous combattez tout ça. On en parle beaucoup
plus maintenant, tu penses que les gens ont (enfin) conscience des
problèmes ?
Did : On
essaie de se diversifier. Mais c'est vrai que la récurrente
sur l'écologie et la cause animale est toujours
là. Ça fait toujours débat. Le
meilleur exemple est le speech de Severn Suzuki, qui est sur le
début de l'album, qui était à l'ONU en
1992, et qui aujourd'hui est toujours d'actualité.
Tu penses que les gens
ont pris conscience du problème ?
Did : Pas
totalement non.
La nouvelle
génération peut-être ?
Did : La
nouvelle génération, je pense qu'elle est plus
pizza/kebab, donc ça va être plus
compliqué. La thématique
générale de l'album parle de nos
élites qui jettent des seaux d'eau sur des incendies, mais
qu'ils ne les éteignent pas. Ils ne se projettent pas sur le
long terme. C'est ça la thématique de cet album
que l'on a voulu exprimer à travers des textes plus
particuliers sur la cause animale, la déforestation,
l'environnement ou de l'industrie pharmaceutique aussi. On
éteint, mais on n'essaye pas de trouver des solutions pour
éviter que ces incendies ne repartent. Ce qu'on vit
actuellement en est un bel exemple. On camoufle, on met des bouts de
pansements, mais on ne va pas aller gratter plus loin pour
définitivement ne plus en entendre parler. C'est ce que l'on
a voulu exprimer dans l'album.
Je vais
peut-être être négatif, mais en pleine
pandémie, tout le monde commençait à
parler des changements à venir, de prise de conscience, mais
maintenant qu'on entrevoit une fin à cette
pandémie, finalement les gens retombent dans leurs travers
non ?
Did : C'est
ça. Les masques commencent à tomber. Et je pense
que dans deux ans les gens auront oublié. On prend
conscience sur l'instant T, mais on ne prend pas conscience de
l'état. Et encore, on prend conscience parce que
ça nous gêne. Nous, cela ne nous a pas
empêchés de mener à bien notre projet,
mais il y a des personnes que cela a et continue de gêner.
On parle de «
Masked Enemy », votre nouvel album. Il était
prévu pour maintenant ou bien la pandémie a
retardé la sortie ?
Did :
C'était prévu pour avril 2021 par rapport au
label chez qui nous avons signé, WTF Records, qui est un
label hollandais. Ils nous connaissaient depuis les années
90 et ils nous distribuaient déjà via Good Life
Records qui était un label belge. Et parmi tous les labels
que l'on a contactés, il a amené un engouement
supérieur aux autres. Et en plus, ils nous ont
proposé une version vinyle ... Tim du label nous a
demandé de repousser sa sortie en juin mais l'objectif
était bien de le sortir en 2021.
Question qui va
peut-être vous faire réagir. Vous ne trouvez pas
que pas mal de groupes abordent tous ces thèmes juste que
parce que c'est à la mode ? Sorte de militantisme, mais pas
trop longtemps quand même.
Did : Oui.
Totalement. C'est un effet de mode. C'est un peu comme les industries
de la viande qui aujourd'hui sortent des produits
végétariens. Pour moi, c'est la même
chose. Après, je ne cache pas que pour certains il y a de la
sincérité. J'ai dernièrement fait une
interview où un autre groupe parlait également
d'écologie et je pense qu'ils étaient
sincères. Mais ils sont peu nombreux dans ce cas.
Heu question un peu con,
mais pour des militants, plus de 800 concerts, le bilan carbone est
quand même catastrophique non ?
Did : (Rires) Oui. On
n'est pas parfait ! On se déplace en camion pour jouer, on a
fait une tournée en avion, c'est sûr qu'on n'est
pas clair clair là-dessus (Rires). Un ami
suisse m'a dit un jour "Un vrai vegan est un vegan mort" (Rires)
On reste dans les
questions à la con : Greta Thunberg ou Severn Suzuki ?
Greta, ce n'est pas un produit manipulé ?
Did : Je
pense, malheureusement pour elle, très
médiatisée, et je n'ai pas l'impression qu'elle
comprenne réellement tout ce qui se passe. Pour moi, je suis
plus sur Severn Suzuki. J'ai lu une interview d'elle
récemment et elle en parlait de ce discours, même
encore aujourd'hui.
Vous êtes un
groupe de scène, avec beaucoup de concerts depuis toutes ces
années, c'est cette expérience qui vous permet de
composer avec cet esprit live ?
Did :
Déjà, on ne compose que lorsqu'on a de la
matière. On n'attend pas que les fans nous demandent un
album, car sinon il faudrait faire un album tous les ans. C'est pour
ça que l'on a très peu d'albums à
notre actif. Cela a toujours été un souhait.
C'est vrai qu'on nous a souvent dit que les morceaux exprimaient du
live, sentaient le live. Nous, en étant dedans, on ne
ressent pas forcément ça. Quant aux compositions,
même si ce n'est pas volontaire, elles sont
forcément orientées pour le live. De toute
façon, la nature de notre musique est faite pour le live.
Je vous ai vu au
Hellfest, mais aussi, il y a quelques années, dans un petit
festival. Finalement, qu'il y ait 5 000 ou 200 personnes, vous donnez
tout pareil sur scène ?
Did : On ne
doit pas tricher. C'est le respect du public. Toi, tu fais des
kilomètres pour venir nous voir. Ils ont acheté
des places, acheté l'album, passé du temps pour
venir te voir. Donc c'est une forme de respect que de tout donner quand
on est sur une scène. Quelle que soit la taille de la
scène.
On revient au boulot sur cet
album. Comment vous travaillez ?
Did : Ah
bien Dimitri va s'inviter. Il va prendre le relais et te
répondre sur cet aspect-là.
Dim : Salut
à tous. Alors comment ça se passe. C'est moi qui
écris les textes et ce monsieur (en montrant Didier)
dépouille tout en studio. Avec Didier on est donc les
membres-fondateurs du groupe et il y a eu un changement de guitariste.
Désormais, on a deux nouveaux guitaristes, Ben et Flo, et on
travaille en concert avec eux depuis deux ou trois ans. Et donc on
s'est posé la question de savoir comment ça
allait se passer pour les compositions. Donc je me suis dit que
j'allais amener les premiers morceaux. Je savais que j'avais de quoi
faire un demi-album, mais pas un complet. Flo a
écouté et il a la capacité
d’orienter ses compositions, chose que je n'ai pas. Il a
déjà composé dans des styles de metal.
Il a vu la direction que je voulais prendre et il composait dans ce
sens-là, et ça a fait mouche. C'est
complémentaire avec ce que j'ai fait.
Did : Et
ça amène de la variation à l'album.
Dim : Ca
amène beaucoup de richesse. Et lui, il avait de la
matière pour un demi-album également. Donc un
demi plus un demi.
Did :
Ça fait un (Rires)
Dim : Et on
est vraiment content de cette collaboration.
Tu poses les textes
après ?
Dim :
Après. Mais pour mes morceaux, j'ai les lignes de chant qui
tournent dans ma tête. Pour ceux de Flo non,
forcément. Dès que j'ai eu tous les textes sous
les yeux, j'ai fait tourner tous les sons chez moi. On était
au début du confinement. Alors au début,
ça va vite, t'arrives à caler tes textes sur les
musiques. Mais à la fin, quand il te reste deux textes et
deux morceaux, tu te dis qu'il faut accélérer, et
surtout, il faut que ça marche sinon tu décales
tout. Mais ça l'a fait. J'ai enregistré sur mon
téléphone, puis j'ai envoyé
à Didier pour avoir son ressenti, puis il est
passé chez moi et il a maquetté tout
ça.
Et tu écris en
fonction de son flow ?
Dim : Non,
il se démerde ! (Rires)
En fait moi j'écris en Français, et quand c'est
traduit en Anglais, tu as des sonorités
différentes. Des fois, c'est chaud, car il faut arriver
à enquiller trois ou quatre syllabes et ça ne
rentre pas (Rires).
Du coup, il râle, car il ne sait pas s'il va pouvoir le
faire, mais généralement, il y arrive. (Rires)
Did : Du
coup je peaufine un peu dans les petits détails, mais en
général la trame reste la même. Mais je
n'ai plus le temps d'écrire car je gère les
à-côtés du groupe. Mais des fois quand
il y a un thème qui m'agace, je lui en parle et je lui
demande d'écrire quelque chose là-dessus car il a
l'écriture facile. Donc on procède comme
ça. C'est particulier, mais ça fonctionne. (Rires)
Je lisais une petite
interview en préparant celle-là, et vous disiez
que vous préfériez la scène 90 que
l'actuelle.
Did : C'est
lui qui l'a dit. (Rires)
Pourquoi ? Tu penses
qu'on a fait un peu le tour, qu'il y a du mal à se
renouveler ?
Dim : Je ne
sais pas si c'est un manque de renouveau, mais on a connu cette
époque et je ne sais pas s’il faut appeler cela de
la nostalgie, mais c'était une époque
où il y avait plus de mixité au niveau des
publics. Maintenant, tout est clivé. Nous, on a cette chance
d'avoir évolué sur la scène hardcore
et metal, donc on a pu à certaines périodes
s'orienter vers le metal, car la scène hardcore, depuis
trois ou quatre ans, propose des choses qui n'ont rien à
voir avec ce qui se faisait avant. Et on ne s'y retrouve pas
forcément. Et surtout on n'était plus vraiment
invité sur cette nouvelle scène, donc
heureusement que l'on a ce côté metal qui fait
qu'on a pu continuer.
Comment a
évolué votre musique depuis vos débuts
?
Dim : Disons
que notre niveau technique de l'époque ne nous permettait
pas de faire ce que l'on voulait vraiment. Quand on a tous
progressé avec nos instruments, on a eu l'idée de
faire ce mixe là, hardcore/metal, et si tu
écoutes tous les albums, tout est cohérent. On
n'est pas parti dans tous les sens. On n'a surtout pas voulu suivre les
modes qui t'emmènent une fois à gauche, puis
à droite. On est resté dans ce que l'on avait
envie de faire.
Did : Je
pense que les gens qui suivent s'y retrouvent. Il y a une patte Primal
Age. Car on a eu des compositeurs différents à
chaque album.
On arrive aux
dernières questions rituelles chez nous : est-ce que tu
pourrais définir le groupe en deux ou trois mots ?
Did :
Passion, énergie …
Dim :
Engagement, longévité.
Et dernière
question : quel est le dernier morceau ou le dernier album que vous
avez écouté ?
Did : Le
dernier album de Gojira, « Fortitude ».
Dim : Alors
moi, je n'écoute que des vieux trucs. Donc je crois que le
dernier c'est Lion's Law.
Merci à vous.
Did : Merci
à toi.
Propos recueillis par
Yann Charles
|
|
|
|