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Ecrit par Yann Charles |
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vendredi, 23 avril 2021
ARCHIE
LEE HOOKER
https://archieleehooker.com/
Rencontre avec un personnage, une personnalité dans le monde
du blues : Archie Lee Hooker. Neveu du légendaire John Lee
Hooker, il a construit sa propre carrière de chanteur et de
bluesman. Avec son nouvel album « Living In A Memory
», il démontre encore tout son talent. Un album
plus personnel où le blues côtoie la soul et
tutoie le rhythm’n’blues.
Archie bonjour. Tout d'abord,
comment allez-vous ? Avez-vous fait vos vaccins, et êtes-vous
prêt à reprendre la route des concerts ?
Bonjour, je vais très bien, merci. Je recevrais ma
vaccination en mai. La route me manque et j'ai hâte de me
remettre à jouer !
Plus
sérieusement, les vaccins sont la solution pour sortir de
cette crise, vous incitez votre public à se faire vacciner
et enfin se retrouver ?
Oui, je les recommanderais absolument, et s'il vous plaît
tout le monde, portez également vos masques. Nous faisons
tous partie de la solution. Travaillons ensemble pour que nous
puissions revenir le plus rapidement possible à une vie
normale.
Avant de parler de votre
album, on ne peut pas ne pas parler de votre oncle. Au
départ vous étiez plus gospel, mais en 1989 vous
tombez littéralement dans le blues. Qu'est-ce qui vous a
fait basculer dans la musique du diable ?
C’est juste quelque chose qui est arrivé comme
ça. Un ami a voulu monter un groupe et ils ont
demandé à John (NDLR John Lee Hooker), mais John
a dit de demander à Archie. C’est ainsi que je
suis arrivé dans mon premier groupe de blues. Nous avons
commencé à composer et à jouer de
petits concerts en Californie. C’est quelque chose s'est
passé mais ce n’était pas quelque chose
que j’avais prévu, c’est simplement
arrivé naturellement. Et je ne le regrette pas une seule
seconde !!!
Vous avez vécu
avec votre oncle, que vous a-t-il apporté musicalement ?
Je suppose que la musique était déjà
en moi et que je ne savais tout simplement pas comment la faire sortir.
Alors John m'a aidé à la sortir. John m'a
définitivement influencé, et j'ai repris des
suggestions de certains des plus grands noms du blues qui venaient
à la maison. Mais John et moi étions amis, on
parlait de tout et pas forcément que de musique.
Question que l'on a
dû vous posez à de multiples reprises : c'est
compliqué de sortir de cette image
d’être "le neveu de" ? A partir de quand vous
êtes-vous dit "ça y est je vis (musicalement bien
sûr) comme Archie Lee" ?
Oui c'est le cas. Tout le monde ne comprend pas que je
n’essaie pas d’être John Lee. J'ai ma
propre histoire à raconter, et c’est ce que je
fais. Quand j'ai commencé à tourner, je n'ai
jamais voulu être dans l'ombre de John, parce que mes
idées musicales étaient différentes
des siennes. J'ai vécu une vie différente de lui.
Et mes idées musicales sont arrivées
naturellement. Peut-être que la première fois
où je me suis vraiment senti dans mon truc, ma musique,
c'était en 2011 quand j'ai enregistré «
Straight From The Heart » avec Carl Wyatt.
Pourquoi avoir
nommé votre groupe The Coast To Coast Blues Band ? Cela a
une signification particulière ?
Oui, cela a une signification particulière. Mon band vient
de différentes côtes, du Brésil au
Luxembourg en passant par la France, ils sont tous de
différentes parties du monde. Et ils ont gagné ce
nom, il ne leur a pas été simplement
donné, mais ils l’ont
mérité. C'est ma façon de montrer mon
attachement à mes musiciens.
Vous sortez un
très bel album, « Living In A Memory
», pourquoi ce titre ?
En me souvenant du chemin que j'ai fait, du Mississippi à la
France, de toutes les routes que j'ai parcourues, des erreurs que j'ai
faites, des mauvais virages que j'ai pris où je devais
repartir et me remettre sur la bonne voie. C’est un CD plein
de souvenirs, bon et mauvais à la fois. C’est la
même chose que mon précédent album,
« Chilling », une compilation du parcours de ma vie
écrite en paroles et en musique.
Vous aviez besoin de
vivre dans un souvenir pour pouvoir avancer ?
Oui, j'ai besoin de revenir sur ma vie pour avancer. Je devais sortir
de moi les choses qui me gênaient pour continuer à
avancer. Du Mississippi au Tennessee en passant par la Californie et
maintenant la France. Vous devez parfois abandonner votre
passé pour continuer à avancer.
Quels thèmes
abordez-vous sur cet album ?
L’album parle de la vraie vie, de la vie qui se passe
aujourd’hui. Rien d’artificiel, rien
d’inventé. Des choses qui se passent
réellement aujourd'hui dans le monde, non seulement pour
moi, mais aussi pour des millions de personnes. C’est une
jungle où les gens doivent avoir trois emplois pour pouvoir
survivre. Il s’agit d’une nation
divisée, du racisme. « Parchman Bound »
parle de l'un de mes parents qui a été
envoyé dans les prisons les plus notoires du sud. Vivre dans
un souvenir, c’est la façon dont ma femme
m’apprécie, parce que je
n’étais pas prêt à
être un bon mari et un bon père. «
Getaway » concerne mon déménagement de
la Californie à la France.
Musicalement, on retrouve pas
mal de styles, ce n'est pas que du blues. On retrouve de l'esprit soul
sur pas mal de titres, du rhythm’n’blues, du swamp
…
Oui, c'est un mélange de blues et de soul. Un
mélange de paroles, de styles et de rythmes, et
c’est comme ça qu'est la vie. La vie
n’est pas toujours la même, il y a des hauts et des
bas. Nous voulions un album qui puisse toucher tout le monde dans ce
monde. Il y a quelque chose pour chacun. Il y a des sentiments et des
paroles qui toucheront les gens de différentes
manières.
Beaucoup de cuivres
également, vous aimez la chaleur musicale
qu'amènent ces instruments ?
Oui, cela ajoute une saveur particulière. Cela rend le son
plus ample, chaleureux, relaxant. Je les aime ! J'ai toujours
aimé les groupes de blues avec une section de cuivres.
J'adorerais aussi emmener les cuivres sur la route. Voyons si nous
pouvons y arriver un jour.
Sur « Blinded
By Love », mon morceau
préféré, avec Bernard Allison
à la guitare, vous allez même vers le Chicago
blues. C'est vous qui l'avez composé, ou bien en
collaboration avec Bernard Allison ? Comme vous il a un
héritage lourd à porter …
Nous avons rencontré Bernard à plusieurs
reprises. Quand j'ai commencé à enregistrer ce
nouveau CD, il a demandé s'il pouvait faire partie d'une
chanson, et j'ai accepté. C'était un plaisir de
l'avoir sur notre album, il est
Génial ! Non, il n'a pas aidé à
composer la chanson, nous avons choisi cette chanson car nous pensions
qu'elle correspondait le mieux à son style. Je suppose qu'il
a aussi un lourd héritage à porter. Mais il s'est
définitivement fait un nom ! Il fait sa propre musique avec
son propre style et c’est ce que j’aime chez lui.
Vous aimez
également dénoncer les travers des dirigeants, je
pense à « It's A Jungle Out There »
…
Il s’agit du monde d’aujourd’hui, tout le
monde travaille si dur pour subvenir aux besoins de sa famille, pour
avoir un endroit où vivre ou travailler dur pour pouvoir
manger. Les deux parents travaillent maintenant. Si ce
n'était qu'un des deux, vous n’auriez plus assez
d’argent pour survivre. En regardant le mur, le racisme.
L'Amérique recule. Nous avons fait beaucoup de
progrès, mais maintenant nous retournons en
arrière et ce n’est pas bon. Les gens doivent
prendre la parole pour que le changement se produise.
J'espère que cette chanson aidera à changer un
peu notre société. Peut-être qu'il y a
des gens qui écoutent la chanson et commencent à
s'interroger sur certaines choses.
Vous terminez cet album
avec le superbe « Miss You Mama », un hommage
émouvant à votre maman ?
Oui, c'est un hommage à ma mère, pour les
sacrifices qu'elle a fait pour moi et pour le savoir et l'amour qu'elle
m'a transmis. Je la remercie ici pour tout ce qu’elle a fait
pour moi.
Vous êtes
installé en France depuis 2011, pourquoi avoir choisi la
France ?
Le fromage et le vin !! Plaisanterie mise à part,
c'était un but musical et d'amour. C'était
à l'origine une suggestion de John. Il a dit que si je
voulais faire de la musique, il fallait aller en Europe. Je lui ai
demandé où en Europe, il a dit je ne peux pas te
le dire, mais tu le sauras une fois que tu y seras.
La France est-elle une
seconde Terre de Blues ? Car on trouve beaucoup de musiciens
américains qui sont venus s'y installer ?
Je pense que oui, je connais de nombreux bluesmen et blueswomen qui ont
déménagé en Europe, pas
nécessairement seulement en France mais aussi en Allemagne,
aux Pays-Bas, au Royaume-Uni, etc. C’est une terre
d’opportunité pour les artistes
américains.
Vous avez
peut-être en France plus de possibilités
d'exprimer votre art et votre musique ?
C’est un pays culturel, ils investissent dans l’art
et la culture, ce qui permet à chaque type
d’artiste d’avancer plus facilement, de faire ce
pour quoi il est né.
Vous avez dit "Comment
mettre du feeling dans une chanson si on n’a pas
vécu soi-même ce que l’on chante", c'est
ce qui fait de vous un chanteur authentique ?
C’est sûr qu'il vaut mieux le vivre, car une fois
que vous l'avez vécu, vous pouvez l’exprimer
librement, sans trop y penser. Ça devient naturel. Et le
public le sent. Il sait si vous êtes un chanteur ou un agent
immobilier ! (Rires)
Merci beaucoup pour cette
interview et à très vite sur la scène.
Merci Yann. Keep on bluesing.
Propos recueillis par
Yann Charles
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