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Ecrit par Yann Charles |
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samedi, 13 février 2021
LIZZARD
https://lizzard.fr/
Rencontre confinée avec Mathieu Ricou, chanteur et
guitariste de groupe franco-britannique LizZard. Il nous parle d'eux
mais également de leur dernier opus, « Eroded
», qui sortira le 19 février via Pelagic Records.
Un album étonnant aux riffs explosifs et aux passages
très planants et psychés. Difficile à
classer, comme le reste de leur discographie.
Salut Mathieu. Peux-tu nous
présenter le groupe et question forcément que
l'on vous pose tout le temps, pourquoi ce nom LizZard ?
Alors nous sommes un trio rock. Il y a Katy à la batterie et
William à la basse, et donc moi Mathieu au chant et
à la guitare. On joue ensemble depuis 2006 et depuis
2012/2013 on ne fait plus que ça. On tourne et on joue
partout dans le monde. Ensuite pourquoi LizZard ? Bonne question. Comme
tous les groupes, au départ, on cherchait un nom de groupe
et on voulait exprimer quelque chose d'assez sauvage pour notre musique
rock. Un truc insaisissable, qu'on n'arrive pas à attraper
comme un lézard sur un arbre. Et donc LizZard est
arrivé. Et avec deux "Z" pour ne pas faire comme tout le
monde.
Vous vous êtes
rencontrés et formés en 2006, c'est une belle et
longue aventure. Qu'est-ce qui fait qu'on reste ensemble au bout de 15
ans ? Il n'y a pas eu de changement de line up.
Non c'est vrai, pas de changement. Quand tu penses avoir quelque chose
d'unique … Comment expliquer ? On a tous eu une vie de
groupe avant ça et il n'y a qu'avec celui-là qui
fait que ce qu'il se passe entre nous, on n'a pas envie de le perdre.
Le groupe est devenu plus fort que nous. Ça fait 15 ans
qu'on joue ensemble et on se connaît très bien. On
s'accepte tous avec nos travers et nos torts. Même quand
ça ne va pas, il faut que ça aille car c'est le
groupe qui prime avant tout. Et comme désormais LizZard
occupe 80% de notre temps, ça fait totalement parti de nous.
On ne voit pas pourquoi ça s'arrêterait.
Il y a des groupes, quand
le succès est là ou quand on vit presque tout le
temps ensemble, cela crée des tensions et souvent
ça s'arrête à cause de ça.
Mais vous non.
Exactement. Nous c'est l'inverse. C'est le fruit de notre travail qui
nous a emmenés jusqu'à ce qu'on est et ce que
l'on vit maintenant.
Comment tu
définis votre musique ? Accrocheuse un peu à la
Wolfmother, très brut mais également assez riche
avec pas mal de morceaux presque planants ?
Je vais essayer de ne pas tomber dans le déjà dit
mais on est en 2021 et on fait du rock au sens large avec de la
distorsion dans nos guitares. C'est vrai qu'on a essayé de
nous cataloguer dans pas mal de trucs, très souvent en rock
prog, car on nous a comparés à Tool
dès le départ. On a de gros riffs rock donc
aussi, à la Wolfmother comme tu viens de le dire. Alors on
n'a pas un son metal car il n'est pas agressif comme le veut ce style,
même si on a une grosse patate. Nous, on aime bien ce nom de
"art rock" car c'est très varié. Ça
ouvre plus de portes que ça ne ferme de tiroirs.
Je trouve un son un peu
rock anglais avec pas mal de recherches.
Tu sais que je suis le seul Français dans le groupe mon
pauvre … (Rires).
La base basse/batterie est anglaise donc forcément
ça se ressent tout de suite.
Vous commencez l'album
avec un titre assez lent, alors qu'on vous attendait plus rentre dedans
peut-être ?
Tu penses à « Corrosive » ?
Oui. Je trouve que vous
débutez l'album de façon très
très soft. Même le second morceau commence
doucement.
« Corrosive » est plus une plage d'ouverture. On
voulait mettre les gens dans un certain état
d'esprit. Sans vouloir leur envoyer un premier, puis un
second single. On avait une volonté de mettre une ambiance
comme ça.
Cette ambiance se
retrouve tout au long de l'album avec un équilibre entre
morceaux planants et softs et des titres aux riffs plus agressifs
…
On a tendance à faire ça oui. C'est pour
ça qu'on n'arrive pas vraiment à nous
définir musicalement. On peut être gros riffs
comme super éthéré, voir
psyché des fois.
Quels thèmes
abordez-vous sur cet album ?
Plusieurs et un seul en même temps. En fait c'est notre
regard sur ce qui nous entoure dans la vie de tous les jours. Cet album
a été créé il y a plus d'un
an et demi déjà. On l'a enregistré en
octobre 2019. Donc c'est notre regard sur ce que l'on observait
à ce moment-là. Et on voyait les choses
être fatiguées et usées. Sans faire de
grands débats mais sur le système, qu'il soit
écologique, économique ou social. Et comme on a
pas mal voyagé, on s'est aperçu que
c'était partout un peu pareil. Et il a fallu qu'on en parle,
qu'on sorte ce qu'on avait dans le cœur sans trop
réfléchir. Et maintenant, on est en 2021 et on
est en plein dans ce qu'on écrivait pour cet album.
Vous vous êtes
volontairement isolés pour enregistrer, vous aviez besoin de
vous isoler complètement ?
Non, c'était la première fois qu'on faisait comme
ça. D'habitude, on mettait toujours une dizaine de jours
à faire nos albums en studio. Cette fois ci on a ressenti le
besoin de tenter cette expérience là. On est
allé à Dresde dans un super studio avec Peter
Junge qui a produit l'album. On s'est enfermés
là-bas pendant un mois et on a enregistré cet
album. On s'est mis là-dedans et on a gratté sur
les disques et sur notre titre pendant un mois. C'était la
première fois qu'on le faisait et je pense qu'on le refera,
même plus intense si on peut car c'est quand même
beaucoup d'organisation et de moyens. Mais voilà,
ça a été une expérience
unique pour l'instant mais que l'on ne regrette pas du tout.
Tu viens d'en parler,
vous avez une nouvelle fois travaillé avec Peter Junge,
qu'est-ce qu'il vous apporte ?
Beaucoup de choses et pas grand-chose en même temps. C'est
l'occasion qui a fait le larron si tu veux. On l'a rencontré
pour « Shift », l'album
précédent, un peu par erreur dans le sens
où on devait travailler avec Sylvia Massy mais elle n'a pas
pu se déplacer pour nous enregistrer. Du coup elle nous a
envoyé ce mec là qu'elle connaissait. Et le
courant est super bien passé avec lui. A tel point qu'on se
demandait comment c’était possible
d’être tellement en phase avec des gens qu'on ne
connaissait pas. Et quand on a terminé l'album
précédent, on a commencé à
parler du suivant, donc de celui-là. De manière
très logique. Il est devenu quasiment le
quatrième membre du groupe. Il nous a beaucoup
apporté dans le sens où il nous a vite
cernés. Il sait ce qu'on sait faire, ou ne pas faire. Ce
qu'on aime faire et ce qu'on n'aime pas faire. Il connaît les
caractères de chacun et en plus, il a
complètement compris le délire du groupe. Il nous
apporte une facilité d'expression. On est à
l'aise avec nous même quand on est avec lui. Par rapport
à d'autres avec qui on a bossé et où
il fallait qu'on se moule à eux. Il nous apaise et en
même temps c'est quelqu'un de très positif, il a
beaucoup de jus et il n'est pas en mode "vive le metal et vive le gros
poil", il est vraiment très très ouvert.
Comment vous avez
travaillé pour cet album ? Qui fait quoi ?
Ça a évolué au fil des
années. Aujourd'hui, je suis souvent le fil
déclencheur. Je suis un peu maladif dans le sens
où je ne peux pas m'arrêter de penser à
ça et donc j'enregistre beaucoup de guitares, de chant, de
thèmes et d'idées. Ensuite j'amène
ça à mes collègues, et on fait le tri
de ce qui nous parle à tous les trois. Et de là,
on commence le travail de création à trois. Par
contre, on travaille ensemble, dans un local, à l'ancienne.
On n'est pas très ordi. Pour nous la musique ça
se vit. Ça ne s'analyse pas et ça ne
s'intellectualise pas. Ça se vit et ça se ressent
d'abord.
Pour les textes, c'est
différent ?
C'est pareil. J'ai souvent des thèmes ou des phrases, mais
comme on fait la musique en même temps, c'est souvent elle
qui prend le pas sur le texte. Une fois que la mélodie est
là, le texte arrive en phase finale de la composition. Et je
les fais avec Katty. Comme les textes sont en Anglais, c'est plus
pratique quand c'est une Anglaise qui écrit (Rires).
Dans votre dossier il y a
écrit "Eroded est un voyage dans le meilleur des
années 90, mais dans le son de 2020" vous êtes
nostalgiques de cette époque ?
Ben sans le vouloir. On a grandi là-dedans. C'est notre
adolescence les années 90. On a commencé
à faire de la musique à cette
époque-là. Après, on a
découvert d'autres trucs, mais sincèrement, la
musique d'aujourd'hui nous gonfle car c'est souvent le même
son. Ou alors c'est de la merde (Rires).
Non je plaisante, mais bon … Moi je viens du jazz, William
est à fond musique des années 70, tandis que
Katty est très metal. Donc ça nous donne un gros
panel, et toutes époques confondues. Et là
où on se retrouve tous les trois, musicalement, ce sont les
années 90. On se retrouve un peu dans tous ces groupes comme
Soundgarden en passant par Tool, Radiohead. On trouve que les
années 90 étaient les plus abouties en
matière de rock.
S’il y a une
chanson qui définit bien l'album, c'est laquelle ?
La chanson éponyme, « Eroded ». Dans le
texte, le ressenti émotionnel de l'album c'est que nous nous
ressentons. Et ce qu'on aimerait que les gens ressentent
également. Sauf que ce n'est peut-être pas le
morceau plus accessible. C'est un morceau où il n'y a pas de
batterie, pas de basse, beaucoup de cordes. C'est presque un morceau
classique. Si les gens veulent avoir le son LizZard, alors «
Blowdown » ou « Haywire ». Mais je ne
suis pas le meilleur promoteur de cet album car tous les morceaux sont
tellement différents. Il n'y en a pas un qui est pareil.
Donc c'est en fonction de tes émotions et de ton ressenti.
Tu sais, on n'est pas dans l'aspect recette dans ce groupe. On
est vraiment dans l'aspect artistique.
Quelles
différences ou évolutions par rapport aux albums
précédents ?
Je pense que c'est aux gens qui écoutent de nous le dire !!
On n'est pas très très bon là-dedans.
Tu sais, c'est un groupe où rien n'est calculé.
Pas de plan de carrière, de plan commercial. Pour nous la
musique est vraiment un moyen d'expression. Jamais on ne va faire un
album en se disant on va faire comme ça ou comme
ça. Tu sais, on ne sait même pas si il y en aura
un prochain (Rires).
On joue tous les trois car on aime ce qui se passe en sortie de tout
ça. Et surtout c'est vraiment un besoin. Comme je te le
disais tout à l'heure, Katty et William sont Anglais, de
culture différente de la mienne, et pourtant on arrive
à communiquer super bien ensemble. C'est vraiment un moyen
d'expression avant de vouloir passer à la
télé tu vois (Rires).
Vous tournez beaucoup,
vous passez beaucoup de temps sur scène, mais pourtant cet
album ne semble pas avoir été composé
pour la scène …
Inconsciemment je te dirais oui car on aime bien pouvoir jouer sur
scène ce que l'on compose. Mais ça se fait tout
seul. On ne calcule pas ça quand on compose. Et
jusqu'à présent, on n'a jamais eu de mal
à se dire comment on allait recréer ça
sur scène.
Tu peux
définir le groupe en deux ou trois mots ?
Alors en deux mots. Sincère et impalpable.
Et la dernière
question plus personnelle, quel est le dernier album ou le dernier
morceau que tu as écouté ?
Ah ça c'est cool comme question. Le dernier qu'on a
écouté car on est très difficile, et
qu'on a kiffé, c'est Amon Tobin. C'est un artiste d'electro
qui est issu lui aussi des années fin 90. Et son album
s'appelle « Guerrero ». Il a composé son
album comme de l'electro, mais qu'avec des sons d'un instrument
acoustique. C'est très intéressant.
Mathieu, merci pour cette
interview.
Merci beaucoup à toi.
Propos recueillis par
Yann Charles - Crédit photo : Audrey Saint Marc
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