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LUDOVIC EGRAZ pdf print E-mail
Ecrit par Yann Charles  
mercredi, 13 janvier 2021
 

LUDOVIC EGRAZ

https://united-guitars.fr/

Rencontre avec le créateur du projet United Guitars, Ludo Egraz, également rédacteur à Guitare Xtreme Magazine. Il nous présente « United Guitars Volume 2 » avec, comme pour la première édition, la réunion de plusieurs guitaristes, pour le plus grand plaisir de nos oreilles. Un projet qui deviendra sûrement un incontournable et que l'on attendra tous les ans avec beaucoup d'impatience. Une belle rencontre avec un vrai passionné de sons et de guitares.

Salut Ludo. Comment vous est venue l'idée de monter ce projet en 2019 ?
Salut Yann. Dans le cadre de mon boulot pour le magazine Guitare Xtreme, j'ai organisé deux tournages vidéo : un qui s'appelait « Extrême Challenge » et un autre « Extrême Blues Rock Challenge ». Ce sont des morceaux qui ont été écrit par Youri de Groote pour le premier et par Fabrice Dutour pour le second. Tous les deux jouent sur les deux disques. Et pour ces morceaux, on avait invité huit guitaristes qui venaient jouer sur les vidéos. Et à la fin du deuxième tournage de l'« Extrême Blues Rock Challenge », j'ai été prendre un café avec Fred Chapellier, Fabrice Dutour et Axel Bauer, et on s'est dit que ce serait bien de le faire de façon plus développée, plus travaillée dans un studio. De le filmer aussi, mais avec un travail plus approfondi. J'en ai parlé à Olivia Rivasseau (Mistiroux Productions) qui est ma compagne et productrice, et qui a l'habitude de monter des projets discographiques et de produire  également des albums. Elle avait une stratégie pour le faire, pour trouver des financements. Donc on s'est lancé en se disant qu'on verrait bien où cela aboutirait. Et toutes les étapes ont fonctionné. On a réussi à obtenir des subventions. On a réuni un line up. On a également fait un financement participatif avec KisskissBankBank qui a très très bien fonctionné. Et de fil en aiguille on a réussi à aller au bout du projet. Et il a super bien marché. Voilà un peu pour la genèse du projet.

A une époque, Jean Félix Lalanne avait monté le projet d'une rencontre entre guitaristes, mais juste pour une soirée, ou une tournée. Vous avez également cette envie d'en faire une tournée ?
Si tu fais mention à « Autour de la guitare », je pense qu'il avait bien accusé le coût financièrement. La moitié des dates avaient été annulées et les artistes étaient quand même là.  Je ne sais pas ce qu'il s'est passé. Le public qui n'a peut-être pas répondu présent … Nous on a travaillés, avant le Covid, pour mettre ce projet sur la route, et en termes de financement c'est assez colossal. Il y a trente guitaristes, les batteurs, le bassiste, la productrice, des personnes pour le son, les lights, la vidéo, le merch … On a fait le festival United Guitar Fest début février 2019 à l'Européen. Ça s'est bien passé, mais c'est déjà assez lourd. Alors transporter ça de villes en villes, je pense que c'est irréalisable.

Ça devait être un projet unique, ou vous aviez déjà en tête d'en faire un projet régulier, tous les ans ou les deux ans ?
C'est une collection et on veut en faire un par an. C'est le but qu'on s'est fixé. C'est pour ça que dès la fin du festival, on a réfléchi à qui pourrait jouer sur le deuxième album. Le matériel a été écrit sur une période de trois mois, et on est rentré en studio. C'est notre volonté d'en faire une collection.

Vous auriez pu vous contenter de demander aux musiciens de jammer sur des titres, mais vous êtes allés plus loin en leur demandant, du moins à certains, de composer des titres ?
Au tout début du projet, on s'était dit que ça pourrait être des jams filmées et enregistrées. Mais, beaucoup de guitaristes qu'on a contactés pour le premier album n'étaient pas très emballés pour faire des jams. Tu sais comment ça se passe. Le jour de la jam, tu ne sais pas comment tu seras, si tu seras en avant ou plus en retrait, tu ne sais pas si le feeling passera bien à ce moment-là. Il s'est avéré que la solution la plus confortable serait de partir sur des morceaux qu'on aurait composés. Quitte à ce que sur ces morceaux il y ait des solos improvisés. Par exemple, pour le morceau de Yarol Poupaud il m'a dit : "Je ne vais rien composer, je vais trouver des riffs, et on improvisera sur place".  Il est arrivé au studio avec son claviériste. Il s'est installé dans le studio avec François Delacoudre et Fred Chapellier qui fait la seconde guitare sur son morceau. Il leur a appris des riffs, et chacun a pris ses marques et a trouvé ses propres parties. Ils ont répété une heure et demie d'un morceau qui au départ est parti de pas grand-chose. Et à partir de là, je crois qu'on a fait cinq prises et je crois que le morceau sur l'album est un mix de la quatrième et de la cinquième prise.

Malheureusement les conditions sanitaires ne permettent pas à l'heure actuelle de faire des concerts, mais le projet va-t-il se faire quand ce sera permis ? Et à L'Européen sur deux jours ou sur une date uniquement genre Zénith par exemple ou Olympia ?
Je ne sais pas. L'Européen a une disponibilité au mois de mai 2021, mais pour l'instant c'est avec beaucoup de points d'interrogation car on ne sait pas quelle sera la situation d'ici là. Je suis assez pessimiste. Le vaccin mais bon, il faudra voir ce que cela donne. Est-ce que les gens autres que les prioritaires pourront en bénéficier avant ? Pas sûr que les gens qui ne sont pas à risque aient accès aux vaccins avant plusieurs mois. Je doute que d'ici là les salles refonctionnent, et surtout refonctionnent à jauge pleine. Et nous, si ce n'est pas à jauge pleine, ce n'est même pas la peine de prendre le risque de louer une salle. De faire appel à des prestataires. Et puis il faut aussi réarranger les morceaux élaborés en studio pour les adapter à la scène. Je te prends l'exemple de Nina Attal qui chante sur huit mesures sur un des morceaux, on ne peut pas lui demander de venir juste pour ça. Il faut réécrire pour qu'elle fasse le morceau. Des fois, il y a trois voire quatre guitaristes sur un morceau. Et c'est pas évident sur scène d'avoir un bon résultat. Il faudrait remanier les parties solos. Donc beaucoup, beaucoup de travail, beaucoup de répétitions. Donc faire tout ça, lancer une billetterie et qu'à la fin rien ne puisse se faire, c'est frustrant. Beaucoup d'énergie pour rien. Non, je pense que ça ne vaut pas le coup de prendre de risques. Autant attendre que tous les voyants soient dans le vert pour envisager quoi que ce soit. On va quand même lancer notre Guitar Contest qui permettra à des guitaristes de rejoindre le projet. C'est On Line donc on peut attendre quelques mois. La manche finale s'était fait en vis à vis à l'Européen. Là si ce n'est pas le cas, on pourrait peut-être le faire dans une salle vide ou en très petit comité dans un studio d'enregistrement.

Vous brassez une multitude de styles de musique, pas de jazz par contre ?
Du jazz pur non. C'est quand même un projet rock à la base. Il y a quand même des musiciens comme Yoann Kempst qui a le cul entre deux chaises. C'est un musicien de rock, mais son vocabulaire c'est le jazz. Swan Vaude, même si ce n'est pas un guitariste de jazz, il est très porté vers la fusion, le jazz rock et ça s'entend dans son jeu. Quelque part Thomas Fratti aussi. Il a tout ce vocabulaire un peu chromatique, à base d'arpèges. Mais effectivement, on n'a pas de morceaux proprement jazz.

On va parler des musiciens. Comment vous les choisissez, et ce n'est pas trop compliqué de les convaincre de participer aux projets ?
Les convaincre non. Il y a même des gens qui nous contactent pour en faire partie. Après, j'ai tendance à privilégier les gens que je connais au moins de réputation ou d'amis communs. Il faut surtout éviter des gens qui sont un peu casse couilles car c'est important pour le projet. Il faut qu'ils jouent bien. Qu'ils aient quelque chose à raconter. Ce n'est pas qu'une question de technique, de vitesse ou d'effets. Il faut qu'ils sachent composer, s'adapter, et qu'ils aient de la substance. Et par la suite, il faut aussi qu'ils puissent pendant une période donner du temps, des idées, quitte à sacrifier un peu de son temps perso. En fait il faut jouer pour le collectif et ça, tout le monde ne le fait pas. Je m'en suis rendu compte après le premier album. C'est un point qui est très important. L'ADN de ce projet est la mise en commun et du partage. Quelqu'un qui veut être dessus uniquement pour sa promo ne nous intéresse pas.

Vous ne prenez que des guitaristes français ? Ou bien c'est ouvert à tout le monde ? Je pense par exemple à Doug Aldrich, il est là en guest, ou bien fera-t-il partie des résidents ?
Je ne sais pas. Il se trouve que c'est quelqu'un que je connais très bien. Et si je lui demandais, je pense qu'il accepterait de remettre ça. Sur le premier il y avait Gus G qui est également quelqu'un que je connais depuis longtemps. Ce sont des gens avec qui j'ai tissé des relations. Doug est quelqu'un qui passe un coup de fil quand il vient sur Paris. Que ce soit pour jouer ou en visite perso. Et quand je lui ai proposé de participer au projet, il a été très enthousiaste. Il y a aussi Youri de Groote. Bon il est Belge donc je ne sais pas si ça compte comme étranger (Rires). Mais j'espère qu'on en aura plus à l'avenir.

C'est vous qui les associez ou bien ils se choisissent eux même ?
Alors cela peut être un souhait qui émane des guitaristes eux même quand ils savent que quelqu'un va faire partie du line up. Je prends en considération leurs souhaits, mais ce n'est pas pour ça que j'accepte. Des fois j'ai des idées dans la mesure où tous ne se connaissent pas. Et moi je les connais tous. Et je sais qu'untel et untel ça va matcher entre eux et que ça va sûrement donner un bon résultat. Généralement, je ne me plante pas (Rires).

Vous avez quand même une base de guitaristes qui étaient déjà présents sur le Volume 1 que l'on retrouve sur le 2 ?
Oui. Ce sont des gens qui étaient là dès le départ, au moment où je commençais à parler du projet. Et ce sont aussi des gens qui nous aident beaucoup. En faisant la promo, en mettant la main à la patte dans l'organisation, dans beaucoup de choses.

Je reviens sur les compositions, c'est liberté totale ou bien vous fixez des limites ?
Non. On donne des limites en termes de timing. Youri de Groote a fait un morceau qui dure neuf minutes, mais à la base il en faisait seize. Déjà neuf minutes on a fait une exception, car normalement le timing est plutôt entre quatre et six minutes. Mais c'est quelqu'un qui a une vision un peu prog de la musique, donc il lui est difficile de faire des morceaux courts. Il n'arrive pas à raconter une histoire en trois ou quatre minutes. Après, cela peut arriver qu'il y ait des morceaux qui se ressemblent trop. Donc là il faut dire à un des deux compositeurs que quelqu'un a déjà proposé un morceau dans la même veine. Est-ce que tu n'aurais autre chose en magasin à nous proposer.

On retrouve une fille sur ce volume 2, Nina Attal, pourquoi seulement elle ? C'est compliqué de trouver des filles qui envoient ?
Normalement il devait y avoir une autre guitariste norvégienne qui s'appelle Tora (Tora Dahl Aagård NDLR). Il était prévu qu'elle vienne enregistrer à Paris, mais cela n'a pas été possible à cause du Covid. Ça m'embêtait un peu. Déjà Doug Aldrich était coincé en Californie pour les mêmes raisons. Et je me suis dit que si trop de musiciens travaillaient à distance, cela nuirait à l'intégrité du projet qui est la rencontre et la vidéo. Donc pour Tora, on a dit qu'on ferait peut être sur le prochain. Ensuite, effectivement, il y a beaucoup moins de filles qui jouent de la guitare que les garçons, même si il y en a de plus en plus. Il y a un phénomène, notamment sur les réseaux sociaux, de filles qui jouent de la guitare, et plutôt bien. En France, je trouve que le niveau n'est pas encore identique. Pour la guitare électrique, il est plus facile de trouver des garçons qui jouent et qui composent. Dans la guitare acoustique, c'est encore différent. Il y a plus de filles qui composent et jouent. Nina Attal, je suis son parcours depuis une dizaine d'année, et elle a plusieurs centaines de concerts à son actif. Elle ne fait pas semblant. Elle envoie. Et en plus, c'est une super compositrice. C'est pour ça que j'ai fait appel à elle. Pas spécialement parce qu'elle est une fille. Qu'un guitariste soit un mec, une fille ou un transgenre, ce n'est pas mon problème. Ce qui compte c'est que ça joue bien, que ça raconte une histoire. On a eu beaucoup de critiques sur le fait qu'on n'ait pas de musiciens noirs par exemple. Ou pas de reubeu. Le but d'un projet comme celui-là n'est pas de remplir des quotas, mais de proposer de la bonne musique. J'entends ces critiques, mais je ne fais que les entendre.

Est-ce qu'un projet acoustique pourrait être envisagé ?
Non. Qu'il y ait de la guitare acoustique sur les morceaux comme c'est le cas pour Thomas Fratti ou Manu Livertout ça ne me dérange pas. Pour être clair, la guitare acoustique n'est pas un truc qui m'attire tant que ça. Même si il y a des gens que j'adore comme Al Di Meola.

Vous avez un titre, ou des titres de morceaux qui vous ont marqué plus que d'autres sur ces deux volumes ?
Au départ ça a pu être le cas, mais plus ça avance, plus non, en fait (Rires). Il y a peut-être des titres que j'écoute plus que d'autres qui correspondent plus à ce que j'aime écouter en temps normal. Je me sens très proche de l'univers du guitariste Nym Rhosilir qui est un des guitaristes qui est sur les deux volumes. Sur ce disque là on a Saturax qui avait composé un titre sur le premier album que j'aimais bien mais qui me laissait un peu de marbre, et là il a composé un titre et je trouve qu'il a beaucoup gagné en maturité et qu'il a beaucoup progressé. Le morceau de Thomas Fratti j'aime beaucoup. Très atmosphérique un peu à la Jeff Beck. Le morceau de Régis Savigny, « I live in a Flat by the River », c'est une ambiance très Mich Landau, très californienne mais avec des éléments de musique ethnique. Le morceau de Judge Fredd, « Tea Time in Waggaduggu », j'aime beaucoup. Il y a la présence sur ce disque d'un garçon, Matt Asselbergh, qui n'est pas très connu car pas très présent sur les réseaux sociaux, qui est très discret. C'est le guitariste de Nightmare et je savais qu'il aimait les guitaristes comme Schenker. Il m'avait fait écouter une ébauche de morceau qu'il avait composé en pensant à Schenker et je lui ai dit que ce serait bien de ressortir ce morceau. Il l'a retravaillé et il en a sorti un bon titre. C'est Scorpionesque, mais c'est un des titres que j'aime beaucoup. Et aussi le morceau de Youri de Groote qui est un guitariste reconnu dans l'univers des studios, mais c'est sûrement un des meilleurs guitaristes dans ce registre  de la guitare électrique instrumentale.

Si vous deviez définir le projet en deux ou trois mots, ce seraient lesquels ?
Partage. Créativité et Adrénaline.

Dernière question plus personnelle, quel est le dernier morceau, ou le dernier album que tu as écouté ?
Le dernier album que j'ai écouté attentivement est celui de Steven Wilson que je trouve à la fois très beau et très déroutant.

Merci pour cette interview et à très vite.
Merci à toi Yann.

Propos recueillis par Yann Charles