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Ecrit par Yann Charles |
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vendredi, 09 octobre 2020
SKÁLD
http://skaldvikings.com/fr/
Rencontre avec Justine et Pierrick du groupe SKÁLD qui nous
parlent de leur nouvel album, « Vikings Memories »,
qui sortira le 9 octobre. Un nouvel opus où le duo nous
entraîne dans les contes et légendes des pays
nordiques. Une belle complémentarité de voix et
une complicité musicale qui vous plongeront avec passion
dans les mythes et les poésies vikings.
Pourriez-vous
présenter le groupe SKÁLD ?
Justine : Bonjour, merci pour ton intérêt !
SKÁLD est un groupe vocal composé de Pierrick
Valence et moi-même. Nous avons deux timbres très
différents et à la fois
complémentaires. J'ai une voix lyrique inspirée
de la musique world, avec des techniques proches des chants mongols et
de l'Est en général qui se marie très
bien à la voix gutturale et profonde de Pierrick et
à ses talents de multi-instrumentiste. C'est notre
compositeur Christophe Voisin Boisvinet qui nous a
rassemblés, c'est également lui qui
crée la quasi-totalité de nos musiques et textes.
Pierrick : Nous avons commencé à travailler
ensemble depuis deux ou trois ans, motivés par notre passion
pour les mythes nordiques, les musiques ancestrales et leurs
trésors spirituels.
Pourquoi ce nom, a-t-il
une signification particulière ?
J: SKÁLD fait référence aux
poètes du moyen âge, des personnages qui louaient
les exploits des héros et des grandes lignées.
C'était des personnages très importants
à une époque où la transmission se
faisait principalement de manière orale. Son
étymologie faisant directement
référence au son et à la «
voix », le mot SKÁLD résonne donc tout
particulièrement en nous.
P: Les scaldes avaient un rôle d’une importance
capitale dans la société des anciens norrois. Ils
étaient ceux qui détenaient l’art de la
poésie, avec lequel ils immortalisaient la
mémoire des hommes. La tradition orale
s’exerçait et œuvrait à
travers leurs dires, en faisant ou défaisant les
réputations des Jarls, des Rois et des Dieux. Toute une
sagesse nordique nous est parvenue grâce à eux.
Comment
définissez-vous votre musique ?
J: SKÁLD est une expérience musicale à
part entière qui invite l'auditeur à se plonger
dans l'esprit ancestral des légendes des peuples
païens du nord, avec une instrumentation ambitieuse
où s'entremêlent et résonnent
percussions, tambours chamaniques et anciens instruments à
cordes comme les lyres, les vielles et les instruments à
cordes frottées. Je n'aime pas mettre notre musique dans une
case en particulier mais si je devais la décrire je dirais
qu'à travers nos voix et tous ces instruments nous essayons
de suggérer le nord ancestral : sa nature, sa mythologie et
la manière dont les peuples y vivaient, en harmonie avec les
éléments.
P: Notre musique illustre des textes hors du temps. Nous composons en
insufflant une part de magie, de mystère à nos
mélodies. Nos influences sont multiples mais ne
s’identifient pas simplement. Ecouter SKÁLD
revient à s’offrir une expérience
agréable dans un monde de souvenirs et de mythes hors du
temps.
D'où vous
vient cette passion pour la mythologie nordique, l'histoire des Vikings
?
J: J'ai toujours été fascinée par
l'art, l'histoire et les cultes des premiers peuples du monde, leur
rapport à la nature, toutes cultures confondues, le
chamanisme et l’ésotérisme à
travers les âges. C'est ancré en moi, je suis une
touche à tout. Au-delà du Nord, la musique
« world » a toujours été une
passion. L'essence même de mon travail au sein de
SKÁLD est la recherche de sensations à travers la
voix, les vibrations, peu importe les mots : Je suis à la
recherche du partage avec l'auditeur dans son être le plus
profond. Quand ce projet s'est présenté
à moi j'ai senti que tous les ingrédients
étaient rassemblés, le côté
historique mais aussi fantasmé et rêvé
de cette époque, ce respect profond pour la nature, les
mythes et les morales que je découvre chaque jours un peu
plus dans la mythologie nordique, la place des femmes dans leurs
communauté...
P: Il y a des choses que l’on n’explique pas
facilement, voire pas du tout. Dès mon plus jeune
âge, l’intérêt pour le
passé, l’histoire, les sagas, les contes de
Trolls, les paysages de fjords, les épopées
épiques de pirates nordiques m’a habité
au point d’influer ma façon de faire de la musique.
En préparant
cette interview, j'ai lu que votre inspiration venait des «
Eddas », qui sont des recueils de poésies, vous
pouvez nous en parler ?
P: Les « Eddas » sont un témoignage
unique sur les mythes concernant les Dieux du Nord de
l’Europe. Snorri Sturluson, un Islandais du
XIIIème siècle, a eu l’idée
géniale de sauvegarder ce patrimoine de sagesse en couchant
sur papier ces histoires. L’art poétique propre
aux Scaldes fut ainsi préservé et nous savons
ainsi quels étaient les coutumes et les perceptions du monde
que ces peuples partageaient.
Vous chantez en quelle
langue ?
J: Nous chantons en vieux Norrois, une langue oubliée, riche
en sonorités.
Après « Le
Chant Des Vikings » paru en 2018, vous sortez «
Vikings Memories ». Parlez-nous de ce nouvel album. Vous nous
emmenez dans un nouveau voyage à travers le temps et les
éléments ?
J: Tout à fait ! Avec « Vikings Memories
» nous revenons conter l'histoire des peuples païens
du Nord leur rapport à l'océan et de
manière générale à la
nature. Nous nous ouvrons de manière plus vaste à
tous les peuples du Nord et ne nous contentons plus seulement de
l'ère viking : nous entamons un voyage encore plus ancien.
Nous remontons à la surface les récits
oubliés, de grands changements climatiques, des continents
engloutis, immergés, suite à la fonte des glaces.
Comme les terres fertiles du Doggerland, englouties sous l'actuelle Mer
du Nord. Notre premier single « Fimbulvetr » parle
quant à lui, d'un hiver long de trois ans, on y voit dans le
clip un enfant découvrant une pierre runique faisant
référence aux présages de la pierre de
Rök retrouvée en Suède, dont
l'inscription laisse deviner la peur des peuples face à une
nouvelle crise climatique semblable au Fimbulvetr qui engendra la
famine, la maladie, les migrations et extinction de certains peuples.
Nous parlons de maelström, vagues géantes et ras de
marrée auxquels ont dû faire face les braves
marins, mais aussi d'aurores boréales, autant de choses qui
-de tout temps- ont alimenté les mythologies des peuples du
Nord.
P: L’idée derrière « Viking
Memories » est d’illustrer une transition avec un
nouvel Âge. Les anciens Norrois concevaient le fait que
différentes périodes se succédaient,
que rien n’était immuable. Le concept est que les
éléments s’expriment pour annoncer ces
changements. Les montées des eaux, les hivers sans fins, les
vents glacials portent des messages ... Qui font échos avec
ce que nous vivons actuellement. Ils y a beaucoup à
apprendre des anciens. Pour que les générations
futures jouissent d’un meilleur environnement, nous pensons
qu’il faut les écouter.
Vous êtes dans
des chants mélodiques, une musique profonde, comment
avez-vous travaillé cet album ?
J: C'est notre compositeur Christophe Voisin Boisvinet qui compose la
quasi-totalité de nos musiques et textes. Nous avons
enregistré « Vikings Memories »
à la sortie du confinement, en Bretagne. C'était
un grand bol d'air frais après cette longue
période d’introspection, ce qui nous a grandement
inspiré et touché. Il y a une grosse dose
d'émotion dans ces chants. Il y a un gros travail de
recherche de sonorité sur ce genre de musiques, chaque
instrument est choisi en fonction du message du morceau et de
l'ambiance que nous voulons lui donner. Nous avons une multitude
d'instruments et de musiciens talentueux sur cet album. Puis nos deux
voix viennent donner l'intention finale, et viennent
suggérer, au mieux, le Nord ancestral. Pierrick à
une voix très basse et gutturale qui donne un
élan magique à ma voix lyrique et à
mes vocalises.
P: Christophe m’a envoyé deux textes et
m’a proposé d’écrire la
musique de deux chansons. Il connait mes inspirations et les
thèmes qui me touchent. C’est lui qui ensuite
réalise et produit. Il a écrit tout le reste.
C’est toujours un moment fort que de voir toutes ces chansons
grandir. J’adore travailler en studio, nous étions
en Bretagne pour cet album mais l’équipe
était la même, Adrien Thore et Christophe sont des
magiciens.
Vous travaillez d'abord
la musique ou les textes ?
P: Les textes viennent en premier lieu et engendrent la musique.
Les textes sont
inventés ou bien ce sont des textes et poèmes
existants déjà ?
J: Dans notre premier album, « Le chant des Vikings
», nous nous sommes énormément
inspirés des Eddas poétiques qui sont des
recueils de poésie scaldique du XIIIème
siècle. Pour « Vikings Memories » nous
avons adapté nos textes au message que nous voulions faire
passer.
C'est un album
scénarisé ? Que l'on suit de la
première à la dernière chanson ?
J: Comme pour « Le chant des vikings », «
Vikings Memories » et un album cinématographique,
chaque chant nous emporte dans des univers et des paysages
différents, des ambiances tantôt
guerrières et d'autre plus douces. L'auditeur peut aussi
bien écouter un chant de manière
isolée que s’asseoir dans son sofa et se faire une
écoute de l'album entier !
Vous étiez en
trio sur l'album précédent, maintenant en duo,
pourquoi ce choix ?
J: La vie nous amène parfois à prendre des
décisions, nous ne souhaitons pas communiquer sur ce choix.
P: Le costume ne fait pas le musicien.
Pourquoi ce choix musical
de folk, plutôt que d'une musique plus brute,
peut-être plus puissante, qui aurait également pu
se placer avec vos voix qui s'adapteraient parfaitement à
ça ?
J: Et bien je crois que c'est une décision purement
personnelle et artistique que de choisir la direction musicale d'un
projet. SKÁLD n'a jamais eu pour vocation d'être
un groupe metal ou de musique extrême.
P: Nos titres sont variés, en fonction des thèmes
abordés. L’intention n’est pas de
proposer une musique brute mais d’évoquer une
puissance spirituelle. Nombreux sont ceux qui la ressentent, certains
méditent, d’autres poussent même de la
fonte en l’écoutant, c’est signe que
notre musique est assez puissante pour activer des désirs et
des motivations.
La tendance nordic folk,
pagan, est de plus en plus recherchée vu le nombre de
groupes qui œuvrent dans ces styles, des festivals complets
(quand on pourra refaire des festivals), que recherchent les gens qui
vous écoutent ?
J: Je crois que beaucoup de personnes ont besoin de revenir
à des pensées et des valeurs plus saines et plus
proches de la terre et de nos origines. Car l'histoire que nous
racontons ici, c'est notre histoire à tous. Les catastrophes
climatiques qui ont engendré des migrations font
écho à notre monde moderne. Un cycle de plus.
Certaines personnes écoutent cette musique pour
s'évader un peu du quotidien et d'autre créeront
eux même leurs espace sacré en allumant un
bâton de sauge pour simplement méditer sur des
pensées positives et sur une façon de se
reconnecter à des valeurs ancestrales.
Vous êtes
très présents sur les réseaux, avec
des chants, des vidéos, c'est important cette communication ?
P: Si nous voulons que notre musique soit
écoutée, il nous faut la promouvoir,
c’est la moindre des choses.
J: Nous sommes arrivés à un stade critique dans
la culture où faire vivre un album en live est devenu
compliqué. Nous avons néanmoins besoin de ce
partage avec nos auditeurs, faire des vidéos, leur apporter
des bonus musicaux et des contenus originaux nous permet de rester
proches d'eux en attendant que la situation évolue.
Vous avez
déjà des idées pour de nouvelles
aventures musicales ?
P: Des idées, nous en avons beaucoup ... Si tout se passe
bien, nous trouverons les moyens de les faire vivre ...
J: Nous avons hâte de connaître les retours sur cet
album qui est sur le point de sortir, la suite au prochain
épisode ...
On arrive aux
dernières questions rituelles. Pouvez-vous
définir le groupe SKÁLD en deux ou trois mots ?
J: Je choisirais « Émotions, Évasion et
Imagination »
P: Libre, Suranné, Eternel.
Dernière
question : quel est le dernier morceau ou dernier album que vous avez
écouté ?
J: Le dernier album que j'ai écouté est Sangre de
Muerdago, « Noite ».
P: Agnes Obel, « Myopia »
Propos recueillis par
Yann Charles
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