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Ecrit par Yann Charles |
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jeudi, 06 août 2020
TOYBLOÏD
https://www.facebook.com/toybloid/
La crise du Covid est arrivée juste au moment où
Toybloïd allait sortir son second album en treize ans
d'existence. « Modern Love » (voir
la chronique), c'est l'album de la maturité avec
des textes forts signés pour la majorité par Lou
et une musique rock et généreuse comme sait le
faire le trio sur scène. C'est Madeleine, la bassiste et
choriste, qui nous en parle.
Salut Madeleine. Est-ce que tu
peux nous présenter ou plutôt nous
représenter le groupe Toybloïd pour les rares
personnes qui ne vous connaissent pas ?
Salut, c'est gentil ça. (Rires).
Toybloïd est un groupe qui existe déjà
depuis treize ans. Ça me fait toujours drôle de
dire ça !! Et on sort seulement notre deuxième
album. On est un trio de rock très classique : guitare,
basse, batterie. Lou qui est guitare/chant, moi à la basse
et aux chœurs, et Greg à la batterie. On chante en
Anglais et on a fait un premier album en 2016, qu'on a
enregistré à Londres en analogique avec le mec
qui a fait l'album « Elephant » des White Stripe.
Et donc quatre ans après, on sort (enfin) notre second album
qu'on a fait tout seul. On a monté notre propre label, on
s'est démerdés. On a viré nos
managers, notre label, et on a fait l'album qu'on avait envie de faire.
On s'est débrouillé tout seul, et on est trop
contents.
Tu dis que ça
fait treize ans que vous vous connaissez, donc vous vous êtes
rencontrées à la maternelle ou en CP ?
(Rires)
Tout le monde nous dit ça et c'est très gentil,
mais on est plus si jeunes. Bon c'est vrai qu'on avait 16 ou 17 ans
quand on s'est rencontrés. Ma première fois avec
Toybloïd, c'était la veille de mon bac
français et je remercie encore mes parents de m'avoir
laissé aller à ce concert. Donc oui, on a
commencé jeunes.
Comment tu
définis le groupe musicalement ?
Ça c'est toujours une question qui m'embête. Alors
c'est du rock tout simplement. Alors même si ce mot est
devenu interdit on fait du pop-rock. Même si maintenant c'est
complètement banni de dire ça. Donc je dirais du
rock très mélodique avec des touches de pop. De
bons refrains et des mélodies qui rentrent dans le
crâne, saupoudrés de gros riffs et de grosses
distorsions. Voilà.
Avant de parler de
« Modern Love », votre nouvel album, y a une phrase
sur votre bio qui m'a marquée : "Ça parle d'amour
et de sueur, de drag queen et de cyprine". C'est ce qui vous
correspond, liberté et provoc ?
Oui un peu (Rires).
C'est ce qu'on a essayé de développer sur cet
album. C'est vrai que le premier album qui est sorti alors qu'on avait
déjà dix ans d'existence était un peu
une compil de ces dix années. On était
très jeune et on n'avait pas encore d'identité
très confirmée. On faisait du rock et basta. Et
en mûrissant, on s'est rendu compte qu'on avait quand
même pas mal de choses à dire, une image assez
marquée et Lou évolue beaucoup dans le milieu
drag queen et c'est cette identité forte qu'on voulait
mettre en avant.
Bon, on parle de
« Modern Love ». Plus qu'un album c'est un cri.
Vous abordez de front les sujets de notre société
?
Toutes les chansons de cet album sont des histoires d'amour entre nanas
qui, en général, se finissent mal.
Après il y a d'autres sujets comme l'adolescence
où c'est difficile parce que tu te fais rejeter par tes
pères mais où c'est aussi comme ça que
tu te construis. Je dirais que les textes de cet album sont un peu une
revanche sur beaucoup de choses que l'on a vécues dans le
passé. C'est le cas pour les groupes de rock, les
problèmes sont souvent le cas de sources d'inspiration.
C'est Lou qui a écrit quasiment tous les textes. Je crois
que ça lui a fait un bien fou de sortir tout ça.
Elle se sent plus libre ?
Oui, je pense. On ne savait pas trop si on devait parler de tout
ça, ou bien si on laisse de côté. Et au
final, elle a eu envie de le sortir. D'où la pochette
où on est allé jusqu'au bout du coup.
Vous parlez d'amour sous
toutes ces formes pratiquement, du beau au plus violent, je ne parle
pas physiquement, mais celui qui vous prend aux tripes, on n'est que
dans le vécu ou bien il y a des histoires
inventées ?
Alors, encore une fois c'est l'histoire de Lou, mais de ce que je
connais de ces histoires, c'est du vécu (Rires).
Après c'est arrangé, romancé pour les
chansons mais c'est du vécu. Moi j'ai également
écrit deux textes qui ne sont pas des histoires d'amour qui
sont complètement vécues également. On
s'inspire beaucoup de ce qu'on vit. On n'invente pas pour l'instant.
Ça viendra peut-être (Rires).
Il y a une chanson qui
s'appelle « 7 ». Les 7 ans sont toujours un
tremplin dans les couples, même maintenant, ce
n’est pas une légende ?
Voilà c'est ça. C'est exactement le sujet.
Ça nous a été inspiré par
l'histoire d'un copain. On ne sait pas pourquoi ce chiffre 7 dans un
couple c'est le test.
« Rck N Rll
» est sorti en 2018, mais on le retrouve sur l'album, c'est
le titre liaison justement entre ces deux albums ?
Exactement. En fait on l'a réenregistré et
réarrangé, mais peut-être que personne
ne s'en rendra compte car on n'a pas beaucoup changé de
choses (Rires).
Fin 2017, on avait bien essoré notre premier album et on
voulait passer sur un deuxième. Et là, on s'est
rendu compte que les managers et le label avec qui on travaillait
n'avait pas la même vision du groupe que nous. Du coup, on
s'est dit qu'on allait continuer tout seul, tracer notre route. On
savait que ça allait être compliqué.
Financièrement déjà, puis monter un
label, les enregistrements, bref tout ce que cela entraînait.
Très vite, dès qu'on a pris cette
décision et pour nous prouver qu'on faisait le bon choix, on
a composé ce morceau. On a contacté un pote
ingé-son, un autre qui a un studio, on a mis en marche notre
réseau potes en fait et on a enregistré ce
morceau là. Donc oui c'est bien le morceau liaison.
Les textes sont forts,
emprunts de sincérité et je dirais qu'ils
laissent aussi transparaître des peurs. Tu penses que Lou a
réussi à les surmonter ou du moins apprendre
à vivre avec ?
Ah la la. Je suis embêtée de répondre
à sa place. Je dirais que ça lui a fait vachement
de bien d'extérioriser tout ça. Et en
grandissant, on apprend à vivre avec oui. Sur le premier
album, c'était l'ancien batteur qui écrivait les
textes. Lou n'avait pas du tout confiance en elle pour
écrire des chansons. Et pour cet album elle a quasiment tout
écrit. Elle a écrit des supers textes.
Ça a été une
révélation pour elle, et pour cet album
là.
On plonge dans des
atmosphères et des ambiances très
différentes. Du punk garage à
l’electro, le rock, vous aimez aller d'un univers musical
à un autre ?
Oui. Même si on a tous une base rock depuis notre
adolescence, on adore aussi un gros single, un gros Rihanna ou Beyonce
par exemple, très efficace, on aime bien. Pour moi, une
mélodie efficace, il n'y a rien de mieux quel que soit le
style. Un refrain qui fonctionne, un truc qui te rentre dans la
tête j'adore ça. Après
qu’autour il y ait des guitares ou du beat-electro peu
importe.
Cet album a
été composé pour la scène ?
Oui bien sûr car le rock c'est sur scène que
ça se passe. Donc forcément ça se sent
dans tes compositions. Mais par rapport au premier album qui
était enregistré en analogique, très
peu de pistes, il était issu de la scène. Pour
« Modern Love », on s'est moins pris la
tête pour savoir ce que ça allait donner sur
scène. On a fait ce qu'on voulait en studio. On a mis trois
couches de guitares, mais les titres ont été
composé pour trois, donc ils fonctionnent bien sur
scène, pas de problème. Alors on l'a
composé pour la scène, mais sans
hésiter à se faire plaisir en rajoutant des
petits trucs et des petits arrangements pour les ambiances.
Vous travaillez comment
pour la musique ?
C'est souvent Lou qui amène une base, souvent
développée. Parfois un morceau entier, d'autres
fois seulement refrain, et on travaille ça ensemble. Moi
aussi, j'en ai apporté aussi et on les travaille tous les
trois. Fred Lefranc qui est le réalisateur,
l'ingé-son, celui qu'on appelle le fameux
quatrième membre du groupe, a pas mal participé
au travail d'arrangements. Dès la pré-production
il était avec nous, il nous a suggéré
pas mal de choses. Ça nous a beaucoup aidés de ne
pas être que tous les trois. On aime beaucoup avoir quelqu'un
de confiance qui écoute les morceaux assez tôt
… et qui n'hésite pas à donner son
avis. Il nous a aiguillés intelligemment.
Quelle(s)
évolution(s) y-a-t-il eu entre votre premier album et
celui-ci. Musicalement, ambiances, textes ?
Les textes déjà puisque c'est Lou qui a
écrit et qui a sorti tout ce qu'elle avait en elle. Moi
aussi, je me suis bougé pour extirper quelques trucs. On a
mûri, pris plus de confiance en nous et maintenant on sait
qu'on est capables de dire des choses. Et on a pleins de choses
à dire (Rires).
Musicalement, c'est surtout la production qui a changé. On
n'avait pas envie de refaire un truc garage comme le premier album qui
était plus crado, plus brut. C'était
très bien de faire ça pour un premier album, mais
il fallait évoluer. Là, on voulait quelque chose
de mieux produit et qui ressemble plus à ce qu'on
écoute. On est fans du rock des années 2000. On
n'est pas dans un revival 70’s et 80’s. Nous on a
grandi avec des Gossip, Block Party, Franz Ferdinand et c'est un rock
que l'on entend plus tellement. Il n'a pas encore fait son grand
retour. Je pense qu'on a fait l'album qu'on aurait voulu entendre quand
on était ados.
Le virus est venu mettre
un peu le bordel dans notre vie …
Oh la la oui !!!
Tu penses qu'il va nous
aider à évoluer dans le bon sens, ou au
contraire, il risque de nous faire nous renfermer ?
C'est difficile à dire. Je ne sais pas. C'est tellement fou.
Tout ce que je peux dire c'est qu'il nous a interrompus alors qu'on
était en plein début de tournée. On
avait je ne sais pas combien de concerts de prévus, bref
c'était la grosse tournée. La sortie de l'album,
les promos, bref tout le travail de plusieurs mois. Et tout
s'arrête d'un coup. Bon ça s'est
arrêté pour tout le monde. Je ne serais pas quoi
te répondre là-dessus. Est-ce que ça
va empêcher de jeunes groupes de sortir ? Est-ce que
ça va arrêter ou interrompre longtemps les
concerts ? Là où cela peut influencer c'est que
tout le monde réfléchit à des choses,
alors peut-être que la musique va changer dans sa
création, sa diffusion. Il y a pas mal de choses qui vont
sûrement se mettre en place. Il y aura aussi des discussions
sur l'avenir de la planète, les enjeux
écologiques et économiques, donc
peut-être que cela pourra générer des
choses intéressantes pour le futur. Par contre musicalement,
je redoute toutes les chansons qui vont arriver sur le confinement.
Nous dans le groupe, on a ouvert notre conscience
écologique, on fait attention, on ne demande plus de
bouteilles d'eau, on vient avec nos petite gourdes. Idem pour les
repas, on privilégie le local. On essaie de faire des loges
zéro déchet. Pour le merch, on a pris du coton
bio, fabriqué dans des usines qui sont certifiées
que ce ne sont pas des enfants qui bossent et que les gens aient un
revenu décent. On essaie d'avoir ce
rôle-là en tant que groupe. Bon, certes, les
concerts ce n'est pas ce qu'il y a de plus écologique, mais
on essaie à notre niveau de faire quelque chose.
La sortie de l'album a
dû être décalée, les dates de
concerts annulées ou reportées, est ce qu'on va
quand même arriver à vous voir sur
scène ?
Oui, ça s'est plutôt bien
décalé à la rentrée. Reste
à savoir ce qu'il en sera de
l'épidémie. Tous les festivals prévus
cet été sont reportés d'un an. C'est
assez troublant d'avoir déjà son planning pendant
un an. Mais bon déjà c'est reporté
donc c'est pas si mal, ce n'est pas annulé. On
espère juste que tout va repartir le plus vite possible et
qu'on va sortir de tout ça rapidement.
Est-ce que tu peux
décrire Toybloïd en deux ou trois mots ?
Alors sauvage, instinctif. Et des meufs (Rires)
Avant de passer
à la dernière question, il y a une phrase qui me
chiffonne un peu quand même dans votre bio.
"Toybloïd c'est du rouge à lèvres
parfumé à la Kro". Y a pas meilleur comme
bière que la Kro ?
(Rires)
C'est le pote de Lou qui a écrit cette phrase. Il a mis
"Kro" car ça doit rimer avec la phrase d'avant je pense
(Rires). Mais la Kro, c'est la bière de base et tout le
monde s'y reconnaît. (Rires). Même si maintenant on
est plus vins natures.
Dernière
question: quel est le dernier album ou dernier morceau que tu as
écouté ?
En ce moment, j'écoute beaucoup The Big Moon. C'est un
groupe de quatre londoniennes. Je suis tombé dessus en
errant sur YouTube et c'est super bien. Elles sont toutes jeunes. Je
n'en avais jamais entendu parler. C'est hyper bien, très
planant, un peu à la Warpaint. J'ai complètement
accroché à leur musique. Elles ont fait un clip
en plan séquence où elles sont toutes les quatre
sur leurs vélos à panier, et c'est vraiment bien.
Je recommande leur dernier album, « Walking Like We Do
».
Merci Madeleine pour
cette interview et j'espère à très
bientôt.
Oui, ce serait très sympa. Merci beaucoup Yann. A
bientôt
Propos recueillis par
Yann Charles – Photo : Christiane Tastayre
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