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Ecrit par Yann Charles |
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vendredi, 17 janvier 2020
ANTI-FLAG
http://www.anti-flag.com/
Depuis plus de trente ans maintenant, Anti Flag, le groupe de punk rock
américain, dénonce et se bat contre les
inégalités, le racisme et le fascisme. Toujours
virulents dans les propos, puissants et énergiques dans
leurs concerts, ils ont pour leitmotiv le respect de la personne. Ils
en arrivent même à demander de se prendre dans les
bras les uns les autres devant leur scène. Et c'est
à l'occasion de la sortie ce 17 janvier de leur tout dernier
opus, « 20/20 Vision » » que nous avons
rencontré le charismatique leader et chanteur du groupe,
Justin Sane. Une interview faite en collaboration avec Dorothy du
webzine UltraRock !
Peux-tu nous
présenter Anti-Flag en quelques mots ?
Anti-Flag est un groupe de punk rock qui aime bien s’amuser,
mais qui a également des valeurs
d’égalité et de respect.
Vous êtes
toujours en lutte avec ce nouvel album qui vient de paraître,
« 20/20 Vision », que pouvez-vous nous en dire ?
On a trouvé, à une époque
où le néofascisme
s’élève dans le monde, où
notre président est un néo-fasciste à
la Maison Blanche, que ce serait important pour nous de
s’avancer et de prendre position. On a dû
travailler vite pour faire cet album, il y a pile un an on tournait en
Europe. On a dû rentrer au bercail et on a
commencé à écrire. Il y avait
matière à écrire, sur ce qui se passe
et sur ce monde qui est foutu. Et puis ma mère est
décédée …
C’était très dur de se motiver pour
faire un album. Ma mère a toujours milité pour la
justice sociale, pas seulement pour elle mais aussi pour les autres. On
a décidé que c’était
décisif, à ce moment de l’Histoire, de
montrer qu’on s’insurgeait contre ce qui se
passait.
Et pourquoi ce titre ?
« 20/20 Vision » est un genre de concept qui
symbolise la clairvoyance, les bêtises de Trump, comment les
gens hauts placés abusent de leur pouvoir, le fait que les
gens sont nourris par la propagande, la façon dont les
politiciens te manipulent avec des drapeaux …
L’idée de ce titre est vraiment
d’évoquer la clarté de
l’information et de montrer les choses telles
qu’elles sont réellement. Trump évolue
comme un jeune enfant avec sa propre vision « 20/20
» mais qui du coup est faussée, c’est
donc là qu’il a besoin de porter des lunettes (Rires).
Vous ne parliez pas
nommément des gens, des présidents ou des
dirigeants dans vos albums précédents, mais
celui-là, vous parlez de Donald Trump (on commence
directement avec la voix de Donald Trump « Hate Conquers All
») ou Mike Pence directement. Vous pensez que c'est
à cause la de politique ou politiciens comme eux que le
nationalisme progresse partout dans le monde ?
Les politiciens transforment le patriotisme en nationalisme. Et ils
utilisent le nationalisme et l’ordre pour forcer les gens
à agir contre leurs intérêts.
C’est valable pour les politiciens américains mais
aussi dans le monde entier. Quand les politiciens utilisent le
patriotisme comme un moyen de contrôler ce que les gens
ressentent et manipuler l’opinion publique, je ne
considère plus ça comme du patriotisme,
c’est du nationalisme et c’est dangereux. Dans
vingt ans, je pense que les gens verront Donald Trump comme un horrible
monstre. Et si un jeune me dit "Pourquoi n’avez-vous pas
protesté contre tout ça ?", je veux pouvoir le
regarder et lui dire "On a protesté !"
Depuis que vous avez
commencé ce groupe il y a trente ans, le monde a beaucoup
changé. Est-ce que Anti-Flag est toujours guidé
par la même envie ?
Oui. Il y aura toujours des gens avides de pouvoir qui en exploiteront
d’autres pour accumuler des richesses. Et le seul moyen de
régler ce problème, c’est de les
repousser. On a écrit « Die For The Government
» il y a des années … Je savais que
ça n'arrêterait pas la guerre, mais je me disais
que ça aiderait des gamins à dire : "Ce monde est
pourri, je ne me battrais pas pour lui". Quand on écrit des
chansons aujourd’hui, c'est la même chose : pointer
du doigt les injustices, les inégalités,
l’hypocrisie, et mettre tout ça en
lumière. De manière à faire voir les
choses différemment et peut-être faire bouger les
choses. C’est ce qui a guidé le groupe depuis le
tout début et je pense que c’est toujours
là, cette passion de le faire et de connecter les gens de
cette manière.
Vous dénoncez
aussi dans vos chansons les médias qui sont "le nouveau
pouvoir" en abrutissant ou manipulant volontairement les gens, mais tu
penses que les gens sont dupes de ça ? On dirait que les
gens ne sont plus capables de réfléchir par eux
même ?
Pour moi, le changement viendra toujours des gens. C’est
intéressant parce qu'on parlait de la révolution
de mai 68 qui avait complètement changé la
société française. La plupart des gens
ne savaient pas quand avait commencé cette
révolte et l’impact qu’elle aurait. Donc
je pense que c’est toujours important de résister,
de se battre pour une issue positive. On commence à voir la
même chose aux Etats-Unis aussi. Les gens voient ce qu'il se
passe et sont dégoûtés. Mais la vie est
exigeante et difficile, ils peuvent voir des horreurs aux infos mais
ils se disent "C’est une honte … mais je dois
aller chercher mes enfants à l’école".
Mais de temps à autre, il y a trop d’injustices et
les gens se réveillent, du genre : "Je ne peux plus faire
abstraction aujourd’hui. La vie ne peut plus être
la même". Et je pense que quand ces moments arriveront, ils
amèneront l’opportunité d’un
réel changement.
Même si vos
chansons sont très speed, engagées, vous
prônez beaucoup la solidarité et le respect dans
vos concerts, même jusqu'à demander à
se prendre dans les bras les uns les autres, vous n'aimez pas la
violence, pourtant vous êtes musicalement dans un punk
très hardcore. C'est pas un peu contradictoire ?
Je n’ai pas voulu créer un groupe pour
être spécial. Je veux dire que j’ai des
idées sur l’image que je veux donner, je suis
vraiment attentif aux personnes qui se trouvent devant moi quand je
suis sur scène et parfois je me pose la question "Est-ce que
j’ai raison de faire ça ?". Je sais que je parais
être quelqu'un d’important quand je suis sur
scène mais je ne veux pas être quelqu’un
d’exclusif. Lorsque le concert se termine, je serre des mains
pour remercier le public, on prend des photos avec lui …
J’apprécie de jouer dans un groupe de punk rock
car c’est une communauté dans laquelle on
t’accepte tel que tu es. Même si ton
état d’esprit est inadapté à
la société, on t’accepte quand
même. Tu peux être un enfant sage ou un sale gosse,
on t’accepte. Le plus important est de passer du bon temps
à travers la musique.
On va vous voir au
Hellfest cette année. Votre dernier passage sur le festival
était en 2013. Cette année vous êtes
programmés sur la Warzone qui est sûrement le
dernier espace de liberté musicale, même au
Hellfest.
Je suis très content de pouvoir jouer une fois encore au
Hellfest. Bon, la Warzone, je n'aurais pas choisi ce nom …
Mais bon. (Rires)
Je suis très content de pouvoir rassembler les gens qui se
sentent attirés par ce "mauvais côté"
de la musique. Notre but est d’offrir aux spectateurs une
occasion de passer un bon moment et d’être
respectés, d’être sympa avec la personne
qui est à côté de toi dans la fosse
… Nous vivons positivement le fait d’avoir cette
opportunité de jouer au Hellfest. Et de profiter des
bières qu’on nous offre au bar et des feux de
camps géants. (Rires)
Dernière
question: Quel est le dernier album ou dernier morceau que vous avez
écouté et qui vous a marqué ?
Le morceau « Mannequin » du groupe Wire. Cette
chanson me fait du bien. Au début, je me demandais de quoi
ça pouvait bien parler. (Rires)
Mais au final c’est une chanson intéressante,
très cool, avec quelques harmonies punk. C'est une chanson
qui fait du bien à ceux qui l’écoutent.
(Rires) Ah,
et il y a aussi cette chanson de Rancid, « Otherside
», qui me plaît beaucoup aussi.
Merci
Merci beaucoup
Propos recueillis par
Yann Charles en collaboration avec Dorothy du webzine UltraRock
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