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Ecrit par Yann Charles |
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mercredi, 04 décembre 2019
LAURA
COX
https://www.lauracoxband.com/
Remarquée sur YouTube il y a maintenant quelques
années pour ses covers à la guitare
électrique, Laura Cox, que l'on a trop longtemps
classée comme guitariste et chanteuse de blues, est en fait
une vraie rockeuse qui envoie ses solos de guitare dans un Southern
Hard Blues où l'on retrouve tous les styles qui l'ont
influencée. Elle nous parle d'elle, de sa passion pour la
musique et pour la guitare et de son second album, « Burning
Bright », sorti chez Verycords.
Dans une interview en
début d'année, tu as dit que quand tu aurais
enregistré ton nouvel album, donc celui-là, tu
tournerais une page … Cette page est tournée ? Et
quelle est-elle ?
C'est vrai ? J'ai dit ça ? (Rires). J'aurais
bien aimé me rappeler du contexte pourquoi j'ai dit
ça, car comme ça, ça ne me dit rien.
Mais c'est vrai qu'après chaque album, il y a une petit page
qui se tourne, c'est sûrement plus dans ce contexte
là je pense. On entame et on entre dans autre chose. On est
toujours chez Verycords mais on a signé sur Ear Music, leur
label étranger. On a franchi un autre palier, et
ça fait plaisir. Je parlais peut être de
ça. Mais pour moi, chaque album est effectivement une
nouvelle page.
On parle de ton nouvel
album, « Burning Bright », c'est une
évolution par rapport à « Hard Blues
Shot » ?
Celui-là est un peu plus personnel. «
Hard Blues Shot » était, globalement, plus
orienté classic rock, assez traditionnel, tandis que
« Burning Bright », il y a des chansons un peu plus
extrêmes, plus atmosphériques, des
mélodies un peu plus douces. Mais on a aussi des chansons
plus hard.
Et au niveau du son ?
Pour ce qui est du son, je n'ai pas véritablement
changé de matos sur cette période, donc on reste
dans ce même type de son. Après pour certaines
chansons, j'ai utilisé des effets un peu
spécifiques avec le matos qu'il y avait dans le studio
où nous étions. Un studio avec beaucoup de
matériel vintage et qu'on pouvait emprunter, et
c'était vraiment cool. Il y a une petite
évolution au niveau du son, je pense que c'est un peu plus
sombre.
Tu n'as pas peur
d'être déçue sur scène si tu
n'as pas le même matos ?
Non. Car bizarrement, le matos que j'ai utilisé en studio ne
sonne pas du tout pareil sur scène. Globalement c'est
à peu près la même chose, c'est juste
au niveau des pédales que ça change. Quand on
active les instruments qu'on avait en studio, on a une
sacrée baisse de volume. Donc en studio ça va, tu
peux régler, mais en live, quand tu as besoin d'une grosse
patate, ça ne répond pas forcément (Rires)
Pour le style,
classic-rock est un style qui te va bien ?
Oui, on part de cette base. Mais dans le groupe on a trouvé
un nom qui définit plus précisément
notre style, on parle de "Southern Hard Blues" car cela mêle
un peu toutes les influences que j'aime. Il y a le
côté sudiste, le côté blues,
même si on est globalement plus rock que blues, mais il y a
une base de blues, pour aller jusqu'au hard rock. Donc ce terme de
"Southern Hard Blues" résume bien notre style.
On s'était
rencontrés pour l'album précédent et
on t'avait classée dans le blues, mais toi, même
si le blues est à la base de ta musique, t'es plus rock ?
Ça te gène qu'on continue à te dire
blueswoman plus que rockeuse ?
Ce n’est pas que cela me gêne, mais c'est un peu
erroné quand même. Ça ne me
gêne plus dans le fait que très souvent, on est
vendu comme un groupe de blues. Alors je ne sais pas si c'est que parce
que dans "Hard Blues Shot" on retrouve le mot "Blues". Mais il y a
aussi le mot "Hard". Donc en fait, il faut écouter la
musique pour comprendre, mais d'un autre côté,
entre le titre du premier album et pas mal de titres de chansons
où tu retrouves le mot "Blues", je peux comprendre. Mais
même si le blues est à la base du rock, on est
clairement plus rock ou hard rock que blues. Et c'est vrai que
ça nous a joué des tours. Par exemple sur notre
dernier tour, en Allemagne, où notre programmateur nous a
dit qu'il n'y avait pas le bon public car justement nous sommes
considérés comme un groupe de blues. Si on avait
su, on vous aurez affiché comme groupe de rock, et vous
auriez eu un autre public.
Tu as
enregistré avec Howie Weinberg (mastering pour Slayer,
Sherryl Crow, Public Enemy, etc.), qu'a-t-il apporté
à ta musique, ou à ton son ?
Alors je n'ai pas techniquement enregistré avec lui car il
s'est occupé du mastering. Conseillé par
Verycords, on est allé enregistrer au Studio ICP
à Bruxelles. Et au moment où on enregistrait, on
ne savait toujours pas qui allait masteriser l'album. Tout s'est fait
au fur et à mesure. On s'entendait tellement bien avec notre
ingé-son que c'est lui au final qui a fait le mix car il a
été super avec nous pour toute la partie
enregistrement et qu'on le sentait vraiment bien sur la partie mix.
C'était pas une relation à distance avec
internet, il y avait une vraie connexion entre nous. On pouvait donner
notre avis, il y avait des échanges, et on savait que le mix
correspondrait bien à ce qu'on voulait. Et pour le
mastering, ce sont les studios qui nous ont conseillé de
voir avec Howie Weinberg, avec qui ils travaillent
régulièrement, et ils pensaient que ce serait
parfait pour notre musique. Ils l'ont contacté, et j'ai
été ravie qu'il accepte car il a quand
même travaillé sur pas mal de mes albums
préférés comme Sherryl Crow, qui n'a
rien à voir avec ce que je fais, mais j'adore. Et je suis
super fière vraiment d'avoir son nom sur notre album. Il a
mis sa touche, mais il n'a pas du tout dénaturé
notre travail. Je ne savais vraiment pas à quoi m'attendre,
il a bossé sur tellement de choses. Et ça a
été une véritable surprise de
découvrir notre album avec sa touche à lui.
Les textes de tes compos
tournent autour de quels thèmes sur ce second album ? Tu
parles d'album plus personnel. Sur le premier, c'est que les textes
étaient sur des thèmes, on va dire, classiques ?
C'est vrai que sur le premier album, on était dans
du assez cliché, même si c'est pas
négatif, mais les thèmes basiques du rock : faire
la fête, rouler sur l'autoroute ... Et c'est vrai que
là, ce sont des thèmes moins clichés.
Comme je t'ai dit, c'est un peu plus personnel, mais je n'ai pas non
plus envie de prendre la tête aux gens qui
écoutent notre musique. Je veux qu'ils passent un bon
moment, qu'ils s'amusent et qu'ils oublient leurs soucis du quotidien
pendant un petit moment. Je n'ai pas envie de parler de politique par
exemple, ou de sujets lourds. Les thèmes tournent autour de
batailles personnelles, d'évolution, grandir, s'ouvrir aux
autres. En fait « Burning Bright », le titre de
l'album, n'est pas le titre d'une chanson en particulier, mais
globalement, tu peux le lier à toutes les chansons. C'est un
peu ça, s'ouvrir, briller, évoluer.
Tu as trouvé
où le temps de composer avec le nombre de dates
impressionnantes que tu as eu ?
C'est vrai qu'on tourne très souvent, mais ça
fait déjà deux ans et demi depuis la sortie du
premier album. Alors c'est vrai qu'on est pas mal occupés,
mais on a du temps quand même pour se poser et composer.
Vous vous imposez des
breaks pour justement travailler le nouvel album ?
Non, pas forcément. On a des périodes qui sont
vraiment chargées, d'autres où c'est
plutôt creux. Donc à partir de là, on
se dit que c'est dans cette période qu'il faut se mettre au
travail sur de nouvelles compositions. Je travaille beaucoup avec
Mathieu, l'autre guitariste du groupe. On bosse chez moi. On part d'un
riff que j'ai ou que lui as, et on enregistre la structure, la guitare,
chant, et ensuite on propose ça à Antonin et
François, batteur et bassiste, et en
répète on arrange tout ça ensemble.
Dans ta bio, on parle de
toi en "Rockeuse Badass". Badass a deux définitions, mauvais
garçon, fille dans ton cas, ou qui impose son style. T'es
les deux toi ?
Ah oui. Badass, je l'aurais plutôt traduit par "cool". Elle
se prend pas la tête, elle vit, elle est cool. Mais, je ne
pense pas que je sois une mauvaise fille.
Toujours aussi macho ce
milieu, ou les choses changent ?
En tous cas, depuis qu'on tourne, on va dire depuis la sortie du
premier album, disons mars 2017 en gros, j'ai jamais eu de soucis,
humainement parlant, avec des mecs qui m'auraient prise de haut, ou des
réflexions. Alors peut-être qu'il y en a eu dans
mon dos, mais les rapports que j'ai avec les fans ou les programmateurs
sont très bons. Et puis, je suis quelqu'un qui ne se prend
pas la tête. Je suis assez sociable et je m'entends bien avec
tout le monde. J'ai déjà eu des retours, de mon
ingé son par exemple, qui me dit qu'il y a certaines
jalousies dans le milieu, parce que quand t'es une fille et que tu fais
du rock en France et que ça marche plutôt bien
avec pas mal de monde qui vient à tes concerts …
Mais globalement, je ne m'en rends pas compte.
Vous n'êtes pas
nombreuses en France à avoir votre propre groupe de rock, et
qui comme toi, envoie du lourd à la guitare ?
Autant sur internet, sur YouTube par exemple, où je poste
pas mal de trucs, les gens se lâchent plus facilement, que ce
soit des compliments ou bien des remarques sexistes, mais bon c'est
normal. C'est internet. Les gens sont cachés
derrière un pseudo et franchement, ça je
n’y fais pas attention. Ce qui m'importe vraiment, c'est ce
qu'on fait avec le groupe en live ou en studio. Mais globalement, on
est très bien accueilli chaque fois.
Justement sur
scène, tu ne joues que tes compos, ou bien tu t'autorises
des covers ?
Au début quand on tournait pour le premier album, on n'avait
pas assez de matière, donc on était
obligé de trouver des reprises pour pouvoir tenir les 90
minutes de concert. Maintenant, on a assez de compos pour tenir le
temps imparti, mais on s'est aperçu que les gens sont
toujours contents d'entendre des chansons qu'ils connaissent plus que
les autres du genre « La Grange » de ZZ Top.
Là, on a fait une reprise réarrangée
de « Foxy Lady » de Hendrix qu'on
intègre dans notre set à chaque concert. Je suis
très fan des Blackberry Smoke, donc en deux ans on a fait
trois ou quatre covers de leurs titres. Sans pour autant tomber dans le
cover band. On intègre aussi des petits passages de titres
connus dans nos propres chansons comme « Johnny B Good
» par exemple, ou du Simple Minds, et les gens aiment bien.
Après il faut faire attention que les gens ne retiennent pas
que ça du genre j'ai trop aimé « Johnny
Be Good » car ce n'est que 15 secondes du concert. Moi
j'espère surtout qu'ils ont aimé le reste.
On t'a connu via internet
et ta chaîne sur YouTube mais n'est-ce pas le revers de la
médaille. Ça t'a ouvert une porte
énorme, mais peut-être que les gens viennent te
voir pour justement pour tes covers ?
C'est vrai que j'ai du mal à savoir si les gens savent ce
qu'ils vont voir avant d'aller au concert. J'ai peur qu'ils se disent
qu'ils sont fans de Laura la YouTubeuse et qu'ils espèrent
me voir faire ce qu'ils ont vus sur YouTube. Mais en live, avec le
groupe, on est là pour jouer notre musique et promouvoir
notre album et nos compositions, et j'inclus quelques reprises, mais il
n'y en a pas beaucoup. Mais c'est vrai que ce que je fais sur internet
et notre groupe sont différents.
Si tu faisais maintenant
sur YouTube ce que tu as fait il y a quelques années, tu
penses que le résultat serait le même?
Non, pas du tout. J'ai commencé à poster en 2006
je crois, et à l'époque, il n'y avait que
très peu de filles qui faisaient des covers à la
guitare électrique, et quand j'ai commencé
à poster, je n'en attendais absolument rien. Je passais
beaucoup de temps à regarder des musicos reprendre des
morceaux de classic rock et ça me motivait. Et un
jour, je me suis dit "Allez, je me filme et je poste et on verra bien
ce que les gens en pensent". En quelques mois j'ai eu 20.0000 vues sur
ma chaîne et j'étais trop contente. Et puis
ça a évolué et surtout ce qui est bien
c'est qu'il n'y a pas eu un gros buzz puis c'est retombé,
non c'est resté constant. Et maintenant je crois que je suis
à 90 millions de vues sur 10 ans ! Maintenant, je continue
à poster régulièrement, pas assez
à mon goût, mais maintenant, il y a
énormément de filles qui s'y mettent, et c'est
une bonne chose, mais justement, il y en a tellement que je passerais
inaperçue. J'ai eu la chance de commencer au bon moment.
On t'a beaucoup vue, dans
les festivals plutôt typés blues, comme on disait
juste avant. Donc du coup tu as plusieurs
générations dans ton public ? Les blueseux et les
rockeurs, ce n’est pas une mauvaise chose ?
Non, c'est bien. Ça a commencé avec la
génération de l'âge de mes parents car
eux écoutaient la musique qui me plaît, et ce sont
les gens qui sont encore attachés au format CD ou vinyle,
disons à un format physique de la musique. Et au fur et
à mesure, ils viennent avec leurs enfants, qui eux se
rendent compte qu'en fait je suis loin du blues et proche du rock que
eux aussi aiment. Et je me rends compte depuis quelques mois qu'il y a
de plus en plus de gens plus jeunes, de mon âge, et des
filles, ça ça fait très plaisir. Et
c'est encore plus valable lorsqu'on joue à
l'étranger. En Allemagne ou en Espagne, on a un public plus
jeune et plus diversifié.
Je sais que tu joues
aussi du dobro, ou du banjo, un concert acoustique serait possible
selon le lieu et le festival par exemple ?
C'est vrai que c'est pas mon domaine de prédilection. Et
Gaelle Buswel le fait bien mieux que moi (Rires), mais je
suis quand même plus orientée
électrique. Mais c'est vrai que pour la promo de l'album par
exemple, on est amené à jouer en acoustique. Et
c'est vrai que ce nouvel album est plus adaptable en acoustique que le
précédent. Je ne dis pas qu'on fera des concerts
entiers en acoustique, mais je ne dis pas que sur un set, on ne
pourrait pas inclure un ou deux titres au dobro par exemple. Et sur les
sessions promo quelques titres en acoustique oui.
2020, Laura Cox au
Hellfest, on est passé d'un rêve à une
réalité ?
Je l'ai espéré et ça se produit. Un
plaisir immense. Un grand moment à vivre.
Merci Laura
Merci à toi
Propos recueillis par
Yann Charles
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