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DOYLE BRAMHALL II pdf print E-mail
Ecrit par Frenchy  
mercredi, 20 novembre 2019
 

DOYLE BRAMHALL II

https://www.db2music.com/

Rien n’y fait. Beau comme un dieu (cf. les photos de Yann Charles), grand guitariste, grand chanteur, grand compositeur, reconnu unanimement par ses pairs (accompagnateur d’Éric Clapton depuis vingt ans, capable de remplacer David Gilmour sur une tournée de Roger Waters, il a aussi travaillé avec Jimmie Vaughan bien sûr – à 18 ans -, Elton John, Gregg Allman, Sheryl Crow et combien dieu sait d’autres..), Doyle Bramhall reste un musicien pour musiciens, inconnu en France. A désespérer… Nous qui le suivons et l’adorons depuis ses débuts, nous étions impatients de le rencontrer lors de sa tournée européenne, pour essayer de vous donner envie d’aller écouter par exemple son dernier album, « Shades », qui est une réussite absolue. Point.
 
Salut Doyle! Je pense, et on est un paquet à penser ça, que tu n’as pas le succès que tu mérites, un peu comme ton père qui est toujours resté un peu dans l’ombre, malgré son talent (Ndr : Le père de Doyle, batteur, de Stevie Ray Vaughan par exemple, chanteur incroyable et grand compositeur – c’est lui qui a écrit « Life By The Drop » pour SRV – mérite aussi que vous alliez l’écouter !) Quel est ton rapport à tout ça, le succès, la célébrité ?
J’avoue qu’à un moment j’ai essayé de chercher ça mais très vite ce que j’ai vraiment voulu faire c’est faire de la musique pour son côté spirituel. Je ne fais pas de la musique pour gagner un maximum d’argent, tant que je gagne assez pour pouvoir continuer à en faire. C’est vraiment un problème si tu penses à l’argent ou au succès parce que ça déteint sur ton art, ça va te faire faire des compromissions.

Revenons en arrière. Ton premier groupe, les Arc Angels (NdR : Groupe formé avec Charlie Sexton et la section rythmique de Stevie Ray Vaughan), auraient pu devenir ENORMES. As-tu des regrets sur la fin prématurée de ce groupe ?
On est devenu très célèbre très vite et je suis vite tombé dans l’autodestruction à ce moment-là, drogues, alcool … Et je ne me sentais pas à ma place dans ce groupe, on ne faisait pas vraiment la musique que moi j’avais envie de faire. J’étais plus branché Stevie Wonder! (Rires)

Quand tu as commencé ta carrière solo, j’ai l’impression, quand on regarde le clip de « Green Light Girl » par exemple, qu’on a essayé de jouer sur ta beauté pour faire de toi une espèce de Rock Star pour gamines, à la Lenny Kravitz…
Tu sais, quand tu démarres, les labels cherchent le meilleur moyen de te vendre au public, te proposent de bosser avec tel ou tel producteur, mais je ne suis jamais vraiment rentré dans ce moule car je déteste être contrôlé par des gens.

Ta vraie chance, ça a été Éric Clapton, non ?
Oui, Éric a adoré mon deuxième album, « Welcome », m’a appelé pour me demander de jouer avec lui, et ça a ouvert toutes les portes ...

Entre ton troisième album et le suivant, il se passe 15 ans. Ce n’est pas la meilleure manière d’établir une carrière, non ?
Non (il sourit), mais à ce moment-là j’avais envie de passer du temps avec ma famille et d’élever mes filles et je pouvais me le permettre en faisant partie du groupe d’Éric Clapton, parce que c’était un travail qui m’occupait toute l’année! Et Derek Trucks, qui est un ami, m’avait aussi demandé de jouer dans son groupe. C’est juste arrivé comme ça …

Pareil avec Roger Waters ? Il a entendu ton disque et a dit : «Je veux ce type-là pour ma prochaine tournée » ?
Oui. Roger a entendu parler de moi par des connaissances communes car il voulait un guitariste qui pouvait AUSSI chanter les parties de David Gilmour. Il m’a appelé et demandé de faire une maquette de « Comfortably Numb ».

Oh la pression !
Oui (Rires). Il l’a écoutée et m’a rappelé pour me dire que je faisais partie du groupe.

Et ça t’a plu, d’être dans un cadre bien précis et de jouer et chanter aussi des parties exactement pareil que sur le disque ?
Oui, car tu apprends beaucoup sur des tournées pareilles. Et j’aime bien faire plein de choses différentes, j’aime jouer tout seul, j’aime jouer avec mon groupe, j’aime accompagner un artiste solo ou collaborer avec d’autres artistes, ça permet vraiment d’évoluer

On m’a dit que tu as même joué sur un album de Johnny Hallyday ?
Oui. Je fais aussi beaucoup de séances de studio, depuis 1997 en fait. J’ai beaucoup travaillé beaucoup avec T. Bone Burnett, Joe Henry et Don Was

Tu as commencé à être producteur de disque aussi. Comment c’est venu ça ?
Éric Clapton m’a demandé de produire son album en 2008. Je lui ai dit que je ne savais pas comment faire, et il m’a répondu de faire ce que je faisais d’habitude avec lui (Rires). J’ai produit deux de ses albums et ensuite Sheryl Crow m’a demandé de produire le sien

Sheryl Crow c’est pas la même histoire, y’avait de l’amour dans l’air !
Ah ah ! Je la connaissais depuis 1994, on était potes et elle aimait vraiment ce que je faisais et du coup j’ai joué sur ses albums, entre 1994 et 2010. En 2010, j’ai produit son album, on est partis en tournée, et c’est là que … (Rires)

C’est aussi une période où tu as beaucoup voyagé, pour t’inspirer de musiques d’autres cultures
Oui, j’ai été en Inde, en Afrique, au Mali et beaucoup au Maroc …

Au point d’apprendre à jouer de l’Oud !
Oui, et je suis aussi très branché sur la musique du Moyen-Orient, la musique Turque. Mais ce que je préfère c’est la musique Gnaoua du Maroc (NdR : https://www.youtube.com/watch?v=1XcKzM3ka68)

(Je le charrie) C’est étonnant cette ouverture d’esprit pour un petit mec d’Austin, TEXAS ! (Rires)
Je n’ai pas grandi qu’au Texas mais aussi à San Francisco, avec un beau-père, un pianiste de musique classique, qui aimait aller à l’opéra, qui aimait la musique classique, les ballets. J’ai donc aussi eu ce genre d’influence et par exemple j’adore écouter Bach, Chopin, Debussy, Ravel, Satie, ou même de la musique espagnole, le flamenco…

Combien de temps tu as habité à San Francisco ?
J’ai déménagé là-bas quand j’avais 5 ans ! Mais j’y passais 6 mois, puis je retournais vivre chez mon père 6 mois à Austin. J’ai fait ça pendant toute mon enfance ! En fait je suis né à Dallas et j’ai aussi habité Fort-Worth quelques années. J'ai beaucoup bougé en fait. Et c’est pour ça que c’est très facile pour moi les tournées. J’aime voyager, c’est une vraie passion. Quand je finis cette tournée, je vais partir faire ma tournée ‘personnelle’. Tu vois, si j’avais des jours off sur cette tournée européenne, j’irais sûrement à Fez, au Maroc. Il y a deux semaines j’étais à Istanbul…

Tu aimes voyager, donc! (Rires)
… Et je veux même apprendre le Français, pour visiter tous les pays où ils parlent Français !

Tu aimes plus tourner, ou enregistrer et produire ?
Tourner, définitivement. J’aimerais bien enregistrer plus si j’avais la possibilité, comme les Stones par exemple, d’entrer dans un studio où tout est installé, les instruments en place, et tu enregistres pendant trois mois, mais à mon niveau ce n’est pas possible …

Ta situation financière n’est pas aisée, à ce stade ?  
Le truc c’est que, par exemple, quand des artistes te demandent de jouer sur leur disque, tu fais ça gratuitement. Si il y a un gros budget, c’est différent bien sûr. Mais je crois que mon gros problème c’est que j’ai une ex-femme (Rires)

Tu as invité Norah Jones sur ton dernier album, « Shades ». Tu peux nous en dire plus ?
Oh c’est simple. C’est une amie à moi et elle n’habite pas loin de là où j’ai enregistré l’album et j’avais envie d’écrire une chanson avec elle. On s’est installé dans une maison qui était à côté du studio et on a bossé sur ce titre qui est devenu « Searching for Love ». C’est une musicienne incroyable, une pianiste incroyable aussi …

Tu aimes bien écrire des chansons avec d’autres compositeurs de toute manière
Oui j’aime ça. Tu ne sais jamais quand tu collabores avec quelqu’un ce que ça va donner, c’est excitant. Et c’est mieux de créer avec Norah qu’avec Britney Spears ou Spina Aguilera (NdR : Il prend un accent espagnol) hein ? (Rires)

Tu sembles avoir trouvé un partenaire idéal avec Adam Minkoff (NdR : Un alien qui joue de la basse, des claviers, de la batterie, excellent chanteur de plus, et qui a composé tous les arrangements de cuivres ET de cordes sur « Shades » !)
Oui, on est vraiment comme des frères maintenant. Et il emmène des choses de lui dans mes morceaux qui sont inestimables. Vraiment brillant !

Toute cette place que tu accordes aux autres montre bien que tu n’as pas un ego démesuré
J’essaye au contraire de ne pas en avoir un (Rires) Ca m’est arrivé plus jeune mais ce qui est bon est bon et j’aime vraiment être inspiré par les autres

Tu sembles plus apaisé aussi avec l’âge
Oh oui, définitivement. J’arrive maintenant à trouver ma place dans ce monde, plus qu’avant, mais je ne suis jamais heureux avec les pédales d’effet et les amplis (Rires)

Deux heures plus tard, Doyle montrera toute l’étendue de son talent sur scène, épaulé bien sûr par l’incontournable Adam Minkoff à sa gauche aux claviers, à la basse et aux chœurs, avec un répertoire axé forcément sur ses deux derniers albums mais aussi le « Green Light Girl » de ses débuts, des reprises d’Hendrix que lui seul égale à notre avis (cette version d’« Angel » !) et un clin d’œil surprenant avec ce « I Wanna Be Your Dog » des Stooges d’Iggy Pop!  

Propos recueillis par Frenchy