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THURSTON MOORE GROUP au TRABENDO (75)
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Ecrit par Fred Hamelin |
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jeudi, 31 octobre 2019
RATTLE
– THURSTON MOORE GROUP
LE TRABENDO –
PARIS (75)
Le 22 octobre 2019
https://www.facebook.com/ThurstonMooreOfficial/
https://www.facebook.com/rattleandrattle/
Remerciements à Margaux de Live Nation
Thurston Moore est une légende. Guitariste fondateur de
Sonic Youth, collectionneur insatiable de disques, patron du label
Ecstatic Peace!, fleuron de la scène noise,
défricheur passionné, incubateur de talents, il
est associé, à raison, avec le pan le plus
radical de la musique indépendante américaine. Il
a réinventé l'usage de la guitare dans le rock,
et à plus de soixante ans, passe encore ses
soirées dans des caves new-yorkaises pour assister des
expérimentations bruitistes. Abordée sous cet
angle, la sortie d'un album solo du bonhomme est toujours un
événement et « Spirit Counsel
» tout juste sorti en septembre, et sorte d'orchestration
noise rock en trois mouvements de plus de deux heures ne faillit pas
à la règle. L'opus sera
présenté ce soir dans son
intégralité et dans les limbes enfumés
d'un Trabendo impatient.
C'est un duo féminin, Rattle qui aura la tâche de
faire patienter un public assez parsemé (une bonne
moitié de salle), un projet musical axé sur des
expériences de rythme, de mesure et de tension. Katharine
Eira Brown et Theresa Wrigley forment le duo à Nottingham
et, avec juste deux batteries et des vocalisations occasionnelles,
tissent une vaste étendue de vortex percussifs. Un duel ou
la caisse claire bat la phase et les pas de côté,
et ou s'échangent des accents de cymbales et les
chevauchements des toms, offrant un terrain bien vivant au chant pour
une exploration sonore bien particulière. Cela
relève plus d'un minimalisme hypnotique et a
été assez dur à (me) convaincre,
manquant singulièrement de cordes. Mais c'est un avis plus
que personnel, les filles ayant vraisemblablement réussi
à accrocher le public.
D'anti-rock-star devenu de son vivant monument de la musique, c'est par
sa curiosité insatiable que Thurston Moore, toujours heureux
d'expérimenter et ne craignant pas de s'immerger dans de
nombreux domaines musicaux et auprès d'un grand nombre
d'artistes de toute discipline, a su rester un musicien vrai et
sincère.
A la suite de Rattle, Moore s'attaque sans tarder à
présenter ses musiciens, avec un certain humour,
pressé de présenter sa nouvelle œuvre,
trépignant comme un éternel adolescent. C'est
qu'il conduit avec rigueur tel un chef d'orchestre et tous garderont
les yeux rivés sur lui tout au long du set. On retrouve
Debbie Googe à la basse (des mythiques My Bloody Valentine),
James Sedwards aux guitares (Chrome Hoof), John Leideker aka Wobbly aux
machines et électronique, et un remplaçant au
batteur Steve Shelley, son compagnon au sein de Sonic Youth, dont
malheureusement je n'ai pu retrouver le nom. Et c'est bien dommage car
il assure une rythmique cadrée et rigoriste.
Trois morceaux seulement seront joués ce soir : «
Alice Moki Jayne » (une heure), « 8 Spring Street
» (une vingtaine de minutes) et le final, «
Galaxies », (55 minutes) pour une apothéose
sonore. A l'appui : distorsion, tension, rupture, poésie
contemporaine, entrelacs d’harmoniques, longues plages
instrumentales se terminant en un maelström sonore
… L'ouvrage emmène l’auditeur
à l'intérieur de ce processus créatif,
se saisissant de chaque changement clé, de chaque nouveau
développement. C'est très rock mais à
la limite du free jazz, tantôt baroque, tantôt
d’avant-garde et rappelle les expérimentations des
allemands de Can ou de Brian Eno au début des eighties. Sur
fond de vidéos astrales, on sent un Thurston Moore
stellaire, touché par la grâce. Les fans, y
compris la vieille garde de Sonic Youth, sont en terrain connu, et les
arrangements inhabituels surprennent toujours. Les arpèges
sont déliés, le son parfait, l'orchestration
subtile et réussie et la voix de Moore bien que
très rare, enveloppante et chaleureuse, nous embarque et
nous envoûte.
Il faut dépasser cet a priori de longueur ennuyeuse pour
pénétrer ces limbes ensorcelants, venus d'une
origine profonde, avec un peu de concentration et d'attention pour un
diamant brut en intentions. C'est un concert sur lequel il faut savoir
rester jusqu'au bout ; les sens totalement
éveillés pour en comprendre la teneur, et y vivre
une expérience inégalable … Thurston
Moore, ce grand explorateur à jamais inassouvi, nous
dévoile encore ces visions de sa conscience rock et c'est
jouissivement surnaturel !
Fred Hamelin –
octobre 2019
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