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Ecrit par Yann Charles |
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mercredi, 24 juillet 2019
SHAÂRGHOT
https://www.facebook.com/shaarghot/
Shaârghot est sans nul doute le groupe français
qui a fait le plus parler de lui depuis deux ou trois ans. D'une, par
la qualité de leur compos et aussi par leurs concerts
explosifs, comme celui au Hellfest cette année.
Extraordinaire. Pour nous parler de leur excellent dernier album
« The Advent of Shadows » et de leur univers si
particulier, nous avons rencontré Etienne. Un entretien avec
le Shaârghot bien étrange et intrigant …
En 2018, vous nous aviez
alléché avec votre univers cyber indus metal punk
avec « Break Your body », « The Advent of
Shadows » est même carrément
méchant, jamais content comme dirait Souchon ?
(Rires).
Carrément pas content du tout !! C'était un petit
teaser de ce qu'allait être cet album-là.
L’EP « Break Your Body » était
un avant-goût de « The Advent of Shadows
».
L'album est encore plus
noir que ce que vous aviez annoncé ? Violent,
très violent si on s'en réfère en plus
aux clips.
Alors, il faut expliquer un peu le contexte de l'histoire. Dans le
premier album, le Shaârghot venait de naître et il
racontait des histoires et des anecdotes de ce qu'était sa
vie dans ce nouveau corps. Et qu'il est le fruit d'une
expérience scientifique ratée, qu'il
ère dans les sous-sols de la ville, les endroits
désaffectés. Il se fait ses nouveaux copains, les
Shadows, qu'il contamine avec son propre sang et qui sont couverts du
même type de parasite noir que lui. En fait il est un curieux
individu à la santé déviante. Et le
Great Eye, l’organisme qui l'a créé se
dit que ce serait pas mal d'effacer toutes les traces de cette
connerie, et donc d'éliminer le Shaârghot. Sauf
que voilà, un Shadows ça ne se tue pas comme
ça, c'est à l'épreuve des balles et
ça se relève tout le temps !!
Résultat, ils ont réussi à
énerver tout ce beau monde, qui décide d'aller
voir justement ce qu'il se passe à la surface. C'est pour
ça que l'album est particulièrement noir et
violent car ils n'aiment pas trop qu'on les chatouille sous le menton !!
Je reviens sur le EP qui
avait quatre titres et bonus : « Doom’s Day
», « Into The Deep » et « Break
Your Body ». C'était les piliers de ce qu'allait
être votre album ?
En quelque sorte oui. Avec « Kill Your God » qu'on
voulait mettre aussi pour montrer les différents aspects de
l'album. Mais comme tu l'as bien vu, c'est difficile de vouloir
établir un spectre précis de ce qu'est l'album,
vu qu'il y a plein de choses qui sont très larges qui
partent parfois plus vers la psy transe et le rock indus.
C'était compliqué de vraiment faire un tableau
représentatif.
Musicalement, pas mal de
titres semblent martiaux au niveau du rythme, presque dictatoriaux, je
pense à « Now Die », c'était
voulu ou involontaire?
Ça se ressent oui. « Now Die », tu
entends clairement les bruits de bottes, donc forcément.
Mais c'est surtout un point de vue ironique. Cette chanson s'adresse
aux élites, aux membres du Great Eye qui se
considèrent comme étant des personnes
intouchables et le Shaârghot se permet gentiment de leur
rappeler que s’ils peuvent saigner, c'est qu'ils peuvent
mourir. Et que ce bruit de bottes c'est pour eux en fait.
On peut parler un peu du
titre « Kill Your God », qui pour moi est le
morceau le plus violent de l'album. Je l'ai ressenti comme
ça en tout cas.
Chacun a des ressentis particuliers sur cet album. « Kill
Your God » dégage quelque chose d'un petit peu
agressif. Ce titre, pour moi, c'est comme une vieille locomotive
à vapeur, rouillée, pleine de TNT et
lancée à plein régime sur les
fondations même de l'idolâtrie. Le
Shaârghot a un gros souci avec tout ce qui concerne
l'autorité et l'idolâtrie, qu’elle soit
envers des personnes, des dieux ou des objets. Pour lui ce sont des
principes qui n'ont pas lieu d'être et qui
méritent d'être abattus. Car il y aura toujours
des gens pour se servir de ces concepts là pour abuser
d'autres gens plus faibles. Alors là où le
discours de la créature et le mien se séparent,
c'est que moi, je ne partage pas forcément ce point de
vue-là. Je suis plutôt tolérant envers
tout le monde. Je dis juste que par exemple, c'est bien d'avoir un
pénis, mais que c'est pas la peine de le mettre sur le
visage de tout le monde. Le Shaârghot, lui, il prend le
sécateur, et il coupe tous les pénis si tu veux.
J'ai dit violent, mais
c'est plutôt agressif que j'aurais dû employer.
Oui, c'est ça. Mais toujours fait de façon
festive en fait.
C'est un peu le
contraste. C'est violent, torturé parfois, mais aussi
festif. Sûrement avec les rythmes techno et indus que vous
donnez à vos titres ?
La paterne en soi elle est zouk derrière !!! (Rires)
Shaârghot c'est
du Zouk donc !!
(Rires)
C'est ça. (Rires)
C'est du Zouk avec des grosses guitares !! (Rires)
Va falloir expliquer
ça aux fans !! Vous allez mettre des posters de Kassav du
coup ?
(Rires)
Non, mais on adore faire des mélanges avec des morceaux
totalement hors du metal, et on s'amuse avec et souvent ça
fait des merdes inaudibles … Mais on est là pour
s'amuser. (Rires)
On a eu peur pendant un
très court instant que le Shaârghot redevienne
humain avec « Regrets », mais non, ouf !!
C'est pas lui qui cause sur « Regrets ». C'est une
parenthèse dans l'album. C'est la dernière
personne qui a survécu dans le laboratoire. Et qui
maintenant est traqué par le Great Eye, toujours pour faire
disparaître les preuves. Et qui est également
traqué par le Shaârghot, qui, lui, aura pleins de
choses à lui demander. C'est une sorte de
parenthèse cinématographique. Tu imagines le gars
derrière sa fenêtre qui regarde tomber la pluie
sur un monde de désolation, qui entend au loin les troupes
et les combats, et qui voit ce message défiler en boucles,
« Life, Choice, Work, Regrets ». Le type se demande
comment il en est arrivé là. Et c'est logique que
ça enchaîne avec « Break Your Body
» après la parenthèse entre le
créateur et la créature derrière. Mais
ça, tu ne peux le savoir que parce que c'est moi qui te l'ai
dit, sinon, personne ne peut le savoir !!
La fin de l'album avec
« Shadows », c'est un constat amer d'un royaume
funeste.
Il y a des deux. Il y a quelque chose qui se veut en même
temps fédérateur ou une sorte de communion du
genre "Vous avez tout perdu, mais il reste encore une
dernière communauté pour vous accueillir, mais
c'est celle de ceux qui sont déjà foutus". Et
puis, c'est un peu annonciateur de ce qui va se passer par la suite.
C'est une sorte de teaser
de ce qui nous attend par la suite ? Je suppose que vous avez
déjà en tête ce que va être
la suite ?
Oui. D'ailleurs, j'ai déjà commencé
à composer. Mais bon, on va laisser un petit peu de temps
à « The Advent of Shadows » pour vivre,
mais oui, j'ai déjà commencé
à composer l'album suivant. Je sais
déjà de quoi il va causer. Mais ce n'est pas la
peine de me le demander, je ne te le dirais pas !!
Sinon,
médicalement ça va bien ? Plus
sérieusement, qu'est-ce qui vous inspire pour nous
entraîner dans cet univers de chaos absolu ?
(Rires)
Mon psy m'a dit que j'allais mieux, donc ça va oui !! (Rires) J'essaie de
me mettre à la place de mon personnage. Au final, moi, en
tant qu’Etienne, je n'interviens pas autant que ça
en fait. J'essaie surtout de le faire parler lui. J'essaie de lui
donner corps et âme. Après c'est vrai que chaque
création comporte une part de son créateur.
Tu vis ça
comme un exutoire ?
Oui oui oui. C'est quelque chose de cathartique. Lorsque je monte sur
scène, Etienne reste majoritairement en dehors de la
scène. Je finis par adopter les souvenirs du
Shaârghot, ses habitudes, ses mimiques, sa façon
de parler et de se déplacer. Je rentre dans le personnage.
Et une part d’Etienne reste un peu derrière,
histoire d'assurer que tout se passe bien quand même !!!
Donc, oui, c'est véritablement un exutoire.
Et c'est dur de redevenir
Etienne après ?
Tu es le premier à me poser cette question … La
réponse est oui. C'est un personnage très prenant
et c'est très compliqué de remettre les pieds
dans la réalité tout de suite. Il y a toujours
quelque chose qui reste après le concert. Ne serait-ce que
la voix ou la façon de bouger. Je n'arrive pas à
me débarrasser de lui tout de suite. Il me faut un petit peu
de temps pour pouvoir redescendre et le laisser repartir.
L'an dernier, on vous a
beaucoup vu, partout, la promo fait partie du jeu, mais vous vous
semblez prendre un sacré plaisir.
Ah oui bien sûr. C'est le panard.
Même si des
fois c'est la grosse galère. L'année
dernière j'ai assisté au démaquillage
au Hellfest, c'est quelque chose.
(Rires)
C'est vrai. Mais c'est le pied car, même si je ne suis pas
d'accord avec tout ce qu'il fait, c'est un personnage qui est
décomplexant. C'est quelqu'un qui n'a pas vraiment de peurs,
de barrières, et qui est très libre au final.
Donc incarner ce genre de personnage c'est satisfaisant. Ce type de
personnage ultra permissif, qui peuvent faire n'importe quoi, un peu
entre le Joker et Dead Pool. Mais qui peut potentiellement aussi te
mettre un coup de couteau dans le dos, car ça aussi, pour
lui, c'est rigolo !! Tout est une question de point de vue (Rires)
On vous a
comparés musicalement, à juste titre,
à Punish Yourself, qui sont une de vos
références, mais finalement vous vous en
éloignez beaucoup au niveau de l'univers que vous proposez.
Alors tu vois, étrangement, il y en a qui trouvent qu'on
s'en est rapproché. C'est marrant. Bon la discographie de
Punish est quand même très large. J'avoue que je
ne sais pas. Je ne me suis jamais vraiment trop posé la
question.
Alors que pour moi, par
moments, vous semblez plus titiller l'univers des Skinny Puppy ?
Alors ça va peut-être t'étonner, mais
je n'écoute quasiment pas Skinny Puppy. Y a plein de choses
que je trouve très intéressantes chez eux, en
terme de sons, mais en ce qui concerne les compos, c'est avec Punish
que j'accroche le plus. Je me sens quand même plus proche
d'eux oui clairement. Il y a un côté plus
torturé chez Skinny, mais qui est plus difficile
d'accès
C'est très
schizo comme univers.
Ah oui, là, si tu veux parler malsain, on y est oui ! Donc
on est beaucoup plus proche de Punish. (Rires) Punish, il
y a quand même une dimension festive.
On avait parlé
la dernière fois de BD, vous en êtes où
du projet ? C'est toujours en état de projet ?
C'est toujours en projet oui. Je ne sais pas si tu as vu l'artwork.
C'est fourni, ça prend beaucoup de temps.
Justement, pour
l'artwork, est ce que vous avez pensé à sortir
des affiches ou posters de ces artworks ?
Il existe un poster de celui-là. Car, en vrai, l'image est
en format poster. Et on a dû la recadrer pour l'album. Mais
en ce qui concerne la BD, c'est toujours en cours. Les
scénarios sont écrits, mais on n'est pas des gens
riches. On fait tout nous-même. Et à l'heure
actuelle, c'est plus pertinent pour nous d'investir dans les clips que
dans la BD. Point de vue visuel, c'est beaucoup plus probant le clip.
Et même, progressivement, on va rajouter du court
métrage. Sur notre dernier clip, il y a trois minutes de
court métrage au début, histoire d'habituer les
gens à plonger dans cet univers du court.
C'est vrai que quand on
lit l'intro de la vie du Shaârghot, on se dit que cela
pourrait être un bon scénario, mais tu le verrais
plus en version film, ou version manga ?
Ah c'est intéressant comme question. Les deux supports
peuvent être intéressants. On pourrait penser
aussi à un univers jeu vidéo. Mais tout est fait
pour donner un côté comics, même
à nos clips avec les couleurs très vives,
très contrastées. On fait tout pour que cela
n'ait pas l'air trop réel.
Qu'est-ce qu'on peut
souhaiter au Shaârghot ?
Une longue vie et des dindons !!! (Rires)
Voilà.
Propos recueillis par
Yann Charles
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