|
|
|
|
|
Ecrit par Yann Charles |
|
|
mardi, 07 mai 2019
SIDILARSEN
http://www.sidilarsen.fr/
Une rencontre avec Didou et Viber, respectivement chanteur et
guitariste de Sidilarsen, pour nous parler de « On va tous
crever », leur nouvel album. Un changement de son et de ton
radical pour le groupe toulousain qui a passé la barre des
vingt ans d'existence. Un besoin de changer ? De se renouveler ? C'est
ce qu'ils nous ont expliqué.
On va parler de l'album
« On va tous crever ». Dès le
début de cet album on plonge dans un univers noir, avec un
son qu'on ne vous connaissait pas. Qu'est-ce qui vous a
amené à ce changement radical ?
D : L'envie en premier. Et surtout un besoin d'exprimer un ressentiment
ou un côté sombre de cette époque. Et
surtout l'envie de l'exprimer plus durement, ou plutôt plus
violemment que d'habitude. Ça permet de se mettre en face de
certaines réalités et de se questionner.
C'était devenu essentiel d'aller vers un album plus dur et
plus sombre.
V : Quand tu as la possibilité d'exprimer ton art dans la
musique metal, tu peux aller plus loin dans le son.
C'est bien radical car
quand on lit votre dossier de presse, on parle de « Feu de
sang », vous parlez d'armes avec « God's Got Guns
», vous êtes dans un combat plus expressif on peut
dire ?
D : Oui. Plus marqué on va dire. Puisqu'on avait
déjà les prémices de cette
atmosphère avec des titres comme « Guerre
à vendre ». Avec « On va tous crever
», c'est une même ligne. C'est plus radical sur la
totalité de l'album.
V : C'est un bon exemple « Guerre à vendre
» comme vient de le dire Didou. On le joue en Live. Et
déjà avec ce morceau, on sentait bien qu'on
était en train d'aller vers quelque chose de plus dur. C'est
un nouveau cycle pour nous.
D : L'année dernière, pour les vingt ans, on a
sorti un DVD qu'on a tourné durant l'année 2018.
Et c'est vrai que ce live nous a enseigné beaucoup de
choses. On ne renie pas ce qui s'est fait avec Sidilarsen avec une
énergie, un truc physique qui pulse en live. C'est cette
énergie qu'on peut retrouver encore sur ce nouvel album,
mais sous une forme clairement plus metal.
J'ai relu l'interview
qu'on avait faite en 2016 pour « Dancefloor Bastards
», et vous disiez que vous avez incorporé des
morceaux metal dans cet album. Pour « On va tous crever
», c'est le contraire, un peu d'électro dans
beaucoup de metal ?
D : Comme on l'a dit, sur « Dancefloor Bastards
», il y avait peut-être les prémices,
mais il y avait beaucoup d'autres choses. Là on voulait
quelque chose de vraiment homogène, une seule ligne, une
seule direction artistique. C'est à dire un gros son, bien
dur, bien metal et un peu plus de noirceur et des textes un peu plus
rentre dedans. On avait envie de quelque chose qui va droit au but, de
clair et puissant. Et même si l'electro est
présent quand même, il est, dans une moindre
mesure, en accompagnement du reste et non pas l'inverse comme avant.
C'est ce dont on se rend
compte très vite à l'écoute. C'est
plus agressif, violent parfois. Surtout les guitares. C'est quand
même assez loin de ce que vous faisiez avant où
vous n'aviez pas des sons aussi metal ?
V : On a toujours accordé beaucoup d'importance à
la qualité du son des guitares, mais c'est vrai que
là, on l'a plus orienté vers l'attaque.
Peut-être aussi plus de précision pour bien coller
avec l'écriture des riffs, et avec des choses un peu plus
techniques, parfois plus rapides. Le son a évolué
en fonction de tout ça. On voulait un mix violent mais
clair, puisqu'on a décidé assez vite qu'on
voulait un mastering puissant avec Drew Lavyne et il fallait que tout
soit parfaitement à sa place avec les guitares.
D : Sinon, on a toujours eu dans l'oreille ce son-là. On a
toujours écouté beaucoup de metal. Et c'est vrai
que sur les albums précédents, on avait une
approche plus rock’n’roll dans les sons que sur ce
dernier album. C'est vrai que dans nos compos, il y a toujours autant
de sauvagerie, mais dans nos productions, on aimait bien naviguer entre
rock et metal. Tandis qu'avec « On va tous crever »
on est carrément dans une production metal dans les
instruments basse, guitares et batterie.
Même dans le
rythme général de l'album.
D : Oui, c'était voulu pour coller aux compos comme dit
Viber. Et c'est une envie depuis un certain temps. On était
classés sur la scène metal indus depuis 2003 avec
notre premier album, « Biotop ». Aujourd'hui, le
son de « Biotop » a bien vieilli, mais il avait
quand même cette couleur electro metal indus. Comme le dit
Viber, c'est une nouvelle ère qu'on enclenche. On ne renie
absolument pas ce que l'on a fait avant, c'est juste un besoin
d'évoluer et les autres compos de Sidi retrouveront
naturellement leur place en live avec ce son là aussi.
Vous avez
masterisé l'album avec Drew Lavyne (Foo Fighters, Terror,
Snoop Dog...), tu l'as dit tout à l'heure. Vous aviez besoin
d'une autre oreille pour cet album, quelqu'un de totalement
extérieur à votre aventure ?
V : Oui déjà ça. L'idée
globale était de pousser les curseurs à fond et
en même temps, on voulait aussi quelque chose de sombre pour
coller à la ligne de conduite qu'on a gardée
depuis le début. On voulait quelque chose de puissant et
d'impressionnant quitte à y aller vraiment franco sans
vouloir absolument préserver la pureté du mix. On
voulait que ça rentre dedans, et donc ça nous a
paru la meilleure solution. Et effectivement, le mix nous a un peu
surpris nous-même, et ça nous a satisfait
pleinement. Ça a été très
efficace. Et puis le mastering c'est une façon de faire en
fonction de l'individu. Si ça se trouve, ça
aurait pu ne pas matcher avec Drew. Mais là, non. Et puis
surtout on veut saluer le travail de Plume avec qui on a fait les trois
derniers albums. Il nous a encore beaucoup apporté sur
celui-ci, puisqu'il y avait des choix de production assez
différents et il a su s'adapter pleinement. Mais
après pour sublimer ça, il fallait passer par
l'Amérique et Drew Lavyne. Et ça s'est
avéré judicieux car y a pas photo, ils ont un
savoir-faire dans la culture du gros son. C'est vrai que le mastering
peut paraître anodin car ce n'est pas une finalité
et juste remettre le son aux bons niveaux, mais pour du gros metal,
ça vient bien finir le truc. Un peu comme un bon
glaçage sur un bon gâteau.
Vous abordez les
mêmes thèmes, que ce soit religion, guerre,
solidarité, social. L'album a été
écrit avant les gilets jaunes, c'était
une prémonition ?
D : Mais oui !!! (Rires)
Comme Sidi est composé uniquement de druides et de chamanes.
(Rires)
Non, mais plus sérieusement, on écoute la rue, le
bruit du monde. C'est quand même ça qui nous
inspire. C'est à travers de ce qu'on ressent nous pour
être sincère et personnel. On colle à
l'air du temps. Et oui, ça s'est rejoint de
manière étonnante mais assez exacte.
V : Les artistes, on est un peu des hauts parleurs et à
certains moments des amplificateurs de ce qui se passe autour de nous.
Nos chemins personnels entrent aussi en compte. Mais c'est vrai que sur
certains textes, on s'aperçoit que quelques temps
après les avoir écrits on retrouve des
similitudes dans l'actualité. Parfois c'est
étonnant, mais aussi décevant. Alors on ne fait
pas non plus que dans le pessimisme, mais cet album est un besoin
d'assumer des situations qu'on ressent et que tout le monde ressent je
pense. On a vraiment le sentiment d'être à un
moment charnière de l'humanité.
On vous sent quand
même moins optimistes que sur l'album
précédent. Déjà,
effectivement, il y avait des morceaux bien noirs, mais là,
vous êtes assez pessimistes.
V : Oui, on avait des morceaux très dark, mais on
contrebalançait avec des morceaux plus légers.
D : Oui, on avait voulu ouvrir à des titres plus
légers comme tu dis. Avec le Bataclan et tout le bordel, et
c'était très dur. L'album « Dancefloor
Bastards » a été écrit
pendant cette période. On avait vraiment besoin d'ouvrir la
fenêtre et de s'aérer la tronche pour continuer.
Et là aussi, mais on a voulu assumer cette part d'ombre. On
ne peut pas faire comme si ça n'existait pas, qu'il ne se
passe rien. Sinon c'est de l'angélisme et ça
frôle la naïveté voir
l'indécence tout simplement.
Il y a quand
même de l'amour dans cet album. « Dans tes bras
», « L'ardeur du vivant » qui ressortent.
Il reste des traces d'humanité quand même.
D : Oui sur la fin de l'album, histoire de ne pas mourir
étouffé par tout ça.
V : Il reste toujours une part d'espoir c'est sûr.
Cet album c'est une nouvelle
étape ou une évolution radicale dans la vie de
Sidilarsen ?
D : C'est une étape, mais sûrement une
étape plus importante que celles qui ont jalonné
la vie du groupe.
V : Il y en a eu des étapes clés, mais celle-ci
en est une très importante effectivement.
D : C'est une révolution. Mais c'est vrai, quand j'y
repense, à chaque fois qu'on discutait des choix artistiques
que l'on faisait pour cet album, il y avait des angoisses sur
l'identité du groupe. Mais elles ont toutes
étaient très vite balayées et on a
vite eu confiance. On était sûr de ne pas choquer
le public, nos aficionados surtout, outre mesure.
C'est vrai, moi qui suis
fan du groupe, la première écoute est choquante
mais dans le sens étonnante car on ne vous attend pas dans
ce registre, mais finalement, après quelques
écoutes, on retrouve vite votre trace, votre marque.
D : Voilà, tu définis exactement ce que l'on
souhaitait. C'était notre pari, et très vite on a
été confiants là-dessus. On a
rassuré beaucoup les autres membres du groupe avec Viber. Et
puis dès qu'il y a eu l'empreinte vocale on a vite
retrouvé notre identité. Fatalement, tu peux
faire évoluer ton son, mais il y a cette empreinte vocale
qui marque et qui te ramène vers Sidi.
V : On savait que la personnalité du groupe resterait
présente quoi qu'il arrive.
D : Ça c'est le versant réfléchi. Et
puis après il y a le versant en tant que musicien qui a
quand même pas mal tourné. On en est au
septième album et on avait besoin de se faire plaisir, de se
renouveler donc de se réinventer un peu.
C'est ça, une
petite prise de risque qui donne un peu de piment et vous donne envie
d'aller plus loin.
V : Complètement. Un besoin d'une nouvelle excitation
musicale.
D : Et puis il y a eu l'arrivée de Sylvain, le nouveau
bassiste. Et forcément ça aide à aller
vers du renouveau tous ensemble. Ca coïncidait avec nos
aspirations de renouveau.
On va vous retrouver en
tournée. Elle va être aussi longue que la
précédente ou pas ?
D : Aucune idée. On aime bien vivre au jour le jour
à ce niveau-là. Ce qu'on sait c'est que
ça va commencer très sérieusement
à l'automne. Avec une belle première salve de
dates. Je vais t'en donner trois importantes. A Paris à La
Maroquinerie le 23 novembre. Le 30 novembre à Toulouse au
Bikini et le 20 décembre à Lyon au Transbordeur.
Mais il y en a beaucoup d'autres. Le mieux est de nous suivre sur les
réseaux sociaux. Et sur 2020 ça va être
plus intense encore. Ça va être une grosse
année.
V : Façon on va tous crever alors ... (Rires)
On va arriver
à la fin de cette interview. Dans le dossier de presse il
est écrit « Sidilarsen est devenu dangereux
». Quand même pas à ce
point-là ?
D : Oui, d'une certaine manière on l'est. On va pousser les
curseurs à fond jusqu'à ce que ça
pousse à faire réfléchir. Il y a de la
provocation avec cet album, c'est ça aussi qui est
intéressant ! Que ça bouge et que ça
vibre.
Sidilarsen, c'est 22 ans
d'existence et de tournées, vous avez fait votre bilan
carbone ?
D : (Rires)
Oui il va falloir le faire !! Avant d'être
sévèrement puni par la Macronie !! C'est
l'ère des amendes et on va payer cher cette pollution. (Rires)
V : Moi j'ai une idée. Si on pouvait convertir le pognon
qu'on laisse aux péages dans la taxe carbone, ce serait pas
mal.
Dernière
question : j'ai pas mal de potes Toulousains, quand ils partent ils
emmènent toujours un truc du pays, genre bouffe, alcool,
vous c'est quoi ?
V : On aime la bonne bouffe oui. Mais dans le camion c'est pas
pratique. Et puis nous, on a toujours apprécié de
manger local.
D : Ah oui, grave !!
V : Quand on voit ce qu'il y a dans ce beau pays qu'est la France. On
privilégie les organisations qui proposent un truc local. Un
truc qui peut nous surprendre plutôt qu'une liste de courses
comme peuvent le faire certains artistes où tu vas tout le
temps retrouver la même chose. Y a rien de plus triste.
On tombe dans la
banalité
D : Oui c'est ça. La qualité de l'accueil,
l'envie de bien accueillir c'est très important. Cela permet
de partager de bons moments avec les gens.
V : Oui. On voit déjà suffisamment d'aires
d'autoroutes semblables et banales. C'est important cet accueil quand
on enchaîne des dates.
Merci beaucoup les gars.
Et merde pour ce nouvel album que personnellement j'aime bien. Vous
avez changé un truc, et c'est vraiment bien.
V : Merci
D : Merci à toi Yann
Propos recueillis par
Yann Charles – Photo : Sabrina Cohen Aiello
|
|
|
|