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INTERNATIONAL BLUES CHALLENGE à MEMPHIS (USA)
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Ecrit par Fred Delforge |
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dimanche, 27 janvier 2019
IBC 2019
INTERNATIONAL
BLUES CHALLENGE
BEALE STREET –
MEMPHIS (USA)
Du 22 au 26 janvier 2019
http://www.blues.org
C’est en parallèle de
l’expédition « En Terre de Blues
» qui nous a déjà emmenés de
New Orleans à Memphis via Meridian, Tupelo et Como pendant
quelques jours (voir
ici), que nous retrouvons les amis de la Blues Foundation qui
organisent la 35ème édition de
l’International Blues Challenge. Rendez-vous
incontournable de tous les amoureux du blues, les cinq jours
à venir nous offriront l’opportunité de
découvrir quelques 250 groupes qui vont se produire dans une
grosse vingtaine de clubs de Beale Street jusqu’à
samedi ! La Mecque du blues …
Mardi 22 janvier 2019 :
En attendant le lancement officiel de l’International Blues
Challenge, on se laisse aller à la découverte de
Memphis avec pour commencer la première des attractions
blues de la ville, le Blues Hall Of Fame de la Blues Foundation dans
lequel on peut admirer divers objets collector ayant appartenu
à des musiciens célèbres et recevoir
nombre d’explications sur l’histoire d’un
genre qui a donné naissance à la plupart des
musiques actuelles, si ce n’est à toutes !
Installée dans l’espace du « Legendary
Rhythm’n’Blues Cruise »,
l’exposition « Mississippi, Terre de Blues
» de notre complice photographe Sylvie Bosc retiendra bien
entendu toute notre attention puisqu’elle est
particulièrement bien mise en valeur et superbement
présentée. C’est une
véritable reconnaissance pour l’artiste mais aussi
pour nous tous puisque le projet qui a conduit à cette
exposition est né en 2016 et qu’il se poursuit
régulièrement depuis lors. On attend le
vernissage de demain avec une certaine impatience !
Nous partirons ensuite en direction de Soulsville, le quartier
populaire qui a donné à Memphis ses plus belles
créations musicales puisque c’est là
que sont nés et ont vécu les plus grands
musiciens du cru et qu’ont été
enregistré les plus grands albums des labels Stax et
Hi-Records. Un arrêt auprès de la maison natale
d’Aretha Franklin nous permettra de revoir sans doute pour la
dernière fois ce lieu important puisqu’il est
question de le démonter pour le transporter à
Detroit. C’est ensuite en compagnie des deux filles de Willie
Mitchell, Yvonne et Oona, véritables gardiennes du temple,
que nous nous attarderons à l’intérieur
de Royal Studios pour y admirer les divers souvenirs de cet antre dans
lequel ont été enregistrées quelques
merveilles du blues, du rock et de la soul music. Absent
aujourd’hui, notre ami Boo Mitchell, récipiendaire
d’un Grammy Award en 2016 pour la Chanson de
l’Année, nous manquera forcément
puisque c’est lui qui habituellement nous accueille et nous
présente quelques trésors musicaux
qu’il conserve précieusement dans ses bandes et
dans ses disques durs …
C’est au très fameux Four Way Grill &
Restaurant que nous irons ensuite déjeuner avec deux de nos
grands amis de Stax Music Academy, Tim Sampson et Paul McKinney, mais
aussi avec une vingtaine de Croates avec qui nous avons rendez-vous
pour passer une partie de l’après-midi. En effet,
nous avons souhaité associer les Croatian Blues Forces
à notre projet pour permettre à de jeunes
musiciens et à leurs accompagnateurs de vivre une sorte de
rêve qui leur permettra de découvrir Soulsville
d’une manière plus qu’originale.
C’est donc en compagnie des artistes français,
Ronan OneManBand et Fred Cruveiller Blues Band, que nous commencerons
par présenter le meilleur de la soul food à des
néophytes qui visiblement apprécient de
goûter au poulet frit, au country fried steak, aux green
tomatoes ou encore aux black eyed peas telles que les locaux les
dégustent traditionnellement. Le moment est
d’autant plus fort que le restaurant accueille
également ce midi quelques preachers habillés
dans des costumes de toute beauté !
Il est temps maintenant de rejoindre les fameux Stax Studios pour
prendre une grande bouffée de soul music en admirant les
nombreux objets qui appartiennent à l’histoire de
ce label mythique, du plus petit jusqu’au plus grand puisque
l’un des clous de l’exposition est la fameuse
Cadillac dorée d’Isaac Hayes. Toujours aussi riche
et aussi bien aménagé, l’endroit est
une mine d’or incontournable dans laquelle chacun peut aller
piocher et attraper ses propres pépites gorgées
d’une partie majeure de l’histoire de la soul et du
blues. Si le film qui précède la visite est un
document inestimable, c’est l’ensemble du
musée et des anciens studios qui est devenu un monument
incontournable de la Capitale mondiale du Blues. A voir absolument !
La nuit commence à tomber quand nous traversons
l’esplanade qui même à la
très fameuse Stax Music Academy, un endroit où
l’on enseigne la musique bien entendu, mais où
l’on prodigue également un enseignement
universitaire reconnu à de jeunes gens issus de familles
ayant peu de moyens. Le marché est clair, on vous offre vos
études de droit ou d’administration, vous
contribuez en échange à la sauvegarde du mythique
Memphis Sound en jouant de la musique, en chantant ou en apprenant un
des nombreux métiers du spectacle.
Et ça fonctionne, nous en aurons la preuve, puisque les
élèves de l’académie
viendront nous jouer quelques morceaux, très vites
imités par quelques jeunes Croates issus du superbe
« Summer Blues Camp » organisé chaque
année dans les environs de Zagreb pour accompagner
efficacement la formation musicale des plus jeunes et contribuer au
développement du blues en Europe. Deux grandes causes qui se
sont rencontrées ce soir grâce à une
collaboration rondement menée entre France Blues, les
Croatian Blues Forces et la Stax Music Academy, preuve que le blues est
un langage universel pour les personnes de bonne volonté !
Pendant ce temps, Ronan OneManBand jouait ses premières
notes sur Beale Street, au Club 152, dans le cadre de
l’International Showcase, le véritable round
d’observation de l’International Blues Challenge
durant lequel les artistes non-étasuniens sont
présentés à la communauté
blues mondiale. Retenus à la Stax Music Academy, nous
n’arriverons sur place que bien plus tard, non sans avoir
traversé Beale Street de bas en haut depuis la maison de
W.C. Handy, pour assister au showcase des Allemands de Blues Baltica -
Eutin, Richie Arndt & Band, un groupe que nous connaissons
déjà un peu puisque nous nous rendons chaque
année au Eutin BluesFest où nous
l’avons déjà vu se produire.
Ce sera ensuite au Fred Cruveiller Blues Band de se produire pour la
première fois sur Beale Street, toujours au Club 152,
où le combo toulousain fera forte impression avec trois
titres fort bien présentés. Energique, bluesy en
diable et bien organisée, la quinzaine de minutes que durera
le set du trio ne laissera pas l’assistance de marbre avec
deux compositions bien fagotées qui enverront même
quelques danseurs sur la piste mais aussi avec une adaptation
très personnelle de « Natural Blues »
qui laissera un peu refroidir les braises mais qui aura
l’avantage de susciter
l’intérêt d’un public devenu
pour le coup moins remuant mais plus attentif. C’est
plutôt de bon augure pour la suite du Challenge !
Le temps de s’installer au Blues City Café pour le
diner et nous aurons le plaisir d’avoir en toile de fond les
prestations de formations australiennes, Ben Ford-Davies
d’Adelaide en solo et The McNamarr Project de Melbourne en
groupe, mais aussi et surtout la véritable explosion blues
d’une bombe atomique présentée par UK
Blues Federation, la fabuleuse Kyla Brox sur laquelle on miserait bien
quelques dollars pour le podium final ! Minuit approche, Beale Street
se vide de ses badauds et il est temps de penser à prendre
un peu de repos avant la grosse journée qui
s’annonce pour demain …
Mercredi 23 janvier 2019 :
C’est une journée un peu particulière
qui commence puisque nous avons rendez-vous à la Blues
Foundation pour assister au vernissage de l’exposition
« Mississippi, Terre de Blues » de Sylvie Bosc.
Première Française à exposer ses
photos dans le Temple Mondial du Blues, l’Aveyronnaise montre
une émotion toute légitime au moment de lire son
discours de bienvenue, en Anglais dans le texte, et c’est aux
côtés de Jeff Syracuse, Président de la
Blues Foundation, qu’elle s’exécutera,
bientôt complimentée par notre ami Etienne Mortini
qui en fera l’éloge, en Anglais lui aussi.
Entourée du gratin du blues international, Sylvie assurera
ensuite le service après-vente en
dédicaçant le volume 1 du livre qui porte le nom
de l’exposition. Un grand moment de convivialité
auquel nous ont fait l’immense honneur d’assister
quelques très bons amis comme Jay Sieleman, Shirley Waring,
Paul Benjamin, Lawrence ‘‘Boo’’
Mitchell, Chris Barnes, Silvio Caldelari et nombre d’autres
encore.
L’heure tourne et il faut rapidement aller se restaurer avant
de commencer la tournée des concerts dans les clubs,
c’est donc traditionnellement au Central BBQ que nous allons
prendre une copieuse portion de ribs dans un décor de
cafétéria américaine à
l’ancienne. En fermant les yeux, on pourrait presque se
sentir dans le décor de la série «
Happy Days », odeurs de cuisine en plus. Rapidement
expédié, le repas nous permettra de reprendre
quelques forces avant une fin de journée qui
s’annonce là encore très
chargée puisque les formations françaises
commencent à jouer dès 17 heures !
On retrouve donc sans tarder Fred Cruveiller Blues Band au Flying
Saucer, le seul club de l’International Blues Challenge
à ne pas être sur Beale Street, et ce sont les
Toulousains qui vont être chargés
d’essuyer les plâtres, ce qui a
l’avantage de leur laisser un peu de temps pour se
préparer avant de plonger dans le grand bain. Bien en place
et parfaitement motivé, le trio a resserré son
set depuis son passage au showcase hier soir et c’est avec
une belle énergie et beaucoup de cohésion
qu’il va nous emmener dans son blues pour en
dévoiler les subtilités à un jury qui
visiblement apprécie l’exercice qui lui est
proposé. Des compositions pleines
d’équilibre et la désormais
traditionnelle reprise de « Natural Blues » et
voilà une première étape
astucieusement franchie par un Fred Cruveiller Blues Band qui
n’a pas essayé un instant de retenir ses coups !
Pas de temps à perdre, il faut rapidement rejoindre Beale
Street où Ronan OneManBand va se produire au Blues Hall dans
moins d’une heure. En attendant, nous en profitons pour
parler un moment avec Bruce Iglauer mais aussi pour
découvrir deux concurrents qui se produisent dans cette
salle au cachet très typé juke joint. Ce sont
donc les Italiens de Caboose qui lanceront les hostilités en
duo avec un blues plutôt sympathique et bien servi avant que
ne leur succèdent Jenkins Bros. Electrified Blues Duo, un
combo directement venu de la Windy City pour nous présenter
une prestation à laquelle nous aurons quand même
un peu de mal à accrocher, quand bien même la
valise qui sert de grosse caisse au groupe lui donne un petit
côté original.
C’est maintenant Ronan One Man Band qui va s’y
coller et nous régaler de sa grosse voix de bluesman sur
fond de guitare slide et de blues un peu rauque. Quelque peu
dérangé par un bruit parasite dans les retours,
Ronan ne va pas perdre son temps à se lamenter sur son sort
mais va au contraire de lancer dans une prestation bien charnue en nous
proposant ses compositions et en surprenant l’assistance par
sa prestance et par la teneur de sa musique. Difficile de
résister à cette vague de blues directement venue
de Bretagne pour inonder Memphis et quand bien même le poor
lonesome bluesman nous fera une petite sortie de route en toute fin de
set avec un léger dépassement de timing, il y a
fort à parier que son empreinte a été
durablement inscrite sur les murs du Blues Hall et c’est bien
ça le principal
!
C’est comme souvent au Blues City Café que nous
irons nous remettre de nos émotions autour d’un
T-Bone et assister à quelques concerts avec notamment ce
soir Kyla Brox qui se produit sur les coups de 20 heures 30 pour une
prestation une fois encore très remarquée de
tous. Il sera temps ensuite de regagner notre hôtel, non sans
faire une halte au Jerry Lee Lewis’ où les
Français lanceront la jam avec un plaisir non feint,
bientôt rejoints par leur ami Little Mike à
l’harmonica puis par une chanteuse à la voix un
peu stridente … Les corps sont quelque peu endoloris par une
longue journée de blues et de piétinements mais
c’est la tête pleine de notes bleues que nous
prendrons quand même un dernier verre avant de profiter des
quelques heures de sommeil qui nous sont offertes
…
Jeudi 24 janvier 2019 :
En attendant le second quart de finale, la matinée sera
consacrée à une longue errance dans Memphis
à la rencontre des gens mais aussi des immeubles qui font de
cette ville un endroit aussi atypique qu’attachant. On passe
des quartiers d’affaires aux quartiers branchés
mais aussi de la middle class au dénuement le plus total
mais quel que soit l’endroit, il y a toujours
quelqu’un à voir, quelques expériences
à partager, quelques mots à échanger
… Du regard bienveillant du passant au rictus du hobo qui
arpente les rues avec son peu de biens dans un sac et parfois un chien
attaché en laisse, elle est surprenante cette ville de
contrastes, et c’est aussi pour ça qu’on
l’aime.
C’est donc un grand tour de ville que nous ferons ce matin,
en marchant mais aussi en voiture, à la recherche
d’instruments du côté de Copper / Young
ou plus simplement dans les rues de Downtown, parce que
résumer Memphis à Beale Street serait une erreur
et parce que sans les différentes facettes de la ville, le
blues n’aurait peut-être jamais eu la
même saveur. Si elle s’est instaurée en
tant que capitale du blues, Memphis n’en reste pas moins le
berceau du rock’n’roll et la ville en porte les
stigmates sur chaque mur, sur chaque morceau de trottoir …
C’est assez difficile à expliquer mais tellement
agréable à regarder et à
apprécier.
Il est temps de rejoindre le Blues Hall où c’est
Ronan OneManBand qui va lancer la soirée en nous proposant
un échantillon de tous ses talents au travers de ses
compositions et de ses adaptations qu’il servira à
la guitare mais aussi à la cigar box et même
a-capella lorsqu’une corde récalcitrante aura la
mauvaise idée de casser. C’est alors la grosse
voix du Breton qui viendra réchauffer
l’atmosphère du Juke Joint et c’est sous
un tonnerre d’applaudissement que Ronan montera
l’une après l’autre les marches qui le
conduiront vers une demi-finale plus que méritée,
mais ça nous ne l’apprendrons qu’en
toute fin de soirée, bien après minuit
… Il y a des prestations qui restent en mémoire
longtemps et celle-là en est une, c’est certain !
On ne tarde pas à traverser la rue et à rejoindre
le Silky O’Sullivan’s pour aller retrouver
Lil’ Red & The Rooster, le couple
franco-américain présenté par Cincy
Blues Society qui nous régale d’une prestation
dans laquelle la guitare de Pascal Fouquet est exceptionnelle et
où la voix de Jennifer Milligan soutenue par ses percussions
est un véritable bonheur. Au même moment ou
presque, les Finlandais Slim Butler & The SlimCuts se
produisent au King Jerry Lawler’s devant une assistance qui
visiblement apprécie leur blues venu du Grand Nord pour se
répandre insidieusement sur le Deep South.
Avant de rejoindre le Flying Saucer, on reviendra un moment au Blues
Hall pour la prestation de Chris Gill & Stan "Dead-End" Street
de Vicksburg Blues Society et c’est finalement The Ivy Ford
Band qui nous accueillera bientôt sur Second Street avec un
show taillé sur mesure pour sa chanteuse, un show explosif
au niveau visuel et musical pour une formation de l’Illinois
qui a déjà quelques belles expériences
à son tableau de chasse puisque le groupe a entre autres
ouvert pour Buddy Guy dans son club de Chicago.
C’est une véritable pépite de blues que
va venir nous offrir ce soir le Fred Cruveiller Blues Band avec un set
à la fois précis, puissant et carré,
un de ces concerts comme on les aime qui parviennent à faire
le tour complet de toutes les facettes d’une formation
à la fois brillante et inspirée, un groupe qui
sait emmener son public de Chicago à Austin en passant par
le Delta. La voix très justement posée et le
guitare vertueuse, Fred Cruveiller va se laisser porter par une section
rythmique de haut vol pour nous déverser avec beaucoup
d’inspiration des slides à vous arracher les
tripes et des solos à vous déchirer le
cœur ! Si l’on en croit la réaction du
public, le concert de ce soir a été en tous
points réussi mais cela ne suffira malheureusement pas pour
faire passer nos Frenchys en demi-finale, les juges en ayant
décidé autrement.
La journée a été longue mais nous
prendrons quand même le temps d’aller
découvrir le septet helvétique Manu Hartmann
& The City Blues Band au B.B. King’s qui nous a
délivré un set autant marqué par sa
chanteuse et son guitariste que par ses cuivres et son orgue Hammond et
c’est finalement chez Alfred’s que nous assisterons
à la fin du Heart & Soul Showcase
présenté par Shakura S’Aida et Terrie
Odabi en compagnie de quelques beaux artistes comme entre autres Mr.
Sipp. Encore un grand moment de talent et de chaleur humaine
présenté par des musiciens
généreux et c’est lentement mais
surement vers l’annonce des résultats que nous
emmènera cette belle fin de soirée …
Entre grand bonheur bien mérité et petite
déception toute
légitime.
Vendredi 25 janvier 2019
:
C’est par la traditionnelle cérémonie
de remise des Keeping The Blues Alive Awards dans le Tennessee Ballroom
de l’hôtel Doubletree que commence cette avant
dernière journée de l’International
Blues Challenge et c’est avec une certaine émotion
que plusieurs de nos amis parmi lesquels les Croatian Blues Forces, la
publiciste canadienne Sarah French et bien évidemment Jean
Guillermo vont recevoir ce prix prestigieux qui récompense
l’ensemble de leur œuvre mais aussi et surtout leur
dévouement à une cause qui nous est commune, le
Blues. Cette longue matinée sera également
l’occasion de saluer les nombreuses personnalités
du blues mondial réunies pour ce premier rendez-vous
important de l’année !
Le temps de quitter les habits de lumière et de rechausser
les baskets et nous nous retrouvons sur Beale Street pour partir
à la découverte des jeunes artistes de moins de
21 ans qui se produisent dans le cadre de l’International
Youth Showcase. On y croise des jeunes venus du monde entier comme par
exemple Us And Them d’Omaha ou encore Bluesee de
Corée qui chaufferont les planches du Rum Boogie
Café en attendant le début de la demi-finale.
C’est pour des jeunes gens comme No Solution venus
en « voisins » depuis Atlanta l’occasion
de se produire devant un public d’amateurs
éclairés, de jouer sur de belles
scènes comme le B.B. King’s et de prouver par
l’exemple que le blues est une musique capable de toucher les
plus jeunes, ceux sans qui les douze mesures n’auraient plus
d’avenir. Un grand bravo à toutes les Blues
Societies qui font l’effort de miser sur la jeunesse et le
renouveau en suivant les groupes émergents et en les
accompagnant dans de telles aventures.
On reste un moment au B.B. King’s pour assister à
la prestation du groupe de Vicksburg, Keith Johnson And The Big Muddy,
et après avoir pu apprécier le talent de cette
formation issue d’un des viviers les plus actifs du blues
américain, c’est à la rencontre
d’un autre groupe de Vicksburg que nous nous rendons au Jerry
Lee Lewis’ puisque ce n’est autre que le duo Chris
Gill & Stan "Dead-End" Street que nous retrouvons sur
scène juste avant le passage de Ronan OneManBand. Le dernier
moment de calme avant la tempête …
C’est un Ronan totalement décomplexé
qui va mettre le feu à un club où ses
prédécesseurs avaient plutôt
joué la carte de la délicatesse et où
sa grosse voix rocailleuse est ses slides dévastateurs vont
aider les murs à se fissurer et contribuer à
faire sauter les couverts sur la table. Ce n’est plus un
club, c’est une arène, c’est un stade,
c’est les Champs Elysées un soir de finale de
Coupe du Monde … Le public s’est levé,
danse, chante crie au point d’en arriver à couvrir
la musique du Breton qui en remet une couche, puis deux, puis trois, et
qui finit littéralement en transe dans une sorte de
communion avec un public qui le découvre mais qui
l’aime déjà. Dès lors, on
commence à penser à la finale … et
l’avenir nous prouvera que nous avions raison
!
Pour se remettre d’une telle baffe, rien de mieux
qu’un énorme sirloin steak au Blues City
Café où nous entendrons au loin les prestations
de Mojomama (Colorado) et Cros (Phoenix) avant que la jam ne commence
autour des Canadiens Steve Strongman et Justin Saladino. Encore un
grand moment de blues comme on les aime, avec de belles guitares et des
voix bien charpentées, mais il faudra rapidement se
résoudre à aller prendre un peu de repos en
attendant l’annonce des résultats et la finale de
demain où nous retrouverons Ronan OneManBand,
l’unique artiste présenté par une blues
society non américaine mais pas le seul Français
sur scène puisque Lil’ Red & The Rooster,
alias Jennifer Milligan et Pascal Fouquet, se produiront
également sur les planches de l’Orpheum !
Samedi 26 janvier 2019 :
C’est le grand jour de la finale de l’International
Blues Challenge avec un grand marathon de blues qui va durer pas moins
de huit heures !
On commence avec le Dion Shakey Trill de Bruce County Blues Society qui
nous offre un blues acoustique de bonne facture avec des compositions
mais aussi avec une relecture du « Trouble No More
» de Muddy Waters assez réussie. Une guitare et un
résonateur, deux voix et un harmonica ... Le bonheur tient
parfois à très peu de choses, quand bien
même le guitariste semble plus que stressé !
On poursuit avec The Gabe Stillman Band de Billtown Association qui
démarre en trombe avec une composition avant de rendre
hommage à Otis Rush avec une cover tout en finesse. La
qualité technique du chanteur et guitariste
associée à un harmonica très fin est
un véritable atout pour un groupe qui peut se reposer sur
une section rythmique solide, même si les parties de guitare
dégoulinent parfois un peu trop !
C’est maintenant à Lil’Red &The
Rooster de Cincy Blues Society de venir régaler
l’assistance avec leur délicatesse et leur
complicité aussi épatante à la ville
qu’à la scène ! À ranger
parmi les meilleurs guitaristes de sa génération,
Pascal Fouquet fait un superbe travail que Jennifer Milligan habille de
très belle manière avec sa voix charmeuse et ses
percussions subtiles. Un superbe moment de blues, même si
l’ampli guitare crachouille un peu ! Un medley de Muddy
Waters et de Magic Sam pour refermer le set et voilà une
prestation qui aura été rondement
menée.
Place à Misty Blues de Capital Region Blues Network qui
arrive en sextet pour nous surprendre avec une grosse voix de
blueswoman et un blues quelque peu tribal et sauvage, une musique qui
décoiffe et qui fait du bien au corps et à
l’esprit. Le batteur qui attrape à
l’occasion une trompette crée un peu la surprise
et c’est au bout du compte une très belle
prestation que nous aura délivré le groupe.
C’est au tour de Scott « Shack » Hackler
de Colorado Blues Society de venir nous faire son show en solo avec un
piano, un chapeau-tambourin et beaucoup d’humour.
D’un shuffle a un slow blues, le pianiste est aussi bon que
le chanteur et c’est une prestation originale et
séduisante qui nous sera offerte au bout du compte. Beaucoup
d’autodérision de la part d’un artiste
qui fait plus se de défendre !
On retrouve The Ivy Ford Band de Crossroads Blues Society of Illinois
pour un set une fois encore très explosif. Une chanteuse et
guitariste un peu exubérante et très
charismatique, une section rythmique impassible et une guitare beaucoup
trop forte, c’est plus le show et le
côté rock‘n’roll que la
qualité du jeu que l’on retiendra, même
si le public semble apprécier !
On retourne vers les duos avec Théresa Malefant &
Scott Medford d’East Coast Blues Society pour une
complicité guitare et chant pleine de
délicatesse. Si le duo ne paie pas de mine, la voix est en
tous points exceptionnelle et le jeu de guitare empreint de
subtilité, la réunion des deux donnant quelque
chose de très folk blues et très beau
à la fois. Une « Queen Bee » pour
replier le set et voilà une affaire qui aura rondement
été menée !
Huitième groupe de l’après-midi, The
Motion d’Orange County Blues Society s’installe et
nous secoue un peu avec un set plein de fougue et de brio. À
la guitare ou au tambourin, le chanteur affiche un réel
charisme et c’est de belle manière que les
Californiens vont venir nous secouer un peu en ce milieu de finale qui
avance bon train. Du rock dans le blues, c’est une
manière de faire qui trompe rarement !
C’est Ronan OneManBand de France Blues qui arrive maintenant
avec sa quincaillerie et son immuable sourire pour nous
présenter un set retaillé par rapport aux
précédents dans lequel on retrouvera toutefois
son « Lonesome Wolf » et une cover de John Lee
Hooker bien ficelée. De quoi séduire une
assistance conquise par une grosse voix bien grave et par une
gentillesse communicative.
En route pour le gros son avec Cos de Phoenix Blues Society, un trio
puissant emmené par un chanteur et bassiste plein de
charisme et soutenu par un guitariste frappé par le syndrome
de Stevie Ray Vaughan ! Énergique en diable, la prestation
du groupe n’en finira plus de nous offrir des solos
dispensés avec fougue par un guitar hero
hispano-américain à la fois prolixe et
très inspiré !
On retrouve avec grand plaisir Steve Strongman de Grand River Blues
Society pour une prestation en solo partagée entre blues et
folk blues. Une belle voix, une guitare assurée et un
charisme de tous les instants font de Steve un artiste
particulièrement apprécié et quand il
sort un harmonica de sa poche, c’est tout l’Orpheum
qui démarre avec lui !
Ils sont rares les groupes blacks à
l’international Blues Challenge et c’est cette
année Ms. Hy-C & Fresh Start de St. Louis Blues
Society qui porte le flambeau de la communauté
afro-américaine en septet. Emmené par sa
chanteuse qui, à l’occasion, manie la batte de
baseball avec vigueur, le groupe en rouge et noir ne va pas manquer son
rendez-vous avec Memphis et nous présenter un set sans temps
mort, malheureusement mal mis en valeur avec des guitares trop fortes
et un saxophone et des claviers quasiment inaudibles !
On entre dans le dernier carré avec Josh "The Pitbull of
Blues" Rowand de Southwest Florida Blues Society qui commence a capella
par un titre de Son House dans le public. La banane
surdimensionnée et le ton très rockabilly ont un
petit côté sympathique et c’est dans la
bonne humeur que l’on suit l’artiste à
la guitare ou même à la cigar box faite dans une
boîte de Jack Daniel’s 1904. Encore un
sérieux candidat au podium !
On avance encore d’une case avec Celso Salim Band de Santa
Clarita Valley Blues Society, un sextet avec orgue Hammond et harmonica
qui va nous proposer un blues taillé dans la veine de celui
de Chicago, mais avec une pointe de Texas blues et de rock pour mieux
battre les cartes avant de les distribuer. Sans grande
originalité mais avec une belle dose
d’énergie, la prestation du combo
séduit globalement une assistance qui commence à
fatiguer après plus de six heures de musique non-stop.
Dernier artiste solo de cette finale, Jon Shain de Triangle Blues
Society pose ses guitares et y va pour une vingtaine de minutes
d’un bon blues qui commence par une cover de Sony Terry
& Brownie McGhee pour mieux continuer avec un original
composé par l’artiste il y a 17 ans, à
la naissance de son premier enfant. Une fois encore, c’est un
artiste très charismatique qui parviendra à
emmener l’assistance dans son sillage pour un concert bref
mais réussi !
On termine avec Sammy Eubanks & The Workmen Class de Washington
Blues Society pour un Chicago blues de bonne qualité qui
séduit grâce à une belle guitare mais
aussi grâce à des cuivres et à un orgue
Hammond. Là encore on ne réinvente pas le genre
mais ça joue avec les tripes et forcément
ça fait mouche sur une assistance qui cède aux
avances d’un groupe qui est loin d’être
né de la dernière pluie. Départager
les candidats sera un véritable calvaire si l’on
s’appuie sur le niveau très homogène de
cette longue journée de blues !
En attendant les résultats on se prend un peu de blues avec
une jam all stars ou l’on reconnaîtra entre autres
Jon Del Torro Richardson, Russell Jackson, Marquise Know, Tony
Braunagel, Kenny Neal, Shakura S'Aida, Terrie Odabi, Thornetta Davis,
Alicia Chambers, Ben Rice, etc. qui rendront hommage à Mike
Ledbetter mais aussi à Aretha Franklin.
L’heure des résultats a sonnée et de ce
35ème International Blues Challenge, on retiendra ce
palmarès :
Best Self-Produced CD : « Lock Up The Liquor » de
The Little Red Rooster Blues Band
Harmoniciste de l’année : Darryl Carriere (Celso
Salim Band)
Guitariste de l’année : Gabe Stillman
Cigar Box Guitar de l’année : Steve Strongman
Catégorie Solo :
2ème place : Theresa Malenfant & Scott Medford
1ère place : Jon Shain
Catégorie groupes :
3ème place : Celso Salim Band
2ème place : Sammy Eubanks & The Work’in
Class
1ère place : Ms. Hy-C & Fresh Start
Il est temps de remercier nos amis de la Blues Foundation et de
retourner à la suite de notre périple «
En Terre de Blues » …
L’édition 2019 de l’International Blues
Challenge a une fois encore été exceptionnelle,
et nous attendons déjà la prochaine avec
impatience !
Fred Delforge
– janvier 2019
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