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Ecrit par Fred Delforge |
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vendredi, 01 février 2019
EN TERRE DE BLUES 2019
EN
TERRE DE BLUES
NEW ORLEANS –
MERIDIAN – TUPELO – MEMPHIS – CLARKSDALE
– VICKSBURG – LAFAYETTE – NEW ORLEANS
(USA)
Du 18 janvier au 2
février 2019
https://visitmississippi.org/
http://msbluestrail.org/
C’est toujours avec le même plaisir que nous
retrouvons le Sud des Etats Unis pour notre virée annuelle
en Terre de Blues et c’est cette année par un
rapide saut en Louisiane que nous commençons
l’aventure avec comme toujours quelques petites anicroches,
un retard de livraison de trois bagage cette fois … Pas de
bobo toutefois, nous patienterons une grosse heure dans
l’aéroport après avoir
été faire les formalités de location
des voitures et il ne nous restera plus qu’à
rejoindre notre hôtel, puis la ville où
malheureusement notre fameux Cajun Seafood vient juste de fermer ses
portes quand nous arrivons. Il faudra donc se contenter d’un
burger dans une grande chaine impersonnelle avant d’aller
profiter du sommeil du juste après quand même plus
de 24 heures de voyage ! Le rêve américain ne
s’atteint pas sans un minimum de volonté
…
Samedi 19 janvier 2019 :
Réveil à l’aube … Les sept
heures de décalage horaire sont déjà
presque avalées et après un petit
déjeuner léger à
l’hôtel, nous partons faire un rapide tour dans New
Orleans pour proposer une première approche rapide de la
ville à ceux qui la découvrent pour la
première fois … Le Superdome, Bourbon Street,
Canal Street, la plus française des villes
américaine dort encore et nous en prenons une
bouffée en express avant de partir en direction du
Mississippi pour une longue journée de transition qui sera
marquée par quelques arrêts majeurs, le Visitor
Center sur la I-59 près de Nicholson, Hattiesburg, et enfin
Meridian.
L’accueil au Visitor Center est chaleureux et si nos
hôtesses sont charmantes, nous nous apercevons
très rapidement qu’elles n’ont pas
grand-chose à nous proposer de plus que ce que nous
connaissons déjà. Il faudra donc partir
à l’aventure par nos propres moyens pour
dénicher de nouvelles trouvailles, mais pas de souci, nous
nous y connaissons un peu dans ce genre d’exercice.
C’est sous une pluie battante que nous quitterons les lieux
pour essuyer un grain qui durera une bonne trentaine de minutes
… Ca change des 21° qui nous accueillaient hier soir
à la descente de l’avion !
Peu de choses intéressantes à
découvrir sur cette longue Interstate, nous nous fierons
donc aux Markers de la Mississippi Blues Trail pour nous abreuver
d’histoire avec deux arrêts importants à
Hattiesburg, le Hi-Hat Club, lieu de spectacle majeur du Chitlin
Circuit où se sont jadis produits les plus grands artistes,
de BB King à Ike & Tina Turner en passant par Otis
Redding et James Brown, et le Roots of Rock ‘n’
Roll symbolisant le lieu où nombre d’artistes,
dont les frères Roosevelt et Uaroy Graves, ont
enregistré en ville. Le temps de déjeuner chez
The Porter, pub et microbrasserie incontournable de la ville, et de
jeter un œil à l’ancienne usine
d’embouteillage de Coca Cola reconvertie en salon mondain, il
sera bientôt temps de reprendre la route pour rejoindre
l’étape du soir à Meridian.
Grande ville pleine de charme, Meridian est un nœud
ferroviaire qui conserve les souvenirs d’antan avec entre
autres les anciens wagons de la ligne Louisville / Nashville mais aussi
une ville qui offre trois markers, le premier étant
situé près de la gare et étant
dédié à une idole du cru, Jimmie
Rodgers, le père de la Country Music à ne pas
confondre avec son homonyme Jimmy Rodgers, connu pour avoir
été le sideman de luxe de Muddy Waters dans les
années 50. Second marker en ville, Meridian Rhythm &
Blues and Soul Music symbolise l’implication de David Ruffin
des Temptations et de son frère Jimmy qui sont partis pour
Detroit où ils sont devenus des icônes du son
Motown. Le troisième et dernier marker est à
seulement quelques miles de la ville, juste en face de
l’usine Peavey Electronics, célèbre
facteur d’amplificateurs et d’instruments
installé dans les faubourgs de Meridian, et signera non
seulement la tombée de la nuit mais aussi la fin
d’une longue journée de route …
Dimanche 20 janvier 2019 :
La nuit a été bénéfique et
c’est en pleine forme que nous nous retrouvons autour des
gaufres de l’Hôtel La Quinta Inn avant de prendre
une nouvelle fois la route pour un long trajet de trois cent cinquante
kilomètres qui va nous réserver quelques
émotions mais aussi quelques retours en terres connues.
Oubliés les 21° de New Orleans, nous sommes
rentrés du restaurant hier soir sous la neige et
c’est dans les températures négatives
que nous avançons aujourd’hui avec un premier
tronçon de route qui va nous emmener à
Philadelphia où nous nous arrêtons un moment
devant le marker dédié à Otis Rush qui
est né non loin d’ici, au Sud de la ville
… Continuation vers Ackerman, un peu plus au Nord,
où nous ferons un arrêt rapide devant le marker
Two Steps From The Blues qui fait référence,
entre autres, à la chanson de l’enfant du pays,
‘‘Texas’’ Johnny
Brown.
C’est ensuite avec une certaine émotion que nous
allons découvrir la dernière demeure
d’un personnage qui nous avait marqués il y a deux
ans, le bluesman Leo ‘‘Bud’’
Welch, qui repose paisiblement depuis la toute fin de
l’année 2017 dans le petit cimetière
très fleuri de Double Springs, au beau milieu des bois, un
environnement que ce personnage attachant et discret aurait
apprécié. Une longue route de terre pour
rejoindre l’église et le cimetière, pas
de voiture, pas de bruit, juste une rangée de
sépultures datant pour la plupart du début des
années 1900 et l’éternité
pour un musicien qui aura fini par se faire connaitre sur le tard, mais
quelle leçon de blues et de simplicité il aura su
donner au monde ! So long Leo …
Une petite centaine de kilomètres nous sépare
d’Oxford où nous décidons
d’aller déjeuner au City Grocery, un restaurant
gastronomique qui propose de superbe plats dans une veine directement
inspirée de la Louisiane. Cuisine simple mais
goûteuse dans une ambiance classe mais pas guindée
avec un personnel avenant et un sens du détail
très poussé puisque l’on peut
même se rincer la bouche avec un breuvage
désinfectant à la fin du repas. On est loin du
genre fast food, et comme il est d’usage à Oxford,
c’est à la librairie Square Books que nous irons
prendre le café en feuilletant quelques ouvrages musicaux,
touristiques, populaires ou même littéraires
puisque Faulkner qui résidait à Rowan Oaks,
à quelques centaines de mètres de là,
est inhumé dans le cimetière de cette importante
ville universitaire qui a su conserver un charme fou.
Avant de rejoindre Tupelo où nous passerons la nuit, nous
ferons encore une halte à Pontotoc où le square
du village accueille le marker du Pontotoc Country Blues qui rappelle
l’histoire de fameux bluesmen comme Terry
‘‘Harmonica’’ Bean qui ont
popularisé le genre en mélangeant une part de
country, de rhythm’n’blues et de rock à
de solides fondations blues. Entourée de balancelles, la
place centrale a un petit aspect coquet mais le désert
absolu qui règne dans la ville nous rappelle très
vite que les petites bourgades du Mississippi ont trop souvent
été vidées de leurs habitants partis
vers les grandes villes pour y chercher du travail et un peu de confort
… Il faut bien reconnaître que si les conditions
de la vie rurales ont donné naissance à quelques
beaux blues, c’est tout naturellement que les populations ont
essayé de se détacher des champs de coton et des
exploitations forestières !
La nuit tombe à notre arrivée à Tupelo
et nous attendrons donc demain matin pour aller faire
l’incontournable Elvis Driving Tour puisque
l’enfant le plus célèbre de Tupelo est
assurément le King en personne
!
Lundi 21 janvier 2019 :
On entre dans le vif du sujet avec deux grosses activités
aujourd’hui, la première
n’étant autre que la visite du lieu de naissance
d’Elvis Presley et du musée qui y est
désormais attaché. Si la maisonnette
où le King a vu le jour est plus que modeste avec ses deux
pièces, une chambre et une cuisine, le musée
insiste sur le côté le plus clinquant
d’un personnage à la vie intense qui aura toujours
eu tendance à bruler la chandelle de son existence par les
deux bouts. Quelques objets familiers, divers costumes de
scène et beaucoup de goodies, une boutique de merchandising
qui nous rappelle que la devise d’Elvis était
« Taking Care Of Business » et c’est un
bon moment que nous passerons en compagnie du souvenir d’un
mythe souvent décrié mais rarement
égalé. La petite église et surtout la
cabane « au fond du jardin » complètent
la visite d’un endroit qui a su rester un petit havre de
paix, surtout en hiver, quand les hordes de touristes n’ont
pas encore pris possession des lieux.
Difficile de quitter Tupelo sans passer faire un tour au
Johnnie’s Drive In, la boutique de burgers restée
dans son jus où le jeune Elvis venait déguster
son plat favori, ou encore au Tupelo Hardware, lui aussi
resté très authentique, où la
mère du gamin eut fort à faire pour le convaincre
de renoncer à la carabine qu’il voulait pour ses
onze ans et à lui faire remplacer par une guitare, avec la
fortune qu’on sait ! Touchante, émouvante parfois,
l’histoire du jeune Presley n’en finit plus de
faire rêver des générations
entières et c’est ici qu’elle puise son
essence, loin des fastes et du strass de Graceland, quand bien
même la demeure historique du King qui se transforme au fil
des ans en un gigantesque parc d’attractions de plus ou moins
bon goût est une mine intarissable
d’émotion pour ses fans.
On prendra bientôt la route en direction de Memphis avec bien
évidemment une halte à Como, véritable
havre de paix posé à un endroit judicieux au bord
de l’Interstate 55 puisque l’on y est à
moins d’une heure de voiture de tous les endroits importants
de l’histoire du Blues ! Outre les trois markers
posés en rang d’oignon dans la rue principale, la
ville d’Otha Turner et Napolian Strickland, deux
maîtres du « fife and drums », mais aussi
de Mississippi Fred McDowell dont la tombe n’est pas
très loin, est l’endroit béni des dieux
où résident deux personnages attachants, la
plasticienne Sharon McConnell et son époux David Dickerson
qui nous accueillent dans leur superbe demeure pour nous raconter leur
étroite relation avec le blues. Connue pour ses marques de
bluesmen mais aussi pour ses bronzes et ses tableaux, Sharon est un
témoin privilégié qui a pu approcher
les plus grands bluesmen d’une autre manière, sa
cécité lui ayant appris à les
appréhender à sa propre manière
…
On quittera bientôt la charmante et paisible bourgade de Como
pour gagner Memphis où, après avoir
traversé divers quartiers d’une ville pleine de
contraste, nous finirons par arriver à Beale Street, la
« rue du blues » qui dort encore paisiblement en
attendant le flot des amateurs venus pour assister dès
demain soir à l’International Blues Challenge. Les
hôtels se remplissent tranquillement, les guitares sortent
des coffres des voitures, la fête va bientôt
pouvoir commencer !
Du mardi 22 janvier au
samedi 26 janvier 2019 :
Consultez
le reportage intégral de l'International Blues Challenge sur
ce lien
Dimanche 27 janvier 2019
:
On quitte l’International Blues Challenge et Memphis sans
oublier d’aller assister à la messe à
la Peace Baptist Church du Reverend Nathaniel Cooper dans les faubourgs
de la ville et c’est toujours avec la même
convivialité que nous sommes accueillis par des
fidèles qui sont visiblement enchantés de
partager ce moment avec nous et qui invitent nos musiciens à
jouer avec eux pendant l’office. Pas de chanteur sur le grill
cette année, mais Laurent Basso et Eric Petznick nous
proposeront quand même un morceau en compagnie de
l’organiste de la paroisse pour un bon moment
apprécié de tous.
Peace Baptist Church fête aujourd’hui les
grands-mères et comme toujours, c’est dans un
mélange de foi et de liesse que nous passerons deux heures
avec des gens humbles et charmants. Les échanges seront
nombreux, notre couleur de peau attirant les plus jeunes qui
n’ont pas l’habitude d’une telle
proximité entre les Blancs et les Noirs, et c’est
finalement tout le monde qui appréciera de vivre un moment
de complicité et de partage durant lequel chaque personne
sera exactement à la même hauteur que son voisin.
Ce n’est pas encore la règle dans la vieille
Amérique puritaine, et surtout dans ces Etats pauvres du Sud
au lourd passé historique, quand bien même la
mixité est quasiment réalisée
à parts égales.
On dépose Ronan et Jean Guillermo à
l’aéroport, le voyage
s’arrêtant ici pour eux, et après les
dernières accolades, nous repartons pour le Mississippi avec
quelques arrêts obligatoires, le premier devant le panneau
qui marque l’entrée de l’Etat et le
suivant au Visitors Center de Tunica, la fameuse Gateway To The Blues
qui est à la fois un office de tourisme et un
musée dédié au genre. On entre en
plein dans la partie rurale du Mississippi et les champs sur le bord de
la Highway 61 semblent déjà jouer le blues rien
que pour nous … La route qui conduit à Clarksdale
est un véritable bonheur !
On arrive bientôt au fameux Crossroads où Robert
Johnson aurait vendu son âme au diable et après un
rapide tour d’orientation en ville, nous allons rejoindre
Sharon McConnell chez son ami James Johnson, mieux connu sous le
pseudonyme de SuperChickan. S’il fait partie des derniers
bluesmen authentiques du Delta, qu’il a tourné
à plusieurs reprises en Europe et qu’il a
reçu un Blues Music Award en 2010, le chanteur et guitariste
ne vit pas pour autant dans l’opulence et c’est
dans sa modeste demeure qui lui sert également
d’atelier de fabrication de guitares et de studio
qu’il nous accueille pour une paire d’heures
d’échange durant laquelle la musique coulera
à flots, SuperChickan prenant du plaisir à jouer
et à chanter mais aussi à partager quelques beaux
moments de blues avec nos amis musiciens.
La nuit est déjà tombée quand nous
partons pour le Shack Up Inn prendre possession de nos chambres et
c’est dans le noir que chacun découvrira cet
endroit atypique … Le réveil demain matin sera
sans doute une belle surprise pour ceux qui sont là pour la
première fois mais en attendant, c’est en musique
et autour d’une belle assiette de carbonara que nous
passerons la soirée dans la Red House tous ensemble ! Il y a
des moments de bonheur dont il serait dommage de se priver
…
Lundi 28
février 2019 :
C’est une longue journée de route qui nous attend
avec un
grand tour dans le Delta à la recherche de quelques grands
souvenirs du blues … On attrape donc l’ancienne
Highway 61
et on descend jusqu’à Merigold rendre visite
à un
Po’ Monkey’s qui se délabre de plus en
plus depuis
le décès de son propriétaire !
Décors de
façade abimée, bois qui commence à
pourrir, tags
en tous genres et nombreuses bouteilles de bière
cassées
devant la porte, il a mauvaise mine ce club mythique dans lequel il se
passait toujours quelque chose et où visiblement le blues
est en
train de s’éteindre peu à peu,
à moins que
la flamme ne tarde pas trop à être
ranimée
…
On poursuit vers Leland où le Musée de la Highway
61 est
fermé le lundi, ce qui ne nous empêche pas
d’admirer
les superbes peintures murales, de saluer le marker de Johnny Winter,
de faire un clin d’œil à Kermit la
Grenouille, autre
héros de la ville, et enfin d’aller faire un tour
sur la
sépulture de James
‘‘Son’’ Thomas dont
la pierre tombale est malheureusement renversée.
C’est
d’autant plus regrettable que le fils du bluesman, Pat
Thomas,
lui-même musicien, accompagne
régulièrement les
visiteurs dans ce petit cimetière, et que quelque chose
pourrait
être fait pour réparer le monument qui date
d’un
quart de siècle …
On reste dans le registre des sépultures en passant saluer
l’âme de quelques bluesmen dont l’immense
Charley
Patton à Holy Ridge avant de pousser
jusqu’à
Indianola pour faire une halte au BB King’s Museum, superbe
musée très riche et formidablement
documenté
auprès duquel le bluesman le plus
célèbre du monde
repose depuis 2015. Encore un grand moment
d’émotion pour
des fans qui tiendront forcément à lui rendre
hommage !
Visiter Indianola sans faire un arrêt devant ses clubs de
blues
serait un sacrilège et après avoir
déjeuné
au Blue Biscuit, pratiquement en face du Musée,
c’est vers
le fameux Club Ebony que nous irons faire un tour pour nous souvenir
que les plus grands musiciens ont joué ici et que ce club a
été sauvé lorsque BB King en personne,
qui
s’y produisait une fois par an, l’a
racheté en 2008
après que sa précédente
propriétaire, Mary
Shepard, ait pris sa retraite. Devenu propriété
du BB
King Museum, le Club Ebony accueille encore et toujours des concerts et
quelques formations françaises ont d’ailleurs pu
s’y
produire par le passé.
La série d’hommages va se poursuivre à
Greenwood
avec la halte incontournable sur la tombe de Robert Johnson, la seule
des trois sépultures de l’artiste à
avoir
formellement été authentifiée, et
c’est avec
une certaine émotion que Fred Cruveiller nous
interprètera un des titres du mythique bluesman assis
à
quelques mètres de sa dernière demeure. En
cheminant vers
Clarksdale pour rejoindre le Shack Up Inn, nous ferons une
dernière halte à Tutwiler pour là
aussi rendre un
hommage à un grand bluesman, Aleck
‘‘Rice’’ Miller, plus connu
sous le nom de
Sonny Boy Williamson II. Moins décorée que la
tombe de
Robert Johnson, la sépulture de l’harmoniciste
n’en
est pas moins régulièrement visitée et
entretenue
et l’on y trouve quelques harmonicas et autres vinyles
laissés là par ses fans …
Il est temps de rejoindre le Shack Up Inn où nous arriverons
à la nuit tombée pour une fois encore prendre un
bon
repas imaginé et fait maison par notre chef cuisinier et
pour
une nouvelle fois passer un bon moment entre amis autour de deux
guitares et de quelques voix. C’est aussi ça la
magie du
blues !
Mardi 29 janvier 2019 :
C’est en nous offrant un grand tour dans Clarksdale que nous
commençons cette journée qui va être
longue et si la ville est encore un peu endormie, les commerces
n’ouvrant pour la plupart que vers 10 heures, nous allons
pouvoir profiter pleinement des peintures murales et autres
façades avant de faire un passage chez Cat Head, la
célèbre librairie de Roger Stolle où
l’on trouve des revues et des documents blues venus du monde
entier. Véritable caverne d’Ali Baba du Blues, Cat
Head est devenu une institution récompensée
à plusieurs reprises au niveau mondial par, entre autres, un
Keeping The Blues Alive Award et un Blues Music Award !
On file ensuite en direction de Cleveland où nous ferons
notre halte annuelle à Dockery Farms, un lieu qui est en
train de s’adapter au tourisme tout en perdant un peu de son
charme puisque les abords un peu délabrés ont
été rasés et que la musique de Charley
Patton qui envahissait les lieux à chacune de nos visite a
désormais disparu … Cela enlève une
grande partie du charme si particulier qui régnait dans cet
endroit qui devient de plus en plus conventionnel et bien propre sur
lui mais de moins en moins typique et chaleureux.
On file maintenant vers Vicksburg que nous visiterons malheureusement
très peu par manque de temps mais où nous
apprécierons quand même le charme de cette ville
où la Yazoo River rejoint le Mississippi et où
les rues sont marquées autant par le souvenir des combat
terribles qui se sont déroulés durant la Guerre
de Sécession que par les grands bluesmen qui y ont
créé quelques œuvres majeures.
C’est ici par exemple que Willie Dixon a écrit
« Little Red Rooster » avant de quitter la ville
pour aller s’installer à Chicago
…
Très active sur la scène blues grâce
à la Vicksburg Blues Society, cette ville d’une
grosse vingtaine de milliers d’habitants présente
chaque année nombre de groupes à
l’International Blues Challenge et propose divers clubs dans
lesquels le blues coule à flot chaque soir. C’est
en nous recevant chez Michel’s Music Shop que Shirley Waring
et les amateurs de blues locaux découvriront notre livre
« Mississippi, Terre de Blues » et nous
réserveront une belle surprise en nous remettant une plaque
commémorative de notre passage dans la ville offerte par le
Maire en personne, le tout sur fond de musique
interprétée par des artistes locaux et par le
Fred Cruveiller Blues Band invité à les
rejoindre. Un superbe moment de convivialité durant lequel
nous ferons la connaissance de nombre de personnes attachantes
à l’histoire captivante parmi lesquelles le fameux
Oncle Scott, figure de proue d’une chaine de restaurants qui
commence à prendre pied en France.
Et comme tout se termine toujours en musique à Vicksburg,
c’est par une soirée au L D’s que nous
finirons la soirée autour d’un house band de
grande classe mené par un chanteur exceptionnel aussi
à son aise dans le blues que dans la soul. Ce sera
l’occasion pour le Fred Cruveiller Blues Band de partager
quelques morceaux avec un public très réceptif et
avec une chanteuse qui les rejoindra sur un ou deux titres.
L’occasion parfaite d’achever une
journée longue et pleine d’émotion par
un vrai grand moment de convivialité
!
Mercredi 30 janvier 2019
:
Nous allons aujourd’hui quitter le Mississippi pour gagner la
Louisiane mais avant de partir de Vicksburg, nous passons encore un peu
de temps en ville pour profiter des fresques murales et des divers
bâtiments qui nous sautent aux yeux. Un rapide saut au L
D’s pour récupérer les objets
oubliés la veille, un autre chez Michel’s pour
sensiblement les mêmes raisons et une séance de
gonflage des pneus plus tard, nous voilà donc enfin sur la
route de Lafayette en passant par Natchez …
Si la route est superbe, avec notamment
la Natchez Trace Parkway que nous suivrons plus ou moins longtemps
selon l’habileté des pilotes à lire les
informations d’un GPS, nous n’aurons
malheureusement que très peu de temps pour admirer les
vieilles habitations coloniales qui caractérisent la ville.
Juste le temps d’aller tremper les mains dans le Mississippi
et d’aller goûter à quelques plats
typiques du Fat Mama’s Tamales, superbe restaurant aux
couleurs vives et à la déco clinquante, et il
sera temps de traverser le fleuve pour retrouver la Louisiane !
Chemin faisant, entre le bayou et les vieilles bâtisses un
peu délabrées, nous traverserons encore quelques
cours d’eau comme L'Atchafalaya, défluent du
Mississippi et de la Rouge du Sud qui rejoint le golfe du Mexique par
le vaste bassin du même nom, avant de faire un
arrêt obligé devant un tout nouveau marker de la
Mississippi Blues Trail, celui de Buddy Guy, qui est
implanté à Lettsworth, juste à
l’endroit où le ce grand bluesman a vu le jour
… Il ne nous restera plus ensuite qu’à
rejoindre Lafayette où nous arriverons à la
tombée de la nuit après une longue
journée de route. Les corps souffrent quelque peu de la
fatigue, du manque de sommeil et du froid et nous nous accorderons donc
une petite soirée de détente avant
d’attaquer le gros morceau du voyage demain avec le retour
sur La Nouvelle Orléans.
Jeudi 31 janvier 2019 :
Le périple tire sur sa fin mais avant de rejoindre New
Orleans, nous nous offrons une petite virée dans Lafayette
histoire de prendre le petit déjeuner et de faire un rapide
tour de ville avant de partir à la découverte des
bayous louisianais ! On remarque au détour des rues quelques
clubs de blues et autres lieux insolites qui témoignent de
l’activité musicale de cette grosse ville de plus
de cent-vingt mille habitants, un chiffre qui fait plus que doubler si
l’on tient compte de ses faubourgs. Cela
mériterait d’y passer un peu plus de temps mais le
timing un peu serré ne nous permettra pas
d’approfondir comme il se devrait cette nouvelle
étape …
On file donc ensuite très vite vers LARC's Acadian Village
où nous faisons un bref arrêt avant de nous
diriger vers Atchafalaya Basin et son petit village typique au milieu
des marécages. L’occasion parfaite
d’aller faire un tour vers Lake Fausse Pointe et
d’explorer les environs en profondeur avant de traverser la
rivière par un pont typique puis de reprendre
l’Interstate 10 pour cheminer à travers la
Louisiane industrielle, celle qui passe par Baton Rouge, puis de
croiser l’Interstate 55 qui nous fera voyager sur des ponts
incroyables posés sur l’eau au milieu des bateaux
des pêcheurs de crevettes !
L’arrivée sur la ville est toujours aussi
impressionnante avec un contraste saisissant entre les beaux quartiers
et les ghettos, avec les fresques murales et les maisons
colorées qui vous sautent aux yeux et avec ses rues
étroites qui courent avec une certaine
élégance entre les grandes avenues …
On y remarque encore les stigmates de l’ouragan Katrina qui
avait littéralement fait disparaitre la ville de la carte en
2005 en la plongeant sous les eaux et on assiste en pauvres
témoins passifs à la lente mais belle et bien
réelle reconstruction d’une ville fière
et digne qui se relève à sa manière et
au gré des moyens de chacun.
Vendredi 1er
février 2019 :
On oubliera vite l’expérience de Bourbon Street
hier soir et de ses soirées entre techno assourdissante et
clubs pop à la mode d’Ibiza pour mieux
s’offrir une journée de promenade en ville
à la rencontre des gens et à la
découverte des endroits insolites, souvent hors des parcours
touristiques et des endroits branchés. La ville est belle,
autant dans sa misère que dans sa fortune, et surtout elle
possède un petit quelque chose qui nous manque en Europe, la
foi en le lendemain ! Une attitude qui se veut positive et surtout
porteuse d’espoir …
Du French Quarter à Tremé, du
cimetière de Saint Louis à celui de Lafayette en
passant par tout ce que la ville compte de rues, de venelles et de
dédales, c’est dans un perpétuel
émerveillement que nous mettrons un terme à cette
aventure hors du commun, à ce voyage « En Terre de
Blues » qui une fois encore aura tenu toutes ses promesses en
nous offrant de nouvelles rencontres, de nouveaux lieux à
découvrir et de nouvelles émotions à
partager.
A quelques heures de notre retour vers l’Europe, il ne nous
reste plus qu’à remercier tous les participants
à ce road trip hors du commun pour leur amitié et
pour leur bonne humeur, quand bien même quelques moments
d’anthologie auraient mérité de figurer
dans un bêtisier, depuis les appareils photo
oubliés sur un coin de table jusqu’aux cymbales
oubliées dans un club, des portières mal
fermées jusqu’aux ceintures de
sécurité pas attachées. Et on garde en
réserve les appels intempestifs aux secours, les fantaisies
des GPS qui voient des voitures assises sur le bord de la route et
autres plaisanteries routières … Bref, on a bien
rigolé, mais on a aussi beaucoup bossé
!
Fred Delforge
– janvier/février 2019
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