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EN TERRE DE BLUES - USA pdf print E-mail
Ecrit par Fred Delforge  
vendredi, 01 février 2019
 

EN TERRE DE BLUES 2019 EN TERRE DE BLUES
NEW ORLEANS – MERIDIAN – TUPELO – MEMPHIS – CLARKSDALE – VICKSBURG – LAFAYETTE – NEW ORLEANS (USA)   
Du 18 janvier au 2 février 2019

https://visitmississippi.org/
http://msbluestrail.org/

C’est toujours avec le même plaisir que nous retrouvons le Sud des Etats Unis pour notre virée annuelle en Terre de Blues et c’est cette année par un rapide saut en Louisiane que nous commençons l’aventure avec comme toujours quelques petites anicroches, un retard de livraison de trois bagage cette fois … Pas de bobo toutefois, nous patienterons une grosse heure dans l’aéroport après avoir été faire les formalités de location des voitures et il ne nous restera plus qu’à rejoindre notre hôtel, puis la ville où malheureusement notre fameux Cajun Seafood vient juste de fermer ses portes quand nous arrivons. Il faudra donc se contenter d’un burger dans une grande chaine impersonnelle avant d’aller profiter du sommeil du juste après quand même plus de 24 heures de voyage ! Le rêve américain ne s’atteint pas sans un minimum de volonté …  

Samedi 19 janvier 2019 :


Réveil à l’aube … Les sept heures de décalage horaire sont déjà presque avalées et après un petit déjeuner léger à l’hôtel, nous partons faire un rapide tour dans New Orleans pour proposer une première approche rapide de la ville à ceux qui la découvrent pour la première fois … Le Superdome, Bourbon Street, Canal Street, la plus française des villes américaine dort encore et nous en prenons une bouffée en express avant de partir en direction du Mississippi pour une longue journée de transition qui sera marquée par quelques arrêts majeurs, le Visitor Center sur la I-59 près de Nicholson, Hattiesburg, et enfin Meridian.

L’accueil au Visitor Center est chaleureux et si nos hôtesses sont charmantes, nous nous apercevons très rapidement qu’elles n’ont pas grand-chose à nous proposer de plus que ce que nous connaissons déjà. Il faudra donc partir à l’aventure par nos propres moyens pour dénicher de nouvelles trouvailles, mais pas de souci, nous nous y connaissons un peu dans ce genre d’exercice. C’est sous une pluie battante que nous quitterons les lieux pour essuyer un grain qui durera une bonne trentaine de minutes … Ca change des 21° qui nous accueillaient hier soir à la descente de l’avion !

Peu de choses intéressantes à découvrir sur cette longue Interstate, nous nous fierons donc aux Markers de la Mississippi Blues Trail pour nous abreuver d’histoire avec deux arrêts importants à Hattiesburg, le Hi-Hat Club, lieu de spectacle majeur du Chitlin Circuit où se sont jadis produits les plus grands artistes, de BB King à Ike & Tina Turner en passant par Otis Redding et James Brown, et le Roots of Rock ‘n’ Roll symbolisant le lieu où nombre d’artistes, dont les frères Roosevelt et Uaroy Graves, ont enregistré en ville. Le temps de déjeuner chez The Porter, pub et microbrasserie incontournable de la ville, et de jeter un œil à l’ancienne usine d’embouteillage de Coca Cola reconvertie en salon mondain, il sera bientôt temps de reprendre la route pour rejoindre l’étape du soir à Meridian.

Grande ville pleine de charme, Meridian est un nœud ferroviaire qui conserve les souvenirs d’antan avec entre autres les anciens wagons de la ligne Louisville / Nashville mais aussi une ville qui offre trois markers, le premier étant situé près de la gare et étant dédié à une idole du cru, Jimmie Rodgers, le père de la Country Music à ne pas confondre avec son homonyme Jimmy Rodgers, connu pour avoir été le sideman de luxe de Muddy Waters dans les années 50. Second marker en ville, Meridian Rhythm & Blues and Soul Music symbolise l’implication de David Ruffin des Temptations et de son frère Jimmy qui sont partis pour Detroit où ils sont devenus des icônes du son Motown. Le troisième et dernier marker est à seulement quelques miles de la ville, juste en face de l’usine Peavey Electronics, célèbre facteur d’amplificateurs et d’instruments installé dans les faubourgs de Meridian, et signera non seulement la tombée de la nuit mais aussi la fin d’une longue journée de route …

Dimanche 20 janvier 2019 :

La nuit a été bénéfique et c’est en pleine forme que nous nous retrouvons autour des gaufres de l’Hôtel La Quinta Inn avant de prendre une nouvelle fois la route pour un long trajet de trois cent cinquante kilomètres qui va nous réserver quelques émotions mais aussi quelques retours en terres connues. Oubliés les 21° de New Orleans, nous sommes rentrés du restaurant hier soir sous la neige et c’est dans les températures négatives que nous avançons aujourd’hui avec un premier tronçon de route qui va nous emmener à Philadelphia où nous nous arrêtons un moment devant le marker dédié à Otis Rush qui est né non loin d’ici, au Sud de la ville … Continuation vers Ackerman, un peu plus au Nord, où nous ferons un arrêt rapide devant le marker Two Steps From The Blues qui fait référence, entre autres, à la chanson de l’enfant du pays, ‘‘Texas’’ Johnny Brown.  

C’est ensuite avec une certaine émotion que nous allons découvrir la dernière demeure d’un personnage qui nous avait marqués il y a deux ans, le bluesman Leo ‘‘Bud’’ Welch, qui repose paisiblement depuis la toute fin de l’année 2017 dans le petit cimetière très fleuri de Double Springs, au beau milieu des bois, un environnement que ce personnage attachant et discret aurait apprécié. Une longue route de terre pour rejoindre l’église et le cimetière, pas de voiture, pas de bruit, juste une rangée de sépultures datant pour la plupart du début des années 1900 et l’éternité pour un musicien qui aura fini par se faire connaitre sur le tard, mais quelle leçon de blues et de simplicité il aura su donner au monde ! So long Leo …

Une petite centaine de kilomètres nous sépare d’Oxford où nous décidons d’aller déjeuner au City Grocery, un restaurant gastronomique qui propose de superbe plats dans une veine directement inspirée de la Louisiane. Cuisine simple mais goûteuse dans une ambiance classe mais pas guindée avec un personnel avenant et un sens du détail très poussé puisque l’on peut même se rincer la bouche avec un breuvage désinfectant à la fin du repas. On est loin du genre fast food, et comme il est d’usage à Oxford, c’est à la librairie Square Books que nous irons prendre le café en feuilletant quelques ouvrages musicaux, touristiques, populaires ou même littéraires puisque Faulkner qui résidait à Rowan Oaks, à quelques centaines de mètres de là, est inhumé dans le cimetière de cette importante ville universitaire qui a su conserver un charme fou.

Avant de rejoindre Tupelo où nous passerons la nuit, nous ferons encore une halte à Pontotoc où le square du village accueille le marker du Pontotoc Country Blues qui rappelle l’histoire de fameux bluesmen comme Terry ‘‘Harmonica’’ Bean qui ont popularisé le genre en mélangeant une part de country, de rhythm’n’blues et de rock à de solides fondations blues. Entourée de balancelles, la place centrale a un petit aspect coquet mais le désert absolu qui règne dans la ville nous rappelle très vite que les petites bourgades du Mississippi ont trop souvent été vidées de leurs habitants partis vers les grandes villes pour y chercher du travail et un peu de confort … Il faut bien reconnaître que si les conditions de la vie rurales ont donné naissance à quelques beaux blues, c’est tout naturellement que les populations ont essayé de se détacher des champs de coton et des exploitations forestières !

La nuit tombe à notre arrivée à Tupelo et nous attendrons donc demain matin pour aller faire l’incontournable Elvis Driving Tour puisque l’enfant le plus célèbre de Tupelo est assurément le King en personne !       

Lundi 21 janvier 2019 :

On entre dans le vif du sujet avec deux grosses activités aujourd’hui, la première n’étant autre que la visite du lieu de naissance d’Elvis Presley et du musée qui y est désormais attaché. Si la maisonnette où le King a vu le jour est plus que modeste avec ses deux pièces, une chambre et une cuisine, le musée insiste sur le côté le plus clinquant d’un personnage à la vie intense qui aura toujours eu tendance à bruler la chandelle de son existence par les deux bouts. Quelques objets familiers, divers costumes de scène et beaucoup de goodies, une boutique de merchandising qui nous rappelle que la devise d’Elvis était « Taking Care Of Business » et c’est un bon moment que nous passerons en compagnie du souvenir d’un mythe souvent décrié mais rarement égalé. La petite église et surtout la cabane « au fond du jardin » complètent la visite d’un endroit qui a su rester un petit havre de paix, surtout en hiver, quand les hordes de touristes n’ont pas encore pris possession des lieux.

Difficile de quitter Tupelo sans passer faire un tour au Johnnie’s Drive In, la boutique de burgers restée dans son jus où le jeune Elvis venait déguster son plat favori, ou encore au Tupelo Hardware, lui aussi resté très authentique, où la mère du gamin eut fort à faire pour le convaincre de renoncer à la carabine qu’il voulait pour ses onze ans et à lui faire remplacer par une guitare, avec la fortune qu’on sait ! Touchante, émouvante parfois, l’histoire du jeune Presley n’en finit plus de faire rêver des générations entières et c’est ici qu’elle puise son essence, loin des fastes et du strass de Graceland, quand bien même la demeure historique du King qui se transforme au fil des ans en un gigantesque parc d’attractions de plus ou moins bon goût est une mine intarissable d’émotion pour ses fans.

On prendra bientôt la route en direction de Memphis avec bien évidemment une halte à Como, véritable havre de paix posé à un endroit judicieux au bord de l’Interstate 55 puisque l’on y est à moins d’une heure de voiture de tous les endroits importants de l’histoire du Blues ! Outre les trois markers posés en rang d’oignon dans la rue principale, la ville d’Otha Turner et Napolian Strickland, deux maîtres du « fife and drums », mais aussi de Mississippi Fred McDowell dont la tombe n’est pas très loin, est l’endroit béni des dieux où résident deux personnages attachants, la plasticienne Sharon McConnell et son époux David Dickerson qui nous accueillent dans leur superbe demeure pour nous raconter leur étroite relation avec le blues. Connue pour ses marques de bluesmen mais aussi pour ses bronzes et ses tableaux, Sharon est un témoin privilégié qui a pu approcher les plus grands bluesmen d’une autre manière, sa cécité lui ayant appris à les appréhender à sa propre manière …

On quittera bientôt la charmante et paisible bourgade de Como pour gagner Memphis où, après avoir traversé divers quartiers d’une ville pleine de contraste, nous finirons par arriver à Beale Street, la « rue du blues » qui dort encore paisiblement en attendant le flot des amateurs venus pour assister dès demain soir à l’International Blues Challenge. Les hôtels se remplissent tranquillement, les guitares sortent des coffres des voitures, la fête va bientôt pouvoir commencer !

Du mardi 22 janvier au samedi 26 janvier 2019 :

Consultez le reportage intégral de l'International Blues Challenge sur ce lien

Dimanche 27 janvier 2019 :

On quitte l’International Blues Challenge et Memphis sans oublier d’aller assister à la messe à la Peace Baptist Church du Reverend Nathaniel Cooper dans les faubourgs de la ville et c’est toujours avec la même convivialité que nous sommes accueillis par des fidèles qui sont visiblement enchantés de partager ce moment avec nous et qui invitent nos musiciens à jouer avec eux pendant l’office. Pas de chanteur sur le grill cette année, mais Laurent Basso et Eric Petznick nous proposeront quand même un morceau en compagnie de l’organiste de la paroisse pour un bon moment apprécié de tous.

Peace Baptist Church fête aujourd’hui les grands-mères et comme toujours, c’est dans un mélange de foi et de liesse que nous passerons deux heures avec des gens humbles et charmants. Les échanges seront nombreux, notre couleur de peau attirant les plus jeunes qui n’ont pas l’habitude d’une telle proximité entre les Blancs et les Noirs, et c’est finalement tout le monde qui appréciera de vivre un moment de complicité et de partage durant lequel chaque personne sera exactement à la même hauteur que son voisin. Ce n’est pas encore la règle dans la vieille Amérique puritaine, et surtout dans ces Etats pauvres du Sud au lourd passé historique, quand bien même la mixité est quasiment réalisée à parts égales.

On dépose Ronan et Jean Guillermo à l’aéroport, le voyage s’arrêtant ici pour eux, et après les dernières accolades, nous repartons pour le Mississippi avec quelques arrêts obligatoires, le premier devant le panneau qui marque l’entrée de l’Etat et le suivant au Visitors Center de Tunica, la fameuse Gateway To The Blues qui est à la fois un office de tourisme et un musée dédié au genre. On entre en plein dans la partie rurale du Mississippi et les champs sur le bord de la Highway 61 semblent déjà jouer le blues rien que pour nous … La route qui conduit à Clarksdale est un véritable bonheur !

On arrive bientôt au fameux Crossroads où Robert Johnson aurait vendu son âme au diable et après un rapide tour d’orientation en ville, nous allons rejoindre Sharon McConnell chez son ami James Johnson, mieux connu sous le pseudonyme de SuperChickan. S’il fait partie des derniers bluesmen authentiques du Delta, qu’il a tourné à plusieurs reprises en Europe et qu’il a reçu un Blues Music Award en 2010, le chanteur et guitariste ne vit pas pour autant dans l’opulence et c’est dans sa modeste demeure qui lui sert également d’atelier de fabrication de guitares et de studio qu’il nous accueille pour une paire d’heures d’échange durant laquelle la musique coulera à flots, SuperChickan prenant du plaisir à jouer et à chanter mais aussi à partager quelques beaux moments de blues avec nos amis musiciens.

La nuit est déjà tombée quand nous partons pour le Shack Up Inn prendre possession de nos chambres et c’est dans le noir que chacun découvrira cet endroit atypique … Le réveil demain matin sera sans doute une belle surprise pour ceux qui sont là pour la première fois mais en attendant, c’est en musique et autour d’une belle assiette de carbonara que nous passerons la soirée dans la Red House tous ensemble ! Il y a des moments de bonheur dont il serait dommage de se priver …  

Lundi 28 février 2019 :

C’est une longue journée de route qui nous attend avec un grand tour dans le Delta à la recherche de quelques grands souvenirs du blues … On attrape donc l’ancienne Highway 61 et on descend jusqu’à Merigold rendre visite à un Po’ Monkey’s qui se délabre de plus en plus depuis le décès de son propriétaire ! Décors de façade abimée, bois qui commence à pourrir, tags en tous genres et nombreuses bouteilles de bière cassées devant la porte, il a mauvaise mine ce club mythique dans lequel il se passait toujours quelque chose et où visiblement le blues est en train de s’éteindre peu à peu, à moins que la flamme ne tarde pas trop à être ranimée …  

On poursuit vers Leland où le Musée de la Highway 61 est fermé le lundi, ce qui ne nous empêche pas d’admirer les superbes peintures murales, de saluer le marker de Johnny Winter, de faire un clin d’œil à Kermit la Grenouille, autre héros de la ville, et enfin d’aller faire un tour sur la sépulture de James ‘‘Son’’ Thomas dont la pierre tombale est malheureusement renversée. C’est d’autant plus regrettable que le fils du bluesman, Pat Thomas, lui-même musicien, accompagne régulièrement les visiteurs dans ce petit cimetière, et que quelque chose pourrait être fait pour réparer le monument qui date d’un quart de siècle …

On reste dans le registre des sépultures en passant saluer l’âme de quelques bluesmen dont l’immense Charley Patton à Holy Ridge avant de pousser jusqu’à Indianola pour faire une halte au BB King’s Museum, superbe musée très riche et formidablement documenté auprès duquel le bluesman le plus célèbre du monde repose depuis 2015. Encore un grand moment d’émotion pour des fans qui tiendront forcément à lui rendre hommage !

Visiter Indianola sans faire un arrêt devant ses clubs de blues serait un sacrilège et après avoir déjeuné au Blue Biscuit, pratiquement en face du Musée, c’est vers le fameux Club Ebony que nous irons faire un tour pour nous souvenir que les plus grands musiciens ont joué ici et que ce club a été sauvé lorsque BB King en personne, qui s’y produisait une fois par an, l’a racheté en 2008 après que sa précédente propriétaire, Mary Shepard, ait pris sa retraite. Devenu propriété du BB King Museum, le Club Ebony accueille encore et toujours des concerts et quelques formations françaises ont d’ailleurs pu s’y produire par le passé.

La série d’hommages va se poursuivre à Greenwood avec la halte incontournable sur la tombe de Robert Johnson, la seule des trois sépultures de l’artiste à avoir formellement été authentifiée, et c’est avec une certaine émotion que Fred Cruveiller nous interprètera un des titres du mythique bluesman assis à quelques mètres de sa dernière demeure. En cheminant vers Clarksdale pour rejoindre le Shack Up Inn, nous ferons une dernière halte à Tutwiler pour là aussi rendre un hommage à un grand bluesman, Aleck ‘‘Rice’’ Miller, plus connu sous le nom de Sonny Boy Williamson II. Moins décorée que la tombe de Robert Johnson, la sépulture de l’harmoniciste n’en est pas moins régulièrement visitée et entretenue et l’on y trouve quelques harmonicas et autres vinyles laissés là par ses fans …

Il est temps de rejoindre le Shack Up Inn où nous arriverons à la nuit tombée pour une fois encore prendre un bon repas imaginé et fait maison par notre chef cuisinier et pour une nouvelle fois passer un bon moment entre amis autour de deux guitares et de quelques voix. C’est aussi ça la magie du blues !

Mardi 29 janvier 2019 :

C’est en nous offrant un grand tour dans Clarksdale que nous commençons cette journée qui va être longue et si la ville est encore un peu endormie, les commerces n’ouvrant pour la plupart que vers 10 heures, nous allons pouvoir profiter pleinement des peintures murales et autres façades avant de faire un passage chez Cat Head, la célèbre librairie de Roger Stolle où l’on trouve des revues et des documents blues venus du monde entier. Véritable caverne d’Ali Baba du Blues, Cat Head est devenu une institution récompensée à plusieurs reprises au niveau mondial par, entre autres, un Keeping The Blues Alive Award et un Blues Music Award !

On file ensuite en direction de Cleveland où nous ferons notre halte annuelle à Dockery Farms, un lieu qui est en train de s’adapter au tourisme tout en perdant un peu de son charme puisque les abords un peu délabrés ont été rasés et que la musique de Charley Patton qui envahissait les lieux à chacune de nos visite a désormais disparu … Cela enlève une grande partie du charme si particulier qui régnait dans cet endroit qui devient de plus en plus conventionnel et bien propre sur lui mais de moins en moins typique et chaleureux.

On file maintenant vers Vicksburg que nous visiterons malheureusement très peu par manque de temps mais où nous apprécierons quand même le charme de cette ville où la Yazoo River rejoint le Mississippi et où les rues sont marquées autant par le souvenir des combat terribles qui se sont déroulés durant la Guerre de Sécession que par les grands bluesmen qui y ont créé quelques œuvres majeures. C’est ici par exemple que Willie Dixon a écrit « Little Red Rooster » avant de quitter la ville pour aller s’installer à Chicago … 

Très active sur la scène blues grâce à la Vicksburg Blues Society, cette ville d’une grosse vingtaine de milliers d’habitants présente chaque année nombre de groupes à l’International Blues Challenge et propose divers clubs dans lesquels le blues coule à flot chaque soir. C’est en nous recevant chez Michel’s Music Shop que Shirley Waring et les amateurs de blues locaux découvriront notre livre « Mississippi, Terre de Blues » et nous réserveront une belle surprise en nous remettant une plaque commémorative de notre passage dans la ville offerte par le Maire en personne, le tout sur fond de musique interprétée par des artistes locaux et par le Fred Cruveiller Blues Band invité à les rejoindre. Un superbe moment de convivialité durant lequel nous ferons la connaissance de nombre de personnes attachantes à l’histoire captivante parmi lesquelles le fameux Oncle Scott, figure de proue d’une chaine de restaurants qui commence à prendre pied en France.

Et comme tout se termine toujours en musique à Vicksburg, c’est par une soirée au L D’s que nous finirons la soirée autour d’un house band de grande classe mené par un chanteur exceptionnel aussi à son aise dans le blues que dans la soul. Ce sera l’occasion pour le Fred Cruveiller Blues Band de partager quelques morceaux avec un public très réceptif et avec une chanteuse qui les rejoindra sur un ou deux titres. L’occasion parfaite d’achever une journée longue et pleine d’émotion par un vrai grand moment de convivialité !         

Mercredi 30 janvier 2019 :

Nous allons aujourd’hui quitter le Mississippi pour gagner la Louisiane mais avant de partir de Vicksburg, nous passons encore un peu de temps en ville pour profiter des fresques murales et des divers bâtiments qui nous sautent aux yeux. Un rapide saut au L D’s pour récupérer les objets oubliés la veille, un autre chez Michel’s pour sensiblement les mêmes raisons et une séance de gonflage des pneus plus tard, nous voilà donc enfin sur la route de Lafayette en passant par Natchez …

Si la route est superbe,     avec notamment la Natchez Trace Parkway que nous suivrons plus ou moins longtemps selon l’habileté des pilotes à lire les informations d’un GPS, nous n’aurons malheureusement que très peu de temps pour admirer les vieilles habitations coloniales qui caractérisent la ville. Juste le temps d’aller tremper les mains dans le Mississippi et d’aller goûter à quelques plats typiques du Fat Mama’s Tamales, superbe restaurant aux couleurs vives et à la déco clinquante, et il sera temps de traverser le fleuve pour retrouver la Louisiane !

Chemin faisant, entre le bayou et les vieilles bâtisses un peu délabrées, nous traverserons encore quelques cours d’eau comme L'Atchafalaya, défluent du Mississippi et de la Rouge du Sud qui rejoint le golfe du Mexique par le vaste bassin du même nom, avant de faire un arrêt obligé devant un tout nouveau marker de la Mississippi Blues Trail, celui de Buddy Guy, qui est implanté à Lettsworth, juste à l’endroit où le ce grand bluesman a vu le jour … Il ne nous restera plus ensuite qu’à rejoindre Lafayette où nous arriverons à la tombée de la nuit après une longue journée de route. Les corps souffrent quelque peu de la fatigue, du manque de sommeil et du froid et nous nous accorderons donc une petite soirée de détente avant d’attaquer le gros morceau du voyage demain avec le retour sur La Nouvelle Orléans.

Jeudi 31 janvier 2019 :

Le périple tire sur sa fin mais avant de rejoindre New Orleans, nous nous offrons une petite virée dans Lafayette histoire de prendre le petit déjeuner et de faire un rapide tour de ville avant de partir à la découverte des bayous louisianais ! On remarque au détour des rues quelques clubs de blues et autres lieux insolites qui témoignent de l’activité musicale de cette grosse ville de plus de cent-vingt mille habitants, un chiffre qui fait plus que doubler si l’on tient compte de ses faubourgs. Cela mériterait d’y passer un peu plus de temps mais le timing un peu serré ne nous permettra pas d’approfondir comme il se devrait cette nouvelle étape …

On file donc ensuite très vite vers LARC's Acadian Village où nous faisons un bref arrêt avant de nous diriger vers Atchafalaya Basin et son petit village typique au milieu des marécages. L’occasion parfaite d’aller faire un tour vers Lake Fausse Pointe et d’explorer les environs en profondeur avant de traverser la rivière par un pont typique puis de reprendre l’Interstate 10 pour cheminer à travers la Louisiane industrielle, celle qui passe par Baton Rouge, puis de croiser l’Interstate 55 qui nous fera voyager sur des ponts incroyables posés sur l’eau au milieu des bateaux des pêcheurs de crevettes !

L’arrivée sur la ville est toujours aussi impressionnante avec un contraste saisissant entre les beaux quartiers et les ghettos, avec les fresques murales et les maisons colorées qui vous sautent aux yeux et avec ses rues étroites qui courent avec une certaine élégance entre les grandes avenues … On y remarque encore les stigmates de l’ouragan Katrina qui avait littéralement fait disparaitre la ville de la carte en 2005 en la plongeant sous les eaux et on assiste en pauvres témoins passifs à la lente mais belle et bien réelle reconstruction d’une ville fière et digne qui se relève à sa manière et au gré des moyens de chacun. 

Vendredi 1er février 2019 :

On oubliera vite l’expérience de Bourbon Street hier soir et de ses soirées entre techno assourdissante et clubs pop à la mode d’Ibiza pour mieux s’offrir une journée de promenade en ville à la rencontre des gens et à la découverte des endroits insolites, souvent hors des parcours touristiques et des endroits branchés. La ville est belle, autant dans sa misère que dans sa fortune, et surtout elle possède un petit quelque chose qui nous manque en Europe, la foi en le lendemain ! Une attitude qui se veut positive et surtout porteuse d’espoir …

Du French Quarter à Tremé, du cimetière de Saint Louis à celui de Lafayette en passant par tout ce que la ville compte de rues, de venelles et de dédales, c’est dans un perpétuel émerveillement que nous mettrons un terme à cette aventure hors du commun, à ce voyage « En Terre de Blues » qui une fois encore aura tenu toutes ses promesses en nous offrant de nouvelles rencontres, de nouveaux lieux à découvrir et de nouvelles émotions à partager.

A quelques heures de notre retour vers l’Europe, il ne nous reste plus qu’à remercier tous les participants à ce road trip hors du commun pour leur amitié et pour leur bonne humeur, quand bien même quelques moments d’anthologie auraient mérité de figurer dans un bêtisier, depuis les appareils photo oubliés sur un coin de table jusqu’aux cymbales oubliées dans un club, des portières mal fermées jusqu’aux ceintures de sécurité pas attachées. Et on garde en réserve les appels intempestifs aux secours, les fantaisies des GPS qui voient des voitures assises sur le bord de la route et autres plaisanteries routières … Bref, on a bien rigolé, mais on a aussi beaucoup bossé !       

Fred Delforge – janvier/février 2019