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Ecrit par Fred Delforge |
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dimanche, 08 juillet 2018
Blues In Queyssac 2018
BLUES
IN QUEYSSAC
VILLAGE –
QUEYSSAC (24)
Du 6 au 7 juillet 2018
http://www.bluespourpre.fr
Pour sa deuxième édition, Blues In Queyssac a
choisi de mettre les petits plats dans les grands et de doubler la mise
en passant d’une seule soirée à deux.
C’est donc l’effervescence dans ce petit village du
Pécharmant qui a bloqué la circulation
dès le vendredi matin pour que tout le monde vaque
à ses occupations. La scène est en place, les
stands et le bar aussi, l’intendance s’affaire dans
la bonne humeur et chacun prend ses marques en attendant le grand rush.
Une soixantaine de bénévoles pour faire tourner
une manifestation d’une telle ampleur n’est pas de
trop, d’autant que rien n’est laissé au
hasard et que de la restauration à la décoration,
tout est absolument parfait ! Quand on vous dit que l’avenir
de la culture en France réside dans ces manifestations que
l’on taxe à tort de « petites
» parce qu’elles ont lieu dans de petits villages
…
vendredi 6 juillet 2018 :
Organiser la finale du Challenge Blues Français est un
évènement en soi puisque ce sont six groupes qui
vont concourir pour obtenir deux places pour l’International
Blues Challenge à Memphis et une place pour
l’European Blues Challenge qui se déroulera aux
Açores en 2019. Mais plus que les prix à
remporter, le véritable challenge est
l’organisation d’une telle manifestation qui
demande pas loin d’une année de
préparation et quelques tracasseries à
régler du premier jusqu’au dernier jour.
C’est donc sous l’œil avisé
d’un jury composé de spécialistes mais
aussi d’un public conséquent que les six
formations vont se produire dans un ordre tiré au sort
à la dernière minute. Et quand bien
même l’enjeu est de taille, c’est dans la
bonne humeur que les six groupes fêteront ensemble la
qualification de l’équipe de France en demi-finale
de la Coupe du Monde de Football face à l’Uruguay.
Toutes ces considérations footbalistiques
achevées, c’est après avoir
dégusté un jambalaya que nous commencerons la
soirée avec Ronan Onemanband qui va nous servir son bon
blues à l’ancienne à la force de ses
guitares et de ses harmonicas mais aussi de sa grosse voix bien
rugueuse, une voix de bluesman comme on les aime. Sincère et
intègre, Ronan va nous régaler de ses belles
notes et de ses bons mots, des mots que ce vrai timide qui se soigne
distille avec beaucoup de savoir-faire et surtout avec beaucoup de
convivialité. En proposant ce soir une prestation de
très bonne facture, Ronan a confirmé devant un
public réceptif qu’il avait sa place dans le haut
du panier de la scène blues nationale et
européenne. Nous n’en avions de toute
façon pas douté un seul instant !
On continue avec The Madest Boogie Revue qui va nous proposer un show
construit et plein de saveur, un de ces shows qui vous donnent la
banane tant ils sont spontanés et sincères. Pas
de grande surprise quand on voit que le duo est composé de
deux pointures, Mister Mat à la guitare, au chant
et
à l’harmonica et son acolyte Denis
à la batterie et au washboard. Sans la moindre faiblesse et
avec la simplicité qu’on leur connait, les deux
compères vont nous servir ce soir un set qui ne manquera pas
de réjouir les spectateurs. Il faudrait être
difficile pour ne pas craquer quand on a un tel groupe en face de soi
et le public de Queyssac ne s’y est pas trompé,
c’est certain !
On entre dans la catégorie groupes avec Daddy MT &
The Matches qui va nous servir un concentré de Chicago Blues
qui ferait pâlir les meilleurs spécialistes du
genre. Les guitares bien en ligne et la voix assurée, les
Rhodaniens vont venir nous mettre des accents de la Windy City dans un
blues qui ne manque ni de jus, ni de saveur, ni
d’énergie, un blues qui vous retourne et qui vous
prends aux tripes avec une sincérité qui ne
trompe pas. Du grand art proposé par un groupe qui ne triche
pas et qui donne du plaisir avec une
générosité sans faille à
une assistance qui ne boude pas son plaisir. La soirée est
bien lancée et c’est pour le plus grand bonheur du
public !
On poursuit avec le Fred Cruveiller Blues Band qui nous
régale en trio d’un blues plein de nuances et de
slide, un blues qui flirte avec le Mississippi et toutes les rives
d’un fleuve qui va très loin dans la gamme du
blues, pardon des blues. Ambitieux, le trio ne manquera pas de
l’être et nous gratifiera même
d’un « Natural Blues » fort bienvenu, un
titre devenu un des classiques du groupe depuis belle lurette mais
qu’il fait toujours plaisir de retrouver sur les concerts
tant il est réapproprié avec intelligence et
talent. Le public acquiesce et c’est un très bon
signe pour le niveau global de la soirée
!
C’est maintenant à Elise & The Sugar
Sweets de venir faire montre de ce que la nouvelle scène
française est capable de proposer, surtout quand elle est
supportée par une section rythmique
expérimentée et par un groupe qui ne manque pas
d’arguments pour convaincre. Encore un peu jeune,
Elise a déjà des capacités vocales
impressionnantes et il y a fort à parier qu’elle
va les développer au fil des ans et des concerts qui ne
manqueront pas de tomber dans l’escarcelle d’un
groupe au grand potentiel. Visiblement, là encore le public
semble y avoir trouvé son compte et les quelques centaines
de spectateurs présentes ont su montrer leur satisfaction.
On termine avec Rumble2jungle, sans aucun doute le groupe le plus
structuré et le plus professionnel de la soirée,
qui va nous servir un show très construit et sans faille.
Emmené par une chanteuse au charisme imposant, le combo ne
va pas ménager ses ardeurs et nous offrir un set
énergique et bien dosé, donnant son maximum
à une assistance qui en fera un des coups de cœur
de la soirée. On ne pouvait imaginer mieux comme final qui
fera l’effet d’un feu d’artifice sur un
public visiblement enchanté de sa soirée. On le
serait à moins !
Le temps de délibérer, Joël Poupeau fera
quelques démonstrations avec ses cigar box guitars et les
résultats tomberont bientôt avec
l’histoire qui retiendra que les concurrents de
l’International Blues Challenge 2019 sont Ronan Onemanband en
catégorie solo/duo et Fred Cruveiller Blues Band en
catégorie groupes. Les deux gagnants s’envoleront
pour Memphis en janvier prochain tandis qu’Elise &
The Sugar Sweets s’en iront pour leur part participer
à l’European Blues Challenge aux Açores
en avril 2019.
Il est maintenant temps de profiter du sommeil du juste en attendant
une seconde soirée de festival qui s’annonce
d’ores et déjà très chaude !
Samedi 7 juillet 2018 :
On retrouve Queyssac en début
d’après-midi et c’est
l’occasion d’aller faire un tour à la
bien nommée Maison des Artistes où l’on
peut découvrir trois expositions, deux de photographies et
une troisième qui va nous toucher tout
particulièrement puisque c’est un carnet de voyage
dessiné et illustré par Nelly Faure qui,
à partir des souvenirs évoqués par un
des voyageurs du projet « Mississippi Terre de Blues
», a réussi à trouver
l’essence même de cet endroit cher à nos
cœurs et à en ressortir quelques œuvres
pleines de sensibilité et surtout d’âme.
Autant dire que l’émotion liée
à la rencontre et à la découverte de
l’œuvre était bien plus que palpable !
Le temps de faire honneur aux aiguillettes de canard et nous
voilà face à Mr Bo Weavil qui va nous offrir une
des prestations dont il a le secret, un mélange de blues
roots et de blues moderne avec des boucles, de l’harmonica et
surtout une voix superbe et une guitare qui ne l’est pas
moins. Une pointe de hip hop, une touche d’afro, beaucoup de
feeling et des rythmiques lancinantes à souhait, Mat
n’aura pas beaucoup de mal à nous prouver par
l’exemple que si Ben Harper le considère comme une
des références de l’hexagone, ce
n’est pas par hasard. Avec un concert à classer
parmi les meilleurs de la saison pour sa
spontanéité, pour sa
sincérité et pour son
élégance, Mr Bo Weavil aura placé ce
soir la barre très haute et aura surtout rappelé
que ce n’est pas parce que l’entrée
d’un festival est à 5 Euros que le programme
n’est pas de très grande qualité. La
foule qui garnit la pelouse de Queyssac ce soir en est la plus belle
preuve !
On va continuer de fort belle manière avec un des gagnants
du 5ème Challenge Blues Français puisque
c’est maintenant le Fred Cruveiller Blues Band qui
s’y colle pour le plus grand plaisir d’une
assistance qui mesure sa chance de découvrir un groupe
quelques mois avant son envol pour Memphis où il
représentera le blues français.
Véritable machine à groove, le trio va nous
emmener dans un monde où la guitare est reine mais
où les autres instruments ne sont pas en reste, loin
s’en faut, un monde où l’on propose des
compositions bien senties mais où les reprises sont parfois
bienvenues, surtout quand elles mettent à
l’honneur des bluesmen aussi talentueux que Buddy Guy ou
Robert Johnson par exemple. La voix assurée, Fred Cruveiller
va tenir sa soirée avec l’assurance des meilleurs,
soutenu il faut le reconnaitre par un Laurent Basso
irréprochable à la basse et par un Eric Petznic
exceptionnel à la batterie. Ce 2ème Blues In
Queyssac tient décidément toutes ses promesses et
entre les fumets de canard et les belles notes de blues, il y a
vraiment de quoi se régaler !
On quitte le rouleau compresseur de Fred Cruveiller Blues Band pour
mieux retrouver le bulldozer Cotton Belly’s, signe des temps
puisque les futurs candidats à l’International
Blues Challenge de 2017 cèdent la place à ceux de
2017 qui avaient atteint la demi-finale lors d’une prestation
d’anthologie au B.B. King’s Blues Club de Beale
Street. Fidèle à lui-même avec un son
énorme, le quartet parisien va nous envoyer une grosse
bombinette pleine de guitares, d’harmonicas et de chant, le
tout non pas porté par une section rythmique mais bel et
bien par un métronome humain, une hydre à deux
têtes avec d’un côté la
resplendissante Aurélie à la batterie et de
l’autre l’incroyable Kiki à la basse, un
dérivé de Dr. Jekyll & Mr Hyde aussi
simple et agréable à la ville que
dévastateur à la scène. Cotton
Belly’s en live, c’est du bonheur, du fun et de la
sueur, mais pas celle qui sent mauvais à la fin de la
soirée, juste celle qui vous apporte une moiteur
légitime et qui vous permet de vous souvenir d’un
moment d’exception qui se mérite car il
n’est pas donné à tout le monde.
Comment dire que l’on est fier de connaitre ce groupe depuis
10 ou 15 ans et d’avoir autant de choses à
partager avec lui ?
Ainsi s’achève la seconde édition de
Blues In Queyssac, une édition … comment dire ?
Exceptionnelle ? Magique ?
Supercalifragilisticexpidélilicieuse ? Ou tout simplement
digne d’un grand festival de blues 100% français
qui se déroule dans un petit village où plus de
60 personnes sont prêtes à se bouger le popotin
pour que ça existe et pour que ça vive ! Point de
gloire personnelle là-dedans, pas de pensées
mercantiles ni d’ambition égocentrique, juste une
véritable envie de partager une musique qui
n’appartient à personne avec des anonymes qui
n’ont pas pour prétention d’en
détenir les clés. Pour ça, et pour
tout le reste aussi, pour avoir eu l’audace de relever le
défi … Merci à vous les amis !
Fred Delforge
– juillet 2018
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