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Ecrit par Aline Meyer & Yann Charles |
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jeudi, 07 juin 2018
ZEAL
& ARDOR
https://www.zealandardor.com
Une interview avec Manuel Gagneux de Zeal & Ardor, c'est une
rencontre comme on en fait rarement. Une rencontre avec un artiste
atypique, voir étrange et même flippant quand on
écoute sa musique. Une musique inclassable, destroy,
où l'on retrouve de multiples inspirations et sources
musicales. On crie soit au génie, soit « qu'est-ce
que c'est que ça !?! »". En tout cas, il ne laisse
personne indifférent. Un second album, « Stranger
Fruit », et un passage par le Hellfest cet
été nous ont donné envie d'en savoir
plus sur le bonhomme.
Tout d'abord, vous avez
joué au Printemps de Bourges il y a quelques jours. Vous
saviez que c'était la première fois qu'un groupe
de metal jouait dans ce festival ?
Ah je ne savais pas !! (NDLR
: en nous on savait que non puisque Machine Head y avait fait la
première partie de Trust en 1997)
Comment avez-vous
ressenti l'accueil du public ? Et comment cela s'est-il
passé de votre côté ?
J'ai joué sur une scène où il y avait
pas mal de groupes tendance punk donc il n'y avait pas une grosse
différence en matière de style musical. En plus,
le Printemps de Bourges et son public sont assez ouverts d'esprit donc
l'accueil a été chaleureux. Ça aurait
pu être bien pire (rires).
Vous jouez habituellement
dans de plus petites salles, que préférez-vous ?
Ces grandes scènes ou les spectacles plus petits et plus
intimes ?
J'aime bien les salles "intermédiaires", ni trop grandes, ni
trop petites. A Bourges par exemple, la scène
était comme celle que j'aime bien. Si la scène
est trop grande, tu as du mal à te rendre compte du nombre
de spectateurs et donc c'est difficile de créer des liens
comme tu peux le faire avec des endroits plus petits. Bourges est
vraiment la scène idéale.
Le nouvel album s'appelle
« Stranger Fruit ». Pourquoi avez-vous choisi ce
nom ?
L'album s'appelle « Stranger Fruit » à
cause d'une chanson de Billy Holiday. La chanson s'appelle «
Strange Fruit » et elle parle de ses étranges
fruits qui pendent des arbres, un peu comme des gens qui sont
décédés de la même
manière durant les années noires de l'esclavage.
Lors d'une rencontre
précédente, pour la sortie de « Devil
is Fine », j'avais vu cet album comme un projet unique.
Comment avez-vous réussi à écrire de
nouvelles choses avec le même esprit et le même
thème ?
J'ai écrit la plupart des chansons de cet album avant de
partir en tournée avec l'album
précédent car ce dernier était court
et donc nous n'avions pas assez de chansons pour faire un set sur
scène. « Devil is Fine » ne fait qu'une
vingtaine de minutes sur la scène. Donc difficile de faire
un concert avec seulement vingt minutes de chansons !! Du coup j'ai
écrit environ 60% de l'album qui allait devenir «
Stranger Fruit » avant de partir en tournée, pour
avoir de quoi jouer un vrai concert. Quant au dernier 40%, overdose de
café, et pas beaucoup dormir et écrire,
écrire et encore écrire … (Rires)
Cet album est-il une
continuation de « Devil is Fine » ?
Oui, c'est exactement ça. Ils partagent le même
univers, la même inspiration, « Stranger Fruit
» est vraiment dans la continuité de «
Devil is Fine », oui.
C'est un nouvel album,
comme vous l'expliquez, mais ce n'est pas un problème
nouveau. Mais il semble que les gens s'en soucient plus que jamais. Et
comme pour la religion, c'est presque une question de
société. Cela ressemble à du "mal
incarné", comment vous sentez-vous à ce sujet ?
Je ne pense pas que ce soit un problème de religion, mais
plus un problème de société
effectivement. Sur ce nouvel album, j'ai voulu faire un
parallèle avec l'histoire et ce qu'il s'est passé
aux Etats Unis il y a 100 ans et les problèmes toujours aux
Etats Unis, mais de nos jours avec l'accession au pouvoir de Donald
Trump. Ce n'est pas uniquement une question de
ségrégation raciale, mais surtout de
ségrégation sociale vis à vis des
pauvres, et pas seulement des Blacks.
Pour vous, tout est venu
d'une sorte de pari, comment obtenez-vous toujours cette inspiration ?
Ce projet est parti d'un "défi" qui m'a
été lancé. Mais maintenant, je ne
cherche pas l'inspiration à tout prix. Je ne
réfléchis pas qu'à ça en
fait. Plus tu réfléchis, plus tu te prends la
tête et moins tu es productif. Par contre, dès que
l'inspiration est là, overdose de café, et tu
écris tant que tu peux !!
On dit
généralement que l'âme d'un musicien se
reflète dans sa musique ? Êtes-vous si
torturé ?
(Rires).
Non, généralement je suis quelqu'un de
plutôt joyeux et enthousiaste !! En fait la musique est
plutôt un exutoire. Quand je ne me sens pas bien,
j'écris et toutes mes mauvaises ondes ou mes
idées noires partent dans ma musique. Et cela me permet
ensuite de me sentir mieux et de retrouver ma joie de vivre. Ma musique
reflète la partie sombre de mon être et mon
âme. C'est un processus assez "cathartique".
La dernière
fois que nous avons parlé, vous m'avez dit à quel
point le processus d'enregistrement était important. Est-ce
plus "traditionnel" cette fois-ci, ou êtes-vous
retourné dans votre garage ?
Cette fois ci j'ai été beaucoup plus
"traditionnel". J'avais plus de temps, plus de budget, donc j'ai pu
travailler avec un producteur dans un vrai studio (Rires) et non pas
dans mon garage. Et finalement, ce n'est pas plus mal comme
ça. Sur le premier album, même si
c'était très bien le travail dans le garage avec
un son qui m'était propre, que j'avais fait tout seul, cela
ne restait qu'un son de démo finalement, même si
c'était bon. Tandis que cette fois ci, c'est plus
professionnel, avec un producteur et des ingés son qui ont
bossé sur l'album avec moi. Le résultat est tout
autre forcément.
Cet album est-il un "concept"
que vous avez mûri avec le temps ?
Oui. Ca a mûri avec le temps. Il se trouve justement que j'en
avais plus, du temps. Donc j'ai pu y réfléchir
plus longuement, argumenter pour savoir ce que j'allais dire et
écrire. Ce ne sont pas simplement des chansons mises les
unes à la suite des autres, mais il y a un fil conducteur,
une narration qui se poursuit tout au long de cet album.
On peut donc supposer
qu'une suite et un troisième album puisse voir le jour ?
Tout dépendra de l'accueil du public pour ce nouvel album.
Si les gens l'aiment, pourquoi ne pas en faire un troisième.
Pensez-vous que le black
metal est l'évolution moderne du gospel ou du blues,
condamnant les excès tels que le racisme,
l'extrémisme religieux, etc. ?
Dans un sens oui, tu as raison. Au départ effectivement il y
avait le blues et le gospel, puis le rock’n’roll et
le hard rock. Et enfin le heavy, et ses
dérivés metal comme le death ou black, etc. La
boucle est bouclée. Tous ces styles de musique ont ou
dénoncent encore l'extrémisme quels qu'ils
soient. C'est une sorte de "poing levé" pour
dénoncer tout ça tout simplement.
Vous écrivez
tout seul, et vous jouez tous les instruments de l'album, mais comment
faites-vous sur scène ? Utilisez-vous des samples sur
scène ?
En concert et sur scène je suis avec des amis qui jouent
avec moi et qui viennent m'aider, mais par contre, effectivement,
lorsque je suis en studio je joue tous les instruments, sauf la
batterie. Le batteur qui joue avec moi sur scène a
également participé au travail en studio. Il
s'appelle Marco, et c'est un super bon batteur.
Pourriez-vous
décrire Zeal & Ardour en seulement deux ou trois
mots ?
(Temps de
réflexion) Enervé, à
fleur de peau, fun.
Avant de se quitter,
peux-tu nous dire quel est le dernier album que tu as
écouté ?
The Ooz : « The King Krule »
Merci pour cette
interview !
Merci à vous.
Propos recueillis par
Yann Charles et Aline Meyer
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