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RENDEZ-VOUS DE L'ERDRE 2017 à NANTES (44) pdf print E-mail
Ecrit par Fred Delforge  
lundi, 04 septembre 2017
 

Erdre 2017 LES RENDEZ-VOUS DE L’ERDRE
NANTES (44)
Du 1er au 3 septembre 2017

http://www.rendezvouserdre.com  

Si l’édition 2016 avait été exceptionnelle ne serait-ce que parce que c’était la trentième, ce nouveau cru des Rendez-Vous de l’Erdre annonce un nouveau départ dans l’histoire de ce qui est le plus grand festival de jazz gratuit de France ! Nouveau graphiste pour l’affiche qui du coup se veut plus moderne, nouvel espace coordination plus au « cœur » du festival avec toujours des endroits réservés à la détente des bénévoles et des artistes … Et puis bien entendu quelques nouvelles têtes dans le jury du Tremplin Blues qui, au fil des ans, est en train de devenir la référence en France tant par la qualité des candidats qu’il propose que par les conditions de jeu qui leur sont offertes ! C’est donc l’esprit heureux et détendu que nous abordons ces trois jours d’un marathon musical mais aussi convivial.
    
Vendredi 1er septembre :

On retrouve « notre » scène blues tant appréciée mais aussi son équipe technique de choc et même un public dans lequel se pressent quelques têtes connues … Et la bonne surprise, c’est que dès le premier soir on ne peut plus faire un pas devant la scène tant la foule est compacte. Un signal fort pour Jakez & The Jacks, les gagnants du Tremplin Blues 2016 qui viennent nous démontrer à quel point cette année écoulée aura été bénéfique pour eux. Un jeu inspiré de leurs idoles qui ont pour point commun un style très Chicago Blues, de Buddy Guy à Otis Rush en passant bien évidemment par Muddy Waters, un style totalement débridé qui laisse énormément de place à la voix de Jakez tout en s’appuyant sur une paire de guitares qui a  trouvé sa cohésion, le jeune groupe encore un peu fébrile que nous avions vu l’an dernier a pris de l’envergure et il est bien décidé à le démontrer en vous offrant un set qui va littéralement mettre le feu à la scène blues. Un groupe nantais plein de talent et de belles choses à proposer … A voir et à revoir donc !  

On attendait ce soir Dr Dee en compagnie des Bad Mules et il n’en sera rien, on le regrette bien entendu car ce chanteur à la voix exceptionnelle que nous avions rencontré un soir de jam à Jackson, Mississippi, possède un charisme tout particulier et que le revoir dix-huit mois plus tard aurait été un réel plaisir … Et à la place nous aurons un autre artiste au charisme impressionnant, le guitariste Josh Miller qui apporte son aura et sa présence à un groupe qui a fait ses preuves depuis belle lurette dans les plus grands festivals internationaux mais aussi à l’International Blues Challenge à Memphis en 2016. Emmené par ses deux leaders fondateurs, le guitariste et chanteur Julien Boissand et le batteur et chanteur Denis Agenet, le groupe s’appuiera ce soir sur le saxophone virevoltant de Caroline Thomas et sur les ivoires toujours aussi subtils de Cédric Le Goff pour nous emmener faire un grand voyage en terre de swing, de soul, de blues et de rock’n’roll.

En quelques huit centaines de concerts, les Bad Mules ont acquis plus qu’une simple aisance et une belle cohésion, ils sont devenus une sorte d’hydre à deux têtes que rien ne parvient à déstabiliser et en plus de leur musique qui est forcément le liant de leur relation avec le public, c’est un véritable sentiment d’amitié sincère et de très grande complicité qui se dégage de la scène et qui rend ce groupe non seulement excellent mais aussi et surtout très sympathique. Alors forcément, quand on leur associe un bluesman de talent comme celui qui nous arrive ce soir de Cocoa Beach en Floride, cela ne peut que donner des moments d’une rare intensité et surtout des trésors de blues. Difficile pour ceux qui ont assisté à ce concert de Josh Miller et des Bad Mules de ne pas avoir été totalement séduits !

Il est déjà près de minuit quand nous remontons l’Erdre en direction de l’hôtel et si la fête continue de battre son plein dans la ville, il n’y a plus de musique, que ce soit sur la scène nautique ou sur les scènes avoisinantes … Il y a bien un pianiste qui joue au Coq en Pâte et quelques clients qui chantent à ses côtés, mais pas de quoi nous retenir plus que le temps d’un dernier verre entre amis. Demain, les choses sérieuses commenceront avec les trois premiers groupes du Tremplin Blues … Il faudra alors ouvrir l’œil, et le bon !

Samedi 2 septembre :

Comment mieux commencer la journée qu’en retrouvant les amis et en allant se promener sur l’eau ? C’est donc à l’embarcadère qu’une poignée de happy few se retrouve pour s’installer sur la Luce et remonter le long de l’Erdre en découvrant au passage l’architecture nantaise mais aussi l’histoire de l’Ile de Versailles et les anecdotes sur les différents ponts qui enjambent cette rivière d’un peu moins d’une centaine de kilomètres de long qui autrefois présentait des intérêts commerciaux délaissés depuis pour devenir aujourd’hui un endroit dédié au tourisme et aux activités nautiques. Un verre de Muscadet à la main, nous croiserons ainsi nombre de plaisanciers mais aussi de sportifs à l’entrainement avant d’apercevoir en cours de route un héron cendré perché dans un arbre. Une manière de ne pas oublier que les Rendez-Vous de l’Erdre ne sont pas seulement un festival de musique mais que leur programmation comporte également une grande partie construite autour de la belle plaisance.

Le temps de la traditionnelle dégustation d’huitres avec les membres du jury et il faudra bientôt se retrouver devant la scène blues pour y découvrir le premier groupe du Tremplin Blues 2017, The Bar Room Preachers, formation nantaise qui vient nous mettre dans le bain avec un set construit autour de reprises soigneusement choisies et intelligemment interprétées. De Muddy Waters à Charlie Musselwhite, le quartet nous fera voyager en musique à travers les Etats Unis en partant de Chicago pour s’en aller faire un tour au Texas en passant par le Delta, le tout au son d’une guitare qui fait plus qu’assurer le coup et d’un harmonica qui habille carrément bien les morceaux. En une cinquantaine de minutes, The Bar Room Preachers aura réussi à faire le tour de la question, et de belle manière en plus !

On file maintenant du côté de Douarnenez d’où nous viennent The Beanshakers, un quintet qui entend nous proposer un mélange de « Blues, Rhythm’n’Blues and other good stuff » et qui s’y prend plutôt bien en dévoilant d’entrée de jeu deux compositions pas piquées des vers. Un harmonica qui ne fait pas que de la figuration et une contrebasse qui donne une couleur toute particulière aux morceaux, un jeu de guitare qui ne manque pas de saveur et une voix qui tient bien la distance, c’est en nous emmenant là encore du côté de Chicago que les Bretons nous présenteront le résultat d’un travail de fond fait à force de patience, d’apprentissage et d’écoute attentive de grands noms comme Muddy Waters mais aussi Buddy Guy et bien d’autres encore. Voilà une journée bien lancée et il n’y a rien de bien surprenant à constater que devant la scène, c’est l’affluence des grands jours !

Le troisième et dernier candidat est pour le moins original puisque The George Dyer Band est emmené par un frontman né en Californie qui, après avoir grandi en France, est aujourd’hui installé en Pologne ! Rien que là, on a déjà fait un sacré voyage que le groupe va nous proposer de continuer en musique en nous emmenant à la rencontre des héros du blues et du rock’n’roll. Puissant mais jamais violent, The George Dyer Band sait se faire désirer et si le groupe connaitra quelques petits soucis avec un ampli d’harmonica récalcitrant en début de set, l’intervention subtile de la super équipe technique de la scène blues remettra tout ça dans les rails pour permettre à tout le monde de poursuivre le chemin en compagnie d’un groupe qui cherche parfois un peu ses repères mais qui finit à chaque fois par les trouver. Projet d’un artiste plus que véritable projet de groupe, George Dyer aura toutefois réussi à donner le change !

Le temps de se restaurer mais aussi de retrouver les artistes derrière la scène où l’ambiance est particulièrement détendue et il va être l’heure de passer au gros morceau de la soirée avec non seulement Curtis Salgado mais aussi son guest, l’inénarrable Sax Gordon. Chanteur de soul parmi les plus intéressants, Curtis Salgado est un monstre sacré qui a entretenu une complicité toute particulière avec des artistes comme Robert Cray, Otis Rush, Albert Collins ou encore Bobby Blue Bland est c’est après une présentation musicale faite par un band de luxe où l’on reconnait forcément Anthony Stelmazsack à la guitare et Julien Brunetaud aux claviers que cette sommité maintes et maintes fois récompensée à Memphis va faire son entrée en scène. Et forcément, le charme opèrera instantanément, d’autant que le chanteur et harmoniciste va venir saluer la foule en Français !

Comment évoquer le show magique auquel nous aurons droit ce soir sans se répandre en superlatifs ? Comment décrire le plaisir palpable qui part de la scène pour se propager jusque très loin dans une foule compacte jusqu’au Pont Saint-Mihiel et bien plus encore ? Il suffit de remarquer la complicité qui s’est établie entre Kris Jefferson à la basse et Fabrice Bessouat à la batterie qui nous offrent une chape rythmique d’une rare solidité et de savoir que chacun des musiciens présent sur scène va jouer un jeu collectif en se mettant au service de tous les autres pour comprendre que l’instant sera magique avec un Curtis Salgado survolté et un Sax Gordon fidèle à lui-même, les deux génies passant leur temps à se regarder, à se répondre et en fait à ne rien faire d’autre que prendre énormément de plaisir tout en en rendant une grande partie à l’assistance. Rien ne pêchera ce soir et c’est soutenu par une paire de choristes où l’on retrouve Laurence Le Baccon et Julie Dumoulin que The Curtis Salgado Band nous offrira aujourd’hui le véritable grand show soul de l’année qu’il ne fallait absolument pas manquer !

Difficile de redescendre sur terre après une telle gifle musicale et quand bien même on l’a reçue plus que de bon cœur, il faudra un peu de temps et quelques moments de partage autour de boissons ambrées avant que l’on réussisse à rejoindre le monde des mortels, aidé il faut le reconnaitre par un jeune et talentueux musicien qui nous abreuvera de sa guitare en nous offrant, entre autres, un « Proud Mary » de très haut vol. Des journées comme celle-là semblent avoir bien plus de 24 heures tant elles sont riches et chargées en intensité !

Dimanche 3 septembre :

C’est par une dégustation des produits de nos amis viticulteurs de Château Guipière que va commencer cette ultime journée des Rendez-Vous de l’Erdre et du Gros Plant Nantais au Muscadet sur Lie en passant par des pétillants blancs mais aussi rosés, c’est tout l’éventail des saveurs de la région qui va se dévoiler à nous avant que les irréductibles ne traversent une nouvelle fois la rivière pour aller déguster quelques huitres avant le début du Tremplin. On en oubliera pour le coup le brunch du Canotier où se produisait Harvest pour rejoindre directement la scène blues et y retrouver le premier des trois candidats du jour …

C’est toujours un plaisir de retrouver le Flo Bauer Blues Project et le jeune Strasbourgeois accompagné de ses routiers au long cours va cet après-midi encore nous donner du grain à moudre avec des compositions bien senties, que ce soit en Français ou en Anglais, et avec un jeu fin et subtil comme on les aime. La guitare affutée et la voix bien posée, c’est dans un blues luxueux au possible avec un trait de Chicago et un autre bien à lui que ce jeune prodige va se mettre dans la poche un public déjà conséquent qui a osé quitter son repas dominical et braver la pluie pour venir écouter du blues. Quand on vous dit que la relation entre Nantes et sa scène blues à quelque chose d’unique … Il faut l’avoir vécu pour le comprendre !

On continue très vite avec Elise & The Sugar Sweets et ce sont des trombes d’eau qui viennent accueillir le groupe parisien qui ne se démonte pas et qui envoie comme si de rien n’était. Des compositions recherchées mais aussi quelques relectures dont un emprunt à John Nemeth, c’est en mettant les petits plats dans les grands que le groupe va essayer de charmer son monde et si tout n’est pas encore parfait, on sent déjà tout le potentiel d’une formation encore un peu jeune qui va véritablement trouver ses repères d’ici très peu de temps. En attendant, c’est un bon blues teinté de Chicago et emmené par le charme d’une jeune chanteuse pleine de sensualité que le groupe nous servira, s’attirant au passage la sympathie d’un public qui n’en démord pas et qui reste stoïque malgré une pluie persistante. Le charme a agi, c’est certain ! 

On sent que les délibérations vont être ardues et ce n’est pas l’arrivée des Anglais de The Big Sets qui va arranger les choses puisque le groupe va nous envoyer dans les cordes à grands coups de blues, de funk, de soul et de rock. Si la voix est perfectible, au moins le chanteur a-t-il l’intelligence de rester dans un registre qu’il maitrise parfaitement et c’est sans sourciller que ces bêtes de scène vont dérouler le tapis rouge devant une assistance qui plie encore et encore, mais sans jamais rompre. Là aussi, c’est en bravant les éléments que le public va manifester son plaisir, et il ne faut pas être un grand mage pour voir à quel point ce plaisir est immense. La cinquantaine de minutes de set écoulée, c’est à regret que le groupe prendra congé d’une assistance qui manifestement en aurait bien repris un peu.

Le temps de délibérer et le jury montera sur scène remettre les prix aux Lauréats et dans le désordre, The Beanshakers recevra le 3ème prix mais aussi les prix Collectif des Radios Blues et Soul Bag. En deuxième position, Elise & The Sugar Sweets recevra également les prix Montfort Blues Festival, So Blues Festival, Scène Caussimon Tremblay et France Blues. Grands vainqueurs du Tremplin 2017, The Big Sets repartiront enfin avec les prix Bain de Blues et Blues sur Suresnes, autant de récompenses qui salueront trois groupes qui étaient ce week-end au-dessus du lot, même si les autres n’ont pas démérité le moins du monde !

L’heure du retour a sonnée mais nous ne nous résoudrons pas à quitter la scène blues sans avoir goûté à une petite heure du concert de Stagger Lee et si les Nantais mettront littéralement le feu, emmenés par un Arnaud Fradin des grands soirs, la présence backstage de Curtis Salgado et de Sax Gordon prêtait à penser que tout cela allait se terminer en jam. Malheureusement, les trains n’attendent pas et il nous faudra quitter les lieux avant que quoi que ce soit ne se produise. Il ne reste plus qu’à remercier nos hôtes de l’Association Culturelle de l’Eté et toute l’équipe du Tremplin Blues qui comme chaque année a encore réussi à nous concocter un évènement à la hauteur de sa réputation, et qui plus est dans un environnement magnifique. Le rendez-vous est déjà pris pour 2018 !

Fred Delforge – septembre 2017