|
|
|
|
|
Ecrit par Yann Charles |
|
|
samedi, 26 août 2017
MALEMORT
http://www.malemort.online/
J'ai découvert Malemort l'an dernier au Raismes Fest, et
lorsque j'ai écouté leur dernier album,
« Ball Trap », j'ai voulu en savoir plus sur le
groupe et son histoire. Et l'occasion de les voir sur scène
avec ce nouvel opus s'est présentée cet
été au Gibus à Paris en ouverture de
Crowbar. Une rencontre bien sympathique avec Xavier, le chanteur du
groupe qui nous parle de Malemort
Salut Xavier, on va se tutoyer ?
Salut. Oui bien sûr ce sera plus sympa.
Parle nous de Malemort,
depuis quand le groupe existe ? Quelle est son histoire ?
Malemort a débuté il y a six ans et un premier
album est sorti il y a quatre ans. Je revenais vers le metal
après une incursion dans le rock. Ayant toujours
été métaleux, je suis allé
vers d'autres musiques car avec le metal tu tournes toujours un peu en
rond, et là ça m'a permis de découvrir
d'autres choses et surtout je savais pourquoi je revenais et ce que je
voulais faire, comme chanter en Français par exemple, ce qui
ne se fait quasiment plus dans le metal. Je savais comment le faire car
dans le rock on a des chants en Français mais dans le metal
je n'avais pas trop de références. Et surtout je
voulais faire un metal fruit de diverses influences et ne pas
m'inscrire dans une chapelle.
Vous avez dès
le début de Malemort décidé de chanter
en Français. C'était un choix risqué,
beaucoup de groupes chantent uniquement en Anglais. Pourquoi ce choix,
et pas de regret ?
Non, car dès le début je savais que ce serait un
des choix les plus importants. J'ai beaucoup chanté en
Anglais dans le metal, même dans le rock, et j'aime tellement
la langue française, et peut être le fait de
vieillir un peu, mais j'aime la musique qui peut être
accompagnée par des paroles qui peuvent être
poétiques et je ne maîtrise pas suffisamment la
langue anglaise pour arriver à des subtilités
poétiques. Et le Français, c'est ma langue, c'est
celle que j'aime, c'est celle que j'enseigne, celle de toutes mes
influences littéraires, donc ça ne pouvait pas
être autrement que de chanter en Français.
On parle de «
Ball-Trap », votre nouvel album, pourquoi ce titre ?
Alors, on est dans les années 20, entre deux guerres, La
France et l'Europe espèrent vivement que la guerre ne se
reproduira plus mais on sait bien que les germes de la suite sont dans
ces années là, même si y a une
expression artistique florissante, mais on sent que c'est vraiment les
derniers instants de totale liberté. Et « Ball
Trap » parce que c'est cette explosion en vol. Ce Paris qui
croit être ressuscité. Artistiquement il y avait
Montmartre qui affrontait Montparnasse dans des avant gardes
artistiques. Il y avait le début sur surréalisme.
Beaucoup d'Américains qui venaient en France car
c'était la prohibition aux Etats Unis et ont
emmené eux aussi leur liberté et leur
créativité. En Europe aussi, on vient
à Paris car justement il y a cette explosion de courants
artistiques. Mais, en regardant bien, toutes ces avant gardes
pressentent déjà ce qui se trament et toutes ces
nouvelles formes d'art sont inquiétantes.
C'est un album
scénarisé, quelle est la trame de cet album ?
La trame de l'album, c'est un jeune homme qui n'a pas connu la
première guerre mondiale et qui comme toute sa
génération a envie de créer, a soif de
faire et de s'amuser alors que du côté des parents
on est plus dans le recueillement, la célébration
des morts. Et cette génération va vite se
retrouver face à la réalité.
Les textes sont
plutôt noirs, en plus on peut les interpréter
différemment en fonction de ce qu'on ressent, comme titre
final par exemple, c'est ce que tu as voulu faire ressentir aux travers
des textes ?
Si tu prends l'histoire telle que je l'ai imaginée, le
dernier morceau, c'est le départ de ce jeune homme. Il lui
arrive des tas de choses à Paris qui font qu'il ne peut plus
rester. Il a trop goûté aux dangers et son
échappatoire c'est la fuite vers l'Indochine qui est encore
française à cette époque
là. Et c'est pour ça qu'il y a un double
sentiment sur ce morceau : la joie de partir vers un ailleurs
où tu peux recréer quelque chose et une
inquiétude et une retenue car tu ne sais pas non plus ce
qu'il va devenir.
Tu as parlé de
metal libre, c'est parce que musicalement on retrouve beaucoup de
styles dans l'album ?
Oui c'est ça. C'est marrant parce qu'on nous dit souvent
qu'on est autant rock que metal. Mais toutes les fondations de Malemort
sont très metal, mais effectivement je lui injecte la notion
de chansons. On fait des chansons, pas des morceaux. Et je tiens
beaucoup à ça. Pour moi, une bonne chanson,
qu'elle soit en prog, death ou pop, il faut qu'elle ait de bons
couplets et de bons refrains et si tu as ça, ta chanson
tiendra debout. Qu'elle fasse vingt minutes ou trois minutes.
Quand on regarde les deux
pochettes de vos albums, superbes d'ailleurs, on est dans un style
très années 20, 30, années folles, art
déco … Qui a eu l'idée de ces
pochettes ?
C'est moi. C'est une époque qui me touche
particulièrement.
C'est une époque
où tu aurais aimé vivre ?
Je ne sais pas si j'aurais aimé y vivre. Il s'y joue
beaucoup de choses et c'est les derniers instants où
l'Europe est totalement créative.
Tu peux faire presque
tout et n'importe quoi, tout est à créer et
à inventer ?
C'est ça. Les avant gardes avant la première
guerre mondiale et entre les deux guerres sont françaises.
Et c'est une période où il n'y avait pas de
frontières artistiques. Même les jazzmen
américains, qui faisaient une musique
révolutionnaire pour l'époque,
n'étaient jamais aussi bien accueillis qu'à
Paris. Et eux venaient à Paris car justement ils
étaient reconnus pour ce qu'ils étaient et ce
qu'ils valaient.
Vous travaillez comment
les morceaux, chacun apporte ou vous bossez en commun ?
Les compositions, c'est essentiellement moi qui les écris.
Le premier album c'était entièrement moi. Pour
celui ci, j'ai beaucoup travaillé avec Sébastien
Bernet qui joue les batteries sur l'album, mais qui est guitariste
maintenant. C'est un excellent compositeur mais plutôt de
progressif. Et on a travaillé sur mes couplets/refrains et
lui a beaucoup travaillé sur les arrangements, sur les
milieux de morceaux et deux chansons, dont l'instrumental, sont de lui.
Quatre ans pour sortir ce
nouvel album, plus concret, plus précis, plus mûr,
vous vous êtes servis de vos expériences de
scène pour donner un son plus pêchu sur cet opus ?
Oui. Quasiment tous les morceaux de l'album ont
été interprétés sur
scène avant même que l'album ne soit
enregistré.
A t il
été composé en pensant
scène ?
Alors, je me refuse à faire ça. Je trouve que le
metal le fait trop. En fait on connait tous les trucs qui font que les
gens vont bouger. Mais je crois que les grands groupes que l'on a
admirés ne pensaient pas comme ça. Je pense
qu'ils pensaient d'abord à la chanson. Est ce qu'elle est
belle, est ce qu'elle peut toucher les gens ? Et quand tu te mets
à ne faire que de l'efficace pour la scène, tu te
condamnes à ne tourner que sur des figures connues. Tu as
des groupes qui le font très bien. Tu les écoutes
sur album et ensuite sur scène et là tu prends
ton pied. Mais nous, on n'est pas dans ce registre là. Par
contre, par rapport au premier album, comme on a
interprété les morceaux sur scène
avant de les enregistrer, on ne s’est pas
gêné pour arranger ou réarranger
certains morceaux ou passages pour donner un plus d'énergie.
Comme ça le plaisir est double, sur l'album mais aussi sur
scène. Mais je pense que c'est une erreur de tout sacrifier
au côté efficacité car tu abandonnes
pleins de subtilités musicales que tu ne peux plus jouer. Et
finalement tu retombes sur ce que des tas d'autres groupes utilisent.
Est ce que tu peux
définir le groupe en deux ou trois mots ?
Oui. Metal, libre, grande sincérité et peu
importe ce que les gens diront.
Si vous aviez la
possibilité de jouer un morceau avec un artiste vivant ou
décédé, avec qui et quel morceau ?
Ah, elle est dure cette question. Je ne me suis jamais posé
cette question. Le cliché serait de dire Metallica car j'ai
toujours été fan. Mais des gars
créatifs comme Bowie ou Queen par exemple qui savent tout
faire. Ce serait plutôt avec des groupes qu'avec une personne
en particulier.
Dernière
question: quel est le dernier album que tu as
écouté ?
Justement on en parlait juste avant. Le dernier album de Bowie.
Là pour le coup, les métaleux qui aiment la
noirceur, ils sont servis ! Il faut s'y plonger. C'est glauquissime
à souhait ! Sinon il ya aussi Baroness, « Purple
» qui date un peu mais qui est excellent.
Merci Xavier
Merci à toi
Propos recueillis par
Yann Charles
|
|
|
|