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Ecrit par Yann Charles |
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lundi, 27 mars 2017
MATHIS
HAUG
http://mathishaug.com/fr/accueil/
Une rencontre avec un artiste atypique, Mathis Haug. Cet Allemand
d'origine, installé dans la région
nîmoise, nous régale avec ses albums aux
différentes saveurs musicales. Et avec son dernier et
très bon opus « Wild Country » (voir
chronique), il ne déroge pas à cette
règle. Blues, folk, un peu Jazz, il nous entraîne
une nouvelle fois dans son univers musical. Un artiste attachant que
nous avons rencontré.
Bonjour, pouvez-vous vous
présenter pour nos très rares lecteurs qui ne
vous connaitrez pas encore ?
Enchanté ! Mathis Robert Haug, né le 22 juin 1912
à Pforzheim, en Allemagne, (mais on me donne 40 ans !), Papa
de 3 enfants, et 3 chats à charge ! Pour nourrir ce beau
monde, je voyage en jouant de la musique depuis des années.
On va parler de votre
dernier album, « Wild Country », c'est la garrigue
nîmoise qui vous a inspiré pour le titre ?
Entres autres, j’ai eu la chance de grandir dans de grands
espaces entourés de grands pins en Forêt Noire ou
dans la garrigue dans le Sud de l’Ardèche, dans
mes deux pays sauvages.
Plus
sérieusement, ou avez-vous voulu nous emmener musicalement ?
On trouve de l'accordéon qui pourrait aussi bien
être d'Europe de l'Est mais aussi du Zydeco, des rythmes qui
passent par le blues certes, mais aussi le folk, le rock, et des
couleurs presque sud-américaines par moment ?
Bienvenue dans mon conservatoire mondial du grand bazar ! Au
départ l’idée était
d’enregistrer un disque de country, mais je dois bien
reconnaitre qu’avec un tel casting on n’allait pas
atterrir au Grand Ole Opry de Nashville, mais bon
c’était la trame de départ. Regis
Gizavo, accordéoniste malgache qui a joué avec la
terre entière, Nick Vaughan, un fiddler gallois, Stephan
Notari aux percussions, Mike Lattrell, le rock n’roller
américain et d’autres encore … Ce sont
eux qui m’ont aidé à rendre ce disque
très … « Mathissé
» ! Rapidement la country est devenue mexicaine, le blues a
couché avec un Allemand, la chanson française a
été chantée en Anglais,
l’Est a sonné à la porte avant la
fermeture, et du coup on a festoyé toute la nuit. A 5 heures
du matin je n’étais plus tout à fait le
même et j’ai laissé les survivants finir
les bouteilles, quelques filles dansaient encore, et ça,
c’est toujours bon signe !
Pourquoi avoir choisi de
chanter en Français, puis en Allemand ?
Parce qu’avec l’Anglais, ce sont les trois langues
que je pratique au quotidien. J’ai pour chacune
d’elles une histoire particulière :
L’Allemand, c’est ma langue maternelle, la langue
de mes premières années, la langue des souvenirs
d’enfance, celle que je parle avec ma famille et quelques
amis. Le Français ? Ma langue d’adoption et celle
de mes enfants … L’Anglais est ma langue musicale,
celle que j’ai apprise pour l’amour du rock, et
celle que je parle beaucoup en étant en tournée.
Il y a-t-il un message
à travers vos albums ?
Oui, et surtout dans « Wild Country », et il est
très clair : si l’on continue notre train de vie,
on va droit dans le mur !
Qu'est-ce qui vous a
inspiré pour les textes ? On vous sent un peu nostalgique,
ou plutôt un peu pessimiste sur les choses actuelles ?
J’ai collaboré avec plusieurs auteurs afin de
pouvoir débattre de nos idées et de confronter
nos points de vues. Cela a été très
intéressant de pouvoir écrire avec Sal Bernardi
qui est le compagnon de route de Rickie Lee Jones entre autres depuis
40 ans, Sebastian Danchin le réalisateur et
spécialiste des musiques américaines, Mathis
Cornet un jeune auteur de mon village. J'étais
très pessimiste, mes collaborateurs m’ont
redonné confiance en l’humain et son avenir, et
c’est tant mieux ! Mais comme dit une bonne amie : pour
changer quelque chose, il faut changer quelque chose ! Et
c’est là le plus difficile, car il nous faut
trouver l’énergie pour dire non au
système, sortir de cette léthargie,
s’inventer à nouveau, se reconstruire sur les
ruines du capitalisme. Nous sommes nombreux aujourd’hui
à en avoir conscience, mais je sens une grande peur du
changement car l’on va vers l’inconnu, la peur de
perdre notre confort, nos avantages, les repères de notre
société, et surtout peur de prendre notre vie en
main, et d’envoyer balader nos dirigeants.
Est-ce qu'on peut mettre
un titre en avant sur cet album ?
Oui ne vous privez pas, prenez celui qui vous fait plaisir et
prévenez moi lorsque vous aurez fait votre choix je suis
curieux. (Rires)
Musicalement,
où sont vos racines ? Ou puisez-vous vos idées ?
Les premières musiques, je les ai entendues et
pratiquées avec ma grand-mère qui jouait et
chantait des chansons folk allemandes, qui sont issues du
mélange des cultures françaises, russes,
tziganes, etc. J’ai retrouvé des
sonorités proches dans les musiques américaines,
certainement que les migrants allemands les avaient
emportées avec eux au 18ème siècle.
Adolescent, j’ai été très
touché par le blues, à
l’époque où il racontait encore de
vraies histoires, et c’est certainement le fil conducteur
dans ma musique. J’essaye de jouer de la musique qui danse et
qui balance, même dans mes ballades, et qui a
l’énergie du rock n’roll,
définitivement.
Quelles sont vos
références musicales ?
Je suis fan de pas mal de monde (voir la liste ci-dessous), mais je
n’essaie plus de faire comme eux depuis longtemps, car
j’en suis incapable la plupart du temps, et cela ne
m’intéresse pas de me rapprocher de la
sensibilité de tel ou tel musicien. J’admire, je
suis parfois ébloui par l’intensité et
le talent, et j’essaye de voir ce que je suis capable de
faire. Quand j’écoute, je pense que mes oreilles
et mon cerveau doivent sélectionner, classer,
répertorier, analyser toutes ces informations, afin de
m’en suggérer des bribes en temps de compositions
ou d’improvisations. J’ai appris à leur
faire confiance (au cerveau et aux oreilles) et notre collaboration
fonctionne bien. Pour les références qui me
viennent à l’esprit : Los Lobos, Big Bill Broonzy,
John Hammond Jr, Tom Waits, Dylan, Eric Bibb, Ami Di Franco, Jacques
Higelin, Louis Prima, The Staple Singers, Chris Whitley, la country,
The Rolling Stones, The Wood Brothers, Jimi Hendrix, Prince, Nina
Hagen, Serge Gainsbourg, le reggae, Duke Ellington, Skip James, la
musique des Touaregs, du Brésil, Joe Henry, The Latin
Playboys, The Blasters, Nina Simone, Ray Bonneville, Dick
Annegarn, B.B. King, le hip hop US, Son Cubain …
Combien de temps pour
écrire, composer et enregistrer cet album ?
Ca s’est étalé sur un an,
j’ai écrit un peu avant et pendant, il y a deux
périodes d’enregistrement en studio, et plusieurs
rendez-vous avec les co-auteurs.
On vous
présente comme "chanteur et auteur-compositeur de folk, jazz
et blues", ça vous convient ? Puisqu'en France il faut qu'on
mette des étiquettes sur les gens ? Personnellement je
rajouterais rock car vos sonorités se rapprochent bien du
rock par moment. D'ailleurs un album plus rock pourrait-il
être envisageable ?
Oui tout cela me parle, la note bleue est bien présente dans
ma musique, mais elle est dévergondée par le rock
et le vent du jazz l’envoie en l’air pour
qu’elle fasse sa vie ! En tout cas pour les personnes qui
aiment ces musiques, je pense qu’ils retrouveront ce
qu’ils aiment dans la mienne, en tous cas je les invite
à découvrir. Je dis souvent qu’il y a
autant de styles de blues et de jazz, qu’ils y a de bluesmen
et de jazzmen. Par rapport au rock, je réponds oui
à la probabilité d’enregistrer un album
plus rock. Cela fait vraiment partie mes envies et pour
l’instant je n’ai pas réussi
à capter mon énergie scénique et toute
cette inspiration spontanée sur un disque, j’ai
encore du travail ! Ma musique peut être même
très rock, et je l’ai
expérimenté sur scène pendant quatre
ans avec le batteur/percussionniste Stephan Notari : à deux
nous avons revisité mon répertoire et quelques
influences comme Nina Simone, le blues, etc., des rythmes latins,
africains, shuffle, avec le son et l’énergie du
rock, c’était très intense et sportif !
Ce nouvel album est-il
une continuité avec vos albums
précédents, ou une nouvelle étape ?
Pour moi c’est une définitivement une
continuité. Les disques me permettent
d’enregistrer une version qui se rapproche le plus de mon
idée de départ.
Avec ces arrangements,
ces instrumentations, on va sûrement vous retrouver sur les
scènes françaises … Avec quelles
formations ? En acoustique ou en formation complète
électrique ?
Oui et j’espère que les concerts seront nombreux !
Je tente en ce moment une nouvelle expérience en invitant un
musicien de grand talent au duo que nous avons depuis quelques
années avec Stephan Notari, le batteur/chanteur.
C’est Christophe Cravero qui va jouer avec nous aux claviers,
melodica, violon et alto. Cela me permet d’avoir un
instrument harmonique qui m’accompagne sur certaines
chansons, sur d’autres c’est moi qui joue la
guitare/basse et lui prendra le violon, parfois il joue trois
instruments dans la même chanson. Mais attention ce
n’est pas un tour de cirque comme on en voit beaucoup sur
YouTube, ce garçon est vraiment très à
l’aise, c’est fluide et naturel, je
n’envisage pas la musique autrement. Sinon je joue aussi avec
mon ami de longue date, le guitariste Benoit Nogaret, un duo tout en
simplicité : deux guitares et une voix. Ce type de formule
me permet de retourner aux sources de ma création et de
proposer mes chansons en version brute de pomme. Mais tu sais chez moi
tout se mélange, les sons, les instruments, les styles et
les répertoires, les formules, je trouve que ce serait
dommage de se priver de toutes ces belles musiques lorsqu’on
a la chance d’avoir à ses
côtés de grands musiciens qui savent jouer une
mazurka, une chanson créole et « Cortez The Killer
» de Neil Young. L’important c’est la
danse, et chez moi c’est un peu carnaval tous les soirs. (Rires)
Si vous aviez la
possibilité de partager la scène pour une chanson
avec un artiste, vivant ou non, vous choisiriez lequel ? Et pour quel
titre ?
« Shadrack » avec Louis Prima !
Une dernière
question qui n'a rien à voir avec les autres : quel est le
dernier album que vous avez écouté ?
« Music From The Revelator » de Gillian Welch et
Dave Rawlings
Merci beaucoup pour cette
interview !
C'est moi qui te remercie, au plaisir …
Propos recueillis par
Yann Charles
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