Ecrit par Fred Delforge |
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jeudi, 02 mars 2017
Migration blues
(Dixiefrog –
Harmonia Mundi – 2017)
Durée
48’12 – 15 Titres
http://www.ericbibb.com
http://www.bluesweb.com
S’il est incontestablement un songwriter parmi les plus
élégants et un artiste parmi les plus
appréciés de la scène contemporaine,
Eric Bibb n’en reste pas moins un troubadour à la
fois conscient et engagé et après avoir
inondé les bacs avec nombre d’albums plus
séduisants les uns que les autres, c’est un
véritable plaidoyer qu’il nous offre
aujourd’hui avec « Migration Blues », un
recueil de quinze pièces dont nombre d’originales
avec lesquelles il rappelle à chaque instant que
l’on est tous plus ou moins issus des flux migratoires, que
ce soit de celui parti de l’Afrique vers
l’Amérique du Nord, de celui des états
ruraux du Sud vers les villes industrielles du Nord ou encore plus
récemment de ceux des pays du Moyen-Orient et de
l’Afrique vers l’Europe.
Interprété majoritairement en trio avec JJ
Milteau aux harmonicas et Michael Jerome Brown aux guitares, parfois
rejoints par Olle Linder aux percussions ou encore par Big Daddy Wilson
et Ulrika Bibb aux voix, ce nouvel effort du chanteur et guitariste
nous invite à ouvrir nos cœurs et nos
âmes et à prendre conscience de la
réalité du monde qui nous entoure pour mieux
comprendre ce qui pousse les hommes à fuir la guerre, la
misère et la mort dans l’espoir d’une
terre plus accueillante ailleurs, loin de celle où ils ont
laissé leurs racines et une partie
d’eux-mêmes. Dépositaire de
l’héritage des premiers bluesmen, ceux qui avaient
été déracinés de force puis
asservis, Eric Bibb s’efforce de proposer une musique
à la fois simple et sincère, une musique qui se
contente de peu d’instrumentations mais qui mise tout sur les
arrangements pour que le résultat soit intense,
forçant sur ses intonations, sur quelques notes
déposées avec un soin tout particulier
… Lancinant, envoutant, « Migration Blues
» évoque autant les trains d’antan que
les radeaux de fortune d’aujourd’hui, en appelle
autant à l’attirance pour Chicago
qu’à la nécessité de fuir
Alep, et nous met au bout du compte les nerfs en pelote avec des titres
forts comme « Refugee Moan », «
Diegos’s Blues », « Four Years, No Rain
», « With A Dolla’ In My Pocket
» ou encore « Mornin’ Train »
et bien entendu avec ce « Masters Of War »
emprunté avec beaucoup d’intelligence à
Bob Dylan. Si on a l’habitude d’être
bouleversé par la musique d’Eric Bibb, il faudra
bien reconnaitre que cette fois l’artiste est allé
encore un peu plus loin … Indispensable !
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