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INTERNATIONAL BLUES CHALLENGE à MEMPHIS (USA) pdf print E-mail
Ecrit par Fred Delforge  
lundi, 06 février 2017
 

IBC 2017 INTERNATIONAL BLUES CHALLENGE
BEALE STREET – MEMPHIS (USA)
Du 31 janvier au 4 février 2017

http://www.blues.org    

Dans la foulée de l’expédition « En Terre de Blues » (voir ici) qui nous a emmenés à la découverte des racines du blues dans le Mississippi, nous abordons avec un réel plaisir ce nouvel International Blues Challenge, 33ème du nom, le grand évènement mondial qui rassemble chaque année plus de 250 groupes venus de toute la planète. Synonyme de retrouvailles avec tout ce que le blues compte d’amis, c’est également un endroit où tout le monde se retrouve autour d’une même passion et d’une même envie de faire vivre une musique qui rassemble autour de ses valeurs !

Mardi 31 janvier :

C’est par un petit déjeuner à Arcade Restaurant en compagnie du représentant de l’Office du Tourisme que nous commencerons la journée, autour d’un échange d’idées et de projets pour l’avenir. Difficile de refaire le monde en une heure mais ces rencontres matinales sont toujours une source d’inspiration et de partage, et c’est aussi l’occasion de se tenir informés de ce qui change dans la ville d’une année à l’autre. Un moment important donc, d’autant qu’il nous aura permis de faire la connaissance de Milton Howery, fraichement arrivé au poste de la communication du Visitors Bureau.

C’est ensuite un grand moment qui attend les groupes français puisque Vicious Steel et Cotton Belly’s vont avoir non seulement l’opportunité de rencontrer Lawrence ‘Boo’ Mitchell, Grammy Award en 2016 pour la chanson de l’année, mais aussi d’enregistrer sous sa direction. Si on sentait sur la route une certaine fébrilité chez les musiciens, le charme et les grandes qualités humaines du producteur ont très vite fait effet et après quatre heures passées à Royal Studios, c’est chacun avec deux titres dans la boite, mixage inclus, que nos Frenchys sont rentrés vers l’hôtel avec en prime quelques belles nuées d’étoiles dans les yeux ! Un moment privilégié dans une carrière que l’on imagine longue et fructueuse.

Pendant ce temps, nous profitions d’un détour technique aux Studios Stax pour y emprunter du matériel et pour faire découvrir le Stax Museum à ceux qui ne le connaissaient pas encore. Difficile, même pour les habitués, de rester insensible aux objets rassemblés dans ces mythiques studios transformés en musée, d’autant que chacune de nos visites nous permet de faire d’autres découvertes inédites. Des souvenirs de Booker T. & The M.G.’s à ceux de Rufus Thomas en passant par les guitares d’Albert King et la Cadillac d’Isaac Hayes, c’est un émerveillement permanent qui attend le visiteur dans chaque salle ! On soulignera également le film de présentation qui présente de fort belle manière la Soul et tous les styles dérivés …

Le temps de récupérer une partie du groupe et c’est au Four Ways que nous partirons déjeuner dans une ambiance exclusivement noire et avec au menu (le mardi et le vendredi) les fameux Chitlins, cette sorte de tripes faite à partir des intestins grêles de porc qui servait de nourriture aux bluesmen lors de leurs tournées des juke joint du pays, d’où le nom de « Chitlin’ Circuit » donné aux clubs les plus courus de l’époque. Et même si le service est un peu long, ce n’est qu’une raison de plus de profiter de la clientèle toujours très endimanchée, même le mardi, pour venir se repaitre des trésors de soul food que propose l’établissement. Une bonne adresse à conserver pour soi, histoire d’être certain la prochaine fois encore d’être les seuls Blancs parmi la clientèle !

On se précipite ensuite au Clayborn Temple, une église transformée en salle de spectacle, pour y assister au début de l’International Showcase de la Blues Foundation où les Cotton Belly’s auront la tâche ingrate d’assurer le premier show à 17 heures, et pour quinze minutes seulement. Pas démontés pour autant, Yann, Jérôme, Christophe et Aurélie puiseront dans le trop plein d’énergie et d’enthousiasme récupéré en studio ce matin pour envoyer un signal très fort à une assistance immédiatement séduite et littéralement sous le charme d’un groupe qui est très à l’aise dans ce genre d’exercice et qui compte bien le faire savoir. Il est loin le temps du jeune groupe un peu timide que nous avions découvert il y a une dizaine d’année et c’est aujourd’hui une véritable machine de guerre qui se présente à un public qui ne pourra qu’apprécier son talent !

Se résoudre à quitter l’International Showcase est d’autant plus compliqué que nous avons quelques amis qui vont s’y produire dans les heures qui viennent, mais nous avons reçu ce matin une invitation à nous rendre à une répétition de la Stax Academy, évènement rare qui nous autorise non seulement à pénétrer dans les locaux de l’Université mais aussi et surtout à y découvrir tout le talent de ces jeunes gens qui ont entre 15 et 17 ans et qui ont déjà tout des plus grands artistes. Après quelques morceaux instrumentaux interprétés avec un sens tout particulier du rythme et du groove, nous assisterons à l’arrivée des chanteurs et chanteuses sans vraiment savoir à quoi nous attendre …

Deux ou trois titres en chorale pour se mettre dans le ton et nous sommes déjà chargés d’émotion, mais c’est véritablement quand les démonstrations individuelles commenceront que le trop plein va finir par déborder avec quelques classiques de Stax bien entendu, mais aussi avec un énorme « Somebody To Love » emprunté à Queen et interprété avec tellement de ferveur et de foi que nous devrons sortir un instant pour essuyer quelques larmes et reprendre nos esprits ! La suite ne sera que pur bonheur car ces jeunes artistes qui ont bien capté notre émotion ne manqueront pas de jouer avec et de nous en donner plus et plus encore jusqu’à terminer la répétition par un clin d’œil avec une version du fameux « Uptown Funk » qui a valu son Grammy à Boo Mitchell … La boucle est bouclée et après tant de moments forts dans la même journée, nous pourrons nous permettre un peu de détente en attendant la suite !                    

C’est enfin au Blues City Café que nous nous retrouverons pour un premier showcase exceptionnel des Vicious Steel durant lequel Cyril et Antoine nous sortiront le grand jeu à grand renfort de leurs compositions, en Anglais mais aussi en Français, qui marqueront un public qui, s’il ne comprend pas forcément le sens de morceaux comme « Le centre d’achats », parvient à en retenir tout le feeling et toute l’énergie. Voilà un sacré point marqué par le tandem qui ne lâchera pas un pouce de terre pendant sa prestation, bien décidé à aller jusqu’au bout de l’aventure et à pousser ses pièces intelligemment sur un échiquier blues qui semble particulièrement ouvert à son jeu. A en croire les amis américains et canadiens présents ce soir, nous tenons là une formation capable de rivaliser avec les meilleures !     

Mercredi 1er février :

C’est dès l’aube que nous nous dirigeons vers les bords du Mississippi pour participer à une émission de télé durant laquelle les Vicious Steel interprèteront deux morceaux en compagnie de Yann Malek des Cotton Belly’s après avoir répondu à diverses questions au sujet de leurs influences mais aussi de leur aspirations et de leurs premières impressions dans la ville. Un très bon moment que les trois comparses utiliseront très judicieusement pour interpréter des compositions en Français, un exercice très apprécié ici si l’on en croit les réactions des spectateurs les jours précédents.

A peine le temps de recharger les batteries que l’on se retrouve déjà au Cozy Corner pour y déguster ce que les locaux considèrent comme les meilleurs BBQ Ribs de la région. Un moment privilégié durant lequel nous aurons la joie de partager la compagnie de Jay Sieleman, l’ancien Directeur de la Blues Foundation, mais aussi de John Nemeth venu céder à la tradition de cet établissement qui ne paie certes pas de mine mais qui accueille le public avec beaucoup de simplicité et de convivialité ! Encore un grand moment assez surprenant puisque c’est en nous voyant avec nos T-Shirts du Cahors Blues Festival que John Nemeth nous a reconnus et est venu spontanément se présenter et engager la conversation !     

Le planning des groupes étant désormais connu et nous laissant un peu de relâche jusque vers 18 heures, c’est vers le Sun Studio que nous nous dirigerons pour profiter de la visite de cet endroit culte de l’histoire du blues et du Rock’n’Roll. Quelques souvenirs de la grande époque de Sam Phillips, un tour dans le studio pour y retrouver l’esprit des grands artistes qui ont contribué à sa réputation, de Carl Perkins à Johnny Cash en passant bien entendu par Elvis Presley et voilà une visite rondement menée qui nous aura permis de nous souvenir de l’époque où les groupes français venaient enregistrer la nuit pendant l’International Blues Challenge. 
 
A peine le temps de se faire une petite sieste avant le grand rush du soir et nous voilà déjà au Blues Hall où l’on découvre Big Papa Binns, le représentant de Buffalo River Blues Society  qui va nous servir un gros show bien complet avec de la présence de la musique et de la roots attitude, le tout avec un peu de poil autour. Suivra immédiatement Randy Mc Quay que l’on connait pour l’avoir vu au même endroit en 202 puis en finale de l’International Blues Challenge en 2015. En bon storyteller, le représentant de Cape Fear Blues Society nous offrira des blues acoustiques avec des passages a-capella ou encore du ragtime … Grand frisson potentiel, même si c’est souvent un peu convenu.

Arrivent ensuite les Vicious Steel qui malgré quelques petits pépins techniques vont nous proposer un show comme toujours marqué par deux titres en Français et par une folle énergie. Exit les tenues de fermiers, c’est ce soir en costume que le groupe va venir surprendre son monde avec comme toujours deux titres en Français carrément bien appréciés par une assistance un peu surprise au premier abord mais très vite conquise par une french touch pleine de saveur et de classe ! Malgré le niveau un peu relevé dans le club, on estime que les Poitevins ont une carte à jouer pour la suite.

On change de club pour retrouver les Cotton Belly’s au Blues City Café pour une prestation littéralement extraterrestre avec à la clef quelques belles baffes distribuées à une assistance instantanément sous le charme. De la communication, de l’échange, un savoir-faire construit à la force de l’expérience, voilà un groupe qui a tout compris de l’art de se faire désirer et qui en use avec une réelle intelligence. Voire une salle debout sur Beale Street avec dans l’assistance des gens de toutes couleurs et de toutes générations, il y a bien longtemps que cela ne nous était pas arrivé ! On en rêvait, Cotton Belly’s l’a fait et sans trop s’engager, on peut déjà prédire une belle aventure au quartet dans cette compétition à l’échelle mondiale.

Jeudi 2 février :
 
Cela fait désormais partie de la tradition de se lever avant le soleil pour aller faires des émissions de télé et c’est cette fois vers Channel 24 Local Memphis que nous nous dirigeons avec la même équipe, c’est-à-dire Cyril et Antoine de Vicious Steel et Yann des Cotton Belly’s, pour y répondre aux questions d’Amy Speropoulos et interpréter deux titres en direct, là aussi en Français ! Détendus et motivés, les garçons n’ont une fois encore pas manqué leur coup et c’est après avoir été salués et félicités par le Maire d’Hernando qui les invitera à participer dimanche à la jam du Catfish Club qu’ils repartiront vers le centre-ville où nous attend une petite surprise …

C’est sur les coups de 11 heures que nous nous rendons donc à l’usine Gibson où le directeur en personne nous attend pour nous offrir une visite privée des ateliers de fabrication des fameuses guitares de la série ES, des Hollow Body de toutes beauté dont nous suivrons l’évolution depuis le simple morceau de bois jusqu’à l’instrument totalement achevé. Une découverte qui ne laissera personne insensible puisque guitariste ou non, chacun reconnaitra la qualité du travail de véritables artisans au service de la musique. Un tour dans le shop pour essayer divers instruments et s’offrir quelques goodies et voilà une affaire rondement menée qui nous aura permis de terminer la matinée en beauté !

C’est finalement à l’heure du déjeuner que nous retrouverons Vicious Steel au Rum Boogie Café pour un showcase d’une cinquantaine de minutes durant lequel les garçons vont une fois encore nous sortir le grand jeu, mettant en avant trois titres en Français et s’attachant à communiquer au mieux avec le public, déjà conséquent à cette heure. Beaucoup d’énergie et de fougue malgré la fatigue qui commence à se faire sentir et une ampoule au pouce droit de Cyril, il n’en fallait pas beaucoup plus pour se mettre en grande forme en ce début d’après-midi.

Les deux groupes ne jouant qu’en toute fin de soirée, on s’accordera enfin une pause salutaire qui permettra aux uns de se reposer, aux autres d’aller faire un tour à Graceland, chez Sun ou encore chez Stax où nous ferons pour notre part une rapide halte pour restituer le matériel emprunté l’autre jour pour pouvoir nous rendre sur les plateaux de télé avant d’essayer d’aller compléter les 5 heures de sommeil réparties sur les deux dernières nuits … Et dire qu’il y en a qui pensent que c’est des vacances et qui disent que l’on a un métier facile !

On se retrouve en milieu de soirée pour dîner avec l’ami Michael ‘Hawkeye’ Herman puis nous sommes une fois encore contraints de nous séparer, les deux groupes français jouant au même moment dans deux clubs différents. C’est donc au Blues Hall que nous retrouvons Vicious Steel pour une réplique sismique du concert de la veille, sans ennuis techniques cette fois et avec une très belle présence scénique, Cyril et Antoine parvenant à se mettre dans la poche non seulement l’assistance mais aussi visiblement le jury qui tape dans ses mains lors des morceaux charnière du set, et en particulier sur les deux hymnes en puissance que sont « Hey Babe » et « Le Centre d’Achat ». Mission accomplie, les garçons ont mis du cœur à l’ouvrage et ça c’est clairement entendu !

Pendant ce temps, au Blues City Café, Cotton Belly’s sortait le grand jeu et laissait la salle exsangue après lui avoir offert un concert tellement mémorable que le groupe avait déjà des propositions à sa descente de scène ! Remontés à bloc, les Franciliens auront comme à l’heure habitude offert le set parfait, celui qui séduit le public en lui montrant une habile mélange de détachement et de bonne humeur combiné à une musicalité de tous les instants avec un rythmique pointilleuse et des solistes impressionnants de virtuosité. Vous y ajoutez une voix parmi les plus belles et les plus classieuses et vous obtenez un groupe exceptionnel, aussi séduisant à la ville qu’à la scène !

Ce sont encore et toujours les Cotton Belly’s qui lanceront la jam du Blues City Café, bientôt rejoints par Vicious Steel mais aussi par diverse formations plus ou moins habiles et enfin par quelques pointures comme le bassiste Russel Jackson ou encore le guitariste Vasti Jackson, deux artistes majeurs de la scène blues ayant collaboré avec Otis Clay, B.B. King ou encore Dr. John mais ayant également leurs propres formations. De grands moments puisque nous avions eu l’occasion de les croiser auparavant en Europe et que c’est en leur compagnie que nous attendrons les résultats, Cotton Belly’s passant bien évidemment en demi-finale tandis que contre toute attente Vicious Steel s’arrête ce soir sur ce qui n’est pas un échec, loin de là, car son aventure en Terre de Blues aura réussi à marquer les esprits !        

Vendredi 3 février :
 
C’est une journée de prestige qui nous attend puisque nous avons rendez-vous à 11 heures au luncheon de la cérémonie de remise des Keeping The Blues Awards 2017 avec au programmes seize personnalités du blues récompensées, dont un Français, Jacques Morgantini, absent physiquement mais représenté par notre délégation, par Michael ‘Hawkeye’ Herman et par un film plein d’humour que le père du blues en France a adressé à titre de présentation. Un grand moment partagé avec quelques fous-rires en cours de route !

C’est en fin d’après-midi que nous rejoindrons Beale Street pour y assister à la fin du Youth Showcase et au début des demi-finales. On commence donc avec Spa City Youngbloods, six jeunes gens de Spa City Blues Society qui nous proposent un show de débutants avec des interprétations approximatives, des placements absolument inconséquent et enfin une voix trop jeune, criarde, nasillarde et absolument insupportable quand elle se lance dans une reprise de « House Of The Rising Sun ». On se demande d’ailleurs si certaines blues societies ne se créent pas spontanément pour se plaisir en envoyant leurs rejetons se ridiculiser dans ce genre d’endroit où le niveau est d’habitude très relevé …

On en arrive enfin aux choses sérieuses avec Erin Harpe & the Delta Swingers de Granite State Blues Society qui va nous offrir un début de set proche de la folk-country avant de glisser vers un blues plus traditionnel puis vers un Chicago blues très conventionnel et sans grand intérêt, la chanteuse en minishort et bas résilles se révélant être une guitariste assez moyenne. Pour sa part le groupe est d’un niveau honorable mais ne révolutionne pas le genre et c’est après un dernier country-blues que le quartet prendra congé de nous avec une cover de « Shake Your Hips » assez réussie. Le public commence à danser dans un B.B. King’s plein à craquer, comme toujours !

C’est maintenant à Cotton Belly’s de se produire pour une demi-heure sur la scène du B.B. King’s et comme toujours les Français vont réussir à emmener le public là où ils en ont envie en proposant un set qui monte peu à peu en intensité pour en arriver très vite à une explosion qui secoue tout sur son passage. Porté par une section rythmique totalement habitée et par un guitariste virtuose qui n’en fait pas des caisses mais qui trouve à chaque fois les notes et le ton juste, Yann nous déploie des trésors d’ingéniosité avec sa voix hors du commun et avec ses harmonicas délurés. Si l’on en croit tous ceux qui sont venus nous avoir après le set, Cotton Belly’s mérite aujourd’hui non seulement une place en finale mais aussi les prix de meilleur guitariste et du meilleur harmoniciste !

Les juges en auront malheureusement décidé autrement et c’est en s’arrêtant aux porte de la finale que Cotton Belly’s quittera la compétition, un peu désabusé après tant de belles choses vécues mais totalement rassuré sur sa capacité à pouvoir jouer partout dans le monde. Preuve s’il en fallait, ce sont eux qui seront une fois encore chargés d’animer la jam du Blues City Café ce soir et parmi les contacts pris cette semaine, on trouve déjà quelques plans possibles du côté de Nashville et du reste des Etats Unis … Pas mal non ?

Samedi 4 février :

Réveillés vers 5 heures du matin par la France où l’on nous attend pour un direct téléphonique dans l’émission Sweet Home Chicago de l’ami Marc Loison sur Radio 666, la journée risque d’être longue puisque c’est à partir de midi que nous sommes attendus pour assister à la finale de l’International Blues Challenge où vont s’affronter à l’Orpheum Theatre pas moins de seize candidats, moitié en solo/duo, moitié en groupes. Pas eu le temps de manger avant ? Ce n’est pas bien grave, on se rattrapera ce soir en sortant, un peu après 20 heures …   
               
C’est Sugar Brown de Toronto Blues Society qui ouvre le bal en solo dans un style très Delta Blues en faisant des allusions à Alan Lomax durant une prestation un peu compliquée, essuyage des plâtres oblige. Quelques passages par le folk et une cover de R.L. Burnside en final, « Keep Behind The Mule », et le tour sera rapidement joué !

On poursuit avec SOBO Blues Band d'Israel Blues Society qui propose un premier titre psychédélique où il est question de Catfish ... puis une chanson en hommage à Candye Kane sur fond de « Toughest Girl in Heaven » et nous voilà tout de suite dans le grand bain d'un concert assez réussi ! Un tour dans le public par le chanteur et le batteur et voilà encore un bon point pour un groupe qui tient la route !

Wes Lee de Mississippi Delta Blues Society of Indianola arrive ensuite pour un Blues du Delta plutôt engageant avec une voix bien placée et un jeu de résonateur très inspiré ! On voyage vers Bentonia puis Greenwood à la recherche des différentes nuances du Delta Blues et ça fonctionne carrément bien, même si ce n’est quand même pas totalement transcendant !

Place à Johnny Fink And The Intrusion de Dayton Ohio Blues Society qui démarrent avec deux blues lents plutôt bien accueillis par le public, même sur le second un peu plus musclé ! Et ensuite ça monte en intensité jusqu'au bouquet final ! Un beau jeu de guitare bien pensé et si là encore rien ne nous a vraiment emballés, on ne peut que reconnaitre la qualité du travail fourni.

On accueille maintenant Brody Buster's One Man Band de Kansas City Blues Society avec comme le nom l'indique un format one man band avec grosse caisse, harmonica et guitare pour un registre folk americana qui marche bien sur l'assistance et qui ne manque pas de produire son effet. Rien de nouveau pourtant là-dedans et on est même tenté de dire que l’on a bien mieux chez nous dans le genre !

The Souliz Band Featuring Sugar And Spice de Suncoast Blues Society est un septet qui envoie de la soul et du rhythm'n'blues avec ses deux chanteuses aux chevelures dignes des Jackson Five ! Ca dégage une très belle énergie et ça remplit bien la scène dans un style très Stax avec un saxo pour habiller le truc ! Le claviériste a une voix superbe et le fait savoir sur deux titres en lead ... La première vraie baffe du jour !

Al Hill de Nashville Blues Society démarre ensuite dans une sorte de piano bar assez basique et sans réel intérêt, avec une voix quelconque ... Il se met bientôt à la guitare électrique et là encore ça manque d'originalité et de classe avec un chant trop fort et une guitare trop lisse ... Seul le final boogie woogie « Train Kept A-Rollin' » nous sortira de cette sorte d'ennui profond où l’artiste a réussi à nous plonger !

Akeem Kemp Band d’Arkansas River Blues Society démarre ensuite dans un style Chicago aussi efficace que peu original et s'attache à faire le job de belle manière. Voilà un trio black très juste dans le ton et dans le contenu qui au bout du compte fera plutôt bon effet avec un Blues qui a de l'âme et du jus et qui finira avec un « I Play The Blues For You » carrément réussi.

Randy McQuay de Cape Fear Blues Society débarque maintenant en one man band et nous fait un show assez construit dans lequel il fait chanter le public. On voit que c'est un habitué de la finale de l'IBC et qu'il va tout faire pour essayer de ne pas la laisser lui échapper en tapant dans les standards et en usant de petits gimmicks comme un ré-accordage en cours de morceau ou encore un titre a capella !

King Bee de Magic City Blues Society se plante un peu sur son début de set avec une guitare pas branchée mais reprend rapidement ses esprits en nous offrant une démonstration de Chicago Blues mélangeant finesse et force, virtuosité de l'harmonica et feeling de tous les instruments ! Ça passe plutôt bien dans l'assistance et le quartet, très pro, n'a plus qu'à dérouler ...

Suit bientôt Sam Joyner de Vicksburg Blues Society au piano solo dans une démonstration de boogie … Il en fait quand même un peu trop entre les morceaux et ça tire en longueur avec des causeries à n'en plus finir. Ça joue pas mal pourtant, mais c'est un peu longuet quand même au bout de 3 titres.

Rae Gordon & Backseat Drivers de Cascade Blues Association est un septet avec des cuivres et une chanteuse qui a du coffre et qui envoie. Un poil jazzy, le set nous emmène du côté de Chicago mais aussi de New York et de la Côte Ouest et le fait plutôt bien en y mettant l'art et la manière. On part ensuite vers de la soul très appréciée par le public et la chanteuse ne se gêne pas pour accentuer l'effet en se mettant à genoux sur le final ... Ça s’appelle avoir le sens du jeu !

An retrouve Ruth Wyand de Triangle Blues Society pour un one woman band assez séduisant avec un beau jeu de guitare et une voix qui interpelle. Le côté folk blues un peu roots ne manque aucunement d'intérêt et quand Ruth se lève pour nous faire un « Little Wing », c'est tout l'Orpheum qui est surpris. Un set original qui ne déclenche pourtant pas l'enthousiasme du public, même si ce dernier applaudit !

Dawn Tyler Watson de Montreal Blues Society arrive à huit sur scène avec le Ben Racine Band et nous emmène tout de suite dans des harmonies vocales du plus bel effet. Les cuivres sont puissants et l'orgue Hammond est un plus indéniable que l'artiste met parfaitement à profit, s'offrant un peu de mouth trompette sur « Take It Outside », un vieux titre revu et corrigé à la sauce brass band ! Un titre en duo avec Ben et des envolées à n'en plus finir et c'est une salle comblée qui acclamera la chanteuse a la fin de sa prestation !

Felix Slim De l'Asociación Musical Blues Hondarribia enchaine en solo avec sa guitare et son harmonica pour des titres très roots dont une reprise de Sonny Boy Williamson I avec une voix un peu nasillarde qui colle parfaitement au genre. Un petit tour dans le ragtime et ce sera véritablement un des bons moments de la soirée avec un kazoo et beaucoup d'humour !

Vince Johnson And The Plantation Allstars de Memphis Blues Society, quartet black qui donne dans un Blues très typé Chicago avec toutefois une Memphis touch, referme enfin cette finale. Souffrant d'un problème de basse, le groupe fera une partie du set en trio mais le chanteur harmoniciste assurera parfaitement le coup et en tirera même profit en s'attirant la sympathie de la salle déjà acquise à une formation locale !

On retiendra du palmarès 2017 …

Best Autoproduced CD : « High Temperature » de JW JONES

2ème place catégorie solo/duo : Brody Buster's One Man Band
1ère place catégorie solo/duo : Al Hill
Guitariste duo « Memphis Cigar box » : Al Hill

3ème place catégorie groupes : Rae Gordon And The Backseat Drivers
2ème place catégorie groupes : The Souliz Band Featuring Sugar and Spice
1ère place catégorie groupes : Dawn Tyler Watson
Guitariste Gibson « Albert King » : Ben Racine
Harmoniciste Lee Oskar : Brody Buster's One Man Band

Ainsi s’achève ce périple « En Terre de Blues », avec ses joies … et ses bonheurs ! De grandes satisfactions, une grande aventure humaine et tellement de choses que ceux qui ne les ont pas vécues ne peuvent pas comprendre … On souhaite le meilleur à tous et de de toute façon on est certain qu’il arrivera ! C’était aussi le but de cette expédition …

Fred Delforge – février 2017