Accueil du portail Zicazic.com


Zicazic on Twitter. Zicazic on Facebook.

Flux RSS ZICAZINE

Qu'est-ce que c'est ?




Accueil arrow Concerts arrow FREDERIKSHAVN BLUES FESTIVAL (DANEMARK)

> MENU
 Accueil
 ----------------
 Chroniques CD's
 Concerts
 Interviews
 Dossiers
 ----------------

FREDERIKSHAVN BLUES FESTIVAL (DANEMARK) pdf print E-mail
Ecrit par Fred Delforge  
lundi, 07 novembre 2016
 

Frederishavn 2016 FREDERIKSHAVN BLUES FESTIVAL
DET MUSISKE HUS – FREDERIKSHAVN (DANEMARK)
Les 4 & 5 novembre 2016

http://www.bluesfestivalen.dk/

Vendredi 4 novembre :

On retrouve avec un réel plaisir cette grosse bourgade du Nord du Danemark, port d’échange privilégié des ferrys avec la Suède et la Norvège, et après une longue journée de voyage, on entre directement dans le vif du sujet à 19 heures avec l’ouverture officielle du festival. Pas de longs discours, c’est avec la prise de l’empreinte de la main de Mr. Sipp pour son entrée au Hall of Fame local que cette onzième édition commencera, et la salle déjà bien garnie ne demande rien d’autre que d’en découdre au plus vite !  

A Frederikshavn, on entre en général directement dans le vif du sujet et ce n’est rien de moins que Ruthie foster que l’équipe dirigée par Peter Astrup nous propose pour commencer ... Pas de problème, le trio féminin aux sonorités roots va venir nous déverser son lot de musicalité et de chansons pleines de charme et tout le monde va suivre sans se faire prier, appréciant quand la batterie cède de temps à autres la place aux cuillères pour quelques emprunts á Lucinda Williams ou encore pour des standard comme « Wade In The Water » ! Voilà une sacrée bonne entrée en matière qui laisse entendre à qui en doutait encore que cette cuvée 2016 sera un grand cru …

On quitte la grande scène Chicago pour rejoindre la scène Mississippi à l’étage et pour y découvrir Doug Deming & The Jewel Tones accompagné de l’harmoniciste Steve Guyger. Voilà un bon groupe partagé entre early rock et boogie blues et saupoudré d’une grosse dose de rockabilly mais aussi d’un peu de West Coast et de Chicago blues et ça envoie grave, avec en prime la contrebasse qui apporte un petit cachet old school pas désagréable du tout ! La soirée bien entamée continue sur les chapeaux de roues et les groupes de qualité semblent vouloir se succéder sans interruption, ce qui est carrément bon signe.

Le temps de redescendre et nous voilà face à Mr. Sipp, le Mississippi Blues Child fidèle à lui-même venu avec un show électrique et éclectique plein de fougue et d'humour ... Le trio, réglé au quart de poil, nous sort le meilleur d’un blues directement importé du Sud des USA et le fait avec un réel talent, tant et si bien que la salle plie littéralement sous le poids de sa musique. Un peu de duck walk pour habiller le tout et des morceaux que le public désormais très nombreux reprend en rythme, la recette fonctionne et on comprend pourquoi le gars a remporté l'IBC en 2014. On remarquera la présence sur scène du colosse Christone ‘Kingfish’ Ingram invité à  prendre la guitare sur un titre en fin de set, un moment apprécié d’un public friand de ce genre de choses !

Retour vers la scène Mississippi où Corey Harris nous fait son show en solo, avec juste sa guitare et sa voix ! Avec des compositions entre delta blues et blues africain, une voix conviviale et une approche très intelligente du blues, Corey Harris n’a pas de mal à être un artiste attachant et convaincant, un de ces grands du Blues qui n'ont pas besoin de grand-chose pour offrir quelque chose de précieux et d'unique ! Et il faut bien reconnaitre que la formule fonctionne, quand bien même l’artiste enturbanné connaitra un petit déficit d’assistance au début de sa prestation, Mr. Sipp se produisant simultanément quelques mètres en dessous de lui. C’est finalement au charisme et au talent que Corey Harris remportera la partie, et haut la main s’il vous plait !

On attendait Joanna Connor pour la fin de cette première soirée mais suite à des soucis de santé, elle sera remplacée au pied levé par Steve West Weston ... Maitre incontesté de l’harmonica, l’Anglais n’est pas venu seul puisque outre son guitariste attitré, Paul Garner, il se produit ce soir avec le Scandinavian Allstars Band avec un guitariste danois, un bassiste suédois et un batteur norvégien. Sideman attitré de Mud Morganfield lors de ses tournées en Europe, Steve West Weston en connait un rayon côté blues et c’est de fort belle manière qu’il va venir nous donner une leçon de choses, en y mettant du cœur mais aussi et surtout du talent et de l’énergie. De compositions en standards, tout le monde en aura pour son argent et c’est bien ce que l’on attendait de l’artiste !

L’heure est venue d’aller prendre un peu de repos … On quitte donc la salle pour recharger les batteries en vue d’une seconde journée qui s’annonce épique avec les anciens musiciens de Willie Dixon mais aussi Robben Ford, Roy Rogers, Watermelon Slim et nombre d’autres encore !

Samedi 5 novembre :

On commence cette seconde journée en fanfare avec Robben Ford et l'orchestre du Nordkraft Big Band qui viennent démontrer que les cuivres collent parfaitement au jeu rock et un tantinet funky du guitariste virtuose. Des compos revisitées spécialement pour l’occasion, une reprise de B.B. King pour se souvenir que l'artiste l'a un temps accompagné, la salle est directement dans le grand bain grâce à un artiste entier mais aussi brillant ! Et quel bonheur de voir le chef d’orchestre danser et invectiver les différents musiciens pour en tirer le maximum … Une sacrée expérience à renouveler de toute urgence !

Doug McLeod  est comme toujours excellent et plein d'humour dans son rôle de chanteur et de conteur qui raconte aussi bien sa vie qu'il la chante ! Un show plein de détails croustillants sur son passé d’enfant abusé mais aussi sur ses amis et sur sa longue relation avec une prostituée, rebaptisée « Rosalie » pour les besoins d’une des trois chansons qu’il lui a dédiées, et enfin des histoires de vie et de mort, de joies et de peines, il ne manquera rien à la prestation d’un artiste positif au possible. Invitant son public à voir la vie du bon côté et à la regarder avec des « Brand New Eyes », Doug McLeod saura s’attirer la sympathie de l’assistance qui, nombreuse, en redemande !

On redescend vers la Chicago Mainstage pour retrouver Christone ‘Kingfish’ Ingram, un beau bébé de 300/400 livres qui envoie fort à la guitare mais qui est aussi capable de choses plus subtiles et qui n'oublie jamais de le faire savoir. Ça déménage sérieux et ça fait plaisir à voir pour un public qui regarde l’artiste du haut de ses 17 ans faire des étincelles. Majeur en janvier prochain, Christone sera diplômé en mai 2018 et pourra dès lors envisager une carrière musicale assidue tout autour du monde! Avis aux festivals intéressés par ce petit génie qui reprend B.B. King dans le texte avec une réelle aisance !

Le Mitch Kashmar Band nous bouscule maintenant un peu sur la scène Mississippi avec son gros blues très empreint de boogie ! Emmené par un harmoniciste virtuose, le quartet ne se prend pas au sérieux et chacun s'offre son petit solo avant de partir en trombe dans un répertoire qui sautille un moment avant de littéralement bondir ! Pas de basse mais un clavier qui assure grave, on est dans le très bon et les amateurs d'harmonica sont forcément présents au rendez-vous ! Un grand moment de cette 11ème édition d’un festival dont un apprend qu’il sera bientôt rebaptisé Bluesheaven.dk …

Roy Rogers attaque son set tout en finesse à la guitare à double manche et commence à nous offrir des trésors de slide, superbement soutenu par une section rythmique qui ne se fait pas prier pour donner le meilleur d'elle-même ! On sent l'expérience du gars qui a œuvré aux côtés de John Lee Hooker dans le Coast to Coast Band et qui sait de quoi il cause. Slideur redoutable, celui qui porte le même nom que le célèbre cowboy et chanteur américain va nous mettre les nerfs en pelote avec un show solidement construit et brillamment interprété mais qui aurait été bien plus approprié à une scène plus intimiste, la manque de proximité avec le public nuisant quand même à la qualité de la prestation !

On remonte prestement vers le premier étage pour y retrouver celui qui au fil du temps est devenu un ami, l’excellent Watermelon Slim, qui va venir nous séduire à grand renfort de glissades bien maitrisées sur une guitare qu’il joue aujourd’hui posée sur ses cuisses. Amoureux de la Highway 61, cet ancien routier mais aussi vétéran du Viet Nam ne se fait pas prier pour parler de ses passions mais aussi de sa vie, de l’appréhension qu’il a de l’élection américaine pour laquelle il rentrera juste à temps à Clarksdale pour pouvoir voter, de son dégout de la guerre et de son amour des gens … Chanteur à la voix chargée d’histoire, harmoniciste plus qu’honorable et guitariste efficace, Watermelon Slim nous aura donné ce soir encore une grande leçon d’humanité ! Et toujours cette gentillesse qui le pousse à avoir un mot bienveillant pour chacun …     

Le temps passe et s’il nous faudra nous résoudre à quitter le festival avant le passage des deux derniers groupes, on se prend quand même une grande rasade du Willie Dixon’s Original Chicago Blues All Stars avant de prendre congé de notre hôte. On s’attendait au meilleur avec la présence de John Watkins à la guitare, Steve Bell à l’harmonica, Ronnie Hicks aux claviers, Maurice J. Vaughn au saxophone, Jimmie Lee Tillman à la batterie et Freddie Dixon à la basse mais il faudra pourtant se contenter d’un show à peine correct avec un Steve Bell qui fera à lui seul le job tandis qu’à ses côtés, on joue à l’économie et sans véritable passion. Quelques standards de Chicago nous emmèneront vers un très artificiel « Hoochie Coochie Man » avant que la vedette de la soirée, Holle Thee Maxwell, ne vienne rejoindre le groupe pour la fin du show ...

Pas grand-chose à dire de plus si ce n’est que la chanteuse dreadlockée débarque dans une robe bleue transparente et qu’elle en fait profiter une assistance qui regarde avec un brin de surprise la plantureuse artiste qui adopte des poses pour le moins douteuses tout en entamant le « I’ve Been Loving You » du grand Otis Redding … Parfois à la limite du graveleux voire même du vulgaire, celle qui se fait appeler « The Original Black Blonde Bombshell » finira toutefois par attirer l’oreille de l’assistance grâce à une voix qui parvient fort heureusement à éclipser quelque peu le spectacle pathétique qu’elle offre à nos yeux.

La tempête annonciatrice d’une vague de neige souffle maintenant sur Frederikshavn et nous regagnons prestement l’hôtel pour y prendre un peu de repos en attendant le retour vers Amsterdam puis Paris … Deux soirées de bonheur se méritent et il faut bien payer un peu de sa personne pour assister à un tel évènement. On y reviendra en 2017, c’est certain, car ce festival est de loin un des plus intéressants en Europe !     

Fred Delforge – novembre 2016