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BLUESFEST EUTIN (ALLEMAGNE)
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Ecrit par Fred Delforge |
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mardi, 17 mai 2016
BLUESFEST EUTIN 2016
BLUESFEST
EUTIN
MARKTPLATZ –
EUTIN (ALLEMAGNE)
Du 13 au 16 mai 2016
http://www.bluesfest-eutin.de
Difficile de résister à l’invitation de
nos amis
Allemands d’Eutin tant l’édition 2015
avait
été exceptionnelle … Un rapide coup
d’œil sur la programmation a suffi à
nous convaincre
de sauter dans un avion pour Hambourg et à participer une
fois
encore à la grande fête du blues dans le
Schleswig-Holstein ! Si la ville ne compte qu’une petite
vingtaine de milliers d’habitants, elle a un sacré
talent
pour tout ce qui concerne l’accueil et
l’organisation de
grands évènements … Au point
d’être
considérée comme le Memphis allemand, ce qui
n’est
pas rien !
Vendredi 13 mai 2016 :
Arriver à Eutin n’est pas une mince affaire mais
le jeu en
vaut à chaque fois la chandelle puisque c’est une
partie
du gratin de la communauté blues que l’on y
retrouve ! Pas
étonnant dès lors de voir
qu’après avoir
reçu un Keeping The Blues Alive Award en 2015 à
Memphis,
le BluesFest a été cette année
déclaré meilleur festival international par le
très sérieux magazine polonais Twoj Blues.
C’est
donc par une cérémonie informelle à la
Mairie de
la ville dès notre arrivée que nous
célèbrerons cette récompense en
même temps
que l’on procède à l’annonce
de
l’ouverture officielle de cette 27ème Edition. Et
comme
une ouverture de festival sans musique n’aurait pas la
même
saveur, c’est Big Mama Montse qui viendra nous jouer quelques
morceaux dont une de ses compositions écrites en hommage
à Candye Kane disparue il y a moins d’une semaine.
Autant
dire que ces quatre jours de fête sont partis de la plus
belle
des manières.
C’est à 16 heures sur la belle scène de
la Place du
Marché que les premiers concerts officiels du festival vont
commencer et c’est Dani Dorchin en one man band qui va
s’y
coller le premier en faisant montre d’une très
belle
énergie et en faisant à lui tout seul
l’effet
d’un véritable groupe. Une guitare
délurée,
des percussions aux pieds et un harmonica qui prend son écho
dans une boite de conserve, il ne faut pas grand-chose de plus pour que
le public commence à réagir. Originaire
d’Israël, le jeune homme connait son affaire et ne
manque
pas une occasion de proposer un show construit, que ce soit
musicalement avec des morceaux pleins de relief ou encore visuellement
avec quelques grigris comme un rat en peluche sur la grosse caisse ou
encore un cochon en plastique confortablement posé dans un
tambourin sur le charleston. Le public a répondu
présent
en ce bel après-midi de printemps ensoleillé et
s’il ne se méfie pas, il finira même par
prendre
quelques coups de soleil tant la prestation de Dani Dorchin semble le
scotcher devant la scène !
La prédiction des coups de soleil est à oublier
puisque
le vent s’est levé et nous a apporté
quelques
nuages au moment d’accueillir la seconde formation du jour,
les
Allemands du Kalle Reuter Band dont le frontman, chanteur et
guitariste, n’a que 16 ans mais affiche
déjà une
participation ici même en 2013 et une autre au Magic Blues
Festival en Suisse l’année suivante.
Accompagné
d’une paire de cuivres et d’une section
rythmique
avec une contrebasse, Kalle Reuter donne dans le blues à
dominante rock et ne s’embarrasse pas de détails
en allant
piocher dans les grands standards comme « Roll Over Beethoven
» ou encore Folsom Prison Blues » pour donner de la
consistance à un set que, pour l’occasion, le
public peut
reprendre en chœur avec lui. Quelques glissades
particulièrement bien maitrisées vers le
rhythm’n’blues en cours de route et c’est
un public
totalement conquis qui en redemandera à la fin du set et qui
pour l’occasion y gagnera un « Sweet Home Chicago
»
qui ne restera sans doute pas dans l’anthologie du festival
mais
qui aura au moins eu le mérite d’être
interprété avec une certaine envie et pas mal
d’originalité.
On continue notre chassé-croisé entre soleil et
nuages et
on accueille déjà les Danois de Chris Grey
& The
BlueSpand, un trio particulièrement en vogue dans son pays
d’origine qui mélange avec une
véritable
inspiration la soul, le funk et le rhythm’n’blues
en y
ajoutant de temps à autres un trait de rock des plus
bienvenus !
Un chanteur guitariste tatoué et plein de charisme qui nous
régale de chansons où il est question de sa
mère
ou encore de sa future ex-femme, un jeu plein de subtilité
soutenu par un binôme rythmique efficace et une voix qui
tient
sans encombre la distance, voilà un groupe qui ne regrettera
pas
d’avoir fait le déplacement depuis le (proche)
Danemark
pour représenter le blues de la Baltique chez ses voisins
Allemands, d’autant plus que le public adhère
instantanément à une musique riche et bien faite
avec ses
côtés dansants et pleins de groove, avec en fin de
parcours une version débridée de « I
Shot The
Sheriff » à vous mettre sur le cul.
Décidément, cette scène nordique
regorge de
pépites que nous découvrons au fil de nos visites
dans le
Nord de l’Europe et ce n’est pas pour nous
déplaire !
On se paie le luxe d’un vol transatlantique pour rejoindre
Memphis et son Mississippi Bigfoot qui va déployer des
trésors d’énergie pour que la nuit se
décide
finalement à descendre tranquillement sur Eutin. La foule
compacte se masse sur la Markplatz et c’est sur les cris du
Bigfoot que le groupe se présente à elle pour un
départ en trombe durant lequel Christina Vieira, sa
chanteuse,
se fend d’un peu de ukulélé. On prend
le large
direction Clarksdale d’où le bassiste est
originaire et on
se paie même le luxe d’un titre qui porte le nom de
la
ville qui héberge le fameux Crossroads pour mieux
s’enfoncer dans un set qui sent bon le countryblues mais
aussi
les ribs et les T-bones à la mode de là-bas.
Véritable plongée dans les bas-fonds du Sud des
Etats-Unis et plus encore, le blues des Mississippi Bigfoot se rappelle
à notre bon souvenir en nous offrant un « Mojo
Working
» à sa sauce personnelle avant de nous faire
emprunter les
chemins de traverse et de nous entrainer du côté
de
Coahoma County, des hills ou encore du delta avec à la clef
un
lot de bonnes vibrations auxquelles essayer de résister est
inutile ! Un peu de cigar box pour accentuer le mouvement, le batteur
qui joue de l’harmonica tout en tenant ses baguettes et un
groupe
qui visiblement prend du plaisir à être
là …
il n’en fallait pas plus pour que cette fin de
soirée soit
une totale réussite !
On désertera pour ce soir l’after à
Brauhaus, le
voyage éprouvant pour venir jusqu’ici nous
incitant plus
à aller prendre un peu de repos qu’à
aller
continuer la fête jusqu’à plus
d’heure et le
programme de demain s’annonçant d’ores
et
déjà bien rempli … Il faut savoir
recharger les
batteries quand le besoin s’en fait sentir !
Samedi 14 mai 2016 :
Le beau temps d’hier semble parti se promener plus
à
l’Est et c’est au moment même
où la pluie se
met à tomber que les Polonais de Gruff! attaquent la
première moitié de leur show … Le
public, peu
nombreux à 13 heures, se réfugie tant bien que
mal sous
les stands voisin tandis que quelques téméraires
bravent
l’averse sous des ponchos de fortune pour assister
à une
prestation qui boit à la source des racines blues du
Mississippi
mais qui a su très intelligemment lui apporter des
influences
plus récentes et une belle énergie qui tire
parfois vers
le rock, voire plus si affinités. Un chanteur harmoniciste
à la voix convaincante qui n’hésite pas
à la
demande à sortir un kazoo en forme de trompette, un dobro ou
une
guitare joués à la mode
d’aujourd’hui, avec
pédales d’effets en tous genres, et enfin un
batteur qui
ne fait pas dans la dentelle, les trois jeunes gens auront droit
à une grosse heure et demie de spectacle durant laquelle ils
seront loin de se contenter de faire de la figuration,
d’autant
que la pluie n’a pas été
gênante bien
longtemps et que devant la scène, on se serre
désormais
pour se protéger d’un petit coup de frais
arrivé
sournoisement.
Le soleil est revenu pour l’entrée en piste des
Franco-Américains du Jersey Julie Band et c’est
plutôt bon signe car le public est au rendez-vous et
qu’il
réagit carrément bien aux invectives
d’un groupe
qui l’emmène directement vers le Sud des Etats
Unis avec
une musique qui sent bon les effluves de New Orleans et plus largement
des Bayous de Louisiane. Des racines américaines du blues
jusqu’au gospel en passant par l’Americana, Jersey
Julie
nous régale d’une voix chaude et
délicieusement
poussiéreuse et affirme un peu plus le mouvement
à la
force de son sax ou de ses tambourins, soutenue à merveille
par
son complice à la ville comme à la
scène, le
guitariste et chanteur Olivier Mas, mais aussi par un tandem rythmique
où l’on remarque Christian Bénard aux
claviers et,
fraichement arrivé dans le groupe, le batteur Jimmy Daniel
qui a
derrière lui une expérience impressionnante avec
des
collaborations prestigieuses. Le blues festif et
déluré
de Jersey Julie fait plaisir à voir et à entendre
et
c’est une assistance conquise qui n’arrive plus
à se
décrocher d’un groupe qui l’aspire
littéralement et qui dès lors ne le
lâche plus, lui
offrant même en cours de route une relecture personnelle et
particulièrement inspirée du « Fire On
The Bayou
» des Meters. Une sacrée leçon de
feeling et de
groove pour tout le monde !
On avait pu les découvrir brièvement à
Torrita di
Siena lorsqu’ils ont terminé à la
troisième
place du 6ème European Blues Challenge, c’est
l’occasion ce soir de les découvrir sur un
véritable concert pour une prestation appelée
à
tenir toutes ses promesses. Avec son blues plein de
délicatesse,
WellBad souffle un vent de calme sur la Marktplatz et nous offre
quelques moments d’un calme salutaire après la
tempête Jersey Julie et surtout avant le déluge
Travellin’ Brothers qui approche. Emmené par un
frontman
plein de charisme qui module ses mimiques en fonction de sa voix chaude
et riche, le combo germanique nous régale de ses effets de
claviers mais aussi de temps à autres d’une
trompette qui
accentue encore un peu le côté jazzy que WellBad
recherche
parfois. Quelques passages un peu plus énergiques pour
donner du
rythme à l’histoire, quelques changements de
guitares
aussi et enfin une contrebasse qui accentue encore un peu le versant
intimiste du groupe et voilà une prestation qui aura su
convaincre le public d’Eutin, non sans raison
d’ailleurs !
On reste en terrain connu avec cette fois les vainqueurs de
l’European Blues Challenge de Bruxelles en 2015 et ce sont
les
Travellin’ Brothers qui viennent réveiller une
assistance
qui vient de passer un long moment à l’abri,
averse
oblige. Premier à arriver sur la scène, le
guitariste
Aitor Cañibano est rapidement rejoint par ses complices pour
un
premier titre en acoustique et c’est ensuite très
vite que
tout le monde part dans un show où le blues, le swing et le
son
de New Orleans sont omniprésents, quand bien même
les
Espagnols emmenés par le charismatique chanteur Jon Careaga
sont
capables de travailler sur un nombre de tableaux beaucoup plus
étendu. Tout en maitrise et en feeling, le concert des
Travellin’ Brothers va lentement mais surement monter en
régime au gré des coups de boutoir de chacun des
membres
qui tirent tous la machine vers le haut à leur
manière,
avec une mélange de technique et de sensualité
qui
témoigne à chaque instant d’une
véritable
expérience. Un peu de gospel pour dédier le
concert de ce
soir à Bruxelles, ville endeuillée un an
après
leur succès là-bas, un détour par
«
What’d I Say » pour rappeler que le spectre du
groupe est
très large et c’est en plein bonheur que le public
d’Eutin finira la soirée, même si ce
soir la pluie
et le froid nous glacent les os ! Il faut quand même
reconnaitre
que pour réchauffer l’atmosphère, il
n’y a
pas mieux que les Travellin’ Brothers …
La journée a une fois encore été
longue et
après quelques moments de convivialité avec les
amis
présents, on délaissera la jam pour aller prendre
un peu
de repos en prévision de deux journées
à venir qui
s’annoncent encore bien remplies. La route des festivals est
longue et tumultueuse et il faut parfois savoir
s’économiser un peu …
Dimanche 15 mai 2016 :
On commence la journée par le concert apéritif
des Norvégiens du Tito Lausteen Band au Café
Klausberger et si la petite salle est traditionnellement
bondée, c’est pour nous l’occasion de
découvrir en formation intimiste un groupe que nous
retrouverons un peu plus tard dans la journée sur la grande
scène ! Du blues, du boogie, quelques shuffles et pas mal
d’humour, voilà un groupe qui fait plaisir
à entendre au milieu des peintures de sa compatriote Eva
Berntsen qui trônent dans
l’établissement, des couloirs jusqu’aux
salles … Un très beau travail de la part
d’une artiste qui nous permet de reconnaitre quelques
musiciens nordiques que les habitués de la scène
européenne ont l’habitude de croiser sur la route
des festivals !
13 heures marquera l’arrivée de la pluie et
l’entrée en scène de Big Mama Montse,
une sorte de signal qui invite l’organisation à
lever le rideau de cette troisième journée de
festival et à laisser le blues prendre ses marques sur la
Marktplatz … Fort heureusement l’averse ne fera
que passer et c’est un public rapidement conquis qui
répondra à l’unisson à
l’invite de notre blueswoman barcelonaise venue en solo pour
nous offrir un spectacle qu’elle emmène de la
guitare et de la voix vers un mélange homogène de
standards et de compositions. Partant du blues des années 30
pour venir jusqu’à celui que l’on joue
de nos jours, Big Mama Montse ne ménage pas sa peine et
parvient à tenir la foule en haleine pendant plus de
quatre-vingt-dix minutes d’un concert pendant lequel on ne
s’ennuiera pas une seule seconde grâce à
des choix artistiques bien sentis qui poussent à
l’artiste à changer
régulièrement de tempo et à faire
participer un public forcément ravi ! Trouver une artiste
capable de passer avec le même talent de Memphis Minnie
à Robert Johnson n’est pas chose facile et Montse
le fait avec tellement de spontanéité que
l’on est bien obligé
d’adhérer sans réserve à la
musique qu’elle nous offre avec tellement de
générosité. La journée
promet d’être riche en belles notes !
Une petite heure de break le temps de faire les balances et de
recharger les batteries et on retrouve le Tito Lausteen Quartett sur la
grand scène d’Eutin pour une prestation que
l’on nous promet moderne et enjouée, ce qui
n’est pas très surprenant si on tient compte de
l’apparente jeunesse du groupe et de la joie de vivre
qu’il affiche ouvertement. Emmené par un batteur
véloce et omniprésent, le groupe peut compter sur
un claviériste en toge romaine, un chanteur bassiste au
feeling certain et un guitariste des plus inspirés qui en
met autant dans les parties délicates que dans les passages
plus musclés. Séduisant dans ses morceaux
empreints de soul, redoutable dans ses boogies, magistral dans les
blues plus traditionnels, le quartet norvégien nous sert une
musique pleine de saveur et installe une ambiance pleine de
convivialité sur une place où pour
l’occasion le soleil revient nous faire de
l’œil et accentuer le côté un
peu psychédélique que les quatre
garçons de Bodø, dans le Nordland, adoptent
volontairement. Un coup de « Great Balls Of Fire »
pour lancer le rappel et après quelques morceaux de plus,
c’en sera définitivement fini d’un
concert qui restera à coup sûr dans les
mémoires !
Une nouvelle heure de break pour laisser l’équipe
technique s mettre en place aux petits oignons et c’est
reparti avec 4Some Blues, un quartet helvético-autrichien
qui fait swinguer son blues et son rhythm’n’blues
en lui apportant énormément de feeling et une
petite pointe de folie. La contrebasse emporte le tout vers les racines
premières d’un swing rapporté du
siècle dernier et c’est avec l’apport
substantiel d’un harmonica que le groupe nous fait partir
vers les années 40 et 50 avec à la clef quelques
adaptations personnelles des standards du blues. Difficile une fois
encore de résister à l’appel
d’une formation qui se donne et ne fait aucune
économie pour ce qui est d’une énergie
qu’elle semble avoir en réserve
illimitée dans ses bagages. Les deux voix collent
parfaitement au style et si on se prend par moments quelques passages
un peu plus jump dans l’esprit, c’est en trouvant
l’équilibre parfait entre ses diverses influences
et en multipliant les breaks que 4Some Blues trouve la clef qui ouvrira
en grand les portes du cœur d’un public qui en a vu
d’autres mais qui apprécie la
sincérité et l’efficacité du
groupe. On va de surprise en surprise tout au long de ce
27ème BluesFest et plus on avance, plus on se dite
qu’avoir la chance d’être là
est un véritable trésor que l’on ne
partagerait pour rien au monde !
On en arrive à la tête d’affiche de la
soirée avec Joe Gilmore, le guitariste et chanteur de
Floride se voyant pour cette tournée accompagné
par un groupe italo-américain avec Enrico Carpaneto aux
claviers et Salvatore Martinelli à la basse mais aussi
Maurice Dukes à la batterie. Trois titres en solo par le
band suffiront à faire arriver la vedette, toute
d’orange vêtue, sur une scène
où l’attend un tabouret pour lui permettre de se
produire dans un confort relatif, le poids des ans et le poids tout
court se faisant quelque peu sentir. Véritable machine
à enquiller les tubes, Joe Gilmore ne se fait pas prier pour
nous emmener dans un blues empreint de soul, de
rhythm’n’blues et de bonnes vibrations qui se
propagent sur une Marktplatz pleine comme les grands soirs. Difficile
de se propulser devant la scène pour shooter la
légende et il faut jouer des coudes au milieu d’un
public enthousiaste que ne veut pas perdre une seule miette de ce que
le bluesman lui lâche avec talent et
générosité. Des blues lents
déposés dans la balance avec un poids
parfaitement contrôlé jusqu’aux shuffles
enflammés que le groupe nous sert avec passion, il ne
manquera rien à une prestation qui aura su convaincre
jusqu’aux plus blasés des amateurs du genre. Eutin
peut une fois encore se vanter d’avoir eu droit à
son moment d’histoire ce soir !
La jam à Brauhaus faisant le plein dès la fin du
dernier concert, on abandonnera l’idée
d’aller finir la soirée là-bas tat les
places semblent compliqués à trouver,
même avec un badge all access … Un peu de repos ne
fera de toute façon pas de mal après une
journée pleine de concerts mais aussi de rencontres avec les
artistes ! Et comme la journée de demain promet
d’être chargée, autant aller se reposer
quelques heures avant de sauter dans le grand bain …
Lundi 16 mai 2016 :
Si le Lundi de Pentecôte est pour beaucoup d’entre
nous un lointain souvenir, L’Allemagne perpétue la
tradition et organise même des manifestations culturelles ce
jour-là, signe que l’on peut, quand on le veut,
joindre l’utile à l’agréable
! On commence ainsi la journée dès 11 heures sur
la scène du Landesgardenschau avec la délicieuse
et talentueuse Juwana Jenkins, chanteuse originaire de Philadelphie
installée en République Tchèque depuis
maintenant un moment. Accompagnée de son band habituel,
cette belle fleur parmi les plantes va nous servir à sa
manière quatre-vingt-dix minutes d’un show
bouillant partagé entre ses propres composition et diverses
covers parmi lesquelles on pourra reconnaitre à la
volée « Hound Dog », «
I’m A Woman » et autres «
Messin’ With The Kid ». Descendue à
plusieurs reprises dans l’assistance pour aller charmer le
nombreux public, la chanteuse changera même de robe en cours
de set et c’est admirablement soutenue par un groupe
où la guitare et l’harmonica se livrent
à l’occasion à de superbes battles que
Juwana Jenkins nous emmènera vers un final en forme de
« Got My Mojo Working » pour mieux nous
délivrer un vibrant « Sweet Home Chicago
» en rappel ! Le soleil a pour l’occasion fait son
grand retour et c’est de fort belle manière que
nous nous mettrons ainsi en condition pour la dernière
journée du festival …
Le temps de reprendre nos habitudes sur la Marktplatz et
c’est bientôt au tour du Lisa Lystam Family Band de
venir nous dévoiler les compositions de son nouvel album. Le
drapeau suédois flotte devant la scène pour
saluer la présence de celle qui avait
représenté son pays lors du 5ème
European Blues Challenge à Bruxelles en 2015 et
c’est un groupe qui a pris de l’envergure qui nous
présente un blues bien électrique
saupoudré d’influences venues du Sud des USA. Si
le sextet affiche une régularité de tous les
instants et s’appuie sur une paire de guitares bien
inspirée, tous les yeux sont forcément
braqués vers la belle Lisa Lystam qui joue autant avec la
sensualité de son chant qu’avec celle de sa
plastique, tombant rapidement les lunettes de soleil pour nous faire
profiter pleinement de ses grands yeux bleus. Rayon musique, on ne se
plaindra pas non plus de la qualité d’un set
millimétré où chacun marche
à la baguette pour nous surprendre avec des breaks bien
pensés et avec des arrangements recherchés,
délivrant au bout du compte un show chargé
d’intensité et de très bonnes ondes.
Une preuve de plus s’il en fallait de la très
grande qualité du blues européen !
On s’offre un petit break sur les coups de 15 heures pour
aller faire une surprise à nos amis Polonais et saluer le
25ème anniversaire du magazine Twoj Blues, une
référence en la matière puisque ses
créateurs ont déjà
été récompensés
à maintes reprises en recevant un German Blues Award mais
aussi un Keeping The Blues Alive Award de la Blues Foundation et
récemment un Blues Behind The Scene Award de la part de
l’European Blues Union. Le secret particulièrement
bien gardé a quelque peu accentué
l’effet de surprise et c’est avec une pointe
d’émotion qu’Andrzej et Danuta Matysik
ont coupé leur gâteau d’anniversaire en
présence de leurs deux filles Ewa et Zosia
présentes à Eutin dans le cadre de la prestation
de MonkeyJunk … Un grand moment de convivialité
tombé à point nommé pour saluer un
très bel esprit blues qui se transmet en famille !
En tournée dans l’Est de l’Europe depuis
trois semaines, MonkeyJunk arrive à Eutin pour sa
dernière date avant le retour vers Ottawa et c’est
bien décidé à tout donner que les
Canadiens viennent dynamiter la Markplatz à grands coups de
leurs compositions pleines de saveur. Avec son blues qui sent bon le
bayou mais aussi le rhythm’n’blues, le rock et le
gros son roots du Sud des Etats Unis, MonkeyJunk crée
à chaque fois la surprise et ce n’est pas sans
raison que le trio a reçu une vingtaine de Maple Blues
Awards au Canada mais aussi un Blues Music Award à Memphis.
Porté par le chanteur et multi-instrumentiste Steve
Marriner, le groupe vibre à l’unisson de sa
guitare baryton, mi-basse mi-guitare, et n’en finit plus de
produire de véritables déflagrations blues devant
un public conquis qui ne demande rien de plus. Véritable
phénomène mélangeant technique,
feeling et originalité sur la scène
internationale, le power trio se montre autant à son aise
dans les titres lents et poisseux que dans les pépites plus
musclées, la réunion de tous ces
ingrédients donnant au bout du compte une prestation
particulièrement dense et harmonieuse. Assurément
un des tous meilleurs groupes de blues de sa
génération !
On en arrivé déjà au gros morceau de
cette ultime soirée avec Jason Ricci & The Bad Kind,
l’harmoniciste aussi doué que turbulent semblant
bien décidé à imprimer sa propre
marque de fabrique sur cette 27ème édition du
BluesFest Eutin en y mettant une grosse dose
d’énergie et en déversant dessus des
palettes entières d’un Chicago Blues
dopé aux sons des années 2000. Un peu de
délicatesse mais aussi beaucoup de testostérone
dans une musique qui sent le groove et le sex appeal dont le bad boy
inonde la foule à la force de ses harmonicas et de sa voix
habitée, plus on avance dans le set et plus
l’ambiance se fait moite, presque malsaine par moment.
Quelques successions de râles animaux entre deux blues, des
atmosphères qui nous feraient presque partir du
côté de la Transylvanie à
l’occasion, si Jason Ricci cherchait à venir
bousculer le confort dans lequel l’assistance se complait, il
ne s’y prendrait pas différemment, mais la formule
fait recette et le public répond présent aux
invectives d’une formation qui ne le ménage pas,
loin de là. Quelques passages par des terrains connus comme
« I Put A Spell On You » et voilà un
concert qui aura tenu toutes ses promesses, et quand bien
même les plus sensibles auront déserté
le devant de la scène, c’est un foule compacte qui
restera bien présente pour la grande jam finale !
L’heure est aux remerciements et on invite sur la
scène ceux sans qui le festival ne serait rien, les
bénévoles qui se décarcassent
à trouver des trésors
d’ingéniosité qui pour transporter les
artistes, qui pour accueillir les invités voire pour les
héberger … Une attitude qui se perd dans nombre
de grands festivals mais qui reste dans l’air du temps en
Allemagne !
Le temps de présenter une fois encore le prix Twoj Blues du
meilleur
festival international et il sera bientôt l’heure
de lancer la jam avec
Big Mama Montse, rejointe au pied levé depuis le public par
un
harmoniciste inconnu mais fort bienvenu. Georg Schroeter et Marc
Breitfelder prennent ensuite les choses en main et ce sera
bientôt parti pour un long moment où se
succéderont divers artistes présents tout au long
du festival et notamment tous ceux présents
aujourd’hui … Encore un grand moment de
convivialité qui nous donnera l’occasion de saluer
des amis que nous retrouverons très vite sur le route des
festivals parce que le blues européen est une famille et que
cette famille aime à se retrouver
régulièrement lors des grands
évènements ! Un grand merci à nos
hôtes qui ont été cette fois encore
parfaits …
Fred Delforge
– mai 2016
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