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PURA FE à l'AUDITORIUM DU MUSEE DU QUAI BRANLY (75) pdf print E-mail
Ecrit par Fred Hamelin  
samedi, 02 avril 2016
 

PURA FE
AUDITORIUM DU MUSEE DU QUAI BRANLY – PARIS (75)
Le 13 mars 2016

http://purafe.com/

Grands remerciements à Jean-Hervé Michel et Yohann Feignoux de Nueva Onda

Taj Mahal dit d'elle qu'elle chante comme les oiseaux ... Pura Fé ... Trois syllabes qui s'énoncent doucement, en prenant son temps, pour en apprécier chaque son pour chaque instant. Tuscarora par sa mère (les Tuscaroras sont l'une des six nations Iroquoises) et Portoricaine par son père (d'où d'autres racines noires), héritière d'une longue tradition puisque fruit de huit générations de chanteuses, Pura Fé est une blueswoman d'exception qui mêle ses chœurs traditionnels et ses mélodies natives à des sonorités souvent plus rock. Pour donner à ses blessures et ses souvenirs leur juste résonance, Pura Fé a mis visiblement ce qu'il fallait de temps, de maîtrise et de soin. D'où cette rare conjonction de tripes et d'élégance et, derrière une sobriété instrumentale déguisée, des choix d'arrangements très sûrs : violoncelle, guitare et batterie légère, le tout agrémenté de diverses percus dont un tambourin fétiche.

C'est donc dans un cadre prestigieux et pour le moins approprié, l'auditorium du Musée du Quai Branly, consacré aux arts premiers, et sous un éclairage d'exception qui ferait jalouser certaines salles parisiennes, qu'eut lieu ce concert. Parce que sa musique vit aussi pour ses racines et honorer la mémoire des ancêtres, sa finalité est aussi de témoigner pour la nature, militer tant pour le respect de l'environnement que pour l'émergence d'une conscience identitaire. L’activiste et féministe Pura Fé a fondé non seulement une organisation pour les femmes indiennes et leur reconnaissance au sein de la société, mais participe également avec son mari, guérisseur natif reconnu, à « Green Arrow Healing », centre d'hébergement et de reconstruction pour adultes.

Sur des textes qui racontent les convictions humanistes de leur auteur, en plus de reprises assez étonnante de Duke Ellington (« In a Sentimental Mood ») et d'une improvisation sur Norman Greenbaum (« Spirit in the Sky »), Pura Fé nous plonge au confins de l' intime et nous surprend par son originalité, charriant avec elle les légendes et refuges mélodiques d'un peuple que l'oubli n'a finalement jamais guetté. Pour ce concert, la petite troupe composée d'Eric Longsworth au violoncelle, de Stéphane Notari aux drums et percus et Rémi Charmasson, issu du jazz, aux guitares, nous donnera un aperçu assez large de son talent, avec des morceaux bien sûr issus du dernier album « Sacred Seed » (sorti chez Nueva Onda) comme « River People » aux sonorités presque celtiques, « Woman's Shuffle », honnête bluesy rock, « Mohomeneh » et ses longues incantations en langue Tuscarora ou « Idle No More » du nom du mouvement contestataire autochtone. Viendront ensuite s'ancrer çà et là quelques titres phares dont « My People, My Land » ou encore « Hold the Rain ». Pura Fé y jouera aussi de la lap-steel-guitar pour des morceaux très intimistes, offrant ses longs cheveux enfin détachés et ce doux sourire énigmatique dont elle a le secret.

Devant se tient une voix mûre pour les confidences, harmonisant à l'occasion avec elle-même. Cette voix éraillée et parfaite oscille continuellement entre graves invocateurs et aigus délicats. Parcourant les ombres et les lumières, les petits matins enneigés, les dernières fois qui ne se savent pas dernières et tout un monde qui paraît se réveiller dans une douceur terrible, Pura Fé évoque sa nature chérie et abîmée, son désœuvrement, le cours du monde avec une simplicité et une justesse désarmantes. Avec ce type d'arrangements bluesy voire jazzy, ce timbre de voix, ces inflexions vocales subtiles, Pura Fé laisse glisser des mélodies enivrantes, accompagnée par le violoncelle de Longsworth qui soutient tout en douceur et magnifiquement le charisme de l'artiste. Cela amène ainsi une profondeur rassurante et une chaleur apaisante. Pura Fé est une véritable songwriter qui vous prend par la main le temps d'une balade qu'on aimerait ne jamais voir se terminer.

Fred Hamelin – mars 2016