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Ecrit par Yann Charles |
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mardi, 08 mars 2016
MYRATH
http://www.myrath.com/
Myrath est un groupe de metal symphonique tunisien qui est totalement
atypique dans le paysage rock. Leur dernier album, « Legacy
», est un petit bijou de mélange de cultures, de
sonorités, d'harmonies et de puissance. Pour nous parler du
groupe et de sa musique, c'est le bassiste Anis Jouini qui a bien voulu
répondre à nos questions.
Anis, bonjour.
Bonjour.
Pourriez-vous vous
présenter pour nos lecteurs de Zicazic ? Parlez nous du
groupe, Myrath ? D'où venez vous, comment vous
êtes vous formés ?
Myrath était à la base un groupe de reprises
formé par Malek (le guitariste) connu à
l’époque sous le nom de Xtazy. Nous
étions assez jeunes (15 ans) et notre but était
de jouer les morceaux de nos idoles de l'époque.
Étant en Tunisie, Il n'y avait aucun disque de metal dans
les magasins, on se passait nos groupes
préférés en copiant les albums sur des
cassettes. Il n’était pas question de mettre nos
origines dans notre musique, ni même de composer.
L’idée était vraiment de travailler
notre technique en se faisant plaisir en "singeant" les groupes
européens et américains. Ce n’est que
bien plus tard que les choses ont commencé à
devenir sérieuses et définitivement à
l’arrivée de Kevin Codfert, notre producteur, que
nous avons compris l’intérêt de proposer
notre propre musique.
Si on regarde bien,
« Myrath » signifie « Héritage
», et « Legacy » également.
Pourquoi ne pas avoir fait un album éponyme plutôt
?
La question serait plutôt pourquoi maintenant ? Nous avons
traversé un long passage à vide après
« Tales of the Sands ». Le groupe a bien
sûr commencé à tourner et à
fédérer de plus en plus de monde mais quelque
chose de tragique nous a obligés à mettre le
groupe en stand-by. Le papa de Malek, qui était aussi
manager du groupe à l'époque, est
décédé subitement. Cet homme
était tout pour nous et il a été
très difficile de surmonter cette épreuve.
L'album « Legacy » est un hommage au papa de Malek,
c'est notre héritage.
Musicalement on vous
décrit comme un groupe de metal progressif oriental mais
pour cet album « Legacy », on est plus dans le
symphonique non ?
L'album est effectivement plus symphonique que progressif, il y a des
influences orientales mais aussi tunisiennes et andalouses. Il y a des
riffs berbères mais aussi « junt » et
sur certains passages electros et alternatifs. Nous ne savons
même pas comment décrire notre musique, ou du
moins on le fait à posteriori. Il n'y a pas de calcul
pendant le processus de composition, on ne sait donc pas ce que
ça va donner.
« Legacy
» est il un concept album ? Qu'est ce qui vous a
inspiré pour les textes cet album ?
« Legacy » n'est pas un concept album, il y a bien
sûr une trame musicale, posée par le groupe. Les
arrangements font office de liant pour une bonne
homogénéité, mais chaque chanson
raconte une histoire différente. Nous avons eu deux
paroliers sur cet album : Perrine Perez-Fuentes et Aymen Jaouadi,
parolier historique. C'est d'ailleurs la première fois que
nous travaillons avec Perrine, qui a su amener une touche de
féminité à la chose. Nous sommes
très satisfaits du résultat.
Comment se sont
passées les compos ?
Nous nous sommes enfermé il y a un an dans une petite maison
dans le sud de la Tunisie. Elyes et Kevin Codfert sont venus avec pas
mal d'idées, nous avons ensuite travaillé
ensemble pour faire prendre vie à ces idées. La
base de l'album était posée en une semaine, mais
le plus long restait à venir. Ce qui prend le plus de temps
dans la création musicale est de trouver la bonne
atmosphère, la bonne manière de
mélanger les éléments occidentaux et
orientaux, et cela n'est pas chose facile. Le rendu sonore entre dans
le process de composition.
Comment vous est venue
l'idée de faire appel à un orchestre symphonique ?
Notre musique incorpore des quarts de ton, il est quasiment impossible
de reproduire cela avec des samples. Nous avons toujours
travaillé avec des vrais violonistes, mais cela
représente un budget conséquent. Nous avions un
violoniste sur le premier album, puis trois sur le suivant, etc. Nous
nous sommes dit pourquoi ne pas avoir une section corde
complète ça sonnera à mort. (Rires).
Les enregistrements se
sont faits entre Paris et Tunis, comment avez vous travaillé
?
Nous avons "parallélisé" les enregistrements.
Pendant que Malek et moi-même enregistrions les guitares et
basses dans le studio parisien de Kevin, Morgan enregistrait les
batteries à Lyon chez Noisefirm studio. L'enregistrement du
chant a aussi été fait chez Kevin, et nous avons
d'ailleurs pris du temps pour essayer plein de micros
différents sur Zaher. Celui qui a retenu notre attention
était un vieux U47 de Neuman qui avait servi dans les
studios d'Abbey Road pour l'enregistrement d'un album des Beatles. Nous
avons ensuite terminé les pianos sur Paris et sommes
descendus à Tunis pour l'enregistrement de la section corde.
Kevin est venu avec tout le matos (micros, preamp, carte son, etc.) et
nous avons fait toutes les prises là-bas.
L'album a
été mixé par Jens Bogren (Opeth) et
Kevin Codfert (Adagio). Pourquoi avoir fait appel à eux ? Et
que vous ont ils apporté ?
Kevin est membre à part entière du groupe. Il
nous produit depuis le début mais il compose
également et gère tout le business autour de
Myrath. C'est lui même qui nous a conseillé de
travailler avec Yens Bogren pour que ce dernier amène une
oreille fraîche à nos morceaux. Il nous a
apporté du recul et son expérience, ce qui a
permis de faire évoluer le son du groupe.
Pouvez-vous nous parler
de la mouvance metal en Tunisie. Y a t il beaucoup de groupes et de
fans de ce type de musique ?
Malheureusement, il y a très peu de groupes. Cela est
dû au manque de structures, de matériel et
d'écoles. C'est très difficile (impossible ?)
pour un groupe tunisien aujourd'hui de s'exporter. Notre monnaie n'est
même pas convertible. Nous avons cependant deux autres
groupes en Tunisie (Persona et Nawather), dont un fondé par
l'ancien batteur de Myrath, qui commencent à faire du bruit.
On sent les influences de
tout le folklore et de la musique tunisienne, mais aussi pas mal de
musique classique, quelles sont vos références
musicales ?
Nous avons quasiment tous une formation classique. Malek a pris des
cours au MAI à Nancy en même temps que Morgan, il
y a donc un fort baguage rock / classique dans le groupe. Nous sommes
fans de Chopin, Rachmaninov, Bach, etc. Ces influences ressortent
parfois quand on commence à composer.
Y a t il un message dans
votre musique ?
Oui, nos compositions expriment un ressenti émotionnel,
physique, en relation avec notre vécu, nos
difficultés en tant que Tunisien, la révolution,
le décès du papa de Malek, nos nuits dehors
à défendre nos maisons avec des armes de fortune.
Nous avons une histoire, quelque chose de physique à
exprimer.
Vous devez faire la promo
de cet album, vous dites quoi ?
Allez acheter notre album, Myrath fait parti des rares groupes
à chanter l’authenticité, à
mettre ses tripes à nu. Malheureusement de moins en moins de
groupes comprennent que ce sont les émotions
dégagées par leur musique qui font
qu’on les écoute. En plus, on sera en concert
à Paris le 23 juin (Divan du Monde), pour la
première fois en tête d’affiche, avec un
vrai spectacle (violonistes, danseuses, show lumière, etc.)
Dernière
question n'a rien à voir avec les autres : quel est le
dernier album que vous avez écouté, à
l'exception du votre ?
Le dernier Dream Theater, « The Astonishing »,
album aussi riche que difficile à apprivoiser.
Merci beaucoup pour cette
interview !
Merci à toi.
Propos recueillis par
Yann Charles
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