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Ecrit par Yann Charles |
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lundi, 07 décembre 2015
MASS
HYSTERIA
https://www.facebook.com/masshysteriaofficiel/
NDLR : Cette interview a
été réalisée avant le drame
du 13 novembre 2015.
Le nouvel album de Mass Hysteria, « Matière Noire
», était très attendu, et personne n'a
été déçu. Entre puissance,
énergie, textes engagés et toujours aussi
rageurs, le groupe phare du metal français a
frappé très fort avec son huitième
album. Et la rencontre avec Rapha le batteur et Vince, le bassiste, a
été l'occasion d'en savoir un peu plus.
Bonjour, pouvez-vous vous
présenter pour les lecteurs de Zicazic ?
Salut, Rapha, batteur depuis une vingtaine d'années, et
Vince, bassiste depuis 2012 …
On entre dans le vif du
sujet, avec « L'Armée des Ombres » il y
avait un rapport avec le film de Melville, pour «
Matière Noire » c'est cette matière
noire, inconnue, indétectable, infinie qui peuplerait
massivement le cosmos ?
Rapha : Tout à fait c'est ça, tu as
répondu toi-même à ta question !!! Et
c'est aussi pour Mouss son interprétation. C'est aussi un
parallèle avec la masse manquante des gens qui votent blanc
par exemple, ceux dont l'avis ne compte pas, ou les gens à
qui on ne donne pas la parole, et pour moi la matière noire
c'est ça. Je crois que Vince tu es d'accord avec moi, une
espèce de chape de plomb qui est autour de nous actuellement
dans les medias : tout va mal. Evidemment que tout ne va pas bien mais
comme disait Vince un peu avant cette interview, il y a aussi des
choses bien qui se passent. Pour moi la matière noire c'est
aussi cette espèce d'élite, ces experts en tous
genres qui nous disent ce qu'il faut penser, ce qu'il faut boire, ce
qu'il faut manger, ce qu'il faut fumer ou ne pas fumer,
écouter ou ne pas écouter, lire ou ne pas lire,
et qui voudraient que tout le monde pense pareil. Voilà,
nous on lutte contre ça avec la musique.
Vince : Oui, comme on parlait tout à l'heure il peut y avoir
plein d'interprétations par rapport aux gens qui vont
découvrir l'album et regarder cette pochette, ça
dépend de ce que chacun vit dans sa vie de tous les jours,
et de sa position dans la société. Pour quelqu'un
qui est proche de la condition féminine y a quelque chose
d'irritant, de conditionnel, il y a plein d'interprétations
différentes et nous on livre la nôtre. Ensuite aux
gens de faire leur propre interprétation.
Musicalement, cet album
paraît être à mon avis le plus puissant
que vous ayez sorti, même si « L'Armée
des Ombres » n'était pas mal non plus. C'est une
nouvelle étape du groupe ?
Vince : On ne s'en est pas forcément rendu compte parce que
nous, on a la tête dans le guidon. On a composé et
on a voulu délivrer le meilleur album possible.
Après, on est assez galvanisés et assez contents
que ce soit perçu comme ça.
Rapha : On a toujours cherché à être
puissants, enfin je ne sais pas ce que ça veut dire mais
proposer un truc dur, lourd. Il y a une question de
production aussi et là je reconnais que Fred Duquesne a fait
du très bon boulot et il a réussi à
capter l'énergie du groupe.
Justement que vous ont
apporté Fred Duquesne et Ted Jensen ?
Vince : Fred sur « L’Armée des Ombres
» était uniquement producteur donc quand il
t'enregistre, il ne connait pas forcément tes morceaux. Il
prend les choses au fur et à mesure. Alors que là
il a participé aussi à la composition. On voulait
amener le morceau de A à Z et donc il voulait être
plus performant sur chaque morceau. Je pense que ça a fait
la différence.
Rapha : Oui, il s'est bien cassé la tête pour cet
album. (Rires)
Il a peut-être
amené une autre oreille, une autre écoute que
celle que vous aviez vous ?
Rapha : En fait quand Fred est arrivé dans le groupe, on
était déjà sur la fin de la compo. Il
a amené des gimmicks en plus, et de nouvelles
idées. Mais il n'a pas été
à l'origine de la compo de l'album donc du coup il a encore
son côté détaché de
producteur.
Vince : Et on ne l'a pas freiné ! Vu qu'il a une aisance
technique pour faire des solos de guitares par exemple, ça a
galvanisé Yann qui a lui aussi trouvé avec lui
une complémentarité guitaristique de folie. Parce
que quand il joue on se dit : "mais qui est qui" ? Ça fait
vraiment un mur du son et du coup on n'a pas brimé Fred
quand il est arrivé. Il a composé avec nous, on
lui a montré les rifs de tous les morceaux. Il a dit "Est ce
que je peux placer ça ou ça". Une
façon de composer un peu comme un bœuf tu vois. Et
on disait "ben ouais, c'est impeccable là" ou des fois "n'en
fait pas trop là, reste un peu Mass Hysteria".
Rapha : Puis attention, Yann a une vision très claire et
précise de Mass.
Vince : Ouais, une vision qui est peut-être un peu
étouffante, mais il a une direction et une vision pour le
groupe. Même si sur le moment tu te dis "Ah ça
fait chier, j'ai envie de faire ci ou de faire ça", tu
t'aperçois au fur et à mesure qu'il va toujours
à l'essentiel. Même si nous, avec notre instrument
et notre façon de jouer, on apporte quelque chose
à Mass Hysteria pour sublimer l'album, l'enrichir et donner
quelque chose d'intéressant à écouter.
On annonce cet album
comme le plus ambitieux que vous ayez sorti, pour vous c'est au niveau
son ou au niveau texte ?
Vince : Je ne sais pas trop ce que ça veut dire
ambitieux. Tu sais on a trop la tête dans le guidon
pour se poser ce genre de question. Ambitieux, ambitieux …
Pour nous ce qui compte c'est de donner des live de folie …
Les singles, les trucs, les machins, c'est d'être bien vu,
d'être caressé dans le sens du poil, mais on n'en
a rien à foutre. Nous ce qu'on veut c'est la communion avec
le public. Quand on a fini nos balances, on sait que le concert est
full et qu'on va donner tout ce qu'on pourra.
Rapha : Oui, le plus ambitieux musicalement, c'est sûr. Les
riffs ont vraiment été bossés et tout,
et on voulait passer un petit cap, ouais. Cet album là je ne
sais pas si c'est le plus ambitieux ou le plus extrême comme
dit le communiqué de presse. Evidemment oui plus
extrême pour du Mass Hysteria. Mais c'est pas devenu un
groupe de black metal tu vois. Ça reste du Mass. On voulait
un album pêchu du début à la fin, que
tu prennes les onze titres comme dans le temps où tu
achetais un disque de Pantera par exemple, tu savais que tu allais
écouter les onze morceaux et que ça allait faire
"bim dans ta gueule". Tu vois genre « Vulgar Display Of Power
». Voilà, c'est ça notre truc, ce qu'on
veut donner.
Les textes sont toujours aussi
puissants. Bon là, c'est plus Mouss qui est
concerné mais il est toujours dans cette
dénonciation des inégalités parce que
malheureusement les choses font que ça n'évolue
pas dans le bon sens. D'où vient l'inspiration?
Rapha : Oui, justement. Il y a une des phrases que j'aime beaucoup dans
l'album, c'est "C'est dans l'espérance et le refus,
bientôt libre esclave de la grande plantation", ça
veut dire ce que ça veut dire. C'est à dire que
maintenant on vit dans un monde où t'as des gens qui font
des études bac +12, 13, 15, et qui doivent s'estimer heureux
de trouver un boulot à 1.500 balles par mois, c'est une
sorte d'esclavagisme moderne.
Il y a un titre qui m'a
marqué, c'est « L'enfer des dieux ».
C'est pas nouveau, vous avez toujours dénoncé ce
fanatisme qui montait, qui montait, et malheureusement ça
continue encore.
Vince : Depuis que j'ai une dizaine d'année je pense, mon
père m'a toujours appris à me méfier
des extrêmes et des fanatiques, et Trust aussi à
l'époque avec des morceaux comme « M.
Comédie », « Fatalité
» ou sur « Marche ou Crève »,
tous les textes sur la junte militaire ou religieuse, donc
voilà ça c'est dans mon ADN. Quand t'allumes ta
télé ou que tu lis les journaux tu vois qu'il y a
pratiquement 80% de ce dont on parle dans les médias en ce
moment c'est des histoires de religion. Là je parle pour
moi. En tant qu'athée ça me fout les boules. Je
crois qu'en fait la majorité des gens sur terre est
athée, donc faudrait peut-être
s'intéresser à eux aussi.
Forcément Mass
Hysteria est un groupe de scène, mais tous les titres
sont-ils composés pour être joués sur
scène ? Je suppose que vous faites tourner sinon vous devez
vite vous lasser et ça doit se sentir, comment on
détermine une set list ?
Vince : Eh bien ceci étant mon rôle, je dois bien
vous avouer que là c'est un problème. Enfin c'est
un problème oui et non. Cet album là, tous les
gens qui l'ont écouté et qui nous en parlent nous
disent qu'ils aiment tout en fait, tous les morceaux. Sauf qu'on ne va
pas pouvoir jouer tous les morceaux. Ou alors il faudrait faire un set
de l'album et après tous les "classiques".
Peut-être pour une date spéciale ou deux, ce
serait possible. Mais là le but c'est d'arriver à
garder le maximum de « L'Armée des Ombres
», de « Une somme de détails
», de « Faille », de «
Contradiction ». Bon je vous rassure tout de suite il n'y
aura toujours pas de « De cercles en cercles » et
de l'album « Noir ». Mais là
à mon avis ça va être un set qui va
être basé à peu près sur le
set de l'Olympia, on va dire pour ceux qui y étaient ou qui
ont vu le DVD, le set de la dernière tournée en
fait avec quatre ou cinq morceaux de « Matière
Noire » qui seront fixes et cinq autres titres de «
Matière Noire » qui tourneront à chaque
set. C'est vrai que quand on est en répétition on
a envie de tous les jouer. Quand on joue l'album en entier,
ça passe comme une lettre à la poste (Rires) et
après on attaque les anciens, donc je ne sais pas, c'est un
peu compliqué.
Quand vous composez,
comme vous êtes un groupe de scène, chaque morceau
est composé pour être joué sur
scène ou certains sont composés uniquement pour
l'album et on ne les mettra jamais sur une scène ?
Vince : C'est arrivé, on a fait ce qu'on appelle des
morceaux d'album. Mais c'est vraiment rare ou alors c'est ceux qu'on
aime le moins. Là il se passe qu'on a
répété tous les titres et que ce sont
tous des bombes alors du coup tu vois dans ce nouvel album aucun titre
n'est mis à la ramasse, ce qui est vraiment
intéressant parce qu'on peut potentiellement tous les jouer
sur scène.
Rapha : On n’a vraiment que des problèmes de
riches là. (Rires)
Vince : C'est quelque chose de vrai en plus, qu'on n’avait
pas forcément sur « L'Armée des Ombres
», en toute franchise on a essayé de jouer au
moins une fois chaque titre en live.
Rapha : Et honnêtement, il y en a qui ne fonctionnait pas du
tout, tandis que là je pense que vraiment tous les titres
sont faits pour la scène.
Je pense que franchement
sur scène ça va accrocher, il y a des morceaux
qui vont être même super puissants.
Vince : L'album dure 42 ou 43 minutes, un set c'est une heure et demie.
On peut très bien le jouer intégralement et
après jouer 45 minutes d'autres morceaux … C'est
plein d'aventures comme ça dans Mass, parfois on se tape des
délires. J'en parlais avec une autre journaliste qui me
posait la même question par rapport à la set list.
Quand je suis rentré dans Mass on a commencé
notre tournée en Belgique pour trente dates, et chaque soir
on a changé la set list. On me disait tu connais «
Dernier tango » tu connais ça, tu connais machin,
et je disais oui celui-là je l'ai bossé. Des
fois, on le bossait l'après-midi ou en balance et si on
avait l'opportunité on le jouait le soir. On
changeait chaque fois la set list, et les habitués qui nous
disaient "Ca fait trop du bien, je l'avais pas entendu depuis
longtemps", "ça fait 5 dates que je vous vois en concert et
c'est jamais la même set list". Ils étaient
galvanisés et ils étaient contents.
Avec nous tout et n'importe quoi peut se passer. En fait il faut suivre
Mass sur la tournée pour tout avoir. (Rires)
Est-ce que vous attendez
quelque chose de particulier de cet album ?
Vince : Du live merveilleux, c'est tout ce que je souhaite.
Rapha : Ouais moi aussi.
Vince : Moi je m'en fous des placements de disque, c'est
très bien pour les labels et tout et j'en suis content parce
que c'est les gens avec qui on travaille.
Rapha : Et en plus ça se passe très bien en ce
moment.
Vince : On n'est pas du genre à cracher dans la soupe. On
veut que tous les gens qui travaillent avec Mass Hysteria soient
aisés avec nous, on ne met jamais personne de
côté.
Rapha : Que tout le monde en profite et si ça marche tant
mieux.
De toute façon
sur scène, c'est là que vous vivez totalement
votre musique, disons que le studio c'est plus entre vous …
Vince : Oui, si tu nous dis qu'on va faire un Bercy, on ne va pas
penser qu'à nous même. On va faire un Bercy
certes, mais en même temps on va attirer plein de gens. On va
vouloir qu'il y ait des choses qui se galvanisent autour de
ça, des choses qui se passent avec d'autres groupes. On aura
envie certes d'apporter notre pierre à l'édifice
parce que ce sera notre show mais les gens ne seront pas
laissés par rapport à ça. On a envie
vraiment d'apporter quelque chose de familial, d'important et de
partager avec plein de gens, le public et d'autres groupes à
chaque fois.
Dernière
question : « Plus que du metal », c'est la chanson
qui définit Mass Hysteria maintenant ?
Vince : La chanson qui définit le mieux Mass, je pense que
c'est « Positif à bloc ». «
Plus que du metal », c'est la vision de Mouss qui est
peut-être moins axé sur le metal que des personnes
comme Rapha et Yann. Ce sont vraiment des enfants du Hard Rock en fait,
qui ont grandi la dedans et qui ont toujours été
attachés au trash, au hard rock, au metal en
général.
Rapha : Oh mon dieu (Rires)
Vince : C'est la vision de Mouss de vivre ça avec Rapha et
Yann, même bien avant que je sois là.
Rapha : En fait c'est ça, « Plus que du metal
», ça me plait bien. Il y a cette notion de
famille. On va prendre le cas du Hellfest encore, où tout le
monde se retrouve que tu sois agriculteur, que tu sois juge pour
enfant, que tu sois policier, que tu sois informaticien, ou ce que tu
veux.
Vince : Que tu ais le look de Dee Snider ou que tu ressembles au mec de
Behemoth, tout le monde est dans la même famille et y a pas
d'embrouille. Que tu sois fan, musicien ou quoique ce soit comme on en
parlait tout à l'heure, notre plaisir, c'est certes de
s'alimenter au bar VIP en croisant David Vincent de Morbid Angel
(Rires), mais aussi d'aller dans le public et de communier tous
ensemble.
Rapha : Et attention, quand je parle de ça, je ne veux pas
que ce sonne communautariste. Cette famille là, elle est
ouverte et tout le monde peut venir.
Merci à vous.
Rapha : Merci à toi
Vince : Merci
Propos recueillis par
Yann Charles – novembre 2015
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