|
|
|
|
|
LA DEFENSE JAZZ FESTIVAL 2015 (2/3)
|
|
|
|
|
Ecrit par Fred Hamelin |
|
|
dimanche, 11 octobre 2015
LA
DEFENSE JAZZ FESTIVAL
PARVIS DE LA DEFENSE (92)
Du 27 juin au 5 juillet
2015
http://www.thebellrays.com/
http://www.righteousmind.co.uk/
https://www.facebook.com/iamjakeisaac
https://www.facebook.com/ladefensejazzfestival
Deuxième partie : The Bellrays – Jim Jones
Righteous Mind – Jake Isaac
En cette fin de semaine, le festival Jazz de la Défense,
comme il se doit éclectique, prend ses quartiers rock avec
le jeudi, le plateau Bellrays et les Righteous Mind, dernier projet en
date de Jim Jones, et le vendredi le jeune prodige de la
scène anglaise, Jake Isaac.
Le quatuor Bellrays s'articule essentiellement entre deux fortes
personnalités, d'une part la féline Lisa Kekaula,
une sorte de prêtresse de bonne largeur à la coupe
afro débordante et au timbre de voix Joplinien, et
à ses côtés Bob Venumm, guitariste sur
pile électrique qui s'octroie la scène
à lui tout seul à grands renforts de gimmicks
rock'n'roll et de sauts déjantés. En gros
imaginez Tina Turner chantant pour les Stooges, une recette explosive !
Les Bellrays, c'est aussi cette orchestration
étoffée et une attention toute
particulière portée sur la voix rauque de Lisa
qui donne ce cachet unique. Une voix sensuelle et chaleureuse, capable
de monter en gamme plus vite qu’un moteur de Corvette. Des
titres chauffés à blanc de fureur incandescente
et imprégnés d'un funk-soul torride qui n'a rien
à envier aux soul sisters, le tout relevé
à la sauce rock survolté au cachet «
Detroit ». Le MC5 n'est jamais très loin,
même sur certains titres soul parce que crasseux et salace.
C'est franc, massif, direct, brut de décoffrage, et c'est
terriblement efficace. C'est dans les vieux pots qu'on fait les plus
goûteuses confitures, Les Bellrays l'ont bien compris, ils
sont cependant l'un des rares groupes au son vintage à les
faire avec la créativité, l'énergie et
le génie nécessaires. Et sur le parvis de La
Défense, ce live commando n'a pas laissé le
public indemne !
Jim Jones, ou l'enfant chéri du rock'n'roll ... L'ex
chanteur des Hypnotics, après avoir enterré sa
Revue l'année passée, revient avec sa nouvelle
formation, les Righteous Mind, avec ce même crédo
toujours scandé haut et fort : « Say Yeah! Rock
You ! ». Avec l'énergie du blues et l'abandon au
rock, le groupe va arpenter la scène en prouvant son
énergie brute de décoffrage. Rien que du gras
gratté à l'os, mais Jones ne se salit pas les
mains tout seul, épaulé par le bassiste Gavin Jay
et le guitariste et pedal steel Malcom Troon de la Revue, de Matt
Millership (Tensheds) aux claviers et de Phil Martini (Quireboys)
à la batterie.
Combien, pour ne pas parler que des Black Keys, John Spencer et
Fuzzstones, se sont essayé à retrouver toute la
sécheresse et la violence primitive du rock'n'roll, combien
ont tenté ce pont qui va jusqu'aux racines du blues ?
Combien se sont plantés dans les larges mesures aussi ! Ici
rien n'est laissé au hasard. Avec ce nouveau combo, on s'en
doutait mais c'est rassurant d'en avoir ici la confirmation, pas de
sortie de route, non, ni faute de goût, ni remplissage
inutile. Et le son est cradingue, loin du feutré
numérique. Ca hurle, ça beugle, ça
suinte, ça sue, ça saigne ...
C'est par cette vision unique, cette punkitude du blues, cette
recherche continuelle d'un son à la fois roots, moderne,
sale et précis (oui, tout ça) que Jim Jones,
quelle que soit la formation choisie, impose cette énergie
et accomplit sa mission revivaliste et révolutionnaire
à la fois. Cette mission, ce sacerdoce, s'exprime par un son
qui a certes évolué avec le temps mais est,
cependant, toujours resté fidèle à une
recherche esthétique d'une honnêteté
à toute épreuve. Long Live Rock'n'roll !
Une belle surprise encore (il faut que j'arrête de m'extasier
!) en la personne de Jake Isaac, véritable
orfèvrerie entrainante, révélation
débarquée de cette perfide Albion qui n'en finit
plus de nous ravir coté son. Outre son talent de performer,
Isaac a aussi cette voix chaude dont les graves capitonnées
de velours peuvent furtivement évoquer Donnie Hattaway, et
un charisme qui interpelle toutes générations, et
aussi parce qu’il y joue du folk-rock à la guitare
acoustique et sait trousser une mélodie avec la fougue
naïve de sa jeunesse.
Sans s'avancer, on peut aisément affirmer qu'il rejoint
naturellement la grâce et l'élégance
mélodique ou stylistique du longtemps sous-estimé
Donovan. Mais avec ce ton décontracté et
effronté bien d'aujourd'hui. On sent que l'homme ne doit
rien à personne. Mais sûr de son talent, il
préfère surtout, par souci de
préserver son authenticité, apprendre et exercer
son métier à l'ancienne en se concentrant sur la
scène et la prestation live. Toujours le meilleur moyen pour
développer un répertoire et affiner un talent de
conteur. Car Jake Isaac est avant tout cela, un véritable
auteur en germe, avec un sens du récit et du refrain
inné.
A l’heure ou l’ivresse instrumentale,
orchestrée par toutes les nouvelles technologies via les
musiques électroniques, inonde la scène musicale,
Jake Isaac s’émancipe. Il puise dans les
tréfonds de sa voix, dans les méandres des mots,
une force pure et sensible. L’univers dans lequel
l’artiste nous projette ne côtoie pas la raison. Il
est cosmique et nous ramène à nos
émotions les plus profondes. Entre chansons
énigmatiques, errances poétiques ou textes
sombres, la spontanéité de son coffre laisse
sans-voix. Du côté de Bill Withers
plutôt que de Dylan, une longue et belle route
s’ouvre devant Jake Isaac !
Fred Hamelin –
octobre 2015
|
|
|
|