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LA DEFENSE JAZZ FESTIVAL 2015 (1/3)
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Ecrit par Fred Hamelin |
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samedi, 10 octobre 2015
LA
DEFENSE JAZZ FESTIVAL
PARVIS DE LA DEFENSE (92)
Du 27 juin au 5 juillet
2015
http://www.trickysite.com/
https://www.facebook.com/vaudougame
http://www.vincent-peirani.com/
http://www.indrariosmoore.com/
https://www.facebook.com/ladefensejazzfestival
Première partie : Tricky - Vaudou Game - Vincent Peirani -
Indar Rios-Moore
Tous les ans depuis maintenant 1977, et oui, l'édition 2015
était la 38ème, a lieu le Festival de La
Défense sur l'esplanade du centre d'affaires. Un rendez-vous
incontournable des amateurs de jazz qui a su évoluer au
gré des tendances actuelles et qui se veut un carrefour
ouvert à toutes les esthétiques des musiques
jazz, en témoigne une programmation qui cette
année ne déroge pas à la
règle réunissant à la fois jazz, soul,
funk, blues et rock et même hip-hop. Depuis quelques
années, ce festival gratuit se déroule sur neuf
jours avec deux week-ends d'ouverture et clôture, puis une
semaine complète avec deux concerts d'une heure entre midi
et 14h pour la pause déjeuner et une reprise de 18
à 20 heures pour la sortie des bureaux. Morceaux
choisis …
Pour une soirée d'ouverture qui se voudra sous le signe du
hip-hop - n'en déplaise aux esthètes du jazz-,
Tricky, pape du trip-hop underground, y posera cette
atmosphère électrique et oppressante qui fait sa
marque de fabrique depuis quinze ans. Affaibli et amaigri par des
années de crack, le prince n'a visiblement pas encore
trouvé le bout du tunnel et promène sa fluette
silhouette sur une scène enfumée et faiblement
éclairée, adossé un temps à
la batterie, dos au public qui tel chef d'orchestre en dirige le
batteur. Il apparait de temps à autre, pose sa voix grave et
déchirée, relayant Francesca Belmonte, sa
chanteuse.
Tricky en énerve plus d'un, mais ravit les autres parce
qu'outre sa prestation fuyante, il contrôle ce show sans en
avoir l'air, et la musique qu'il transmet vous touche au fond des
tripes et s'attaque à l'âme. Et vous ne
ressortirez réellement d'un concert de Tricky
qu'après avoir gobé l'antidépresseur
salvateur.
A retenir du lundi midi, la prestation exceptionnelle mais bien trop
courte du Vaudou Game de Peter Solo, le Togolais et ses comparses qui
réinsufflent un vent jeune à l'afrobeat
béninois des années 60 avec une aisance
déconcertante, le teintant aussi bien de rock que du funk.
Littéralement jouissif car riche et varié dans
les moindres détails, généreux et
sincère.
En un groove métissé et
décomplexé, pour porter cette musique
incantatoire qui vient des tripes, Solo tel un prêtre vaudou
élevé aux gimmicks Motown a assez de charisme
pour emporter l’adhésion d'un public qui se presse
aux barrières pour le suivre dans sa transe. Un live
véritablement extatique pour shaker son booty mais aussi
pour apprécier de grands moments de guitare comme
à la bonne époque des guitar-heroes avec des
riffs à vous faire dresser les poils sur les avant-bras.
Succédant au trio de Laurent Coulondre,
interprétation somme toute classique, la grosse claque du
mardi vient du nouveau projet de Vincent Peirani, Livin' Bein', un
quintet ou il partage la vedette avec le sax soprano Emile Parisien,
tous deux révélations des Victoires du Jazz 2014.
Peirani fait partie de cette génération montante
de jeunes musiciens de jazz qui ont validé leurs
études de musique classique au plus haut niveau, mais qui
ont grandi dans l'amour du jazz, du rock, de la world et même
des musiques électroniques.
Au fil des années et de ses nombreuses collaborations (Youn
Sun Nah, Richard Bona, Michel Portal, Daniel Humair, Sanseverino,
etc..) sa polyvalence et sa maitrise des différents langages
musicaux l'ont imposé comme l'un des musiciens,
interprète, improvisateur et compositeur, les plus accomplis
et les plus novateurs. Non seulement Livin’ Bein’
amène le jazz aux antipodes de son classicisme mais
libère aussi l'accordéon du carcan des
stéréotypes. L'univers joué est
éthéré, atmosphérique ...
Très Floydien en ce fait qu'il leur est donné
librement l'opportunité d'explorer de nouvelles
sonorités, un laboratoire se nourrissant d'influences
variées et qui produit çà et
là unissons, déconstructions variées,
hymnes complexes et polyphonies. A l'oreille, tout en fermant les yeux,
un régal auditif.
C'est sous un soleil de plomb, pratiquement 45° à
l'ombre sur le parvis et avec malheureusement un public qui a fui la
chaleur que la New Yorkaise Indra Rios-Moore nous offrira un
récital digne des grandes divas du jazz. Avec cette voix
très élastique et sensuelle, la soprano nous
ravit en toute simplicité, demi-sourire félin aux
lèvres, dans le simple appareil d’un
accompagnement guitare-basse-batterie-saxophone ténor venu
du Nord (des musiciens Danois), histoire de rafraichir un peu
l'atmosphère.
Elle y présente sur scène « Heartland
», un album de reprises représentatives de ses
origines éclectiques -jazz, blues et encore rock- avec cette
interprétation nonchalante, douceur et
sincérité oblige. Woodie Guthrie («
Little Black Train »), David Bowie (« Heroes
»), Duke Ellington (« Solitude »), Pink
Floyd (« Money »), ou encore Billie Holiday
(« What Becomes of the Broken Hearted ») se
succèdent, transfigurés par la voix sensuelle de
la demoiselle et l'atmosphère de jam session. Et
parce que les arrangements sont inédits et peuvent parfois
dérouter, c'est un pari réussi.
Fred Hamelin –
octobre 2015
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