|
|
|
|
|
Ecrit par Yann Charles |
|
|
mercredi, 07 octobre 2015
LITTLE
BOB
http://www.littlebob.fr/
Remerciements : Nadia (Kat Spirit Promotion), Dom.
Une rencontre
particulière sur Zicazic avec un grand Monsieur du
Rock’N’Roll français, Little Bob.
Même s'il n'aime pas ce mot, il est une légende au
même titre que Johnny ou autres. Et juste avant une date
très importante pour lui et son groupe Little Bob Blues
Bastards ce vendredi 9 Octobre au New Morning, il a bien voulu
répondre à nos questions. Un grand plaisir de le
rencontrer et de discuter avec lui.
Little Bob bonjour.
Salut à toi.
On entre directement dans
le vif du sujet et on va parler de cet album, « Howlin
», de Little Bob Blues Bastards ...
« Howlin » pour mon amour pour le Blues et pour
Howlin’ Wolf, y a un peu de ça
forcément. Il y a aussi une chanson sur l'album qui
s'appelle « I'm howlin », mais c'est surtout parce
que je pense que la Terre hurle en ce moment. Ca hurle partout. Il y a
des guerres, il y a des gens qui crèvent la faim, il y a des
immigrés qui se noient. Et puis écologiquement
aussi ça ne va pas. Donc le monde hurle parce que
ça va très mal, voilà pourquoi ce
titre. Mais je ne parle pas que de ça tout de même
dans cet album (Rires)
On vous sent
concerné et toujours aussi enragé aux travers de
vos textes …
Forcément. Je ne peux pas rester comme ça en
fermant les yeux, ou en me bouchant les oreilles. Bon, il y en a qui y
arrivent très bien, mais moi je ne peux pas. Je vis
là aujourd'hui, dans ce monde, ou dès que tu
regardes la télé ou que tu allumes la radio, il
n'y a que des trucs durs qui arrivent. Et donc j'ai écrit
des chansons là-dessus. Je ne sais pas ce qu'il va se
passer, mais on est dans une phase ultime tu vois. Il est
peut-être temps que les gens réagissent un peu
partout. Et ça ce n'est pas une question de partis que ce
soit de gauche ou de droite, surtout pas de droite de toute
façon (rires),
et donc il va bien falloir que les gens reprennent tout ça
en main. Et ce n'est pas en votant pour qui on vote ou que les sondages
disent que l'on va voter en ce moment en France, surtout pas.
Bon je sais que c'est pas avec mes chansons que je vais changer le
monde, mais quand en 1996 j'ai enregistré « We all
have a dream », inspiré du discours de Martin
Luther King, où je parlais de justice et de
solidarité, ben tu vois qu'aujourd'hui, ces mots ne font
toujours pas partie de notre vie.
Mais cet album, comme
vous le disiez avant, ce n'est pas que ça …
Oui, sur l'album il y a l'hymne des Blues Bastards, « We are
the Blues Bastards » par exemple où on dit qu'on
ne joue pas pour le diable mais pour les gens. Il y a aussi de belles
chansons d'amour, des chansons sur la joie, pas que des chansons
tristes, mais des trucs heureux.
Dans les belles chansons
il y a « Sleeping in a car » par exemple, qui est
terriblement d'actualité …
Effectivement. C'est l'histoire d'une fille qui habite dans sa bagnole
sur le parking d'un supermarché. Elle a un boulot, mais elle
a pas assez d'argent pour payer son loyer, ou l'avance de loyer comme
on te le demande maintenant. Et des gens comme ça y en a
plein malheureusement. Avec une super intro à la contrebasse
à l'archer sur un tempo Rock’N’Roll
vraiment cool.
L'album
précédent, « Break Down The Walls
», a été enregistré en one
shot, il en a été de même pour
« Howlin » ?
Effectivement, on l'a enregistré en deux jours, sans
réenregistrement. D'ailleurs tu le sens sur la voix
à certains moments. Tu sais c'était une
époque un peu dure pour la famille, donc je ne me sentais
pas d'écrire. J'ai composé trois titres, on en a
repêché deux, et le reste ce sont des covers. En
plus, je voulais installer les Blues Bastards. Donc c'est pour
ça qu'on a des reprises plutôt blues comme
« I Feel so Good » et d'autres morceaux qui sortent
un peu de ce que les gens écoutent
Aujourd'hui, j'ai eu le temps d'écrire tranquillement. Donc
là je suis vraiment positif par rapport à cet
album. J'aime bien les titres que j'ai écrits, et en fait on
entame le véritable premier album des Blues Bastards.
Y a-t-il un titre que
vous voulez mettre plus en avant sur cet album ?
Au départ, pour moi, c'était « Sleeping
in the car ». Mais Laurent Jezequel et Gilbert Carsoux m'ont
fait un Rockumentaire de 52 minutes qui s'appelle « Rockin
Class Heroe » et que vous verrez au New Morning juste avant
le concert, et ils ont fait un clip de 13 minutes sur « Only
Liars » qui est un des morceaux les plus durs de l'album et
donc c'est ce morceau qui a été
propulsé en avant. On n’est plus à
l'époque des singles … En fait il me faudrait
plusieurs singles !! (Rires)
Je reviens sur
l'enregistrement de « Howlin », vous avez voulu
conserver la méthode one shot pour avoir un rendu plus brut,
plus vrai ?
L'enregistrement est toujours one shot. Bon là on a fait
plusieurs one shot en fait. Autrefois, tu faisais une prise et le
morceau était sur le disque. Là, on a fait des
arrangements sur certains titres qui comptent le plus pour moi. Mais
par exemple, je n'ai retouché que trois fois mes voix. C'est
des voix live, sauf que cette fois on a pris environ sept jours. Donc
je ne me suis pas tué en chantant treize ou quatorze titres
en deux après midi. Là, on a pris notre temps
pour les faire car je voulais que tout le monde soit bien, pas
fatigué afin de pouvoir donner le meilleur de
soi-même. Bon, on a bien fait quelques petits rajouts de
guitares ou de contrebasse par la suite, mais on peut dire que tout a
été fait sur le moment.
Comment se passent les
compositions des textes ou des musiques, vous vous asseyez pendant des
heures, ou bien ça vient comme ça,
spontanément ?
Les sujets je les ai déjà avant si tu veux.
Après pour que ça sorte de façon
correcte pour moi, il faut que j'arrête d'écouter
de la musique, que je m'isole un peu chez moi. Je ne vois plus les
amis, je ne réponds plus au téléphone.
C'est ma douce qui s'occupe de ça. Et très
souvent c'est le soir que ça me vient. J'ai le texte,
l'idée de la mélodie, la musique qui vient avec.
L'idée de l'arrangement. Mais ensuite on les travaille avec
les musiciens. On répète, et au fur et
à mesure je leur dis ce que je veux ou ce que j'attends
d'eux. Et lorsqu'ils ont un truc à me proposer, on
écoute tous ensemble et si c'est bien on garde. On fait les
arrangements tous ensemble.
C'est ça, vous
n’êtes pas fermés aux propositions des
autres musiciens … Si l'un d'eux vous propose un truc qui
claque, vous ne dites pas non parce que ce n'est pas venu de vous.
Non pas du tout. Tu sais j'ai toujours aimé partager la
scène, mais je partage aussi ça. Et d'ailleurs
ils sont déclarés lors des
dépôts des titres à la SACEM comme
étant les arrangeurs avec moi. Tu sais ce sont des vrais
musiciens. Il ne faut pas que je les isole. Ils ne sont pas musiciens
de studio, même si ils pourraient le faire. Ce sont de vrais
musiciens, des musiciens de live. Et qui en plus aiment cette musique
là. Regarde le contrebassiste, c'est le même
depuis Little Bob Story, donc plus de 24 ans !! Gilles Mallet, avec
quelques petites coupures, ça fait 34 ans qu'on joue
ensemble. Mickey Blow c'est pareil. Et à la batterie, mon
neveu Jérémy Piazza, jouait
déjà à 8 ans sur mes disques en tapant
sur la table avec les baguettes de Nico Garotin, le batteur de
l'époque. Donc lui aussi est habité par cette
musique là.
Votre dernier album «
Howlin » est qualifié d'album Blues, ou
plutôt Blues Rock …
Je dirais Blues Batardisé plutôt. Chez Dixiefrog,
David Isaac a trouvé le Dirty Blues. Ça sonne
plutôt bien.
C'est un retour aux
sources le Blues ?
Si tu veux, pour moi, c'est plus nouveau que ce que je faisais avec
Little Bob ou Little Bob Story. Bien qu'il y ait toujours eu un
côté Blues dans ma musique, même si elle
était plus Rock’N’Roll. Mais tu sais,
dès le départ quand j'écoutais les
Stones ou tous les groupes que j'aimais, je me suis dit un jour :
"Autant que j'aille écouter ce qui les avait
inspirés eux". Et je pense qu'aujourd'hui les
mômes s'inspirent des derniers guitar heroes si tu veux, mais
pareil, allez découvrir les sources de tout ça.
Ce ne sera pas merveilleux au niveau du jeu de guitare ou autres, mais
il y a un feeling, je suis fan du Delta Blues, il y a une envie
là-dedans. Moi je suis fan du Delta Blues. Celui du
début, celui de la douleur, de l'amour ou de la joie qui les
faisaient chanter.
Y a-t-il des messages
à travers vos textes et votre musique ?
Des témoignages plutôt. Les messages tu sais
… La vie est tellement difficile aujourd'hui que je ne peux
pas être un donneur de leçon. Juste dire ce qu'il
se passe. Parler de ce qui me touche profondément et que
j'essaie de retranscrire avec ma musique. J'ai la chance
d'être bien entouré. De ma douce, mais aussi
pleins d'amis, comme Nadia notre attachée de presse ou Dom
notre graphiste, de musiciens qui m'aident à supporter tout
ça. Et tout ça me donne la force de continuer.
Car le métier est devenu d'une dureté incroyable.
Je reçois quasiment tous les jours des disques ou des mails
de jeunes groupes, pas mauvais, qui me demandent de les aider. Mais ma
réponse est la même : les mecs, aidez-vous vous
même. Moi je me débrouille tout seul. Je prends
l'officiel de la musique, je regarde les pages spectacles, les lieux et
les endroits qui peuvent me recevoir et j'appelle, on envoie des mails.
Voilà c'est un travail de fond. A une époque,
j'ai voulu passer par une agence à Paris. Et pour la
tournée de Blues Stories en 1997, ils m'ont
trouvé six concerts. Mais c'est pas possible !
J'ai un groupe et ce groupe doit exister et pour ça il doit
exister, aller sur la route. De mon côté j'en ai
trouvé une trentaine. Donc à, partir de
là j'ai arrêté et on a
créé notre petite structure. Et on avance comme
ça, même si c'est un boulot de dingues et que
parfois je préfèrerais être en studio
pour jouer ou bien prendre du bon temps, mais voilà,
maintenant c'est comme ça.
Voilà, donc mon message s’il y en avait un c'est
celui-là. Il faut se battre tous les jours, sinon t'es mort.
Un petit mot sur votre
douce, Myriam, à qui vous consacré une chanson,
« My Heart is Beating », Little Bob serait-il
Little Bob sans votre douce ?
Je crois que je ne serais même plus là. Au moment
où on s'est rencontrés, il tournait pas mal de
substances illicites, beaucoup trop d'alcool, de la coke et quand on
n’avait pas de blé, du speed. Je ne sais pas si je
serais encore vivant. En tous cas avec cette pêche
là aujourd'hui. Donc c'est grâce à
elle. Je me suis dit « la vie vous le coup d'être
vécu avec une personne comme ça », et
donc j'ai arrêté tout ça et je n'en
suis que plus heureux. Bon c'est pas que j'ai
arrêté de boire non plus, rassurez-vous (Rires),
mais désormais quand je bois c'est que du bon, et c'est
moins souvent qu'avant.
Tu sais l'amour c'est fort. Et ça fait 28 ans que
ça dure. C'est une merveille. Je peux compter sur elle, et
elle peut compter sur moi.
A travers toute votre
aventure vous avez joué avec beaucoup de très
grands musiciens, il y en a-t-il un ou plusieurs qui vous ont plus
particulièrement marqués ?
Pas spécialement. Moi c'est surtout les vieux Bluesman qui
m'ont marqué. Sinon y a des gens que j'adore
écouter comme Southside Johnny, ou Willie Deville,
Springsteen dans ses meilleurs albums comme « Born To Run
», une chanson qui me file les poils à chaque
fois. Y a aussi Jon Spencer Blues Explosion, ça c'est
énorme. Les Delta Saints aussi.
Un petit mot sur
Dixiefrog qui vous suit depuis longtemps ?
Philippe Langlois, le patron de Dixiefrog, est le mec le plus
honnête que je connaisse dans ce métier. Je sais
que c'est difficile pour lui, mais avec lui tu vois, je n'ai pas de
contrat longue durée. Il me dit "si tu veux aller sur autre
label, tu y vas … Et si tu veux rester chez moi, je suis
aussi content", et on signe album après album. Et moi je
continue d'être chez lui. C'est vraiment quelqu'un de bien.
Ce dernier album,
« Howlin », c'est le renouveau de Little Bob ? Ou
bien c'est un autre Little Bob ?
Non c'est toujours moi. Mais c'est vrai qu'il y a comme un air de
fraîcheur. Tu vois c'est comme un petit courant d'air qui te
fait du bien. Eh bien c'est ce petit air de fraîcheur
là. En tous cas quand j'ai écouté
l'album au mastering, ça m'a filé la
pêche, et surtout une positivité incroyable.
Alors il faut profiter de cette positivité là.
Parce que je vais l'avoir sur scène, comme au New Morning le
9 octobre. Et si les gens suivent, ben ça va être
encore meilleur.
Un dernier mot ?
Que je dure encore un peu et de continuer encore un long moment
à faire ce que j'aime. Je suppose que ce sera bien pour les
gens qui aiment cette musique.
Merci
Merci à toi Yann
Propos recueillis par
Yann Charles - octobre 2015
|
|
|
|