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BLUESFEST EUTIN (ALLEMAGNE)
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Ecrit par Fred Delforge |
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lundi, 18 mai 2015
BLUESFEST EUTIN
BLUESFEST
EUTIN
MARKTPLATZ –
EUTIN (ALLEMAGNE)
Du 14 au 17 mai 2015
http://www.bluesfest-eutin.de
Suivez les concerts en
direct sur http://www.rockradio.de
Se rendre à Eutin, c’est toute une aventure depuis
Hambourg, avec une succession de métros et de trains, mais
l’arrivée dans cette ville d’une petite
vingtaine de milliers d’habitants ne laisse aucun doute sur
le charme et l’authenticité des gens du Land de
Schleswig Holstein ! Une scène plantée sur la
place du marché, des stands pour se sustenter en solide et
en liquide, un public déjà nombreux pour le
premier de ces quatre jours de concerts et surtout quelques
éminents représentants de la
communauté blues internationale venus pour certains depuis
les Etats Unis ou encore la Lettonie, il faut dire que tout
auréolé d’un Keeping The Blues Alive
Award en début d’année, le festival
attire les professionnels du monde entier. La grand-messe allemande du
blues promet d’être belle avec à la clef
nombre de formations européennes …
Jeudi 14 mai 2015 :
Arrivé trop tard pour assister à la prestation du
Petra Börnerova Trio, c’est avec les Suisses du Joe
Colombo Band que commencera pour nous ce 26ème Bluesfest
d’Eutin. Emmené par le guitariste du
même nom, voilà un power trio tout en slide avec
un très fort syndrome de SRV, mais bon dieu que
ça joue bien ! On regrettera quand même le
côté tout instrumental d'un set un peu
téléphoné avec l'inévitable
cover de « Hydeaway », mais c'est joué
avec tellement de plaisir et de maestria que ça fonctionne
au quart de poil sur un public qui se déchaine
déjà ! La rythmique, solide et parfaite, ne se
fait pas prier pour prendre ses solos individuels et après
un voyage du côté de chez Hendrix pour finir de
plier l'histoire, nous aurons fait un joli tour non pas du blues mais
des blues, ceux qui vont du Texas à Chicago en passant par
le West Coast et, plus largement, par l'Europe !
On a pris un peu de retard sur l’horaire mais ça
nous permet d’aller retrouver les amis au restaurant du
festival et à notre retour, le public est encore plus dense
pour assister à la prestation du Nick Moss Band. Il ne s'est
d’ailleurs pas trompé car le bluesman de Chicago
nous sort le grand jeu, partageant le chant avec son acolyte guitariste
Michael Ledbetter mais gardant l’essentiel des solos pour lui
! Une Melody Maker toute récente ou une Telecaster qui a un
peu plus roulé sa bosse suffisent au guitariste pour nous
sortir des riffs bien pensés et si l’on
dérape de temps à autres à
côté du blues pur et dur avec des titres plus rock
voire même l’intro de « Hells Bells
», on reste en face d’une formation qui donne tout
pour le blues, ce dernier le lui rendant d’ailleurs assez
bien.
La force du Nick Moss Band, c’est avant tout son leader mais
c’est aussi la combinaison de deux chants
complémentaires, la présence d’une
section rythmique éprouvée avec Nick Fane
à la basse et Patrick Seals à la batterie et
enfin Taylor Streiff aux claviers qui apporte encore un peu plus de
relief et un peu plus d’énergie à un
blues moderne mais respectueux des traditions, un blues que le quintet
vit plus qu’il ne le joue, et ça se ressent
pleinement de l’autre côté de la
scène. Disponibles après leur concert pour signer
des autographes et discuter avec le public et le staff
l’organisation, les membres du groupe en seront
régulièrement félicités et
remercieront à leur tour l’assistance avec
beaucoup d’humilité …
La route a été longue et nous
déclinerons ce soir l’invitation du Nightfestival
dans la Brauhaus toute proche pour aller prendre un peu de repos bien
mérité … Le Bluesfest Eutin ne fait
que commencer mais il n’a pas lésiné
sur la qualité du plateau proposé pour sa
première soirée !
Vendredi 15 mai 2015 :
L’annonce de la disparition de BB King ce matin a fait
l’effet d’une douche froide mais le soleil est
là pour réchauffer les corps et c’est
de la plus belle des manières que nous penserons
à lui toute la journée, en écoutant de
la musique, et parfois même la sienne … On
commence l'après-midi en acoustique dans la petite salle du
Café Klausberger avec André Slotteroy du
Blueskollektivet venu nous présenter avec deux de ses
complices un échantillon de ce que les jeunes
Norvégiens sont capables de proposer . Un tango revu et
corrigé à la mode blues, des titres en
Norvégien, la salle un peu surprise répond
pourtant présent à l'unisson ! C'est
plutôt bon signe ...
Un
premier hommage informel avant le début du concert de The
Blueskollektivet et on entre directement dans le vif du sujet avec un
quintet qui fait des efforts vestimentaires mais qui ne se
ménage pas non plus rayon musique. Si le chant en
Norvégien surprend là encore, les titres ne
manquent absolument pas d'intérêt avec des
morceaux très teintés Chicago blues et d'autres
plus empreints de rhythm’n’blues ou de rock ! Une
bonne entrée en matière pour une
journée sans grande star à l’affiche
mais avec un programme qui se tient vraiment bien.
Nouvel hommage à BB King avec cette fois une minute de
silence précédée d'un message de
Bonnie Rait lu par Art Tipaldi visiblement ému et suivie
d'un « Early In The Morning » offert par les
brillants Danois de The Blues Overdrive en intro de leur concert !
La suite n'en sera pas moins bonne avec un quartet où les
guitares sont reines mais où la section rythmique fait elle
aussi bien plus que de la figuration. Un blues old school servi
à la sauce moderne avec beaucoup de feeling et de technique,
deux Gibson ES335 qui dialoguent admirablement et c'est parti pour un
concert sans aucune longueur et plein de détails. Un grand
moment de blues proposé au travers de deux sets explosifs !
Troisième et dernier groupe de la soirée, Adriano
BaTolba Orchestra vient nous offrir en formation complète
avec treize musiciens un show de rockabilly comme on n'en voit plus
souvent ! Un leader chaussé Gretsch, une contrebasse et un
échantillon de quatre saxophones, trois trompettes et trois
trombones, revêtant qui plus est l'uniforme du groupe, il
n'en faut pas plus pour que le public massé devant la
scène et visiblement acquis à la cause de
l’artiste et du genre réponde présent
à un grand rendez-vous ... Rayon photo, les pros se
retrouvent relégués sur le coin de la
scène pour en prime vivre de l'intérieur un show
pour le moins bouillant qui nous donne même au passage la
fièvre avec un « Fever » de
derrière les amplis.
Un petit passage en trio par les plus grands standards du rockabilly
mais aussi du rock fifties et sixties et ça repart de plus
belle avec le brass band au grand complet pour un show tellement
énergique que la scène en arrive presque
à plier sous le poids de la musique ! On parle souvent de
l'efficacité allemande ... On vient de la constater de visu
!
Cinq à six heures de musique et nombre de belles rencontres
avec les amis venus de toute l’Europe auront le dessus sur
notre détermination et c’est un fois de plus que
nous déclinerons l’invitation pour le
Nightfestival de la Brauhaus. La journée de demain sera
intense avec encore d’autres amis venus des Pays Bas et
même de France … l’heure est venue de
reprendre des forces !
Samedi 16 mai 2015 :
La journée commence tranquillement au Café
Klausberger avec une rencontre internationale durant laquelle on
exposera la situation actuelle du blues mais aussi son avenir au
travers de son inévitable vieillissement, de la
difficulté à renouveler le public ou encore des
problèmes que rencontrent les formations
non-étasuniennes pour aller se produire aux USA ... S'il
semble évident qu'une décision politique devient
urgente sur ce dernier point, il reste encore à trouver les
personnes capables de la prendre !
Le soleil nous a laissé tomber pour la journée et
c'est en jonglant avec quelques gouttelettes que le Marcus Lovdal Band
va nous expliquer sa manière de faire swinguer le blues.
Classique au premier abord, la musique des Norvégiens
deviendra de plus en plus enivrante au fur et à mesure que
les morceaux défileront avec en prime des parties
progressives voire carrément expérimentales et
avec même un petit riff emprunté a «
Amazing Grace » en cours de route ! La machine
démarre bien en prévision d'une
journée qui s’annonce intense ...
On passe a des choses beaucoup plus traditionnelles avec les Danois Big
Creek Slim & The Cockroaches qui plongent directement dans un
blues roots qui ne suffit pas à réchauffer
l'assistance mais qui, combiné à du
café bien chaud, permet de passer un très bon
moment de blues. De la slide bien léchée et une
voix posée très intelligemment
emmènent le band vers le haut et on ne s'ennuie pas une
seconde durant une prestation véritablement
réussie ! Le public applaudit à tout rompre, et
pas seulement pour se réchauffer les doigts ...
On entre maintenant en terrain connu avec le John F. Klaver Band que
l'on suit depuis un certain temps puisque nous l'avions
découvert à Amsterdam lors de sa
première victoire au Dutch Blues Challenge et que nous
l'avons ensuite retrouvé deux fois à l'IBC
à Memphis et deux fois à l'EBC à
Berlin puis à Riga ! Les Hollandais ont fait le pari de
mettre le feu ce soir et ils attaquent bille en tête avec un
énorme « Spoonful » qui se termine en
apothéose avec un medley Hendrix sur lequel John F. Klaver
laisse le feeling prendre le dessus ... Les jeux sont fait et de compos
bien senties en covers épatantes, le groupe n'a plus
qu'à dérouler le tapis rouge à sa
guise. Sacrée formation !
Ancien lauréat de l’IBC à Memphis, Sean
Carney est un poids lourd qu'on ne présente plus et tout
festival digne de ce nom a déjà réussi
à l'avoir à son affiche, une performance que
Eutin n'a pas manqué en invitant Sean avec sa section
rythmique française, Fred Jouglas à la basse et
Pascal Delmas à la batterie, mais également en
compagnie de la chanteuse du Mississippi Shaun Booker qui apporte un
peu de chaleur, de soul et de rhythm'n'blues à la prestation
du bluesman de l'Ohio. Démarré en trio avec un
détour par un excellent « Come Together
», le concert virera très vite à la
messe soul avec une frontwoman qui n'a pas froid aux yeux et qui ne
rechigne pas à le montrer !
Difficile de résister à la fraicheur de la
prestation offerte par Sean Carney et Shaun Booker tant les deux
leaders y mettent du cœur et du corps avec
l’association réjouissante de la guitare du
premier qui fait partie des tous meilleurs guitaristes du blues moderne
et de la voix gorgée de soul de la seconde qui transporte
directement l’assistance vers le Deep South
américain. Une prestation à revoir
d’urgence !
Le temps d’essayer de passer faire un tour à la
Brauhaus qui affiche plus que complet et c’est vers un peu de
repos que nous partirons ce soir encore, non sans avoir longuement
échangé avec les artistes …
Dimanche 17 mai 2015 :
On attaque cette ultime journée de festival au
Café
Klausberger avec Marcus Lovdal Band qui nous propose ce matin, jour de
fête nationale en Norvège, un set
apéritif avec des
blues très calmes aux accents très jazzy. La voix
luxueuse du frontman colle parfaitement à la guitare de son
acolyte et soutenu par une basse et une caisse claire, le quartet
n'aura aucun mal à convaincre un assistance un peu
serrée
dans cette petite pièce où la fête
battra un peu
plus tard son plein avec pâtisseries et boissons à
gogo !
On sait accueillir en Norvège …
Après avoir essuyé quelques averses pendant les
balances,
le Krakow Street Band investit à son tour la
scène
d'Eutin pour un set aux cachets très New Orleans ... Mais
avant
de monter sur les planches, c'est au milieu du public que les banjos,
ukulélés, dobros, contrebasses et cuivres vont
réveiller une assistance un peu timide mais rapidement
motivée à l'écoute de classiques dont
certains
sont empruntés a Ray Charles, Muddy Waters, Jimi Hendrix et
à tant d'autres encore ! Rien de tel qu'un bon Big Brass
Band
pour démarrer la journée et la grosse averse aux
deux
tiers du concert n'y changera rien, bien au contraire ...
On glisse de la Pologne à l'Italie et on retourne un peu
plus
loin dans le 20ème Siècle avec cette fois Egidio
Juke
Ingala et son blues très fifties. De jump en swing, le
chanteur
et harmoniciste nous sort comme à chaque fois le grand jeu
et
nous sert le meilleur d'un répertoire ou ses compositions
croisent de temps à autres quelques reprises pas
piquées
des vers avec par exemple des emprunts intelligemment faits
à
Slim Harpo ... Pour le coup, même le soleil est de retour et
à scène d’Eutin prend des allures de
juke joint !
On reste un peu en Italie avec le Henry Carpaneto Band qui se lance
seul pour quelques titres avant d'accueillir sa vedette
américaine, l'épatant Tee Dee Young qui met toute
son
énergie dans un show époustouflant où
le blues, le
boogie et le rhythm'n'blues se rejoignent sans aucune
arrière-pensée ! Un premier titre en forme de
medley de
quelques grands standards du blues réussit
instantanément
à enflammer la Marktplatz et c'est sans aucun temps mort que
Tee
Dee et son Band nous emmèneront dans un univers
où l'on
perçoit sans aucun mal l'esprit de la Windy City !
On poursuit dans les grosses pointures avec Earl Thomas & the
Royal
Guard et dès son entrée en scène, ce
véritable entertainer nous en met plein les yeux et plein
les
oreilles ! Porté par un groupe de killers capable de passer
en
force mais aussi en finesse, ce véritable songwriter repris
par
des pointures comme Etta James, Solomon Burke et Tom Jones nous envoie
un pur concentré de soul, de funk et de rhythm'n'blues dont
il a
le secret ! Backstage, tout le monde a quitté ses
conversations
pour ne pas en manquer une miette et de Sean Carney à Grady
Champion en passant par Shaun Booker, tout le monde vibre à
l'unisson d'un chanteur qui a non seulement le talent mais aussi
l'attitude !
Comment terminer cette soirée autrement que par une
énorme jam session ? Mais en attendant, ce sont tous les
bénévoles que l'on réunit sur
scène pour un
bis repetita de la remise du fameux Keeping the Blues Alive Award ...
Une cérémonie non officielle mais pleine
d'émotion
qui nous emmènera directement vers une première
cover de
« Cocaine » par Georg Schroeter et Marc Breitfelder
accompagnés de Pascal Delmas à la batterie !
Invité surprise de dernière minute, Grady
Champion
prendra ensuite le lead aux côtés du Sean Carney
Band,
bientôt rejoint par Shaun Booker puis par tous les artistes
encore présents pour un grand moment de partage et de
convivialité appelé à refermer les
portes de ce
26ème Bluesfest Eutin !
Quelques hommages à B.B. King comme « The Thrill
Is Gone
» par Shaun Booker et Tee Dee Young émailleront la
fin de
cette dernière soirée d'un festival en tous
points
réussi ! Un grand merci à toute
l’équipe
d’organisation qui aide vraiment à garder le blues
en vie
…
Fred Delforge
– mai 2015
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