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FISH au DIVAN DU MONDE (75) pdf print E-mail
Ecrit par Fred Hamelin  
lundi, 23 février 2015
 

FISH
LE DIVAN DU MONDE – PARIS (75)
Le 27 janvier 2015

http://fish-thecompany.com/

Le poisson écossais est de retour aprés un long voyage dans les eaux troubles de l'industrie musicale et il va sans dire qu'il vieillit bien. William Derek Dick fait son petit chemin, pas à pas, de légende du rock progressif depuis bientôt quarante ans. L'ancien frontman et chanteur de Marillion, puisqu'il faut le dire, du fait d'une carrière solo assez inégale, l'homme ne s'est jamais vraiment débarrassé de cette étiquette, a quand même construit une réputation solide d'auteur-interprète grâce à des airs à contre-courant des tendances actuelles, ce qui est d'autant plus courageux.

Pour la petite histoire, humour british oblige, et puisque que Dick passe des heures à mariner dans des bains, finissant toujours par arriver en retard aux répétitions, il obtiendra vite de son premier groupe Blewitt le pseudo de Fish. C'est sa rencontre avec Peter Gabriel qui devient déterminante et justement pour Marillion. En 1980 le groupe d'Aylesbury est à la recherche d'un chanteur et d'un bassiste. Lorsque le poisson arrive, bourré, chante sur plusieurs morceaux de Genesis et reprend « Lola » des Kinks, il impressionne tous de cette voix très semblable à celle de Gabriel qui fera sa marque de fabrique. Il en deviendra le leader charismatique, place qu'il partagera difficilement avec Steve Rothery, guitariste virtuose.

1988, après huit ans d'albums exceptionnels, dont « Fugazi », « Misplaced Childhood » et « Clutching at Straws », de concerts mythiques un brin mégalo digne des grandes performances scéniques du prog rock comme l'aurait fait un Genesis ou un Yes, l'aventure Marillion s'arrête pour Fish. C'est un peu le syndrome Waters qui quitte le Floyd en 1985 après « Final Cut », pour un peu les mêmes raisons. Outre son addiction à l'alcool, Fish veux sortir « Vigil in a Wilderness of Mirrors » que les autres membres de Marillion jugent trop personnel ... Mais aussi parce que Fish, grand maître d'œuvre, est partout : à l'écriture, à l'orchestration et à la production, ce qui laisse peu de place aux aspirations personnelles. Il sortira « Vigil » en solo tout comme Waters le fera avec « Pros and Cons of Hitchhiking », et cet album restera à ce jour la pièce maitresse de l'écossais, enfin jusqu'à aujourd'hui ... J'y revendrais.

Cette carrière solo est malheureusement en dent de scie, ponctuée d'accrocs : déboires avec Emi Music, puis Polydor, une carrière d'acteur au cinéma et au théâtre qui n'amène pas grand-chose, problèmes de santé et deux opérations des cordes vocales et bien que deux autres opus, « Internal Exile » et « Songs From the Mirror », se doivent d'être reconnu à leur juste valeur, y compris par les fans de Marillion de la première heure, le reste est une suite d'albums périssables aux frontières d'une pop commerciale, ou des albums de covers jetables. Et fin 2013, sursaut d'inspiration, sortie cette très belle surprise, « Feast of Consequences », concept album qui revient aux sources du Canterbury Prog rock et qui s'avère vraiment être un petit bijou, complet, tant intimiste qu'efficace, oscillant entre ballades et longs morceaux superbement écrits. Le thème principal évoque la première guerre mondiale et reste évidemment assez sombre. L'album est d'ailleurs dédié aux blessés, disparus et morts de la grande guerre et le chant semble parfois être narratif. La musique n'est pas forcément très complexe mais laisse une grande place à l'émotion. Fish ne pousse pas non plus trop sa voix mais réussi intelligemment à apporter de la profondeur au chant. C'est la très conceptuelle suite centrale (« High Wood », « Crucifix Corner », « The Gathering », « Thistle Alley » et « The Leaving ») évoquant la grande guerre et surtout son grand-père mort dans les tranchées de la Somme qui sera jouée en intégralité ce soir-là au Divan du monde. Cette longue pièce se découpe en plusieurs actes, débutant à la cornemuse et se terminant au piano, introduisant des trompettes. Elle joue sur des variations rythmiques parfois proches de marches militaires, des ambiances lourdes et épaisses laissant transpirer l'anxiété et les décharges d'adrénaline associées à ces moments forts. Un pur chef d'œuvre.

Alors ce soir au Divan du Monde, outre le dernier album et quelques morceaux des albums solos dont le tube « Tattoo », ce sera revival, avec presque tous les grands morceaux issus des années Marillion. Le public a trépigné, effervescent. Il a attendu Fish comme un messie, et ce messie a marché sur l'eau pendant près de 2 heures 30. Enorme concert se finissant après deux grandioses rappels avec un Fish lessivé d'avoir tout donné à un public qui en aurait bien pris encore plus , après tant d'années d'attente. Aucune déception, la foule a fredonné sur « Slainte Mhath » et « Lavender », « Sugar Mice », « White Russians », a entonné « Kayleigh » et « Assassing », « Clutching at Straws » ou « Incommunicado ». Un sans faute, grace à ce personnage attachant et communicatif avec son public. Un homme sincère, sorte de poète maudit, mais qui sait remuer les tripes sans trop d'effort ni fioriture.

Un grand merci à ce William Derek Dick, dit Fish, à Robin Boult à la guitare, Steve Vantsis à la basse, Foss Patterson aux claviers, et à Gavin Griffiths à la batterie, vous m'avez bluffé et j'en suis sorti des étoiles plein les yeux ... Hâte de vous revoir...

Fred Hamelin – février 2015