lundi, 02 septembre 2013 LES RENDEZ-VOUS DE L’ERDRE
NANTES (44)
Du 30 aout au 1er septembre 2013
http://www.rendezvouserdre.com
vendredi 30 aout 2013
C’est traditionnellement le dernier grand festival en plein air avant la rentrée des classes et comme tous les ans, c’est à Nantes que nous avons décidé de poser nos valises pour les très fameux Rendez-Vous de l’Erdre ! Au programme, Jazz et Belle Plaisance, mais aussi fiesta dans la ville et, cerise sur le gâteau, un Tremplin Blues qui gagne petit à petit ses lettres de noblesse et qui devient une des références au niveau national ! Parmi les anciens lauréats, on se souvient entre autres des Shake Your Hips, d’Alex De Vrée, de Mathieu Pesqué & Roll Pignault, de Jeff Treguer et bien entendu des Lazy Bones, les derniers vainqueurs en date que nous retrouverons dimanche soir en clôture du festival !

En attendant les deux longues journées qui marqueront ce grand week-end de musique, on se détend pour une première soirée 100% française avec deux groupes de qualité qui ont comme point commun d’avoir représenté notre pays à l’International Blues Challenge de Memphis, le premier, Bo Weavil, qui concourrait dans la catégorie « groupes » en 2009, et le second, Mountain Men, qui a participé dans la catégorie « solo / duo » à deux reprises, en 2007 et 2010 ! Ce sont les Nantais qui s’y collent pour l’ouverture avec en guise d’apéritif une heure d’un set à la fois sale et varié, le côté fossoyeur de Mat Fromont à la guitare, Miguel Hamoum à la basse et Franck Tommelet à la batterie se faisant de plus en plus évident au fur et à mesure que les trois garçons avanceront dans une prestation qui ne souffrira d’aucun temps mort !

Du blues du Mississippi à celui du désert, il n’y a qu’un pas que Bo Weavil n’hésite pas à franchir et c’est devant une foule déjà dense et indiscutablement séduite que le trio gagnera la partie sans aucun mal, plaçant du même coup la barre très haute pour des Mountain Men qui, derrière la scène, se régalent déjà à l’idée de devoir relever le challenge et de devoir se battre comme des lions pour parvenir à mettre le public dans leur poche ! Sur le côté, les pros apprécient l’instant à sa juste valeur et se disent que ce soir, il va se passer quelque chose d’énorme … Quand on sait que trop peu de festivals donnent l’espace qu’ils méritent aux groupes français, ça a d’autant plus de force et de crédibilité !

Mountain Men, ce sont déjà des vieux routiers de la scène blues et si Mat au chant et à la guitare et Iano à l’harmonica tournent plus que de raison depuis quelques années, ils n’en restent pas moins simples, humbles et efficaces ! Un vieux phonographe trône sur la scène derrière le duo, l’un est assis, l’autre debout … La mise en scène est sobre mais efficace et le son est à la hauteur de notre attente. Revisitant à part égale leurs différents albums, les Mountain Men nous promènent dans un répertoire qui évolue, des premières compositions blues et blues folk aux nouvelles plus ouvertement blues-pop voire carrément parfois blues-rock ! On ne s’ennuie jamais et le premier set d’une cinquantaine de minutes, rythmé par le footstomping de Mat, sera l’occasion pour le duo d’instaurer un dialogue convivial entre la scène et le public qui lui répond de bon cœur.

Un quart d’heure de pause et on y retourne avec des Mountain Men qui souffrent un peu de cette cassure mais qui se reprennent très vite en enchainant leurs « tubes » mais aussi ceux des autres, des standards du gospel et du spiritual mais aussi des relectures de Nirvana ou de Ray Charles, mais toujours à leur propre sauce ! Devant quelques milliers de personnes, le tandem franco-australien usera ainsi de tout son talent mais aussi de tout son humour pour finalement attraper Nantes par les tripes et faire de l’assistance ce dont il a envie, l’invitant à chaque instant à participer en chantant « Travailler c’est trop dur » ou en faisant la sonnette sur « Smells Like Teen Spirit », et ce ne sont là que quelques exemples parmi tant d’autres.

Minuit vient de sonner mais le public n’a pas envie de s’arrêter là, c’est donc au merchandising qu’il viendra retrouver les artistes pour une longue séance de dédicaces. Pendant ce temps, Michel Portal termine son concert sur la Scène Nautique Ceineray mais il faut bien se résoudre à aller se coucher en prévision de la longue journée qui nous attend demain … Rendez-vous est pris pour 15 heures devant la Scène Blues !
Samedi 31 aout 2013
Comment résister à l’appel d’une assiette d’huitres, de quelques galettes et crêpes ou encore des breuvages régionaux quand on est à Nantes ? D’autant que les bords de l’Erdre regorgent à l’occasion du festival d’estaminets où l’on trouve l’un et l’autre dans une ambiance des plus accueillante … On cède donc bien volontiers à la tradition en allant partager le verre de l’amitié en attendant le début des spectacles annoncé juste après le café. Bonne surprise, le public est à l’heure et même si l’on n’atteint pas encore l’affluence d’hier soir, la Scène Blues fait bonne figure pour accueillir le premier des trois groupes du Tremplin qui vont concourir aujourd’hui !

Après une brève présentation du concours et de son déroulement, ce sont Bobby And Sue qui viennent prendre place sur les planches pour un premier acte des plus luxueux. Le duo de Douarnenez s’y connaît pour ce qui est d’installer des ambiances conviviales et c’est à force de ses guitares, électriques ou acoustiques, mais aussi de son piano, que Brendan aka Bobby tisse un confortable tapis sur lequel Violaine alias Sue n’a plus qu’à déposer ses chansons, personnelles ou adaptées des grands standards du blues ou du jazz. L’assistance ne s’y trompe pas et apprécie comme il se doit un spectacle bien rodé et bourré de petits détails visuels mais aussi musicaux. La journée ne pouvait véritablement mieux commencer qu’avec ces deux superbes musiciens que l’on se plait toujours à retrouver, de France jusqu’au Québec d’ailleurs puisque nous partagions un voyage au FestiBlues International de Montréal il y a quelques années déjà !

Le temps de changer de plateau et c’est bientôt Thomas Ford qui s’y colle, l’Anglais débarqué de Plymouth avec ses trois guitares, ses harmonicas et son footstomp n’ayant pas en tête l’envie de ne faire que de la figuration. De la Grande à la Petite Bretagne, il n’y a qu’un pas que le musicien qui parle couramment le Français franchit allègrement sur fond d’un blues qui se veut gras, poisseux, et fortement recouvert de poussière ! Les classiques succèdent aux compos au rythme des changements de guitares et de sa magnifique « planche » Airline à son superbe dobro National d’époque, Thomas Ford n’hésite jamais à faire des effets de style, quitte parfois à casser des cordes, mais ce ne sont là que les risques du métier que l’artiste accepte avec un flegme très britannique. Conquis, les bords de l’Erdre ne désemplissent pas et c’est ruisselant de sueur que Thomas Ford, qui ne fait pas semblant de tout donner, achèvera son set par un rappel fort apprécié !

Place maintenant aux derniers lauréats du Tremplin du Cahors Blues Festival, Red Beans & Pepper Sauce, un quintet biterrois porté par un guitar hero en puissance, Laurent Galichon, et emmené par une chanteuse à la voix ample, Jessyka Aké. Après un premier titre en instrumental, la vocaliste ne tardera pas à rejoindre ses acolytes pour nous proposer une prestation en dents de scie avec des passages blues et blues rock et d’autres aux ambiances plus proches du jazz, les claviers de Baptiste Chaubard donnant aux morceaux des cachets qui ne manquent pas d’intérêt. La section rythmique ne se démonte jamais, quand bien même le bassiste Denis Bourdié se voit victime de petits problèmes techniques très vite résolus par une équipe des RDV de l’Erdre comme toujours au top, et c’est un Thierry Imperato métronomique qui rythme le tout de ses petites touches de cymbales pas désagréables du tout pour un résultat qui prête à penser que le cru 2013 du Tremplin sera exceptionnel !

Le temps de laisser Big Daddy Wilson faire son soundcheck, les amis du jury qui se retrouvent depuis maintenant quelques années vont partager leurs premières impressions autour du repas concocté avec soin par le restaurant du festival et c’est de retour juste à temps pour le dernier épisode de la soirée que nous nous retrouvons face au chanteur et percussionniste qui se révèle également être un habile guitariste et, en privé, un fort agréable personnage ! Installé depuis des années en Allemagne, Big Daddy Wilson qui sait toujours bien s’entourer est accompagné ce soir par une paire de musiciens transalpine où l’on reconnaît forcément le guitariste virtuose Roberto Morbioli, le génial frontman de Morblus !

S’il est arrivé tard sur le devant de la scène blues, Big Daddy Wilson n’en est pas moins un musicien dont l’expérience rivalise avec le talent et c’est une fois encore un blues qui lui ressemble qu’il nous propose, chaleureux, accueillant et bon vivant, comme à chaque fois qu’on le croise d’ailleurs puisque de Berlin à Memphis en passant par Zagreb, l’occasion de rencontrer l’artiste ne nous a jamais fait défaut. Le calme et la tempête, c’est ce qui ressortira d’un concert durant lequel Big Daddy n’aura pas manqué de nous offrir un grand tour de son blues, de ses blues pourrait on presque dire puisque du Sud au Nord des Etats Unis, ses influences sont aussi multiples que bien maitrisées. Comment résister à pareille invitation ?

Il faut désormais se protéger des moustiques grâce à l’expérience du Président du Jury qui a vécu aux Antilles et en a rapporté des élixirs présentés comme des plus efficaces contre ces insectes puis on remonte tranquillement vers la Scène Nautique Ceineray ou l’explosif Médéric Collignon et son « Jus de Bocse » jouent ce soir King Crimson devant un public qui nous repousse au delà des limites du raisonnable, que ce soit pour les photos ou pour une écoute convenable … Après quelques minutes, c’est donc vers l’hôtel que nous repartirons pour y profiter du sommeil du juste ! Demain, c’est à 14 heures que la journée commencera pour le Tremplin et juste avant, nous aurons droit au traditionnel Brunch Blues du Canotier …
Dimanche 1er septembre 2013 :
C’est un peu plus tard que les années précédentes que nous avons rendez-vous pour le traditionnel Blues Brunch du dimanche matin et c’est autour d’un café et de quelques pâtisseries que nous attendent le duo Bruno Rouillé et Thierry Gautier. Une guitare et un harmonica, il n’en faut pas vraiment plus pour nous entrainer sur les routes des vieux blues d’autrefois et pour donner aux bords de l’Erdre de faux airs de Mississippi ! Si le festival est traditionnellement dédié au jazz, plus on approche de l’Ile de Versailles et plus c’est le blues qui prend le dessus, ce qui n’est pas forcément pour déplaire puisque c’est un public des plus denses qui s’y retrouve chaque jour !

Pas de sieste dominicale pour les Perpignanais de Blues Connexion qui attaquent cette deuxième journée de Tremplin Blues bille en tête avec un set très axé dans la direction de Chicago. Un chanteur guitariste britannique qui savonne parfois un peu entre les morceaux mais qui garde le cap bien droit devant pendant qu’il chante, une section rythmique solide et efficace et enfin une paire de solistes clavier / guitare pas piquée des vers, John Hillary et consorts ne font pas dans la dentelle et vont littéralement mettre le feu devant une scène qui ne s’attendait certainement pas à un tel réveil en fanfare. Ceux qui avaient prévu une digestion tranquille vont en être pour leurs frais, et ce n’est là que le début d’une journée qui s’annonce mouvementée !

On poursuit avec Aurélien Morro Blues Band spécialement venu de Clermont Ferrand pour nous régaler d’un bon gros blues porté par un frontman volubile qui n’hésite pas à en faire des tonnes à la guitare mais qui a très clairement les arguments pour le faire ! A ses côtés, un clavier lui aussi très inspiré, Fred Canifet, et enfin une section rythmique de haut vol avec Eric Courier à la basse et le colossal Miguel Pereira à la batterie qui tape avec autant d’inspiration en force et en finesse. Amis guitaristes, amateurs de blues délicatement teinté de funk, voilà le groupe qu’il ne fallait pas manquer cet après midi puisque Aurélien Morro est parvenu à séduire même les plus exigeants avec une musique bourrée de détails et surtout pleine de talent !

Le dernier groupe à concourir cette année vient de Paris et nous propose un grand voyage au cœur du blues qui nous emmène du Sud des Etats Unis jusqu’au Nord avec à la clef des étapes inattendues dans des endroits comme Washington, pas vraiment connue comme La Mecque du blues, et pourtant … Raphaëlle Naudin, la chanteuse, ne ménage pas ses effets de style et entre parfois tellement dans les morceaux qu’elle en ressort très empreinte d’une émotion qui produit son effet auprès du public. Des chain gangs du Mississippi jusqu’au blues urbain de Chicago, Nantucket ne manquera pas la moindre escale et c’est soigneusement porté par la guitare de Nils Frechilla habilement soutenue par la contrebasse d’Erwan Ricordeau et la batterie d’Aurélien Pasquet que Nantucket nous accompagnera jusqu’au bout d’un Tremplin qui cette année aura été particulièrement relevé !

Place aux délibérations d’un jury qui désignera comme vainqueur 2013 l’Anglais Thomas Ford qui est déjà rentré à Plymouth sans même savoir qu’outre le Prix des RDV de l’Erdre, il remporterait également les Prix du Festival So Blues, du Léon’s Blues Festival, du Montfort Blues Festival et du magazine Soul Bag. Juste derrière lui, Blues Connexion et Nantucket remporteront les deuxième et troisième prix d’une neuvième édition qui s’est avérée très diversifiée en terme de styles musicaux et très équilibrée en terme de qualité, le seul véritable vainqueur étant de toute façon le public qui s’est copieusement régalé de bout en bout !

Avant de se quitter, on retrouvera les régionaux de l’étape, The Lazy Bones, primés en 2012 et invités ce soir à donner deux heures d’un concert qui tiendra toutes ses promesses ! Fraichement rentré de New Orleans, le guitariste Thomas Pichot retrouve ses compagnons de route, François Nicolleau au chant et à la guitare, Miguel Hamoum à la contrebasse et Arnaud Mi à la batterie, et reprend tranquillement ses marques avec une musique où l’on trouve de manière récurrente les vieux souvenirs empruntés à Muddy Waters, T.Bone Walker et autres Amos Milburn. Séduisants dans leur jeu, les Lazy Bones ont en prime le charme de la jeunesse qui les pousse à s’exprimer librement, sans véritable contrainte mais avec une approche à la fois très fidèle et très audacieuse d’un blues qui a vu le jour bien avant eux mais qu’ils s’approprient avec respect et talent !

Jouer à la maison a quelques avantages et c’est en invitant quelques amis à les rejoindre que The Lazy Bones remercieront le public nantais de son soutien et de sa fidélité. Kevin Doublé viendra s’installer finalement au milieu du groupe et apportera son harmonica mais aussi sa voix à un set qui ne lâchera pas prise jusqu’à ce qu’un spectateur soit victime d’un malaise dans le public et que, par correction, le groupe s’interrompe une dizaine de minutes pour laisser les secours faire leur affaire. Ces musiciens là sont vraiment des garçons pleins de talent mais aussi de courtoisie et on leur souhaite de récolter rapidement les fruits de leurs efforts !

Un dernier morceau pour plier la Scène Blues et les RDV de l’Erdre referment définitivement leurs portes avec Sandra Nkaké que l’on entend au loin … Un dernier verre avant d’partir comme on dit dans le blues, puis arrivent les traditionnels au-revoir avec les amis du jury, les techniciens, les bénévoles et les artistes encore présents. Il est déjà temps de se dire que rien n’a manqué cette année encore, ni la bonne humeur, ni la bonne musique, ni le temps qui comme à chaque fois a été au beau fixe ! A noter pour 2014 : réserver le dernier week-end d’aout pour venir à Nantes … et prévoir de la lotion anti-moustiques en quantité suffisante !
Fred Delforge – septembre 2013

|